Mademoiselle K

Mademoiselle K a eu une année mouvementée, puisqu'afin d'imposer son envie de chanter en anglais, elle a dû affronter le véto de sa maison de disque, qui comme ses consoeurs françaises flippent dès qu'un artiste français s'éloigne de la langue de molière (ce qui en général signifie moins d'exposition dans les radios FM). Après s'être faite virer, la miss a donc monté sa propre structure, a proposé un premier extrait ("Glory", dont le clip se trouve plus bas) et s'apprête à revenir avec un nouvel album en janvier 2015, qu'elle va commencer à présenter lors d'une première tournée des clubs pas plus tard que ce mois-ci. Notre amie Flora Doin nous a généreusement proposé de partager l'entretien qu'elle a pu avoir avec elle, lors de son concert du 4 octobre dernier à la MJC Picaud à Cannes. Merci à elle ! 
 


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Bonjour Katerine, avant de parler de ton nouvel album, je voudrais te proposer un petit jeu...

Mademoiselle K : ah c'est cool ça, c'est bien les jeux ! Voilà un truc ludique !

Dans tes précédentes compos, il y a certains mots ou thèmes qui reviennent régulièrement. Sans trop réfléchir, peux-tu nous dire ce qu'ils t'évoquent ?

• Tête ? Bordel
• Noir ? C'est noir
• Vent ? J'aime
• Peur ? Tout le temps
• Vieux ? Pas envie
• Seul ? Flippant
• Parents ? J'évite...
• Ombre ? Peur
• Ventre ? J'allais dire « douleurs », mais ça dépend des fois... Je me suis pas mal réconfortée depuis avec mon ventre, c'est toujours le siège de beaucoup de choses donc on va dire : contradictoire.
• Connerie ? Humaine
• Infini ? Espace
• Trembler ? Sensibilité
• Terre ? Mer
• Fringues ? Peau
• Mal ? Femelle, mais ça doit pas être le même « mal/mâle », tant mieux, je trouve ça drôle.
• Nuit ? Calme
• Doute ? Permanent
• Lumière ? Attirance
• Jouer ? Toujours !

Merci ! Une page se tourne puisque ton prochain album sera en anglais. Peux-tu nous dire ce qui a influencé ce choix ?

Deux choses. A chaque fois, ce qui me guide, c'est le désir. Là il y avait vraiment un désir d'anglais. Et… une volonté de rupture. Plus radicale que précédemment. J'ai fait trois albums avec la même équipe, les mêmes musiciens puis je suis partie trois mois à New York. Tout le monde m'a demandé si je partais là bas pour faire de la musique mais non, surtout pas, j'y suis allée pour m'aérer la gueule. Bon je suis quand-même revenue avec une basse...

Peu de temps après, j'avais un concert à Paris et j'avais très envie de jouer avec un autre batteur dont Peter, mon guitariste, m'avait beaucoup parlé. Là j'ai senti le vent neuf souffler. Je me suis séparée de David. Puis de Pilou parce qu'à trois finalement c'était plus honnête. Ça correspondait plus à la démarche.

A partir de là, je suis allée au bout de cette démarche. Je voulais écrire en anglais malgré les menaces de ma maison de disques. Je l'ai fait. Ils m'ont virée. Donc j'ai monté ma boîte (Kravache) pour pouvoir me produire, je suis en distribution avec « Believe » et l'album va sortir là, en janvier.

J'ai aussi un nouveau manager qui est super, c'est lui qui m'a poussée en me disant « reste en trio, il y a un truc brut à nouveau, c'est vachement bien »... Moi j'avais peur, je chiais dans mon froc parce que le trio si tu pètes une corde ben tu pètes une corde, il y a quelque chose de beaucoup plus dangereux, il n'y a pas une autre béquille quelque part comme quand tu es à quatre...

Et donc là, il n'y aura plus que toi à la guitare ?

Non, justement, on alterne basse/guitare avec Peter. C'est marrant, sur cette tournée-là, on est un peu comme des bébés, ça m'a rappelé les débuts de « Ça me vexe », j'ai un peu le même trac mais vachement bien, assez bénéfique.


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Finalement ça n'a pas été trop difficile de changer complètement de structure, d'équipe ?

Non ça va, finalement quand tu es en difficulté, en fait tu te rends compte que tu es plus fort que ce que tu pensais et c'est important. Et puis la difficulté  c'est ce qui me fait me bouger le cul et aller plus dans quelque chose que je ne faisais peut-être pas. En plus, la dernière tournée c'était particulier parce qu'on n'était pas quatre mais cinq, avec un clavier en plus, on était trop. J'ai fini par me dire « pourquoi tous ces gens ? » parce que je pense qu'on s'est éloignés d'un essentiel, par rapport à ce que je propose musicalement. Et finalement, dans mon esthétique, là on est dans un truc qui me correspond plus.

Est-ce que ça été difficile de trouver un public pour du rock en français ?

Non au contraire, ça a été assez surprenant, j'ai eu assez vite un public très identifié et très large en fait, c'est ça qui m'a beaucoup surprise dès le début. J'ai vu des enfants de 9 ans, 8 ans, 6 ans même, avec le gros casque de chantier, j'étais presque choquée, je me dis que si j'étais parent, je ne sais pas si j'amènerais mes enfants à un concert de Mademoiselle K, alors que globalement y a que sur internet que je dis des choses obscènes (rire)... Non ça va, j'les collectionne pas non plus mais j'aime bien de temps à autre, c'est des trucs un peu marrants...

Bref j’ai aussi des gens de 50, 60 piges, je ne crois pas avoir eu de 70, je ne sais pas. C’est vrai que sur l'album « Jouer Dehors » j'ai eu plus de familles, sur cet album-là je pense que j'en aurai moins mais ce n'est pas grave, il y a des choses qui changent et c'est bien.

Alors justement, tu parlais d'internet et tu es très présente sur Facebook, c'est important pour toi ce contact avec tes fans via les réseaux sociaux ?

J'y suis venue vraiment progressivement mais oui, très important, encore plus là, quand t'as pas de maison de disques et que tu te retrouves, quelque part, seule. Là je suis mon propre boss. Puis ce sont les gens qui décident. Mais je n'écris pas pour leur faire plaisir, il y a un vrai dialogue sur Facebook, je dis mon truc et ils me suivent ou pas et bien sûr que j'aime qu'ils me disent quand ils sont contents ou non, et je l'entends. C’est un vrai échange.

J'ai aussi développé Twitter récemment, je suis encore en train de chercher la manière...

Instagram également, depuis peu parce que c'est l'occaz de s'exprimer d'une autre manière, j'aime bien les photos, j'aime bien les trucs un peu spé' et je trouve ça cool aussi des fois de s'exprimer par une photo plutôt que par des mots.

Ok. Donc là, prochain album, en anglais, enregistré à Londres, t'as changé de batteur, peux-tu nous en dire plus ?

Oui en fait ça fait deux ans que j'ai trouvé ce batteur-là, deux ans qu'on évolue sur ce projet, il s'appelle Colin Russell, il a joué sur Gaëtan Roussel, il joue sur beaucoup de trucs, il fait pas mal de sessions studio, il est vachement sollicité. Il a vraiment un truc ! Pas variét' pour un sou, une super énergie, il a un truc très fin, ce que j'aime beaucoup parce que je fais du rock mais pas du rock de brutas, il y a des intentions, musicalement j'aime toujours qu'il y ait des subtilités, des choses qui se passent et ce batteur-là a vraiment ça. Et il est petit ! Et je savais que mon prochain batteur le serait. Visiblement, les batteurs, il faut qu'ils soient plus petits que Peter et moi… (rire)

 

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Peux-tu nous dire de quelle façon vous avez enregistré cet album, façon live ou chaque piste séparément ?

Y a pas de règles. Souvent en live pour l'intention surtout, parce qu'au final quand t'écoutes les albums que tu kiffes, le plus important c'est l'émotion. Des fois on a refait des guitares, des basses, derrière. Sur certaines prises live on ne gardait que la batterie parce que le batteur est vraiment parfait et que Peter et moi on est beaucoup plus imparfaits. Surtout qu'on n'est pas bassistes depuis des années. Du coup, il y a une sensibilité très différente d'un bassiste traditionnel. C'est aussi ça qui était intéressant parce que tu abordes la chose, comme quelqu'un au début qui ne sait pas peindre il va essayer par un autre moyen d'atteindre ce qu'il a en tête.

En général, c'est la musique ou bien les mots qui te viennent en premier ?

Avec le recul, je pense que les bonnes chansons, il y a quand-même eu les mots avant. Pas tout le texte, loin de là mais les deux premières phrases ou parfois un bon début de texte. Quand il y a la musique c'est cool mais généralement ça n'amène pas aussi loin que quand ça a commencé par un texte.

Tu as commencé hier soir une nouvelle tournée avec des salles plus intimistes, est-ce que c'est une formule que tu apprécies particulièrement ?

C'est surtout parce que l'album n'est pas encore sorti et c'est aussi assez rock donc je trouve ça cool dans une config' à trois, salles de 300, c'est vraiment un rêve de sentir les gens là.

Après ça ne veut pas dire que je n'aime pas les grands plateaux, on en a fait deux/trois, l'hôtel de ville cet été, la Fnac Live, c'était super de se retrouver à trois justement sur un énorme plateau.
Je ne savais pas grand chose à la fin du 3ème album mais je savais vraiment que je voulais en revenir à quelque chose de très rock et très minimaliste et donc on y est.

Et pour cet album en anglais, vous envisagez déjà des dates à l'étranger ?

Ah bien sûr on voudrait, mais là ce n'est que le début, il n'est pas encore sorti, il est tout fraichement masterisé (la semaine dernière), on le prépare tout doucement, avec un clip pour le prochain single « Are you swimming ? » qu'on va mettre en ligne très prochainement, d'ici une semaine maximum donc on va commencer à y aller plus fort.


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Peux-tu nous parler des artistes qui t'ont influencée, en France comme à l'étranger ?

En France Gainsbourg, sans hésitation, plus que tous les autres quoi. J'aime bien Brel, j'aime bien la chanson, j'ai découvert Barbara récemment que je trouve super mais j'ai besoin de l'arrangement, de la batterie, de ce truc très pop, cet espèce de finesse, que ce soit très intimement lié entre les mots et la musique.

Dans les groupes anglais, Cure, j'aime beaucoup, je suis une grande fan. Radiohead, ça m'a suivie pendant toute mon adolescence, plus que Nirvana, bizarrement. Globalement mon équilibre est là : entre un Tom Yorke et un Kurt Cobain dans mes références, c'est à dire des mecs à fond dans ce qu'ils chantent, pas toujours juste mais on s'en fout en fait.

Sinon, il n'y a pas longtemps j'ai acheté un des premiers albums d'Elton John qui s'appelle « Goodbye Yellow Brick Road », faut qu't'écoutes hein parce que les derniers trucs de variété là, « Candle in the Wind », c'est cool mais 'faut écouter cet album-là, c'est de 1973, ça tue quoi, entre la soul et le glamrock. Mon influence c'est ça, ce truc dansant, ce truc très identifiable des artistes qui ont une vraie personnalité mais qui sont très populaires parce qu'ils ont fait de grandes chansons.

Et la musique qui passe en boucle sur les grosses radios nationales en ce moment, qu'en penses-tu ? Pas déçue qu'on entende toujours les mêmes choses, les mêmes artistes et pas un peu plus les indé qui ont des choses à dire ?

Ben je me dis que maintenant les gens écoutent aussi beaucoup sur internet. Les radios dont tu parles c'est en bagnole, quand on part quelque part.

Mais c'est drôle, justement là, il y a quelques jours dans Rising Star, une nana a repris « Jalouse », j'ai trouvé ça pas dégueu, bon elle en fait trop mais dans le genre « j'en fais trop » c'est pas dégueu. Honnêtement j'ai été assez surprise, j'ai fait « ouais, pourquoi pas ». Et on m'a demandé une autorisation : ils vont en faire un spot publicitaire sur RTL2, RFM, Nostalgie... absolument toutes les radios qui ont une énorme audience ! Je peux te dire que le jour où je rentre sur ces radios, c'est bon quoi, je ne crèverai plus la dalle.

Il y a un moment où la chanson elle n'est plus à toi et il y a des gens qui la reprennent et elle fait son chemin et c'est ça qui est vachement touchant pour moi.

Du côté de tes clips qui sont souvent très décalés, est-ce que tu laisses généralement carte blanche à ta maison de disque, à un réalisateur ou est-ce que tu drive tout ça aussi ?

Oh la la, les clips c'est compliqué. En gros je n'ai jamais été contente. Avec le recul les clips que j'adore toujours c'est « Jalouse » et « Maman XY » parce que c'était cool de ne pas être dessus, c'est que des fans et il y a vraiment un truc que j'aime beaucoup. Je n'aime pas les clips de « Jouer Dehors », je les trouve chiants. « Glory » j'aime beaucoup, c'est hyper convulsif, hyper punk, très bien.
Et là le prochain, très arty. Très spé. Pour une chanson qui ne l'est pas du tout, chanson « easy listening » comme on dit et j'aime bien ce contraste-là.

Pour finir, dis-nous... Qui est Mademoiselle K ?

Un être complètement contradictoire. Mais je pense que beaucoup de gens le sont...

Et qui est Katerine ?

(Long silence)
C'est personnel... (sourire)

Propos recueillis par Flora Doin

 

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