OCEANSIZE – Self Preserved While the Bodies Float Up

Hermétique. Difficile de qualifier autrement ce nouvel album d’OCEANSIZE. Après l’excellent « Frames » (2007), un poil plus accessible que l’album qui les a réellement fait connaître, « Everyone Into Position » (2006), les mancuniens ont décidé de retrousser leurs manches et de n’en faire qu’à leur tête sur leur 4e véritable album (un EP acoustique, « Home and Minor », est sorti fin 2009), « Self Preserved While the Bodies Float up », au titre aussi obscur que son contenu. Certes, on est habitués avec les anglais à une musique relativement complexe, à des changements d’ambiance marqués, en bref, à un mix entre prog’ et influences plus radiophoniques à rechercher vers le Post-rock et le Shoegaze. Pour autant, jamais les ambiances développées par le groupe n’avaient été aussi tranchées et, disons-le, extrêmes que jusqu’à maintenant. Malheureusement, ce n’est pas pour le meilleur, car si l’investissement artistique est indéniable, le groupe a un peu oublié l’auditeur dans sa démarche.

 

De l’aveu même des musiciens, alors qu’ils cherchaient peut-être à impressionner leur public sur leurs précédents efforts, ils ont cette fois voulu faire abstraction du possible accueil qui pourrait leur être réservé et ont davantage laissé libre cours à leurs propres envies. Le moins que l’on puisse dire, c’est que le résultat est surprenant, à commencer par « Part Cardiac », qui ouvre le bal, lourd, sombre, quasi apocalyptique, et à des années lumières de ce que l’on pouvait attendre. La surprise peut avoir du bon bien sûr, encore faut-il que la musique proposée reste agréable à l’écoute, ce qui n’est pas vraiment le cas ici. Remarquez, une compo de moins de 4 minutes, c’est peut-être juste une introduction, jusque là tout va bien et attendons de voir la suite.

 

 

Il faudra de la patience et de nombreuses écoutes avant d’entrer dans cet album. OCEANSIZE avait jusqu’alors montré une grande facilité à mélanger les genres et les influences, proposant des compos globalement longues qui parvenaient à entraîner l’auditeur dans un voyage onirique et toujours passionnant. « Frames », de par son côté épique, était à ce sujet un modèle du genre, tandis qu’on se régalait à plonger au cœur de la grande diversité d’« Everyone Into Position ». Ici, les différents aspects ont été clairement séparés. Les compos heavy sont heavy, les calmes sont calmes. Et l’impression de voyager au sein d’un univers si particulier (l’apport de la 3e guitare est devenu une marque de fabrique du combo) s’évapore au profit d’un album certes admirablement interprété, mais qui paradoxalement paraît plus conventionnel.

Après un début canon (« Superimposer » et l’entremêlement des 3 guitares, à écouter au casque, et le très heavy « Build us a Rocket then… », qui donne l’occasion au batteur Mark Heron de montrer l’étendue de son talent), l’album s’enferme dans des compos planantes et atmosphériques. Non pas que celles-ci soient mauvaises, la longue pièce « Oscar Acceptance Speech » et son riff hypnotique s’avérant même somptueuse de bout en bout, mais dieu, où est passé cet OCEANSIZE capable de passer du coq à l’âne au sein d’une même compo ? En cherchant à radicaliser son propos, le groupe a perdu de vue ce qui faisait sa plus grande force. En résulte un disque étrange, à l’équilibre précaire. C’est d’autant plus dommage que les mancuniens n’ont rien perdu de leur capacité à pondre de magnifiques titres planants qui, une fois de plus, révèleront toute leur richesse au fil des écoutes. « Ransoms », l’autre long morceau du disque « Silent/Transparent » avec sa longue montée en puissance finale très post-rock dans l’âme sur laquelle les 3 guitares font une nouvelle fois merveille, ou encore le touchant « Pine » et les cordes qui l’accompagnent sont excellentes, mais pourquoi les mettre bout à bout ? Seul « It’s my Tail and I’ll Chase it if I want to » relève la sauce.

 

Bien qu’il contienne de très belles choses (le contraire eût été étonnant), ce 4ème album d’OCEANSIZE reste une déception. Des compos plus courtes, des atmosphères plus tranchées, et l’impression d’entendre un album en kit, déconstruit, mal équilibré. En se concentrant sur le challenge artistique, les mancuniens ont un peu oublié le plaisir de l’auditeur. L’interprétation est sans failles, les compétences des musiciens immenses, et oui le niveau d’exigence est logiquement relevé, surtout après 2 albums qui ont mis tout le monde d’accord. Une chose est sûre, le public du groupe sera déstabilisé. Peut-être était-ce en partie le but recherché ? Difficile à dire. Toujours est-il que si l’album est intéressant, on le conseillera en priorité aux amateurs avertis, aux inconditionnels et à ceux que des écoutes prolongées n’effraient pas. Hermétique on vous disait.

Ma note : 6,5/10

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