The Divine Comedy – Foreverland

Neil Hannon, pince-sans-rire impénitent - comme tout bon britannique se doit de l’être, même depuis le Brexit - a attendu 6 ans depuis "Bang Goes the Knighthood", pour nous livrer ce onzième opus. Le leader de Divine Comedy est peut-être moins tendance que Stuart Staples des Tindersticks, son collègue songwriter - catégorie crooner baroqueux -, mais sa musique est infiniment plus légère. Et il affiche un perpétuel sourire en coin, là où l’angliche de Nottingham conserve un mine de banquier de la city, caché derrière sa moustache…

Celui qui s’était essayé il y a quinze ans avec "Regeneration" à sonner indie, est vite revenu dans ses albums suivants, aux cordes pléthoriques et autres cuivres rutilants qui caractérisent sa pop de chambre…  Si "Absent Friends" qui l’a suivi trois ans plus tard, convoquait les mannes de Steve Mc Queen et d’Oscar Wilde, Hannon fait ici dans l’impératrice et l’empereur, respectivement la grande Catherine de Russie et notre petit Napoléon national. C’est lui qui ouvre le bal, où du moins par procuration, puisque il est question d’un complexe dont souffre sans nul doute un certain candidat à la future élection présidentielle… Une des ébauches de "Napoleon complex" - parmi la douzaine réalisée par Neil-the-perfectionnist - traîne sur le net. Pas d’arrangements savamment orchestrés, ni de chœurs féminins susurrant de sensuels Napole-oleon ; la version finale a vraiment gagné en puissance. On regrettera néanmoins un vers fort savoureux qui est passé à l’as : "Who'd make Margaret Thatcher look like Mary Magdalene"… Not so politically correct, dear Mister Hannon ? Les bruits de navires et le cri des mouettes qui concluent le morceau et évoquent au passage le dernier voyage à Sainte-Hélène, sont une "subtile transition", n'est-il-pas… Une parfaite introduction à "Foreverland", balade irlandaise aux faux-airs de chanson de marins.

La seconde famous personality de l'album est donc "Catherine the Great", un hommage qu’il présente comme "le tube de l’été le plus historiquement inexact" et un choix de casting qui peut également être perçu comme une private joke toute personnelle à l'intention de sa compagne, la chanteuse Cathy Davey. La débauche de cuivres, le clavecin - omniprésent dans les compositions du maestro - et les choeurs plus qu'orthodoxes peuvent apparaître comme pompiers mais on est dans son sujet ou on ne l'est pas, que diable ! Le clip typiquement hannonien - second degré et auto-dérision oblige donc - voit l'actrice Elina Lowensohn, camper une hiératique souveraine, tout à la fois frivole et éthérée, pour laquelle soupire notre héros déguisé en hussard amoureux…

The divine comedy, Neil Hannon, nouvel album, orchestral pop

"Funny peculiar"qui lui succède, est un ravissant duo so romantic, amoureusement interprété avec Cathy Davey ; "you’re the one for me" lui susurre-t-il sur fonds de violons tout sauf sirupeux et d'ensorcelants sifflements à la Burt Bacharach… Ne reculant devant aucun anachronisme, le dandy irlandais ose avec "The pact" une valse où l'accordéon piaffe à faire tourner la tête à Edith. Le clavecin - et les cordes - ont encore la part belle sur le somptueux "To the rescue" et la voix de Hannon fait songer à celle de Bowie ; pas de hasard, il a récemment repris avec brio "Station to station" pour la BBC. Quant à "How Can You Leave Me On My Own", je défie quiconque de résister à claquer des doigts - en rythme si possible - ou d’exploser de rire - avec une distinction toute britannique ou pas - à la vision du clip où Neil Hannon fait le pitre déguisé en Napoléon.

"I Joined the Foreign Legion (To Forget)" se paye le luxe de jouer les ritournelles des années 30, époque où le légionnaire sentait encore le sable chaud et non le vieux bouc militaire. Fallait oser tout de même, non ? "My happy place" qui conte l'histoire d'un gars manifestement plus à l'aise dans son monde intérieur qu'avec ses semblables, file paradoxalement la banane avec son piano à la Elton John - période "Goodbye yellow brickroad", pas quand il soufflait sa bougie à Lady Didi - son banjo et sa cuica brésilienne. Rythmiques ensoleillées et colorées toujours avec l'orientaliste "A desperate man", récit d'une fuite éperdue. Les arrangements, tout bonnement grandioses, seraient dignes d'illustrer une rencontre entre James Bond et Lawrence d’Arabie, à l'heure du thé !

"Other People" complainte commencée a cappella et vite rattrapée manu militari par les cordes, se termine par des blah-blah-blah pour le moins surprenants. La raison invoquée sans vergogne aucune par Hannon ? Plus d'inspiration. Quand on vous dit qu'il ose tout ! Et c'est "The one who’s love you" qui ferme le ban sur une note primesautière ; la faute en revient essentiellement à un banjo badin qui se tire la part du lion… Surchargée d'anecdotes, voire surannée "l’orchestral pop"de Neil Hannon ? Sans nul doute baroque - d'aucuns diraient même rococo tant ça brille - mais assurément intemporelle et surtout un souverrain remède contre la morosité ambiante !

Setlist
1.  "Napoleon Complex"
2.  "Foreverland"
3.  "Catherine the Great"
4.  "Funny Peculiar"
5.  "The Pact"
6.  "To the Rescue"
7.  "How Can You Leave Me On My Own"
8.  "I Joined the Foreign Legion (To Forget)"
9.  "My Happy Place"
10.  "A Desperate Man"
11.  "Other People"
12.  "The One Who Loves You"
 

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NOTE DE L'AUTEUR : 9 / 10



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