Amos Williams, bassiste de Tesseract

J'ai eu le plaisir de croiser au détour d'un coup de téléphone, Amos Williams le bassiste d'un nouveau phénomène britannique : TesseracT. Voici un petit compte rendu de ce qui s'est dit ce soir là, à propos de leur prochaine tournée et de leur nouvel album : One.

À ce qu'il paraît vous êtes en tournée dans peu de temps. Vous préparez vous déjà?

Oui, nous sommes sur le point de partir en tournée au Canada et aux États-Unis avec Protest the Hero et un groupe nommé Maylene and the Sons of Disaster qui font une musique mélangeant plusieurs style, mais les deux groupes font une musique progressiste et, tout en étant différentes de la notre, garde en commun le coté "cinglé"... Mais le reste de la tournée, nous l'espérons continueras en Europe continentale. Jusqu'ici nous n'avons pas pu facilement faire beaucoup de concert sur le continent, en fait nous n'y avons joué que deux fois, et jamais en France en plus! Ce qui est très dommage au vu de la distance entre Paris et Londres. Je crois que le plus proche que l'on ais fait soit la Suisse... Mais le même genre de choses nous est arrivé au Royaume Uni. Avant très récemment nous n'étions jamais allé plus loin au nord qu'environ 100 Km au dessus de Londres et c'est seulement cette année que nous avons pu aller vers l'Écosse, le Pays de Galle et le nord de l'Angleterre... ce qui paraît assez dingue pour un groupe qui à fait des concerts en Inde, en Amérique, en Russie et en Pologne! Mais on espère que cette année ça changeras et que l'on pourras tourner plus en Europe, notamment à Paris et en Europe de l'Est.

Comment faîtes vous pour incorporer le coté très ambiant de votre musique sur scène? Utilisez vous des séquences et des échantillons pré-enregistrés?

En fait, sur scène nous avons deux guitaristes, deux chanteurs un bassiste et un batteur mais il serait difficile à un groupe comme TesseracT d'exister sans l'aide de la technologie actuelle. Donc une partie de ce qui est enregistré en studio est utilisé sur scène. Néanmoins nous n'avons pas grand chose de rythmique dans ces échantillons. Ils sont principalement composés par des parties de guitares, des claviers, des ambiances et des choeurs. Donc il y a pas mal de choses qui se passent dans ces échantillons. Mais nous nous sommes rendus compte assez rapidement qu'au hasard des concerts, les systèmes de sonorisations sur lesquels notre musique allait être diffusée allaient être de qualité variable et qu'il nous fallait rendre avec notre formation de base (2 guitares, basse, batterie et 2 chants) un son qui soit le plus riche possible. Mais je pense que c'est comme ça que se fait la musique sur scène aujourd'hui et c'est plutôt une bonne chose. À l'avenir nous espérons pouvoir enregistrer d'autre choses et pouvoir les ajouter sur scène; un orchestre. En fait, nous avons pour projet d'enregistrer un EP, comprenant des versions acoustiques de nos morceaux, certains morceaux du prochaine album et quelques reprises. Nous sommes des grands fans de Pink Floyd et Jeff Buckley. J'ai de bons amis arrangeur qui sont interessés par la possibilité d'arranger la musique de TesseracT, et si nous pouvions amener ces enregistrements sur la scène, ça serait vraiment génial.

Pourquoi le nom TesseracT?

Oh TesseracT!! (rires) C'est assez drôle parce que, à part une personne dans le groupe, on a tous besoin d'une calculette pour faire à peu près n'importe quoi... mais le mot tesseract*, pour nous, signifie quelque chose de particulier. Pour nous c'est faire partie d'un ensemble plus grand. Un tesseract est un objet à 4 dimensions compris par nos sens qui n'en comprennent que 3. Le scientifique Carl Sagan, à très bien expliqué le concept du tesseract dans une de ces émissions "The Cosmos"; il dis qu'un tesseract est l'ombre d'un objet à 4 dimensions pour nous et que nous ne pourrons jamais le comprendre que par petit bout ou plus précisément, ne comprendre que l'effet qu'il à sur les dimensions que nous comprenons. De notre coté, ça veut dire : OK notre musique à coté arty et presque ridicule... mais notre but est de créer une musique qui à une base rythmique non-linéaire. Ce que nous avons essayé de faire sur l'album, et nous espérons sincèrement que cela se ressens, c'est de créé un ensemble de morceau qui s'appellent les uns vers les autres et forment un tout. Si bien que lorsque vous écoutez le premier morceau ("Lament"), vous avez déjà des éléments qui appellent au dernier ("Eden") et quand vous écouter "Eden" d'autres éléments vous rappellent à "Lament", ainsi quand vous réécoutez l'album, l'émotion s'accumule jusqu'à "Eden". C'est pour ça que nous avons, au mastering, placé les morceau dans l'ordre où il sont, de façon à ce qu'ils s'enchaînent parfaitement et construisent un crescendo émotionnel. Bon, évidemment on se doute que tout le monde n'écoutera pas l'album en entier mais, pour sentir l'impact musical que nous avons voulu rendre, il serait bien de prendre 55 minutes de sa vie pour l'écouter de la piste 1 à la piste 11. Le disque fonctionne assez comme un concept album en somme et tourne autour du morceau central "Concealing Fate", qui même s'il est divisé en 6 pistes ne forme en réalité qu'un seul et même morceau.

Allons y avec les questions horribles : étiquettes!
J'ai entendu que le style que vous et des groupes comme Periphery, Monuments or Fellsilent, était parfois appelé Tech-Metal. Aimez vous cette étiquette ou préférez vous le mot "Djent"?

En fait le mot "Djent", est le mot utilisé pour décrire un courant actuel que prend le métal prog/tech. La façon dont nous comprenons "Djent" est comme une évolution du prog. Quand on prend des groupes comme Dream Theater ou Tool ... tout ce que nous faisons, c'est perpétuer leur héritage. Mais comme nous le faisons 10 ans plus tard... Ben ça doit changer de nom. En fait "Djent" est un mot qui décris le son des schémas rythmiques des guitares dans Meshuggah, et plus tard, le mot à désigné cette nouvelle vague de métal prog. Il n'y à pas vraiment de différence entre nous et, par exemple, l'utilisation du mot Grunge pour désigner ce qui était une nouvelle forme de rock alternatif, et de même pour le New-Metal aux États-Unis dans les années 90. Donc, pour nous le Djent est une nouvelle mouture du métal prog, nous ne faisons que continuer ce que faisais Meshuggah ou The Dillinger Escape Plan, il y a 10 ans. Et il est clair que sans Meshuggah il n'y aurais ni TesseracT, ni Periphery, ni Fellsilent et tout les autres. Et jamais nous ne cacherons ce que nous devons à Meshuggah, ce fut d'ailleurs un honneur de jouer en première partie de leur concert récemment.

Mis à part l'évidente influence de Meshuggah, qui citeriez vous comme vos influences principales?

On pourrait citer des groupes comme Textures mais aussi des artistes comme Jeff Buckley. Buckley a une énorme influence sur nous, notamment dans son approche harmonique mais aussi dans les structures de ses morceaux, qui avant une petite analyser peuvent paraître assez "aléatoires", nous espérons d'ailleurs faire une reprise de lui dans peu de temps. Un autre truc qui peut paraître marrant, nous nous sentons aussi assez influencés par des gens comme Michael Jackson pour son approche rythmique... Et puis d'autres choses que nos parents écoutais comme The Doors, Pink Floyd, et puis aussi Faith No More et un peu de Deftones et de Tool.

Comment le groupe fonctionne vis-à-vis du processus de composition?

En fait, le groupe n'existerais pas sans l'invention d'Internet. Nous vivons tous assez loin les uns des autres. En fait, Acle (le guitariste) est notre compositeur principal, il apporteras les idées de départ et nous en discutons; nous voyons ce qui peut être amélioré...ensuite il développeras l'idée et nous l'apprendrons et puis nous la jouons en répet. Et c'est de cette façon que nous comprenons le mieux ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas ou ce qui demande plus de travail. Acle les reprends pour les retravailler encore et puis nous y ajoutons les voix pour arriver au point ou la plupart des groupes se dirais que le morceaux peut directement figurer sur un album. À ce moment nous la laissons mûrir pendant quelques concerts, car le morceau, malgré toute les répétitions, sonneras toujours différemment selon le public. Après cela nous le retravaillons encore, pendant l'enregistrement. C'est d'ailleurs pour cela que nous proposons un DVD dans un coffret spécial ou nous jouons "Concealing Fate" entièrement, en live dans un studio. Nous nous sommes rendus compte que le morceau avait changé pendant la phase d'enregistrement. Les éléments principaux sont restés les mêmes mais, le morceau avait changé suffisamment pour que nous voulions donner aux fans, le rendu de cette musique en live. De plus le DVD donne la possibilité de mixer en 5.1 et nous avons pendant des années discuté de cela avec Acle, en se disant "il faut absolument amener la musique de TesseracT au son Surround", il se passe tellement de choses... On a quand même laissé une version stéréo pour ce qui n'ont pas la chance d'avoir le matériel chez eux, mais si vous avez la possibilité de l'écouter en 5.1... ça vaut sérieusement le détour.

Est-ce que le type de structure très fluide et articulé comme un courant de conscience, est un type de structure naturel chez vous, ou êtes vous sortis de l'habituel schéma "couplet-refrain-pont" délibérément?

C'est vrai que nos structures sont souvent éloignées du "couplet-refrain-pont" mais il n'y à pas forcément de décision consciente derrière cela. Il y a même deux morceaux sur l'album qui ont une structure plus traditionnelle. En fait à un moment, nous essayions de nous détacher de la musique et de lui laisser nous dicter vers où elle veut aller, et les parties 1 et 3 de "Concealing Fate" reflètent bien cette démarche, elles n'ont pas de structures définies, et les mélodies... nous ont presque expliqués là où elle voulaient aller. Du coté des paroles; Dan, le chanteur à été pendant un moment officier de police. Et en tant que policier il  eu l'occasion de voir, ce qu'on l'on pourrait sûrement considérer comme le pire de l'humanité, et parfois aussi le meilleur. Donc en tant que chanteur, cela lui donne un grand panel de thèmes et d'émotions décrire et à intégrer dans la musique. Il n'a donc jamais eu de problèmes à trouver des sujets ou à se placer émotionellement dans la musique. Et donc, derrière les paroles qu'il écrit, il y a malheureusement la réalité.
Musicalement, nous nous concentrons énormément sur le groove. Pour nous, notre musique doit donner l'envie de danser et bouger. Ensuite, la musique doit nous émouvoir. Il ne faut pas voir derrière notre musique une démarche intellectuelle mais plutôt une démarche émotionnelle.

Comment avez vous gérés le processus d'enregistrement, avez-vous essayé de capturer une performance en une fois ou avez vous enregistré tout les éléments séparément?

Nous n'avons malheureusement pas eu le luxe de concevoir l'album entièrement puis de l'enregistrer. D'abord nous avons enregistré "April" en 2009, puis nous avons enregistré "Concealing Fate" dans son ensemble, puis "Sunrise" et "Nascent", qui sont de très vieux morceaux pour nous, puis enfin "Lament" et "Eden" les morceaux de début et de fin de l'album. Cela s'est passé sur une période de 18 mois. Le problème principal était la logistique. Encore une fois nous vivons très loin les uns des autres et tous nous retrouver au même moment pour enregistrer, entre les concerts et nos vies respectives. Le second problème était que, moi et Acle en tant que producteurs de l'album, nous voulions le meilleur résultat possible. Je travaillais à l'époque à Metropolis Studios, qui est un studio absolument fantastique à Londres. Ils ont enregistré Queen, Elton John, Michael Jackson... L'avantage de bosser dans un tel studio est qu'en tant qu'employé, lorsque le studio est libre, on peut l'utiliser gratuitement. Notre batteur étant assez bon, nous nous sommes dit "enregistrons le dans le meilleur endroit possible avec le meilleur équipement possible" et c'était Metropolis. L'inconvénient, c'est que comme Metropolis est un studio qui arrive à effectivement faire de l'argent... il est souvent pris, donc les séances libre s'espaçaient souvent de deux à trois mois. Rajoutez à ça la difficulté de se retrouver tous au même endroit au même moment et les concerts et vous avez un temps cumulé d'enregistrement d'environ 20 jours... étalé sur 18 mois! Ce qui rendait le processus assez difficile pour nous parce que, nous enregistrions un morceau et étions obligés de passer à autre chose. Du coup, la quasi totalité du prochain album est déjà composée, il nous faut maintenant voir avec notre tournée pour pouvoir retourner en studio et finir ces morceaux làs, mais honnêtement je pense que cela durera sûrement entre 18 mois et deux ans.

 

Avez-vous produit l'album entièrement vous mêmes?
 
Nous avons effectivement enregistré, mixé, produit et fait tout nous même, à l'exception du mastering qui à été fait par un de mes amis qui travaille en temps qu'ingénieur de mastering à Metropolis. Il s'appelle Andrew Baldwin, c'est lui qui s'est occupé du mastering du DVD du Live 8, et puis il à bossé avec The Who et pour plein d'autres choses. Il nous à donné aussi son opinion extérieure, et son expérience de professionnel travaillant dans pleins de différents styles.

Avez-vous utilisés des triggers sur la batterie?

Nous avons ajouté en dessous des sons originaux pour les renforcer, quelques échantillons provenant de Drumkit From Hell, particulièrement sur la caisse claire et un peu sur la grosse caisse. Mais nous avons aussi profité de l'enregistrement pour enregistrer des échantillons de chaque élément de la batterie, qui étaient évidemment tous enregistré avec du matériel auquel peu de gens on accès. Donc nous nous sommes fabriqués une petite bibliothèque de sons que nous avons occasionnellement utilisé dans l'album.

Quelles sont vos influences dans le champ de la production musicale? L'album à un son très stratifié qui me rappelle des albums de Strapping Young Lad ou le travail de Devin Townsend en général.

Devin Townsend, n'est pas vraiment une influence directe. En revanche Pink Floyd et notamment le travail de leur ingénieur du son Alan Parsons, sur Dark Side Of The Moon en particulier. Et puis il y a ce gars qui s'appelle Michael Paul Stavrou, il à écrit un livre, "Mixing with your Mind", il parle de créer des fantômes sur une scène noire et de les faire apparaître et disparaître au fur et à mesure, et c'est un peu comme ça que nous avons voulus produire l'album. Nous voulons donner à l'auditeur un environnement, assez sombre d'ailleurs, où les sons, apparaissant et disparaissant, ont une profondeur et une énergie qui ne donne pas nécessairement une claque comme beaucoup de productions métal modernes. C'est plus chaud et rond et ce sont des sons qui invitent, à se rapprocher de la scène pour en entendre plus. Notre Album est certainement moins fort en terme de volume que beaucoup d'albums modernes mais c'est fait intentionnellement, quand un album est trop puissant dans les haut-médiums, il sonne très bien au début mais au bout de 5 minutes on commence à sentir de la fatigue auditive, l'oreille se fatigue vite en écoutant des albums de, par exemple Killswitch Engage, qui sont par ailleurs d'excellentes productions, mais sont un peu fatigantes à écouter. Nous essayons d'éviter cela à tout prix, et du coup nous nous orientons plus vers une atmosphère plus vieille école avec des bas-médiums et des basses plus ronds et moins de l'attaque des hauts-médiums. C'est la raisons pour laquelle nous avons tendance à ne pas aller vers du Hi-gain et beaucoup de distortion et de compression. La distortion et la compression abusive nous empêche de convoyer le message musical que nous voulons faire passer. Donc, nous essayons, et ce particulièrement sur les guitares, de mettre le moins de distortion possible, ce qui nous l'espérons, ajoute à la profondeur de notre musique.

Y a t-il des groupes ou artistes français que apprécieriez?

Ah! Question piège! En fait, globalement, au Royaume Uni, les média ne passent que des artistes américains ou britanniques... Du coup je ne suis pas forcément extrêmement au courant de la scène française. Le seul groupe que j'ai eu l'occasion d'écouter est, principalement Gojira, groupe génial par ailleurs et très bons sur scène.

Nathanaël

(* Un tesseract est un cube à 4 dimensions...)

Retrouvez la Chronique de l'album One

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