Keith Richards – Crosseyed Heart

Vendredi 18 septembre 2015, fin d'après-midi... L'impatience me gagne.… Demain matin, il sera temps de me ruer sur la FNAC la plus proche pour aller chercher le "précieux". Yes, Crosseyed Heart, le nouveau Keith Richards sort demain. Troisième effort solo après plus de vingt ans. Bon ? Pas bon ? Je m'en fiche, je suis fan. De toute façon, même si le truc s’avère être d'une piètre qualité, j’irai quand même l’acheter demain. Les Stones et Keith en particulier, ça s’achète pour la collection, par respect pour l’œuvre accomplie… Qui a dit pour payer la maison de retraite ???

Samedi 19 septembre 2015 à 10h28. Me voila de retour à la maison. La platine avale de CD de Crosseyed Heart. C'est parti... On l'écoute ensemble ?

"Crosseyed Heart" ouvre l’album sur un vieux blues façon Robert Johnson. Et là, le fan inconditionnel des Stones que je suis a déjà perdu toute objectivité. La voix de Keith, définissable entre mille, pas forcement par sa qualité, reconnaissons le, fait frissonner les esgourdes. On revoit les grands moment des désormais immuables deux morceaux de Keith chantés en plein milieu d’un set stonien. On pense aussi à "Love In Vain" que les Glimmer Twins affectionnent particulièrement.

Pour le fan des Stones, la magie Keith opère. Après ça "Heartstopper" fait ressortir les guitares électriques, les riffs "richardsiens", on sait à qui on a affaire. Pas question d’originalité ici. Keith se fait plaisir et c’est communicatif.

"Amnesia" permet à Keith de balancer ses riffs sur lesquels il pose sa voix mixée très en avant. Certainement une manière de conjurer le syndrome du timide caché derrière l’exubérant Jagger pendant la plus grande partie de sa carrière.

"Robbed Blind" se pose comme la première ballade de l’album. On sait que Keith raffole de ces compos là, qu’il affectionne ces titres limite jazzy qu’il peu jouer avec des jolies jeunes filles comme Norah Jones lorsqu’il reprend "Nearness Of You" par exemple. Il aime ça, et nous aussi on aime ça. Le vieux pirate capable de devenir un être sensible… En plus, sa voix rocailleuse fait merveille et contraste avec la subtilité des compositions. Notez que le fan des Stones arrivera à qualifier la voix de Keith avec des superlatifs inversement proportionnels à ceux qu’un non initié utiliserait mais qu’importe… Si t’es pas fan des Stones, tu vas pas te faire chier a écouter un album de Keith Richards...

"Trouble", premier single, déjà disponible depuis quelques semaines, se pose comme un possible morceau des Stones. Ca plaisait pas à Mick ? Peut-être...  A moins que ce vieux brigand de Keith ait voulu se le garder sous le coude ? On n’en saura jamais rien mais en tout ça le morceau est un beau porte parole de ce que Keith est encore capable de pondre…

"Love Overdue" avec son intro à cuivres et sa rythmique tendance reggae nous rappelle que Keith a pas mal travaillé du coté de la Jamaïque avec les Wingless Angels. On a donc une ballade reggae avec une section cuivre qui ne laisse pas sa part au chien.

"Nothing On Me", comme "Trouble", laisse le vieux pirate s’exprimer sur un riff dont il a  le secret. Le message est simple et efficace. Mais on se laisse porter par les gimmicks de gratte. On se laisse souvent guider vers des références stoniennes. Le complétiste entendra ici ou là les cinq notes d’intro du solo de "Midnight Rambler" à Forth Worth pendant la tournée 72 ou se remémorera une des innombrables perles gravées sur vinyle, souvent bootleg… Car le fan de Keith Richards est un fidèle, un irréductible et celui là particulièrement prendra son pied à l’écoute de ce Crosseyed Heart.

"Suspicious" est un de ces titres mid tempo, certainement pas un rock mais pas une ballade bonjovienne non plus.

"Blues In The Morning" se pose comme un blues (étonnant) mais un blues trash tendance rock. Ca sonne presque comme chez les vieux bluesman du delta. Au début, on pense a des gars comme RL Burnside, puis après ça lorgne vers des trucs comme le rock des pionniers. Moi j’ai pensé à "Whole Lotta Shakin' Goin' On". Les solos couinent et groovent à souhait. Les fans encenseront le titre, les détracteurs le qualifieront d’énième jam des Stones ou de chute de studio remise au gout du jour par une production intelligente.

"Something For Nothing" fait le boulot façon "Gimme Shelter" avec ses chœurs féminins qui donnent une profondeur au morceau. Bien sur, on ne retrouve pas l’urgence du premier mais une ambiance s’installe et on se laisse prendre au jeu sans rechigner.

"Illusion" est la deuxième « grosse» ballade de Crosseyed Heart. Keith y invite une charmante demoiselle qui pousse la chansonnette en duo avec lui. Renseignement pris, il me semble bien reconnaitre Norah Jones avec qui je l’ai déjà vu sublimer le standard "Nearness Of You". Apparemment, le vieux pirates aime s’entourer des belles chanteuses… Et dans un registre jazzy, cette "Illusion" fonctionne.

Keith Richards Crosseyed Heart

En cette fin d’album, la ballade est reine. En voila une troisième. "Just A Gift" ! Keith descend souvent dans les graves avec sa voix fantomatique puis monte dans les aigus sur le refrain toujours à  la limite de la justesse. Mais qu’il est bon d’entendre ce petit tremolo dans la voix du vieil homme indestructible qui a fêté ses 71 balais.

Et hop, une petite incursion dans la country avec "Goodnight Irene" de Lead Belly. La gratte acoustique fait merveille. Certes, vocalement les parties de  Keith ne sont pas des merveilles techniques mais au niveau de l’interprétation, il se dégage un feeling indescriptible faisant que l’on pardonne toutes les imperfections au vieux pirate. Et c’est bien là, toute sa force. Techniquement beaucoup sont capable de jouer ces morceaux mais arriver à leur donner vie est une autre paire de manche. Keith a-t-il passé avec pacte avec le diable tout comme son ainé Robert Johnson, qui sait ? Une telle longévité et un tel talent, c’est pas naturel… il ya forcement une once de surnaturel là dedans ? Keith est-il un extra terrestre venu  évangéliser la planète rock ‘n roll (certainement arrivé dans le même wagon qu’un certains Lemmy Kilmister) ? En tout cas, ce "Goodnight Irene" m’a emmené loin, pas vrai ?

Et après, on s'envoie un "Substancial Damage" qui semble dans la même lignée que des trucs comme "Anybody Seen My Baby ?". On y voit Keith dans un registre bien différent. Peut-être une chute de la période Emotional Rescue ? Puis une partie de slide ramène l’auditeur vers des valeurs blues. Keith arrive encore à surprendre. Hé hé, il ya encore plus d’un tour dans son sac, le vieux briscard.

Et devinez par quoi on fini ? Ben ouais, une petite dernière ballade. Keith en a plein son chapeau. Il suffit de lui laisser une gratte dix minutes et une bouteille et voila qu’il nous régurgite une chanson qui tient la route. C’est pas du "Angie", c’est beaucoup plus roots mais ça fait le boulot et ça finit plus que correctement l’écoute de ce "Crosseyed Heart"…

"Voila c’est fini" disait dans un de ses single le chanteur des Rolling Stones français, Jean-Louis Aubert. C’est l’heure du bilan. Alors que vaut finalement ce Crosseyed Heart ? C’est un album de Keith Richards. Le bonhomme y joue sincèrement ce qu’il aime. Il fait ce qu’il sait faire. Il a toujours envie de le faire. Ca se sent. On apprécie un album sympathique (for the devil, bien évidemment) qui part un peu dans tous les sens mais c’est pas a 70 balais qu’on va le canaliser, le vieux pirate, et c’est tant mieux.

Moi j’ai aimé l’album mais encore une fois je ne suis pas objectif, je ne peux plus l’être. Les Rolling Stones et Keith représentent beaucoup de choses, sont associés à tout un tas de souvenir mythique. Et je sais que les gens comme moi sont nombreux. Donc si vous êtes fans des Stones, ce Crosseyed Heart doit figurer dans votre discographie. Pour les autres, essayez de lire une chronique plus objective ou faites vous une opinion par vous-même !

 

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NOTE DE L'AUTEUR : 8 / 10



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