Entretien avec Antoine et Jean-Jérôme de Regarde les hommes tomber au Motocultor 2013

Antoine et Jean-Jérôme, les deux guitaristes de Regarde les Hommes tomber  nous ont accordé un interview en ce dimanche 18 août, quelques heures après avoir joué devant le public du Motocultor.

 

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Thomas : Quelle est votre impression personnelle sur votre concert de tout à l'heure ? Alors attention, il s'agit pas juste de dire "c'était trop bien, on a assuré". Qu'est-ce que vous avez pensé de cette belle scène ?

Jean-Jérôme : Alors, mon impression personnel, en tant que guitariste, c'était un de mes meilleurs concerts que j'ai fais depuis le début de Regarde les hommes tomber. C'était vraiment une belle scène, j'avais beaucoup de sensations, il y avait du monde. On a commencé à jouer à midi, et malgré ça, il y avait vraiment du monde, ça faisait vraiment plaisir. On était vraiment dans de très bonnes conditions, j'ai vraiment pris mon pied sur scène en tout cas.

Thomas: Et le son était bon.

Jean-Jérôme: Et il y avait une bonne réponse du public. C'était vraiment un super concert.

Antoine: Pour moi, je suis aussi guitariste, j'avais un peu d'appréhension pour le concert parce qu'on a l'habitude plutôt de jouer dans des salles avec très peu de lumière, beaucoup de fumées. C'est vraiment beaucoup plus développé, on s'est acheté des super stroboscopes et tout, enfin c'est quelque chose qui nous tient vraiment beaucoup à cœur et on a fait notre première grosse scène au Hellfest. J'avais trouvé un peu dur au Hellfest de rentrer dedans et à être dans le concert, alors là je me disais merde, le Motocultor en plein jour et en pleine lumière, ça va être horrible. Et en fait, déjà on arrive, on voit les gens qui se rapprochent, on voit pas mal de gens dans le public qui ont notre tee-shirt, ce qui nous a pas mal scotché, on s'est dit ah d'accord on est attendu, notre show partait bien. Voir les gens qui se rapprochaient, je voyais personne qui partait, tout le monde restait, était attentif, et moi je me disais putain c'est génial, parce que je m'étais dis que certains allaient pas accrocher, parce qu'on fait quelque chose d'assez particulier, assez ambiant et moi je trouvais ça génial. Je pense aussi que pour moi, en terme de ressenti, c'était le meilleur concert que j'ai fais parce que là, on était pas dans un truc avec esthétique, avec très peu de lumière, là c'était brut. On était tout seuls face au public et pas de light, juste la lumière du jour.


Thomas: Donc bonne impression. Le public l'a prouvé d'ailleurs, en venant de plus en  plus nombreux au fur et à mesure du set.
Tu as parlé de tee-shirt à un moment donné, vous avez une imagerie qui est basée sur les gravures médiévales, alors pourquoi ce choix ? Qui a choisi ?

Jean-Jérôme: On voulait quelque chose de cohérent avec la musique, le nom du groupe et les thèmes des paroles. Le thème des paroles, c'est quelque chose d'assez biblique avec beaucoup de références. On peut voir la pochette du dernier album, il y a la tour de Babel, on parle de l'histoire de Cain.

Antoine: On est pas croyant, c'est pas un groupe chrétien, on aborde la Bible d'un point de vue mythologique parce que c'est ce qui transmet le mieux le reflet de l'homme.

Jean-Jérôme: Et du coup, ça nous paraissait logique de mettre le travail issu de Gustave Doré, que ce soit sur la pochette de l'album ou les tee-shirts.

Antoine: En fait, Regarde les hommes tomber, c'est un groupe assez particulier, et à la base c'est Jean-Jérôme qui a composé les morceaux et il fallait quelque chose qui colle à ça. On avait la musique, on avait le titre, on s'est dit qu'il fallait absolument que tout colle. On a un concept global, c'est ça qui marche, c'est ça qui nous plaisait. Et c'est pour ça qu'on a pris du temps pour bosser nos tee-shirts. On voit nos tee-shirts plus qu'un simple objet de merchandising. Pour nous, c'est l'imagerie du groupe. Avant en disait en interview, 3-4 mois avant la sortie de l'album, on disait "ne vous attardez pas à nos gueules", c'est pour ça qu'en concert, on a très peu de lumière, attardez vous aux paroles, attardez vous à l'imagerie, c'est ce qui compte, c'est ça Regarde les hommes tomber. Après, nous on fait de la musique point barre. Je suis content de voir que les tee-shirts marchent bien, parce que je trouve que ça véhicule bien l'image du groupe.

Thomas: Ils sont jolis en plus ! On va continuer un peu sur " l'explication de texte" puisque ça a l'air d'être assez important pour vous, on ne va pas choisir des références précises comme ça par hasard.
Êtes vous optimistes ? (rires) Vous avez l'air sympa quand même, ça change un peu des groupes de black dépressifs, qui sont vraiment dépressifs. Vous avez le sourire, c'est cool, mais pourquoi ce choix ?

(rires)

Antoine:  Il parait pas comme ça, mais il peut être bien négatif.
 

(Antoine, à gauche; Jean-Jérôme à droite)
 

Jean-Jérôme : Alors la vie est injuste et n'a aucun sens, mais on se bat (rires). Mais sérieusement, avec la musique qu'on fait, c'est vrai que ça reflète franchement pas un message positif. On se base sur des récits qui montrent la chute de l'homme. Ce sont des récits sur des hommes qui ont voulu se faire l'égal des dieux, et qui ont été punis par les éléments, par Dieu lui-même, par des forces supérieures et ce sont des choses qu'on retrouve également à des niveaux inférieurs. Par exemple, moi j'essaie d'être meilleur qu'Antoine, chacun essaie de devenir meilleur que l'autre, ça crée des conflits...

Antoine: Tu vois, la mythologie grecque par exemple, c'était juste comment exprimer les sentiments humains d'une manière un peu ésotérique. C'était un choix donc et on a tous été d'accord. Moi, ce que j'aimais bien dans le black metal, c'est que souvent les groupes développent une esthétique qui est en dehors de la réalité. C'est le côté ésotérique, c'est ça qui est intéressant. Tu parles pas de ta vie de tous les jours, c'est un échappatoire. En plus, dans la musique, il y a un côté épique, c'est quelque chose qui te porte et c'est naturellement que la musique était sombre. On a tous à peu près la même vision sur ce que vient de dire Jean-Jérôme, et les textes collaient parfaitement à tout ça. Je voulais pas avoir des paroles sur un fait d'actualité. Il fallait quelque chose de transcendant.

Jean-Jérôme : Quoi que l'homme entreprenne pour améliorer sa condition, c'est voué à l'échec.

Thomas : Ah oui, t'es quand même un peu pessimiste.

Jean-Jérôme : Il y a des milliers d'exemples, partout. T'allumes ta télé, tu lis...

Thomas : Tu penses qu'on est dans un fin d'ère ?

Jean-Jérôme : Bonne question. Honnêtement, je pense qu'on vit une époque pas franchement réjouissante, quand on voit tout ce qui se passe tout autour de nous. Lire le journal, ou allumer sa télé pour voir ce qui se passe au Maghreb, pour voir les crises économiques, pour voir des villes en ruines... On change d'époque, oui. Je sais pas, peut-être que c'est tout simplement une transition vers quelques chose de nouveau. L'humanité a souvent connu des cycles comme ça, où elle arrivait au bout d'un modèle, ça se cassait la gueule puis un nouveau modèle émergeait. Peut-être qu'on est dans une fin de cycle comme ça. Et ça illustre très bien la chute des hommes. C'est que des cycles. On construit une civilisation, et au bout d'un moment cette civilisation se casse la gueule, puis on en reconstruit une, etc.

Thomas: On va revenir un peu sur le côté musical, au-delà des explications. Quelles sont vos influences ? Quelles sont vos références, au niveau du groupe.

Jean-Jérôme : C'est vrai qu'on a chacun des références musicales, mais le but du jeu, c'était pas de refaire tel ou tel groupe, nous on voulait construire une atmosphère autour de la musique, une ambiance. On voulait surtout que les gens, quand ils écoutent notre musique, ils ressentent des émotions. Notre musique a un côté introspectif.

Antoine: A la base, c'est Jean-Jérôme qui a composé les morceaux, avec ses influences, dans lesquelles je me retrouve totalement. Après, il nous a fait écouté et on a construit le groupe. Moi, la première fois que j'ai écouté les morceaux de Jean-Jérôme, c'était comme une sorte de voyage en fait. On sentait qu'il y avait la musique, qu'il y avait matière à développer énormément de choses. C'est pour ça qu'on a fait son concept. Et au niveau des influences, il y a Neurosis...

Jean-Jérôme : Si tu veux des noms de groupes, voilà, c'est Neurosis, Cult of Luna, un peu de black metal, Emperor.

Antoine : Secrets of the Moon aussi.

Jean-Jérôme : oui, Enslaved un petit peu aussi. Mais après, on vient tous pour des raisons différentes dans le groupe. Le batteur est fan de death metal, Antoine aussi, le bassiste est fan de punk-rock.

Antoine: Punk-hardcore.

Jean-Jérôme: Oui (rires). C'était dur de rallier tout le monde. C'est pour ça que j'ai fais en sorte de mêler les influences dans quelque chose d'atmosphérique en fait.

Antoine: Le but du jeu c'est de jouer une musique en concert que "transcende".

Jean-Jérôme: Oui, quand on joue sur scène, on est vraiment... Je sais pas si tu as pu voir, mais on est vraiment... On s'envole quoi !

Thomas: Ca s'est vu.

(rires)


Est-ce que l'album, qui est sorti en mars 2013, c'est peut-être un peu tôt pour demander, mais est-ce que vous êtes déjà dans autre chose ?

Antoine : En fait, on voudrait faire un maximum de concerts possibles, on adore la scène et le meilleur moyen de promouvoir notre album, c'est de faire des concerts. Après, ça fait déjà deux ans que l'album a été écrit donc on commence un peu à s'ennuyer en répét. On aimerait bien bosser sur autre chose. Ca va venir, on a des pistes. A la base, c'est Jean-Jérôme qui a tout composé sur le premier album... Après, on l'a retravaillé ensemble.

Jean-Jérôme : Il faut que je me motive en fait.

Antoine : Le batteur a composé un morceau qui est vraiment bon. En fait, on se donne le temps. Après, on va bien pouvoir choisir le studio dans lequel on va enregistrer. On souhaite travailler toujours avec le même label, mais prendre notre temps, peut-être sortir un truc dans deux ans et surpasser le premier album.

Jean-Jérôme : On est vraiment très satisfait du premier album, et on veut vraiment prendre notre temps pour sortir quelque chose d'au moins aussi bon.

Thomas: Au niveau dates, je crois qu'il y a un festival organisé par les Acteurs de l'Ombre ?

Jean-Jérôme : C'est le Black Metal is Rising, à Paris, au Glazart. 1er décembre.

Antoine: Avec Chaos Invocation en tête d'affiche, super groupe de black metal.

Thomas: J'en profite pour mettre à jour mes dates.

Jean-Jérôme : On a une dizaine de dates de prévues jusqu'à la fin de l'année.

Thomas: Et il y a des festivals de prévu ?

Jean-Jérôme : Oui, on va faire le Festival des Arts Bourrins, le Blood Wave Fest à St-Nazaire, donc le Black Metal is Rising. Il y a Suppuration au Blood Wave, Svart Crown aux Arts Bourrins. Et après, on voudrait faire une tournée avec le groupe bordelais The Great Old Ones, qui sont signés sur le même label que nous, qui font une sorte de black atmo excellent.

Thomas: Très très bon, je suis grand fan.

Antoine: En plus, c'est des mecs hyper-sympas, et on voulait faire une tournée avec eux, mais c'est tombé à l'eau, et en fait, on va quand même faire quelques dates avec eux, on va jouer à Toulouse, à Montpellier, à Bordeaux, Lille , Strasbourg... On a onze dates de prévues jusqu'à la fin de l'année pour l'instant.

Jean-Jérôme : On est encore en phase de promotion quand-même.

Thomas: Heureusement, sinon ça serait à la limite inquiétant ! (rires)
 


Pour conclure, la question con. Désolé. Pour vous, en un mot, Regarde les hommes tomber 2013, qu'est-ce que c'est ?

Jean-Jérôme  : Je dirais surprise.

Thomas: (Antoine étant en pleine hésitation) Je devrais appeler ça la question chiante plutôt que la question con.

Antoine : Non mais après, d'un point de vue personnel...

Jean-Jérôme : Un mot !

Thomas: Allez, deux.

Antoine : Non, "génial". On aurait jamais crû il y a un an.

Jean-Jérôme: Inattendu.

Antoine: Si tu veux, nous ça nous fait vraiment plaisir, pour terminer l'interview. C'est qu'on a travaillé ce truc là. On a bossé un an dans un local de répétition dans un jardin, à composer dans le noir à la bougie, à travailler les morceaux, sans chanteur.

Thomas: A la bougie ?

Antoine: C'était vraiment ça. On était dans le noir total, c'était génial. On bossait, on bossait. On a tout lancé, et ça s'est fait naturellement. C'est de la satisfaction même si maintenant, on est au stade zéro. On bosse encore, mais déjà c'est super. Et un grand merci encore une fois à Gérald du label les Acteurs des l'Ombre, et à toute l'équipe, Karen, etc.

Jean-Jérôme : C'est vraiment quelqu'un qui se plie en quatre. C'est un petit label, mais...

Antoine: Un passionné, il travaille comme cent.

Jean-Jérôme : Mais ce qu'il fait pour nous... On cessera jamais de le remercier. Si on est là, c'est grâce à lui.

Thomas: OK, à moins que vous ayez un truc à rajouter, on va conclure là-dessus.

Jean-Jérôme : Merci à vous, de vous intéresser à nous.

Thomas : Ah ben, ce qui est bon, on s'y intéresse !
(rires)

Thomas Orlanth


Merci à Thyrd pour l'enregistrement du son pendant l'interview !
Photos : © 2013 Thomas Orlanth  - site internet: www.thomasorlanth.com
Toute reproduction interdite sans autorisation écrite du photographe.

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