Entretien avec Corbier au Sylak 2012


Entretien exclusif avec François Corbier
dans sa loge du Sylak Open Air...

 

Par : LeBoucherSlave
Photos : Carmella

Une interview avec « l'idole des jeunes »  Corbier, ce n'est pas comme se faire cuire un steak en deux tours de poêle, trois minutes chrono dans une petite noix de beurre salé : cela se "prépare" ! ... Et ça tombe bien, car nous suivons depuis quelques années déjà la 'nouvelle' carrière musicale de ce talentueux chansonnier trop méconnu - car cantonné par le quidam à l'image farfelue de ses "années télé" dans les années 80 et 90 -  et les questions ne manquent donc pas...

Sauf qu'au moment de commencer, gros coup de 'flippe' : impossible de remettre la main sur cette liste de questions si soigneusement concoctée, que j'avais pourtant bien pris soin de mettre de côté cinq minutes auparavant... Grand  moment de solitude donc pour votre serviteur, qui se voit contraint de devoir vider le contenu de son sac (autrement dit : le bordel incommensurable qui s'y trouvait ...) dans la loge impeccable du chanteur, triant ses feuilles volantes sans parvenir toutefois à retrouver ce fichu papier ! L'ombre d'une interview façon 'Raphaël Mezrahi' se profile et le désenchantement guette donc pour un face-à-face si longtemps attendu... Mort de honte, je n'ose évidemment regarder François Corbier, de peur d'avoir à lire dans son regard l'impatience et le dépit face à tant de "professionnalisme"..

Je me trompais. Tout ce temps, comme Carmella me le confiera, c'est un Corbinou plutôt amusé (peut-être gentiment moqueur ...) et compatissant qui me regarde gesticuler sans succès, avant de me proposer en toute bienveillance : « Mais tu sais, si c'est toi qui l'as préparée, il y a bien des questions qui vont te revenir, moi je vais te répondre, tu vas pouvoir rebondir sur mes réponses et c'est aussi sympa comme ça, une vraie discussion quoi ! » ...  Et comment, M'sieur!!  ... C'est donc par la force des choses, mais également ainsi mis à l'aise par un homme dont la nature profondément humaine se dessine clairement au fil des questions/réponses, que l'interview qui va suivre prendra la forme d'une conversation moins formelle, d'un échange plus intimiste entre votre Boucher en mode 'free-style' (désolé pour cet anglicisme, François... ^^) et un Corbier drôle, touchant et intègre, sans langue de bois, qui se livre l'air de rien à quelques confidences ...

Volontairement, nous ne nous attarderons pas sur sa période « Club Dorothée » (l'homme y revient de lui-même de toute façon...), ni sur ses goûts en matière de métal (il avoue ne rien y connaître ni même y comprendre, quand bien même nous nous prenons à imaginer que les textes d'un Gojira par exemple seraient à même de l'interpeler ...), et préférons mettre l'accent sur d'autres aspects moins connus de la carrière et de la personnalité de l'artiste. Un parler simple et vrai, un bon sens et un goût du bon mot tout provincial (désolé pour mes collègues citadins de la Capitale!...), avec toujours tapie cette petite graine d'anar impertinent et insoumis, un peu à l'image du grand Brassens jadis - lequel, il n'y a pas de hasard, avait d'ailleurs encouragé notre apprenti-chansonnier à ses débuts, décelant peut-être déjà en lui les prémices d'un talent naissant qui allait en faire aujourd'hui l'un de ses plus dignes héritiers... Bref, un Corbier pas 'métalleux' pour un sou mais parfois bien plus 'rock n' roll' dans son attitude que vous ne sauriez l'imaginer, et donc à même de parler aux plus ouverts d'entre vous autant qu'aux nostalgiques de la "grande époque"... Mais jugez plutôt !

PS : Ah oui, au fait, la fameuse liste de questions a été retrouvée cinq minutes après avoir quitté les lieux, bien en évidence là où j'étais pourtant persuadé d'avoir cherché... Assurément, le destin aura voulu que l'entretien qui suit se déroule ainsi. Pas grave, il en restera le souvenir impérissable d'une rencontre d'autant plus marquante...


 

Corbier en concert, arrivée sur scène Sylak 2012


 

Merci à Corbier et à sa charmante épouse pour leur patience, leur disponibilité et leur infinie gentillesse... Également à Stéphane de la compagnie AECE de nous avoir aimablement mis en contact.

 

Bonsoir, Corbier... C'est un honneur pour nous de te rencontrer, et toujours un grand plaisir de te retrouver dans le cadre d'un festival rock et métal comme le 'Sylak' aujourd'hui ! Alors, c'est un petit peu atypique comme cadre pour toi, mais on a l'impression que tu apprécies ce genre d'expériences un peu différentes, as-tu le sentiment d'y être toujours bien accueilli et comment te l'expliques-tu ?

Alors d'abord, quand on fait ce métier il ne faut pas être fermé. C'est-à-dire que si on m'invite dans un festival de jazz... bon, je ne fais pas de jazz! (sourire)  Mais les organisateurs qui m'auront invité auront pensé que ce que je fais pouvait rentrer dans la programmation d'un festival de jazz. Ici, c'est un festival de hard-rock, s'ils m'ont invité c'est que les gens qui organisent ont pensé que je pouvais venir. Donc, moi je n'ai pas à me poser la question de savoir : est-ce que mon répertoire peut s'adapter ou pas ? Je vais faire la même chose que d'habitude, un peu plus court parce qu'on me donne moins de temps, mais je ne suis pas gêné de venir là, au contraire c'est toujours des expériences, oui, et toute expérience est intéressante.

On se rappelle notamment par le passé les concerts-concept "Cassoulet Show" ...

Voilà, les "Cassoulet Shows", organisés par 'Jésus', qui était un type formidable, donc j'ai dû en faire deux ou trois pour lui, et puis un jour j'ai dit : « Bon, ça suffit, quoi, on va arrêter quand même ! », mais c'était très très sympa. En plus, il faisait venir des groupes tout à fait étonnants...

(le coupant) Gronibard, Ultravomit, ...

Oui, mais pas que, pas que... Il y avait aussi des gens qui faisaient de la musique de ce genre-là (NdA: de la chanson à texte comme Corbier, s'entend) de façon très performante, très intéressante.

Il se passe toujours de drôles de choses dans ces moments-là, est-ce que tu as peut-être des anecdotes dont tu te rappelles un peu, de choses qui s'étaient passées au cours de ces concerts-là ?

Je me souviens qu'il y avait mon copain Didier Super, que j'aime beaucoup et qui passait avant moi, et il jouait avec une petite femme qui jouait de la contrebasse ou quelque chose comme ça - je ne sais plus bien - et qui faisait la gueule tout le temps... C'était très étonnant parce que Didier est un garçon qui n'arrête pas de rigoler ... et cette femme qui faisait la gueule! (rires) Mais c'était incroyable parce que, tu vois, on était arrivés après Didier et puis on cherchait à entrer en coulisses, qui étaient verrouillées, donc on tapait à la vitre et elle, elle faisait celle qui ne nous entendait pas, ne nous voyait pas... enfin bref, c'était une conne, quoi! (rires)  (NdA : en espérant qu'elle n'était pas de la famille, en tout cas, par ces températures, la voilà rhabillée pour l'hiver!)

Le personnage qu'incarne Didier Super, justement, est un peu provocateur. Toi, on sait que tu as eu quelques 'problèmes' avec des paroles de ta chanson "Belette" notamment, quand tu en as parlé un peu à la télévision...

Je ne me souviens pas, non, je ne crois pas... (NdA: en fait, il est plutôt rassurant de voir que Corbier ne s'en rappelle plus car il s'agissait simplement d'une apparition chez la bande de 'testeurs' craignos de chez Ruquier - ou chez Mireille Dumas on ne sait plus trop bien - , et c'était la ligne « Les filles se feront violer dans les commissariats » de la chanson évoquée qui avait interpelé - "choqué"?! - un des chroniqueurs ... pas un réel 'problème' donc... ^^) 

Je ne crois pas, peut-être qu'il y avait eu un truc, un type qui était venu me dire une connerie... Mais non je n'ai jamais eu de soucis, je n'ai jamais été censuré. Alors, par contre mes chansons ne passent pas en radio, ça c'est vrai, et on m'invite rarement à la télévision pour chanter également mon répertoire actuel... Mais ça vient tout simplement du fait que la variété en France - peut-être à l'étranger aussi, mais je m'en fous, je vis en France - est extrêmement calibrée. Donc, dès qu'on dit un gros mot, dès que l'on a une situation un peu scabreuse, dès qu'on se moque d'un homme politique, il y a le risque que cette chanson ne passe pas. Ça ne me gêne pas, je m'en fous... Je ne suis plus à l'âge où on a envie d'être vu partout, de passer par tout le monde, je m'en fous maintenant ! Donc, je fais mes chansons : si elles plaisent, tant mieux, si elles ne plaisent pas, tant pis, mais je ne vais pas moi-même me censurer... L'auto-censure, c'est la pire des choses, et puis s'il y a des gens qui n'osent pas passer mes chansons, tant pis.

Il y a quelques temps, j'étais invité dans une radio chrétienne, et il y a une chanson que je chante sur scène qui s'appelle "Pour Dieu, pour Dieu", dans laquelle je dis que l'on tue tout le temps au nom de Dieu (NdA : thème ô combien d'actualité aujourd'hui...). Alors, on nous dit que  « Dieu est Amour » et on n'arrête pas de tuer en son nom. Je trouve ça absolument aberrant, donc c'est une chanson où je dénonce les Chrétiens, les Juifs, les Musulmans et puis d'autres religions, tous ceux qui tuent au nom de Dieu. Moi, je ne suis pas croyant, donc je ne devrais pas me mêler de ça, mais c'est justement parce que je ne suis pas croyant que je peux en parler ! Parce qu'un catholique aura une vision de catholique, etc... Donc, moi je dis : «  Vous tuez, c'est honteux, c'est abominable, et c'est toujours au nom de Dieu... » . Et le gars de cette radio me dit : « On ne peut pas passer ça! ». Et je lui dis : « Donc, vous êtes d'accord, pour la guerre... ». Lui : « Non! » . Moi, j'insiste. Et lui : « Non, c'est pas ça, c'est que mes patrons, gnagnagna... »   Moi, je lui dis : « Alors je ne fais pas votre émission ! »  Et lui : « Si, on va la faire quand même, mais je ne la passerai peut-être pas en entier... » .  « Faites comme vous voudrez, au moins vous en passerez un bout... Mais vous êtes une radio chrétienne, si vous êtes vraiment des Chrétiens vous êtes forcément contre la guerre ! ». Bénir les armes, c'est une hérésie...

Ce soir, vas-tu jouer ta chanson "R.I.K." ? C'est l'une de nos petites préférées (NdA : dans sa version 'studio', frissons assurés à chaque écoute!...) et elle est malheureusement revenue d'actualité cette année encore...

C'est une chanson, pour moi on ne devrait plus la chanter, mais il ne se passe pas 6 mois sans qu'on nous refoute l'Erika, et quand ce n'est pas l'Erika, c'est la même chose, c'est un autre bateau ailleurs dans le monde qui largue du pétrole ou qui sombre, enfin tous ces gens qui occupent les mers en se foutant complètement des poissons, des habitants qui vivent sur les rivages... Ces gens me dégoûtent profondément et je n'ai pas de raison - une fois encore - de me châtrer, je vais la chanter bien sûr !


 

Corbier en concert, live Sylak 2012

« Bénir les armes, c'est une hérésie ... » (Corbier)

Malgré tes avertissements parfois envers le public, il y en a toujours qui viennent te voir avec en tête l'image du Corbier de leur jeunesse. Est-ce que ça ne t'agace pas un peu parfois qu'ils ne prennent pas le temps de découvrir ce que tu fais, ce qu'on connaît depuis à peu près 10 ans, le Corbier chansonnier, à textes ?

On ne peut rien faire contre ça. Tu sais, je suis resté longtemps à la télévision parce que j'y gagnais ma vie. Si je n'avais pas été content, je n'avais qu'à foutre le camp. Donc, j'ai assimilé très tard, très longtemps après, que la présence à l'antenne marquait les gens, mais moi je n'en savais rien... Parce que... c'est un peu con, ce que je vais dire, mais c'est vrai, hein! (rires) ... Lorsque j'étais à l'antenne, jamais un journaliste n'est venu m'accorder le dixième de ce que tu es en train de m'accorder là, ce soir ! C'est-à-dire je n'existais ni pour la presse écrite, ni pour la presse parlée, ni pour la presse télévisée. Je faisais un métier qui était à la télévision, mais on ne parlait pas de moi : on parlait de Dorothée, on parlait des vedettes de l'émission, Hélène ou d'autres personnes des séries, on parlait des dessins animés, mais moi j'étais juste un type à côté de Dorothée qui faisait le crétin... Donc, je n'intéressais personne. Et il a fallu que je quitte la télé pour d'un seul coup découvrir que les gens m'aimaient bien, que la presse m'aimait bien aussi, donc c'est une découverte qui est un peu tardive, et qui fait que forcément j'ai cette image, puisque j'y suis resté trop longtemps... Si j'avais été moins con, je me serais rendu compte que j'avais un impact sur les gens et sur la presse, et peut-être qu'à ce moment-là je serais resté moins longtemps.

Avant la télé, il y a eu quand même un début de carrière musicale (très longtemps avant même, nous précise-t-il..., NdA), qu'est-ce qui à ton avis a pu manquer - quand on voit la qualité de tes textes et de tes chansons, même déjà à l'époque - pour percer ?

D'abord, j'étais très timide... Je le suis beaucoup moins, mais je le suis encore. J'étais extrêmement timide, donc, et je n'avais pas la force physique d'imposer certaines choses. Or, tu le sais, un chanteur, il doit être le patron sur scène, c'est Dieu, hein... (rires)  Non, j'exagère, mais voilà, moi je ne pouvais pas dire des choses sérieuses, je n'avais pas la gueule pour, je n'avais pas la voix pour, je n'avais pas le physique pour... Donc, je faisais rire, car je savais qu'avec mon physique, avec ma voix, c'était plus simple. Ça ne m'empêchait pas de dire des trucs quelquefois un peu tordus, aussi, mais j'avais du mal à chanter mes chansons sérieuses. Donc, il a fallu qu'il se passe bien des années pour que j'accepte de reprendre la guitare pour chanter des choses sérieuses. Et ça s'est fait parce que mon frère, ma femme, mon fils m'ont poussé à le faire, parce Maxime Le Forestier m'a encouragé... Je n'y croyais plus, moi, je croyais que j'étais barré dans un truc, soit de comique délirant, soit comme animateur d'émission pour enfants. Ça a été donc difficile, et puis le jour où je me suis aperçu que les gens étaient d'accord pour m'écouter, ça a été une révélation. Mais j'étais vieux, déjà! (rires)

Pour en revenir un peu au festival de ce jour, qu'est-ce que tu penses de ces styles, métal, hard rock, toi qui viens plutôt de l'école Dylan ou Brassens ?

Je vais te dire : je n'ai rien du tout contre ces jeunes gens, ils s'amusent et ils font sans doute très bien ce qu'ils ont à faire. Moi, je ne comprends pas ce qu'ils font, donc je ne peux pas dire si c'est bien ou pas bien, puisque je n'entends pas... C'est une vague sourde qui m'arrive, donc je ne comprends pas. Et il y a un truc qui me fait péter de rire, mais vraiment, peut-être qu'un jour ils s'en rendront compte eux-mêmes, j'espère, je n'en sais rien : j'imagine le type qui écrit ses chansons et qui pendant 6 mois va bosser sur le texte, qui va fignoler, qui va faire les choses bien, puis il arrive sur scène, il chante, et personne ne comprend ce qu'il dit ! Donc, pourquoi est-ce qu'il s'emmerde à mettre des mots, il n'a qu'à faire « roooââaâar-groââaâa », et c'est suffisant ! (rires)

(NdA : il est vrai qu'il n'a été invité que dans des festivals avec majoritairement du 'death' ou du 'grind', et ne peut se référer principalement qu'à ça... Reste qu'avec un cri aussi convaincant, notre Corbinou est passé à côté d'une belle carrière dans le métal ! ^^)

Parlons de ton dernier album... Déjà son titre, "Presque parfait" : un clin d'œil à l'émission culinaire sur M6 ou bien ?

Ah, je ne connais pas... (NdA : encore une fois, qu'est-ce que ça fait plaisir à entendre, des choses comme ça ! ... ^^) Non, non, c'est parce qu'une amie avait dessiné la pochette et l'album alors n'avait pas de titre. Et quand elle m'a envoyé le dessin, elle m'a dit : « Dis-moi si tu remarques quelque chose... ». Et j'ai dit : «Mais l'avion vole à l'envers ! », et elle me dit « Ouais, et je suis contente que tu l'aies vu parce que c'est un peu un gag ». Je lui ai dit : « Hé bien, on va appeler le disque 'Presque Parfait', voilà! » (sourire) ... C'est venu comme ça. Ce disque a été fait il y a 4 ans maintenant.

On a un peu le sentiment à l'écoute que tu as peut-être voulu revenir à une production un peu plus simple, plus organique, comme si tu revenais un peu aux fondements de ta musique, la dimension collégiale...

J'essaie avec mon camarade Eric Gombart - qui est un musicien d'exception, vraiment - de faire des choses simples, jolies, agréables à écouter point de vue musical. Et plus c'est agréable à écouter, plus on peut dire de choses... Donc, j'essaie de faire sincère, de mélanger des textes un peu costauds, un peu forts, je ne dis pas que c'est de la poésie, c'est pas ça mais... essayer de dire des choses, et puis en même temps, pour ceux qui écoutent un peu moins "bien", que la musique puisse les séduire. Alors, je pourrais aussi mettre des batteries, de la basse, je le fais sur certains disques, mais je ne le fais pas sur scène puisque je pense que c'est bien comme ça.


 

Eric Gombart & François Corbier, Sylak 2012

« On ne fait pas des chansons pour emmerder les gosses, on fait des chansons pour les amuser ... » (Corbier)

 

Sur le dernier c'est vrai que c'est un petit peu plus allégé, plus aérien parfois...

Oui, oui... Là il va y avoir un double-album 'live' qui sortira pour la fin de cette année 2012, qui a été enregistré à Lyon dans un petit établissement qui s'appelle "A Thou Bout d'Chant", et quand Eric a écouté le travail qu'on avait fait sur scène, il m'a dit : « Oh, il faut rajouter une basse, c'est vraiment dommage qu'il n'y ait pas de basse » ... Alors il m'a rajouté une basse en studio sur le 'live', donc c'est quand même assez rigolo (rires).  Et puis il y aura aussi un autre album (studio cette fois) qui sortira au printemps, avec 12 ou 14 chansons nouvelles...

(le coupant) avec plus de batterie et de basse, donc ?

Et là, oui, il y aura de la basse, de la batterie, il y aura des flûtes (déjà présentes toutefois sur le dernier album, NdA), de l'orgue, de l'orgue Hammond, sans doute du violoncelle, donc un disque qui ressemblera déjà plus aux autres albums que j'ai déjà faits.

Une question qui me tient assez à cœur... Dans certaines chansons, tu as vraiment un vrai talent pour brosser des portraits de personnages auxquels on peut s'identifier, je pense à la maman de ce "Jean-Jean" sur le dernier album, au "Grand-Père" de la chanson du même nom, à la vieille dame de "J'arrive chez elle", vraiment c'est comme si on les voyait, qu'on les visualisait... Alors d'où te vient ce talent, est-ce que tu aurais vécu plusieurs vies pour comme ça pouvoir nous en dépeindre autant ?

Non, mais ça c'est l'école Brel si tu veux... Jacques Brel, quand tu l'entends chanter "Ces Gens-là", c'est ça, c'est-à-dire que c'est un portrait absolument fort... Il te raconte quelque chose et il ne faut pas que tu te loupes dans ton vocabulaire, parce que sinon la chanson redescend... Donc il faut que ça monte, que le vocabulaire soit de plus en plus précis, plus fort, de plus en plus « agressif »  même. Donc, ben c'est ça ! (sourire) Tu sais, moi je suis partagé en chanson française entre Brassens, Brel, Léo Ferré, Le Forestier et puis aussi des chanteurs Canadiens. Donc, j'aime les gens qui racontent des choses, et je me dis : si je dois raconter aussi des choses, il faut que je me rapproche de ces gens-là, alors je ne sais pas si je m'en approche, mais j'essaie en tout cas, j'essaie d'être clair et simple et que ça touche les gens.

Une petite question sur une chanson particulière de l'album, "Brune"... Peux-tu nous dire, car on fait un petit pari avec Carmella, si ce serait métaphorique, s'il pourrait y avoir plusieurs lectures : qui est cette « brune » justement, qu'on rencontre d'ailleurs plusieurs fois dans l'album ?

Alors, au départ c'est personne. Et puis la chanson elle bouge, elle avance, je la réécris, je refais un couplet complet, et puis un jour je la chante à mon frère et il me dit : « C'est la République, c'est Marianne ». Et voilà, effectivement c'est ça... (NdA: je suis donc de corvée de vaisselle, car Carmella avait bien vu juste... ^^)

Il y a aussi un livre, me semble-t-il, en préparation ?

Alors, « en préparation », en fait, non, il va même sortir, là, au mois d'octobre (sourire), je ne peux pas te dire quand, mais enfin à partir du 15 à peu près, peut-être le 30, enfin il va sortir ! ... C'est un livre qui sera difficile à trouver, parce que c'est un tout petit éditeur, mais si on vient sur mon site officiel on pourra le commander, ou le commander chez l'éditeur, ou avec la référence aller chez un libraire et le commander. Mais on le trouvera pas dans les gares et tout ça, hein!

Et les anciens albums, est-ce qu'ils seront réédités ?

Jamais. Parce que je fais des chansons qui sont quelquefois en situation sur un moment donné, et puis ce moment bouge, ça ne veut plus rien dire pour les gens, ils ne comprennent plus de quoi il s'agit, parce que l'actualité bouge, donc je ne les ressortirai pas, il faudra attendre que je sois mort, à ce moment-là il y aura des gens qui ressortiront mes disques, voilà... (rires)


Il y aura un couplet à rajouter aux "Chanteurs de l'Ossuaire"... (chanson du dernier album, NdA)

(rires)  Voilà, c'est ça...

Sur une note plus légère, sur les choses que l'on peut dénoncer en chanson, est-ce que tu as entendu parler - Carmella et moi venons de Bourgogne et toi tu y as joué et même enregistré un 'live' jadis - du récent rachat par des Chinois d'un domaine de Gevrey-Chambertin, et est-ce là quelque chose qui pourrait te scandaliser, jusqu'à te faire écrire une chanson ? (sourire)

Non, je m'en fous. J'aime bien mais je suis pas un spécialiste du vin. Que les Chinois fassent du vin, rachètent un machin, tu sais ça changera rien à l'histoire du pinard... Tant qu'il est fait chez nous, il y aura toujours des œnologues français qui vont épauler les Chinois, alors ensuite que les Chinois prennent la production du Gevrey-Chambertin et l'emmènent en Chine, hé ben ça devrait faire plaisir à tous les pinardiers qui vont pouvoir augmenter leurs prix, donc on ne va pas jeter la pierre aux Chinois parce qu'ils ont envie d'acheter ce qu'on fait de bien chez nous. C'est le jeu du commerce... Bon, moi je ne suis pas très concerné par cette histoire.
Ça me semble moins grave que d'être envahis par la langue anglaise... Qu'ils nous font chier, qu'ils nous emmerdent, on ne peut plus mettre la télévision sans entendre un mot sur dix en anglais, ILS NOUS FONT CHIER, voilà ! ... Alors, je n'ai rien contre les Anglais, j'ai contre l'envahissement de la langue anglaise, je vois plein de jeunes gens qui ne sont même plus capables de chanter en français, mais qu'ils aillent se faire f*****, ils me font tous ch*** ! (rires)

 

Corbier en concert, live Sylak 2012

« Que les Chinois fassent du vin, rachètent un machin, tu sais ça changera rien à l'histoire du pinard ... » (Corbier)

Un mot sur la génération que tu a touchée, et que tu retrouves là aujourd'hui, qui adhère quand même à ce que tu fais mais qui revoit aussi le Corbier de leur enfance. Ne penses-tu pas que tu fais toujours un peu le même métier, chanter pour les enfants d'hier qui en grandissant ont perdu de leurs illusions?

Dès l'instant où on monte sur scène, quoi qu'on présente, quoi qu'on chante, quoi qu'on joue, quoi qu'on ... danse (sourire), on s'adresse toujours à un public, donc c'est toujours le même métier. Alors ensuite, quand on s'adresse à des enfants, il est mieux d'éviter de parler de « sodomie », de montrer ses couilles sur scène, d'insulter les gens dans la salle. Bon, quand on s'adresse à des adultes, il vaut mieux éviter aussi ; mais si on le fait, on sait qu'on s'adresse à des gens capables de peut-être comprendre qu'il faut écouter, voir ça avec une autre oreille, un second degré... C'est la seule différence. Sinon, on dit les mêmes choses. Tu sais, quand tu parles d'amour, à des enfants ou à des adultes c'est toujours de l'amour en fait.

Sauf que tu leur chantais majoritairement des chansons "enfantines", aujourd'hui c'est des chansons plus sérieuses, plus graves, peut-être parce que justement maintenant ils ont grandi et on ne peut plus, on ne doit plus leur raconter d'histoires...

Oui, mais, si tu veux, dans les chansons que je chante, il y a toujours des chansons qui sont des thèmes parodiques. Quand je fais une chanson sur le nucléaire (sur le dernier album, NdA), par exemple, chaque couplet raconte une histoire différente et drôle pour avancer un truc contre le nucléaire. Et lorsque je chantais "Le Nez de Dorothée", c'était une façon de faire le chansonnier aussi puisque chaque couplet était différent, et faisait une histoire complète. Je te dis : faire des chansons pour les enfants, pour les adultes, c'est pratiquement la même chose. C'est une question de vocabulaire, quoi. Il faut essayer que les enfants comprennent quand même ce que l'on raconte. Mais Brassens avait fait un album complet de titres qu'il était allé chercher dans toute son œuvre, qui s'adresse aux enfants. Donc, voilà, il n'y a pas de raisons. Brassens n'était pas quelqu'un de spécialement intellectuel, c'était un type qui écrivait de très bonnes chansons, et ce n'était pas un langage compliqué. Mais il avait quand même un petit peu peur que les enfants entendent certains mots, car dans ses chansons il y avait parfois des gros mots, des situations scabreuses. Lui, il a été censuré ! Lui et Pierre Perret, ça a été terrible... Mais ils ont quand même trouvé 12 chansons qu'ils ont mis sur un album où il n'y avait pas de gros mot, donc on peut écrire des chansons pour les enfants comme pour les adultes. C'est le même métier.

Et maintenant, on utilise même certains de ses textes (de Brassens, NdA) à l'école...

Oui, ça c'est pas bien, c'est pas bien... Parce qu'on ne fait pas des chansons pour emmerder les gosses ! (rires) On fait des chansons pour les amuser...

Est-ce que d'ailleurs tu penses avoir gardé une part d'enfance, justement, comme on en retrouve sur des vieilles chansons comme "Plante un Jardin" par exemple, ou certaines d'aujourd'hui ?

Il y a une chanson de Jean Ferrat où il dit : « Nul ne guérit de son enfance »... Je ne sais pas si cette phrase est de lui ou pas, mais c'est ça... Moi je sais que j'ai commencé à en parler - j'ai écrit donc un livre où je raconte ma vie - et une fois que j'ai fini le bouquin et que je l'ai apporté à l'éditeur, je me suis remémoré des tas d'autres choses de ma toute petite enfance dont je n'avais pas parlé dans le livre. Parce que d'un seul coup ça a ressurgi et j'aurais eu besoin de l'écrire et de le raconter. Peut-être que ça fera un autre petit bouquin, je n'en sais rien... « On ne guérit pas ! » (sourire).

Des futures dates de concert pour ceux qui veulent continuer à te suivre ?

Je vais essayer de me reposer un petit peu prochainement, pendant 1 ou 2 mois et ensuite je pense que je repartirai, en décembre, en janvier...

De toute façon, tu l'annonceras sur ton site, et notamment sur ton "Corbiblog", entre deux allusions sur le sport, j'ai vu que tu y avais beaucoup parlé de sport dernièrement...

(ironique) C'est formidable le sport, c'est formidable... C'est bien connu.

Tu trouves que ça été dénaturé, peut-être...

Mais enfin, attends, c'est que du fric, c'est QUE DU FRIC ! C'est quand même terrible, quoi... Tu vois des mecs qui font le Tour de France, pourquoi, pour gagner du fric, des gars qui courent dans un stade, maintenant c'est pour le fric, qui sautent, c'est pour le fric... Tout ça est pitoyable, c'est nul, c'est laid, c'est moche ! Et quand tu vois qu'il y a des gens qui sont handicapés qui font aussi du sport, ça devrait être merveilleux, on devrait voir ça autant d'heures qu'on a vu les valides qui prennent plein de fric, on devrait les voir dans le poste ! On les voit à peine, on n'en parle pas, on en parle parce que Machin a eu une médaille et qu'il est Français... « Ha, les Français, qu'est-ce qu'on est bien ! » ...  Mais tout ça c'est de la merde, c'est des conneries ...

Corbier en concert, live Sylak 2012


Site officiel de Corbier


Site officiel d'Eric Gombart

 

 

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