Dylath-Leen – Cabale

Il existe des groupes qui n'ont pas grand chose de banal et qui se démarquent de la masse d'une façon ou d'une autre. Par un talent exceptionnel, une musique très singulière ou un côté avant-gardiste prononcé. Et qu'ils soient connus ou confinés dans un certain anonymat, ils existent, quelque soit leur nationalité. Dylath-Leen, formation française de death metal, est de ceux-là. Leur musique ne fait pas l'unanimité du fait de ce qui est cité ci-dessus. Avec un line-up stable et toujours emmené par la dame aux cheveux noirs Kathy, ils nous reviennent en 2011 avec une troisième œuvre, intitulée Cabale.

La recette de Dylath-Leen est, en surface, inchangée. C'est à dire que nous pourrons mettre les points sur les i dès le départ : si vous n'aimez pas les précédents efforts, alors ce ne sera pas vraiment la peine de vous attarder sur ce nouveau brûlot qui vous repoussera immédiatement. En même temps, il y a de quoi, et c'est ce que l'on aime ou pas chez Dylath-Leen, ce côté « j'adore ou je déteste ». Donc prévenons d'emblée pour ceux qui ne connaissent pas la musique de ces français, si vous vous attendez à du death classique, vous allez être déçus. Si vous tendez l'oreille vers du metalcore, c'est toujours pas ça. Le groupe ne joue pas dans la simplicité mais tire au contraire une corde plus complexe, où les racines vont se tourner vers le metal atmosphérique et, dans une moindre mesure, le progressif, pour construire des pistes à la fois originales et inventives. Et, à double-tranchant, difficile d'accès. Et dans ce nouveau brûlot, c'est encore plus ardu pour un non-initié de s'imprégner de l'ambiance que dans ceux d'antan, un peu plus « accessibles », bien que ce terme, dans le vocabulaire de la formation, soit tout à fait relatif.

Pour parler des compositions elles-mêmes, elles ne respectent pas réellement le traditionnel schéma bien connu de tous du couplet/refrain. Dylath-Leen a décidé de se creuser la tête et d'injecter un peu plus de leur tripes là-dedans. Du coup, c'est totalement déconstruit, des breaks peuvent (sembler) sortir de n'importe où, les lignes de chant se brisent, se démêlent et se refont, bref un fouillis qui en réalité n'en est pas un du tout, et c'est là que le groupe illustre sa dextérité. Les parties instrumentales sont toujours adroitement maîtrisées et ne manquent pas de mordant malgré tout, notamment l'absence de refrains fédérateurs, qui, en somme, ne manquent pas un seul instant. Car ce que nous propose le quatuor est tout autre, et ceux-ci ne comptent pas sur des titres catchy et des passages éclairs pour emporter l'adhésion. En fait, c'est beaucoup plus subtil que ça, car tout passe par l'ambiance, d'où le côté atmosphérique très marqué et d'une vraie importance. C'est d'ailleurs ce point qui divisera, car pour apprécier pleinement leur offrande, il faut savoir s'en imprégner, et c'est là qu'on ressent l'impact de l'influence Lovecraftienne sur la musique de Dylath-Leen dans son côté noir et lugubre. Les titres sont constamment marqués par cette touche, bien plus encore que sur les albums qui précèdent, ce qui rend Cabale d'autant plus attrayant pour les uns qu'il peut être difficile à appréhender pour les autres.

Et en cela, l'arme utilisée ne leur permet pas de gagner la sympathie d'une majeure partie du public, qui n'aura peut-être pas la patience nécessaire pour se laisser emporter par de telles atmosphères. Qu'importe, car il est tellement bon de voir une formation gardant son entière intégrité que l'on ne peut nier tout le travail colossal fait par Dylath-Leen pour nous offrir un brûlot qui va régaler les fans de la première heure. Et dans cet océan sombre, il se dégage un morceau qui ne laissera absolument pas indifférent. « Forever...Still », titre en deux parties et intégralement chanté par la belle Kathy Coupez mérite entièrement d'être écoutée encore et encore, tant elle est à elle seule une raison suffisante de se précipiter sur Cabale. Prenante et vraiment unique, elle porte à la fois le côté plus « féminin » du combo, là où le chant clair de la frontwoman donne encore plus une tournure énigmatique, mais également, de part l'instrumentation et le piano de fond, sur ce côté froid et ténébreux. Les guitares, à la fois lourdes et incisives, ne trompent pas. C'est évidemment un vrai plaisir de retrouver le growl de la jeune femme, qui, là encore, va donner du fil à retordre à certains. La belle possède une voix très particulière, difficile de la comparer avec une telle autre. En réalité, elle est, tout comme la musique, très personnelle. Haut-perchée, expressive, c'est une sorte de douleur qu'elle semble ressentir la plupart du temps, très écorchée. Le chant d'Igor, plus caverneux, est paradoxalement plus rassurant pour l'amateur de death lambda, et peut être un point d'accès vers Dylath-Leen. Chose moins banale, les deux protagonistes se partagent moins les lignes de chant qu'avant, certains morceaux chantés exclusivement par Igor, d'autres uniquement par Kathy, et parfois ils sont ensemble. Mais l'un comme l'autre peut s'occuper avec sa guitare lorsqu'ils ne sont pas derrière le micro.

Le petit reproche que l'on va adresser au quatuor du Nord, c'est de manquer d'une piste qui se démarque (« Forever...Still » et « I Dreamt » sur laquelle nous reviendrons mises à part). « Never Rising Sun » a beau être directe et réussie, elle reste quand même dans l'ensemble très uniforme que constitue cette galette. En soit cela n'est pas gênant car, fort heureusement, on ne déplorera aucune baisse de qualité. On regrettera néanmoins ce côté trop « monolithique » dans le sens où il est parfois difficile d'évaluer certains titres, qui, sans passer à la trappe, marquent moins à côté d'autres qui ont vraiment quelque chose à dire. Et là, en plus de « Forever...Still », on pense irrémédiablement à l'exquise « I Dreamt », se déployant sur la longueur, n'hésitant pas à employer des effets tels les échos ou des breaks très progressifs pour créer ce côté lugubre. Et les touches de clavier qui ponctuent derrière ne sont pas innocentes, elle n'apportent pas de l'éclaircissement, mais à l'inverse, elles renforcent l'aspect ténébreux. Le chant, comme à son habitude (porté par Kathy), est foncièrement impressionnant.

Oui, les détracteurs de Dylath-Leen vont encore pouvoir se frotter les mains avec ce nouvel opus qui reste dans la lignée des précédents grâce à son aspect personnel. Et encore heureux, on espère bien qu'ils continueront à se réjouir longtemps, car ceux qui apprécient le combo ne vont certainement pas bouder Cabale. Un brûlot mature, solidement ficelé et qui ne déçoit en aucun cas, au contraire. Il confirme bien que dans un metal tendant de plus en plus à avoir du mal à se renouveler et à sombrer dans sa crise de conformisme aiguë, Dylath-Leen et son originalité ont bien des choses à nous raconter. Et nous n'attendons qu'une chose : la suite de leurs histoires.

Note finale: 8,5/10

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NOTE DE L'AUTEUR : 9 / 10



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