Toto au Zénith de Paris (28.05.2015)


Il avait été allègrement relayé dans les diverses radios, magazines, et couloirs du métro : difficile de rater le concert des gentils dinosaures du hard rock / AOR / prog le jeudi 28 mai au Zénith de Paris ! Les Californiens légendaires de Toto étaient de retour, à peine deux ans après leur dernier show parisien, et pour notre plus grand bonheur. Il est inutile de vous les présenter (en outre, en nos colonnes) tant le collectif et chacun de ses membres sont des autorités en leurs domaines respectifs, et des encyclopédies du rock à eux seuls.
 


C’est « Running Out Of Time » (premier titre du tout nouveau XIV, 2015) qui ouvre le spectacle avec un superbe tomber de rideau. Entrée en matière très prog, comme le groupe adore le faire depuis Falling In Between (2006), avec ses sons futuristes de claviers, le phrasé analogue de guitare et l’usage si caractéristique du Floyd de la Musicman de Luke. Premières excellentes surprises : la présence de Mr Lenny Castro (Sir Elton John, Eric Clapton, The Rolling Stones, Quincy Jones, The Bee Gees, mais aussi Oasis, Maroon 5, Slash, Lisa Marie Presley, Adèle ...) aux percussions, la beauté des chœurs de (presque) tous – véritable trademark du groupe, et enfin, pour les fans purs et durs du groupe, la présence de Mr David Hungate (Willie Nelson, Joe Cocker, Diana Ross, Grease …), bassiste originel du groupe (jusque l’album IV, puis à nouveau sur XIV, sur quatre titres), instigateur de tous les slides et plans alambiqués chez Toto, et « le bassiste préféré de Mike Porcaro » (selon les dires de Steve Lukather). Bond temporel pour le deuxième morceau à ouvrir le show, avec « I’ll Supply The Love », ère Bobby Kimball, repris avec classe par un Joseph Williams bien en-voix. Si ce n’est un secret pour personne que le fils du maestro John Williams avait perdu de sa voix à une certaine époque reculée (et dans une galaxie lointaine), force est de constater que le bougre est à présent meilleur que jamais. Depuis son guesting sur l’album Falling In Between en 2006, et les tournées qui ont suivi après (avec et sans Bobby Kimball), il est, à 54 ans, plus impressionnant que jamais. Un placement de voix magique, un timbre et des notes incomparables de contre-ténor, et son crunch (ou mini-growl) si emblématique : la voix de Simba (eh oui, dans The Lion King, c’est lui) est au top, et amène un excellent « Old School Feeling » à cette « Evening With Toto ».
 


Steve Lukather & David Hungate

On attendait avec impatience d’entendre « Burn » (XIV) portée en live : réminiscente à souhait de l’identité sonore de Toto, idéologiquement également, on a l’impression de connaître cette chanson depuis toujours. « Stranger In Town » (Isolation, 1984) est le grand moment où Mr David Paich s’aventure hors de son piano, micro en main (et la montre à Gousset-chapelet fabriquée par votre humble serviteur, portée avec grâce par Monsieur autour du cou), pour entonner un de leurs chefs d’œuvre 80’s. « I Won’t Hold You Back » (IV, 1982), l’instant émotion attendu par femmes & cœurs sensibles, tel que le présente Steve Lukather, est le premier vrai moment vocal du chanteur-guitariste héros. Présent avec retenue sur les chœurs des chansons précédentes, et atteint, visiblement, d’une calamité oculaire (Luke souffre d’une angine, doublée d’une allergie ce soir-là…), il n’en brille pas moins pour autant, et ravi l’assistance de ses interjections vocales et guitaristiques, comme à l’accoutumée. « Hold The Line » arrive très tôt dans le programme, et offre au public l’opportunité de chanter en chœur, pour continuer sur la lignée du tube précédent, mais dans un style plus dynamique et rock. Au tour de Steve Porcaro de prendre le micro (car, comme le dit si bien Joseph, dans notre interview : « tout le monde sait chanter dans ce groupe ! ») pour entamer « Takin’ It Back », mais avant, il en profite pour remercier le public parisien pour son soutien, et de ses kyrielles de lettres, messages, témoignages en l’honneur de Mike Porcaro, son grand frère, légendaire bassiste de Toto, décédé en mars dernier des suites de la terrible maladie de Charcot (Paix à son âme).

« Pamela », le tube extrait de The Seventh One (1988), un des deux albums estampillés « Joseph Williams », provoque la liesse populaire, et cartonne toujours autant - live. « Holy War », troisième extrait du nouvel album, s’intègre à merveille dans la setlist du soir, avant que « Caught In The Balance » (la préférée de Williams, selon ses propres dires, dans notre interview, toujours) rappelle l’ère Mindfields (1999) et offre le même dynamisme. Le ténor chante avec brio les parties de Bobby Kimball, et feinte avec une petite tierce en-dessous par moment, pour attraper les notes haut-perchées de ce dernier. Nouveau batteur de Toto, et remplaçant leur légendaire Simon Phillips, Shannon Forrest y fait notamment une démonstration en puissance. Privilégiant un jeu peut-être un poil plus feutré que ses légendaires prédécesseurs, Forrest s’inscrit dans la juste lignée de ses comparses : musicien de session prolifique et respecté, originaire de Nashville (le berceau de la country), ayant officié pour des Boz Scaggs, Kenny Rogers, Willie Nelson, Michael McDonald, etc ... quand même. Certains lui reprocheront son manque de fantaisie, ce soir-là. Dur dur, que de remplacer l'inoubliable Jeff Porcaro, puis le devenu culte Simon Phillips... Tâche ingrâte, même.

Apparemment jamais rejouée en live depuis 1990, et à la souvenance de Luke, en ces mêmes lieux précisément (le Zénith) : « Without Your Love » (Fahrenheit, 1986) enivre avec son feeling bluesy et romantique, avant que le groupe ne reparte sur « Orphan », quatrième tube extrait de XIV. « I was born in the lost-and-found, an orphan raised in the underground … » ; nous sommes tous à la fois orphelins et jamais seuls au monde, et nombreux sont ceux qui s’identifieront bien à cela. Très agréable surprise, « The Road Goes On », extraite du génial Tambu (1994), se voit dédiée ce soir à tous nos frères défunts. Luke y empoigne la guitare acoustique (avec un son incroyablement chaud et lumineux), puis la guitare électrique pour le solo. Magnifique démonstration de cohésion vocale entre Luke, Joseph, David, et puis Mabvuto Carpenter et Jenny Douglas McRae (LA merveilleuse Jenny de Tambu, précisément).

 

Joseph Williams & Steve Lukather

Mr Paich reprend le micro sur « Great Expectations », le morceau qu’il a composé pour XIV, et réconforte l’audience de sa voix de basse. « Rosanna » (IV) vient sonner le glas, et l’on sait que la fin est désormais proche. En guise de rappel, un très bel interlude aux accents celtiques (« The Muse ») introduit une rumeur de voix avec l'écho de Joseph, laissant murmurer « do you love me ? », pour enchaîner sur un « White Sister » (Hydra, 1979) tout en énergie. « Africa » (IV) entamée par David Paich et reprise progressivement par toutes les voix présentes sur scène, offre au Zénith une dernière danse. Irréfutablement modernes, les tubes de Toto ne restent pas bloqués dans les 80’s, comme (malheureusement) beaucoup de groupes, mais sonnent toujours autant d’actualité et font chanter petits & plus grands.

Si leurs ventes de disques se seront montrées inégales et ciselées au fil des décennies, la qualité de la production artistique du groupe n’aura, elle, jamais fléchi, et aura toujours affiché le même standard d’excellence. La force du groupe réside dans sa capacité à offrir des shows d’envergure, avec un line-up toujours différent (car Toto, c’est davantage un collectif, finalement) donc intéressant, pertinent, et qui permet une exploration toujours plus dense, riche, et nuancée du répertoire ; mais également dans l'incursion de tous ses membres dans les productions discographiques de leurs confrères : intemporels, rôdés, c'est eux qui ont, bien souvent, lancé la tendance - qu'on se le dise.

Une prestation toujours à la hauteur, de la part de nos pères à tous dans la musique ; avec un jeu de lumière un peu moins en grande pompe que sur les tournées précédentes, mais une setlist et des interprétations fabuleuses de la part de tous, qui mettront des étoiles plein les yeux ! Toto, en 2015 comme à toute époque : c'est résolument la très grande classe.
 

Steve Porcaro

Setlist :

1. Running Out Of Time
2. I’ll Supply The Love
3. Burn
4. Stranger In Town
5. I Won’t Hold You Back
6. Hold The Line
7. Takin’ It Back
8. Pamela
9. Holy War
10. Caught In The Balance
11. Without Your Love
12. Orphan
13. The Road Goes On
14. Great Expectations
15. Rosanna
16. The Muse
17. White Sister
18. Africa

Show dédié à la mémoire de Jeff & Mike Porcaro, et Fergie Fredriksen

Photographies de : Marjorie Coulin

www.marjoriecoulin.com

Merci à Elodie de H.I.M. Media & Veryshow.

 

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