Refused – Freedom

"Après George Miller qui a donné une leçon de mise en scène à tous les Michael Bay du monde avec son Mad Max : Fury Road, Refused revient mettre un bon coup de pied au cul d'une scène qui oublie parfois ses fondamentaux, au point de tomber dans l'autocensure."

Refused n'a jamais rien fait comme les autres, ce qui lui a par ailleurs valu d'être reconnu comme un groupe très influent du punk-hardcore, même si cette reconnaissance est surtout venue à titre posthume. Le groupe s'est en effet séparé une première fois en 1998, après 3 albums et un paquet d'EP. Pourtant, le combo ne manquait pas d'arguments : refus systématique des rythmes binaires (ce qui reste rare dans ce genre), riffs enragés et paroles à l'avenant, doublées d'un véritable engagement des membres, notamment en faveur des droits des animaux. Peut-être en avance sur son temps, Refused ne connaît qu'une reconnaissance limitée et finit par se séparer après un 3e album aussi ambitieux qu'incompris.

A force que des groupes les citent comme une influence majeure, la demande augmente, et le groupe se reforme en 2012 pour faire une tournée des festivals qui leur permet de réaliser à quel point leur côte de popularité a monté. Ce qui devait n'être qu'un one shot aboutit donc à l'enregistrement d'un nouvel album, enregistré en toute discrétion et sorti au mois de juin dernier.


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Les expérimentations jazzy de The Shape of punk to come (1998) ont été globalement remisées au placard, on retrouve donc un Refused plus classique. On peut le déplorer, mais le groupe profite bien de l'expérience acquise pour ne pas proposer une simple redite. Ce qui frappe d'emblée, c'est que les musiciens n'ont rien perdu de leur hargne, de leur envie de tout bouffer et de faire mal. Le premier extrait dévoilé, "Elektra", mettait les points sur les "i" : riffs ultra corrosifs, chant en équilibre sur une scie sauteuse, des rythmiques qui répugnent à la facilité mais n'oublient jamais le groove... La bonne nouvelle, c'est que Refused se permet tout. Revenir à une musique moins expérimentale, oui, mais envoyer des arrangements que personne n'attendrait d'un groupe de ce style ("366"), why not ?

Refused n'a jamais fait partie de ces groupes qui brandissent leur incapacité à jouer comme une garantie de leur authenticité. Les mecs n'ont pas besoin de ça, ils vivent leur engagement Straigth Edge au quotidien et n'ont aucune raison valable de ne pas utiliser leurs capacités musicales pour écrire de vrais bons morceaux. On se retrouve donc avec un album tout à fait moderne ("Servants of death") et varié (il faut écouter la lente mélopée de "Useless Europeans", qui conclut l'album), qui peut sans problème tenir la comparaison face à tous les The Bronx du monde.

 

Le groupe n'a par ailleurs rien perdu de son mordant contestataire, comme le démontre l'excellent "Françafrique", particulièrement d'actualité alors que les scandales qui ont récemment touché des soldats de l'armée française en Centrafrique (accusés de viol) sont gentiment étouffés via une enquête bidon qui ne vise pas tant à déterminer ce qu'il s'est passé que d'établir s'il y a eu des "dysfonctionnements dans la chaîne de commande". Le morceau est aussi violent qu'implacable avec ses "exterminate the brutes" répétés à l'envie. Mais encore une fois, Refused n'oublie jamais l'aspect musical et propose un vrai groove, réhaussé en fin de morceau de cuivres bienvenus. 

Ce groove, qui lorgne sur l'agressivité globale de la galette, et l'absence d'expérimentations particulières pourraenit bien décevoir quelque peu les aficionados du groupe. C'est compréhensible, mais ce serait aussi faire abstraction qu'en à peine plus de 40 minutes, Refused fait preuve d'une rage aussi intense qu'au service de sa musicalité pour un album complet qui sait varier les plaisirs, soit des qualités que l'on peine à retrouver dans l'actuelle scène punk / hardcore. Comme quoi les vieux lions ont encore de sacrés reste. Après George Miller qui a donné une leçon de mise en scène à tous les Michael Bay du monde avec son Mad Max : Fury Road, Refused revient mettre un bon coup de pied au cul d'une scène qui oublie parfois ses fondamentaux, au point de tomber dans l'autocensure. Une preuve de plus que le punk hardcore a de beaux jours devant lui, pour peu que les musiciens fassent un effort.

 

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NOTE DE L'AUTEUR : 8 / 10



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