Alex Colin-Tocquaine, leader d’Agressor, au Hellfest 2016


La veille du passage d'Agressor sur la scène de l'Altar au Hellfest, La Grosse Radio a pu s'entretenir avec le leader du groupe, Alex Colin-Tocquaine. Nous sommes revenus ensemble sur les trente ans de carrière du combo niçois, ainsi que sur cette édition 2016 du Hellfest, qui marque la première participation d'Agressor à ce festival incontournable. Nous avons également pu évoquer les trente années de carrière d'Alex au sein de la scène metal française, ainsi que les projets à venir pour Agressor, dont le dernier album remonte déjà à 2006. Entretien avec l'un des pionniers du death metal en France.

Bonjour Alex et merci de nous accorder cette interview.

De rien !

Demain vous allez fouler les planches du Hellfest pour la première fois (interview réalisée le 18 juin NDLR). Ce concert coïncide également avec les trente ans d'Agressor, que tu as formé en 1986. Qu'avez-vous prévus pour fêter cet événement ?

On a préparé un set qui reprend des morceaux de pratiquement tous les albums, mais plus particulièrement ceux du premier (Neverending Destiny NDLR). C'est un album que nous n'avons pas joué pendant longtemps et on s'y est enfin remis. On a pas mal de festivals de prévus également pour célébrer ces trente ans, notamment le Motocultor au mois d'août.

Deathreat votre dernier album date déjà de 2006. Qu'avez-vous fait pendant ces dix ans, et as-tu commencé à composer de nouveaux titres ?

Il s'est passé plein de choses pendant ces dix dernières années. De mon côté, j'ai été jouer dans d'autres groupes, j'ai participé à pas mal de sessions. Et puis j'ai une vie de famille aussi et un boulot, donc ça prend du temps. Et j'ai effectivement bossé sur de nouveaux titres. D'autre part, j'ai essayé de remettre en place un album que l'on a enregistré en 1994, Symposium of Rebirth. Je l'ai complètement retravaillé. C'est pratiquement terminé. Il s'agit d'une nouvelle version de l'album. On a gardé les batteries d'origine, même si on les a améliorées, car c'était vraiment catastrophique. Et on a réenregistré toutes les guitares, la voix et la basse. On a refait tous les arrangements avec de vrais instruments classiques et retiré toutes les parties initialement faites en MIDI.

Tu n'étais pas du tout satisfait de  la production de cet album ?

Non, pas du tout. C'est une catastrophe cet album ! (rires) On va essayer de le ressortir dans une version deux cd, avec l'original tel qu'il était, car il y a toujours les fans inconditionnels qui aiment cela. Et proposer la deuxième version sur un deuxième CD. L'idée de base c'est celle-ci, après, peut-être que cela va évoluer.

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A propos de rééditions, vos albums sont difficiles à trouver. Certains se vendent à prix d'or sur internet. Envisages-tu de rééditer tous vos albums si vous récupérez les droits dessus ?

On a parlé de cela avec le label (Season of Mist NDLR). Actuellement, on attend de terminer le nouvel album sur lequel on travaille et qui contient de nouvelles compositions, pour pouvoir ressortir tout le back catalogue en même temps. Comme cela, on fera des remasters et on proposera des livrets avec des photos d'époques.

Cela incluerait-il le split avec Loudblast, Licensed to Thrash ? Sachant que de son côté Loudblast est en train de rééditer ses premiers albums également ?

Oui, on est en train d'envisager cela. Et même si nous ne sommes pas sur le même label, cela ne pose pas de problème. Le but c'est qu'il sorte chez l'un ou l'autre. En tout cas, c'est à l'ordre du jour.

Il y a deux ans, Agressor a participé au Fall of Summer, pour sa première édition. Quel souvenir gardes-tu de ce festival ?

J'ai un super souvenir de ce concert, on s'est éclaté comme des fous et il y avait une super ambiance. On a joué avec un bon son. Le concert avait lieu sur la Blackwater stage, et comme nous étions en ouverture, il n'y avait pas encore beaucoup de monde, mais le public nous a super bien accueilli. Le festival était super également en lui-même. Ils ont une affiche un peu spéciale avec tous ces vieux groupes, ils se démarquent vraiment des autres festivals. D'ailleurs, j'y suis retourné l'année d'après en tant que festivalier.

Pour revenir sur le Hellfest, ta soeur Sybille est également présente cette année puisqu'elle a joué avec Witches. La musique et le Hellfest, une histoire de famille ?

Oui, bien sûr. Nous avons toujours baigné dans ce milieu-là. Notre mère écoute du rock, du hard-rock. Elle écoute Slayer, King Diamond et les Stones. C'est la suite logique ! (rires). Nous allions à des concerts quand nous étions tout petits. On a pu voir pas mal de choses dans les années 70, ça commence à dater maintenant.

Pourtant vous êtes originaires de Nice, une région qui n'est pas réputée pour ses concerts metal...

Oui, et aujourd’hui c'est toujours pareil. Il y a quelques temps nous avons joué au Rat's, une salle de concert à Puget-sur-Argens à côté de Fréjus. Ça c'est super bien passé, il y avait du monde. Mais c'est vrai que dans l'ensemble, dans le sud c'est un peu plus compliqué, surtout du côté de Nice. Mais maintenant, cela fait treize ans que j'habite dans le nord, et il y a des concerts partout et tout le temps ici, c'est l'orgie ! (rires). Tu n'as même pas le temps de tout voir ! Et puis il y a la Belgique à côté. Il y a beaucoup de metalleux et de musiciens ici, c'est vrai que ça me change du sud. Le sud c'est bien pour le soleil et la montagne mais l'ambiance est différente. Il y a des bons musiciens et des bons groupes, mais ils restent enclavés.

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Quels groupes as-tu prévu de voir cette année au Hellfest ?

Plein de groupes, mais avec l'emploi du temps et les interviews, il y en a plein que je n'ai pas pu voir. Là j'ai vu Vader, Inquisition et un bout du set d'Anthrax. Je crois que c'est tout pour l'instant. Et Witches forcément !

Sur tes trente années de carrière, quel souvenir gardes-tu en tête en particulier ?

Je crois que je dirais mes rencontres avec Quorthon (leader de Bathory NDLR) et les gars de Mayhem à l'époque. Je suis resté en contact avec eux pendant longtemps. Necrobutcher (bassiste de Mayhem NDLR) est le parrain de ma fille. Euronymous et Necrobutcher passaient chez moi régulièrement. Quorthon, je l'ai rencontré via son père, qui était notre producteur à l'époque, à Berlin quand on a enregistré notre premier album. Ce sont des bons souvenirs.

J'ai lu dans Metal Bunker, le livre de Jérémie Grima, que tu avais connu aussi Chuck Schuldiner à l'époque de Mantas, avant que le groupe ne change de nom et ne s'appelle Death...

Oui, alors en réalité je ne l'ai pas connu personnellement. On faisait du tape trading avec eux. C'est comme ça que j'ai découvert Mantas (devenu Death par la suite NDLR) ou Genocide (première formation de Repulsion NDLR).

Agressor a connu pas mal de changements de line-up au cours de sa carrière. Il y a notamment un batteur qui est passé dans les rangs du groupe, Kaï Hahto, qui joue aujoud'hui pour Nightwish... Comment as-tu réagi en apprenant la nouvelle ?

C'est cool pour lui ! A l'époque on ne s'attendait pas à ce qu'il fasse cette belle carrière. Quand tu es dans un groupe, tu fais surtout en sorte que tout se passe bien avec les gens avec qui tu joues. C'est vraiment super pour lui, car en plus d'être un batteur génial, il est super sympa humainement ! On a enregistré une partie de Medieval Rites ensemble puis il nous a accompagné sur une tournée. Mais tu sais, des batteurs, il y en a beaucoup qui sont passés par chez moi ! (rires).

Oui, vous avez notamment eu Romain Goulon à l'époque de Deathreat, puis Kévin Paradis aujourd'hui.

Oui c'est ça ! Ce sont tous les deux de très bons batteurs.

Ces changements de line-up t'ont-ils bloqué à un moment donné dans ta carrière avec Agressor?

Oui, c'est toujours un peu chiant ! (rires). Surtout au début, avant 1999. Le line-up variait sans arrêt. Après, au cours des années 2000, il y a eu énormément de musiciens qui jouaient super bien et qui voulaient faire du metal extrême. C'est donc à partir de ce moment que ça a été plus facile pour moi de trouver des gens. Après, c'est toujours compliqué de les garder pour soi, mais je le comprends, je le fais aussi moi ! (rires). Jouer dans d'autres formations, ce n’est pas un problème, il faut juste s'organiser. Là actuellement, avec Agressor, on a plusieurs line-up, mais j'essaye de garder Kevin à mes côtés. (sourire)

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Agressor est reconnu comme l'un des pionniers du death metal français aux côtés de Loudblast ou Massacra. Comment vis-tu cette reconnaissance ?

C'est sûr que ça nous touche. Mais il faudrait qu'il y ait encore plus de monde qui vienne nous voir en concert ! (rires) Bon parfois, j'ai l'impression que l'on a enfoncé des portes ouvertes pour rien, mais ça c'est parce que je ne suis jamais content ! C'est un gros problème ! (rires) Non, c'est bien. Quelque part, c'est un peu prétentieux de dire ça, mais peut-être que c'est grâce à nous que le metal s'est popularisé en France et qu'il y a des événements tels que le Hellfest. On peut y prétendre un peu en tout cas. Quand on a débuté, il y avait déjà d'autres groupes, mais ils jouaient plus dans un registre heavy metal, chanté en français qui plus est.

Oui, tu parles d'ADX, Sortilège et cette vague-là?

Oui, c'est cela. Moi, je n'étais pas trop fan de cette scène, c'est pour cela que j'ai fondé Agressor (rires). Pour aller un peu plus loin dans la violence. Et puis le chant en français me dérangeait beaucoup. Même si je reconnais avoir beaucoup aimé les deux premiers albums de Trust. Mais après, hormis quelques morceaux de Vulcain, ADX ou Killer qui trainent toujours dans un coin de ma tête, ce n'était pas trop mon truc. Après, les gars sont super humainement, et surtout, ils ont du courage d'être toujours là après avoir connu trente ans de galères !

As-tu l'impression qu'après trente ans dans le milieu, c'est toujours galère pour ces groupes de cette période ? Ou bien la solidarité a-t-elle pris le dessus ?

Il y a toujours cette solidarité. Heureusement. On joue toujours ensemble tu sais, on se croise et surtout on a passé l'âge de se prendre la tête pour des conneries ! (rires).

Parmi les groupes récents, lequel t'a marqué particulièrement ?

Tu sais, je n'écoute plus trop la même musique qu'avant. Mais je vais dire que sur la scène française, il y a Temple of Baal. Je les ai vus au Fall of Summer et j'ai bien aimé leur concert. On a joué avec Otargos aussi et c'était pas mal. Je les avais déjà vus une première fois et je dois reconnaître que ça ne m'avait pas trop plu. Puis la deuxième fois c'était super !

Si tu pouvais choisir la tête d'affiche du Hellfest 2017 pour l'Altar et la Temple, qui correspondent à tes styles de prédilection, le death et le black metal, qui choisirais-tu ?

Je mettrais Agressor ! (rires) Sur l'Altar ET la Temple, comme ça on jouerait avec les deux line-up ! (rires) Non, plus sérieusement, ça serait super d'avoir un énorme groupe qui jouerait sur une de ces petites scènes. Comme Slayer ou Metallica, comme ça, la tente serait pleine et les groupes ne joueraient pas avec les artifices qu'ils ont actuellement. Ça leur rappellerait leurs débuts, je suis sûr que ça pourrait être sympa !

Merci pour l'interview qui touche à sa fin. As-tu un dernier mot pour nos lecteurs ?

Continuez d'écouter du metal et La Grosse Radio ! Et supportez Agressor et venez à nos concerts !

Entretien réalisé au Hellfest le 18 Juin 2016
Merci à Alex ainsi qu'à Gunnar et Season of Mist qui ont rendu cette interview possible.

Photographies : Céline (© Child In Time 2016)
Toute reproduction interdite sans autorisation du photographe.

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