Dream Theater – The Astonishing

Il y a de cela un an, on apprenait que les virtuoses de Dream Theater préparaient la composition et l’enregistrement de leur prochaine galette, la treizème du nom. The Astonishing, opéra-rock monumental en deux actes. L’enregistrement ayant pris du retard à cause de la tournée des 30 ans du groupe, il finit par s’achever le 25 septembre pour laisser place par la suite au mixage.
Et les musiciens ont su comment s'entourer puisque l’on retrouve Richard Chycki au mix/mastering (Rush, Aerosmith, et une liste interminable d’autres artistes) et David Campbell aux arrangements/orchestration (Metallica, Kiss, Bon Jovi) ; des sommités dans leurs domaines respectifs. De plus, l’Orchestre Philharmonique de Prague s’est prêté au jeu, rien que ça !

Entrons sans plus attendre dans le vif du sujet ! Majestueux. Grandiloquent. Un double album à la hauteur de ce groupe mythique qu’est Dream Theater. Une virtuosité mise au service de la musicalité ; pour cet album, la technique (et ils en ont sous le coude !) a laissé la part belle à la mélodie, et le résultat s’en ressent.

En fait, cet album, n’est ni plus ni moins que du très bon Dream Theater. Mais qu’est ce que du «  Dream Theater » au juste ? Pour certains, un concentré de technique et de branlette de manche, pour d’autres encore, c’est un mariage parfait entre ce que la musique propose de plus beau et l’expérimentation ; un groupe novateur, des « créateurs de musique » en quelque sorte. L’usine Renault de la musique quoi. Enfin non, pas Renault. Plutôt la Scuderia !

Cela étant dit, si vous vouliez du « Dream Theater » classique, à la sauce Images and Words (vous reprendrez bien un peu d’Awake avec votre café ?), passez votre chemin. A moins que vous ne vouliez du DT plus récent à la sauce Systematic Chaos ou A Dramatic Turn Of Events ? Passez aussi votre chemin, et allez boire des bières au lieu de perdre votre temps davantage.

dream theater , promo, 2016, the astonishing

La recette de The Astonishing paraît assez simple, mais s’avère bien plus complexe quand on fouille un peu. A la base, cet album peut être perçu comme un melting pot de toute la discographie du groupe ; on prend tous les albums, on les balance dans un shaker, et on rajoute un ou deux glaçons. Là où ça se complique, c’est qu’il faut ajouter quelques ingrédients. Et pas vraiment les plus faciles à trouver. Une pousse d'inspiration, un brin de génie, du talent en poudre, on shake vigoureusement le tout, et on verse tout ça dans un double contenant. Mais il manque toujours le garnish, cette petite « décoration » qui, bien qu’elle ne donne pas forcément de goût, change toute la gueule du résultat. Et ici, le garnish, c’est cette trame de fond, ce thème, cette histoire mystérieuse, dévoilée au compte goutte depuis des mois, à raison de newsletters énigmatiques. Ce sont ces paroles, ce concept fou, que les Américains sont parmi les seuls à oser mettre en place à cette échelle.

Des albums concepts, il y en a. Du bon et du moins bon. Mais décidément, à l’écoute de cette pépite, on se demande quand même si elle n’aurait pas sa place entre un The Wall (attention, légende !) et un 2112 de Rush à l’histoire d’ailleurs très voisine (il y a fort à parier que DT leur ont fait un énorme clin d’oeil avec ce nouvel album !). Déjà qu’on a un Scenes from A Memory qui doit s’y balader, ça pourrait bien se placer à côté très honnêtement. Alors on peut dire ce que l’on veut sur l’histoire ; certains trouveront le tout bien gaulé, d’autres se plaindront que c’est bateau. Eh bien messieurs dames pour qui c’est si facile, je vous invite à nous faire part de votre mécontentement sur un papier libre, le plier en huit, et vous le carrer bien profondément.

Notons tout d’abord le grand retour du piano ; l’instrument a la part belle au sein de ce double album. Félicitons un Jordan Rudess (notre interview avec lui à ce propos, ici) des grands jours aux commandes !

James Labrie évolue dans un registre où on le sent bien à l’aise. On n’a à déplorer strictement aucune envolée vocale approximative ; on est bien dans la maîtrise et la retenue. Mais qui dit retenue ne dit pas forcément bridage ; la sagesse a tout simplement conduit la formation à ne pas surjouer, mais à doser. James a parfaitement compris cela, et le résultat n’en est que plus impressionnant de part la rigueur vocale dont il fait part. Un très grand bravo également dans l’interprétation des différents personnages ; une alternance de styles narratifs qui constitue une très grosse prise de risques ; remarquable.

John, John, John. Que dire sur les parties de guitare de sieur John Petrucci ? Eh bien, la première impression en se focalisant sur la guitare, c’est que le maître n’a plus rien à prouver à personne, et cela se ressent tout du long de cet album. Finis les "antivols", ces parties de guitare injouables pour le commun des mortels. Là aussi, on est sur de la maîtrise pure, une recherche mélodique immense, et des solos à faire pleurer un mort ("A Better Life", "When Your Time Has Come" !).
Ajoutons à cela une sacrée dose de feeling, du groove, de la discrétion quand il le faut, des riffs malsains, ("A Better Life", "Three Days", "A Tempting Offer"), d'autres plus épiques ("Dystropian Overture", "Lord Nafaryus", "A Savior In The Square", "Ravenskill")  ; un savant dosage que « JP » maîtrise à merveille. Et la guitare acoustique, on en parle ? Eh bien oui messieurs dames, vous en aviez rêvé, vous voici exaucés !

La batterie quant à elle est bien plus présente que dans les 2 derniers opus, avec un Mike Mangini qui a définitivement trouvé ses repères et dont le jeu s’est considérablement enrichi au sein de la formation. Ce qui rend la chose intéressante, c’est cette capacité à ne pas en rajouter plus que ce qu’il n’en faut ; le dosage est parfait et au service de la musique. On regrettera tout juste un John Myung un tantinet en retrait, problème rapidement compensé via un équipement sonore adéquat.

The Astonishing a tout d’une grande oeuvre. Alors certes, on peut "reprocher" quelques longueurs dûes à la présence d’un certain nombres de "power-ballades", l’album est mois "heavy" et percutant en matière d’agressivité que le reste de ce que le groupe a sorti précédemment, mais le risque est tout de même contrôlé.

On était prévenus ; c’est bien un opéra-rock/metal, et non la continuité de leurs dernières oeuvres. Et l’objectif fixé est atteint, en plein dans la cible. The Astonishing se veut être comme du bon vin, il se bonifie avec le temps, au fur et à mesure des écoutes, car sa richesse rend impossible de se forger une opinion à la première d’entre elles. On retiendra tout de même rapidement quelques chefs d'oeuvre, comme "A Better Life", "Lord Nafaryus", "A Savior In The Square", "When Your Time Has Come" (quel enchaînement), "Ravenskill", "A Tempting Offer", "Moment Of Betrayal", "The Parth That Divides"...

Ce qui rend également ces disques remarquables, c’est la facilité d'immersion dans cette histoire folle. De part ses arrangements et son contenu, ce conte musical va sûrement être sublimé lors de sa présentation sur scène et la tournée devrait tenir toutes ses promesses en matière de production - notons que le groupe a communiqué que l’intégralité de l’album serait jouée et rien d'autre .

Dream Theater est vivant, Dream Theater est grand. Merci les gars !

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NOTE DE L'AUTEUR : 9 / 10



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