Anathema – Distant Satellites

Que faire après avoir sorti un chef d'oeuvre ? En sortir un deuxième ? Plus facile à dire qu'à faire. Après avoir atteint des sommets sur Weather Systems, on se demandait ce qu'Anathema allait bien pouvoir sortir de sa besace pour nous emballer à nouveau. Difficile d'enchaîner après un tel coup de maître, même si le groupe anglais semble en apesanteur. Complètement libérés, ayant trouvé avec le producteur Christer-André Céderberg la personne idéale pour les aider à apporter la cerise sur le gâteau, Anathema peut sembler être touché par la grâce, reste que la chute vertigineuse est un risque toujours présent. Vinnie Cavanagh nous avait prévenus lors de notre entretien il y a deux ans : après nous avoir sorti un nouveau couple de faux jumeaux avec We're here because we're here puis Weather systems (le premier étant bien sûr Alternative 4 / Judgement), le groupe allait se diriger vers de nouveaux horizons et tenter autre chose. Le souci de ne pas se répéter semble en effet primordial pour la Cavanagh corporation, qui revient donc le 6 juin prochain avec Distant Satellites.
 

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De prime abord, le changement n'est pas particulièrement voyant : il faut dire que commencer par deux titres qui n'en font qu'un ("The Lost Song"), et qui suivent exactement le même schéma que "Untouchables" sur l'album précédent, n'est pas la meilleure façon de mettre en avant une volonté de se démarquer. Pourtant, la tonalité générale est bien plus sombre, plus mélancolique. En fait de changement brutal, le diptyque fait office de transition en douceur vers un Anathema qui s'appuie sur ses nouvelles capacités d'écriture et d'arrangement pour revenir à des mélodies plus typiques de ce qu'il a pu proposer par le passé tout en les amenant dans une nouvelle dimension. Car cette qualité d'écriture-là leur permet d'aller bien plus loin que tout ce qu'ils ont pu faire par le passé. Les moments "chair de poule" ne manquent pas, à l'image du final de "Dust (Dark is descending)" et surtout de la magnifique ballade "Ariel". Le morceau a beau être simple, le groupe est passé maître dans l'art de laisser respirer sa musique, de la laisser évoluer naturellement, ce qui nous donne un titre absolument majestueux, délicat mais qui s'impose sans forcer à qui fera l'effort d'écouter.

Les nostalgiques des anciens albums ne seront pas forcément ravis pour autant : encore une fois, Anathema ne revient pas en arrière. La façon d'écrire des musiciens a totalement changé et il est inutile d'espérer un Judgement (1999) Part 2. Si en revanche vous avez apprécié l'évolution des anglais mais regrettiez un peu les ambiances plus romantico-mélancoliques de leur première partie de carrière, Distant Satellites est fait pour vous. Le morceau "Anathema", avec son ambiance à couper au couteau et son long solo de guitare final, suffira à vous en convaincre : il s'agit bien du groupe qui a écrit Alternative 4, qui a grandi et évolué, mais qui au fond est toujours le même.

Tout juste regrettera-ton un peu ce "The Lost song part 3" en milieu d'album, pas mauvais en soi, mais moins inspiré et qui démontre les limites de John Douglas à la batterie. S'il est indéniablement une pièce maîtresse du groupe en ce qui concerne la composition (d'un point de vue créatif, le groupe c'est Danny/Vinnie/John Douglas et leur producteur), le batteur n'a jamais été un excellent technicien et ressort encore et encore le même rythme syncopé, qui commence à être redondant. A croire que quand il s'agit d'accéléer, l'homme ne sait pas quoi faire d'autre ! Le titre manque d'une progression rythmique plus ambitieuse pour véritablement s'imposer et, sans être déplaisant (son efficacité explique sans doute pourquoi il a été retenu en single), marque le seul petit coup d'arrêt d'un album de très très haute tenue.

 

Le single et moins bon titre de l'album est le seul actuellement disponible en intégralité.
Ne vous y fiez pas !


Car si Anathema enchante en revenant à une tonalité qu'il maîtrise sur le bout des cordes, les 4 derniers titres de l'album se montrent bien plus surprenants. Même si les anglais ont déjà un peu expérimenté ce genre de choses (sur A Natural Disaster notamment), voilà qu'une grosse boîte à rythme débarque, avant qu'une guitare distordue ne s'en mêle, le tout partant complètement en cacahouète dans un final apocalyptique pour 3 minutes de pur bonheur qui relèvent bien la sauce après toutes ces émotions ! Un court instrumental plus tard, Anathema ressort la boîte à rythmes, cette fois-ci de façon plus mesurée, pour nous servir son morceau-titre, un petit chef d'oeuvre qu'on vous laisse découvrir, et un dernier morceau plus ouvert et lumineux. Les anglais ont beau dire qu'ils n'écoutent pas trop les groupes récents, ils doivent bien garder une oreille ouverte par ci par là et laissent ici s'exprimer leur amour des bandes originales, du Trip-hop et d'on ne sait trop quoi encore. Audace payante, car ce final est aussi surprenant que réussi.

Anathema n'a donc pas fini de nous surprendre, avec un album qui tient autant du (faux) retour aux sources qu'il ouvre de nouvelles perspectives pour l'avenir. Avec Distant Satellites, le groupe se sort brillamment du piège qui consiste à survire à son propre chef d'oeuvre et propose un album presque aussi bon, différent, qui montre un groupe fier de son passé, heureux de vivre le présent et résolument tourné vers l'avenir. Cette période de grâce ne sera pas éternelle, mais au jour d'aujourd'hui, et depuis qu'ils sont revenus de leur break discographique, tous les voyants sont plus que jamais au vert, et on a du mal à voir ce qui pourrait les arrêter.
 

8,5/10, Seul le single faiblard empêchant l'album de monter à 9.

 

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NOTE DE L'AUTEUR : 8 / 10



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