Didier Wampas – Interview à  l’Empreinte (Savigny) le 4 avril 2015

Du coté de Savigny, à l’Empreinte, on annonce un concert des Wampas ce soir. Pour moi l’occasion est belle d’aller poser quelques questions à Tony Truant, le gratteux, grand fan de rock devant l’eternel. Une fois l’interview calée pour un magazine spécialisé garage punk, la prod’ me propose de faire  d’une pierre deux coups et de m’entretenir avec Didier, le taulier des Wampas. En voici le résultat.

La Grosse Radio : Salut Didier, on vous catalogue toujours comme le mec qui bosse à la RATP. Qu’est ce que ça vous fait ?

Didier Wampas : Oui, oui. Ben t’y peux rien, c’est comme ça. Tu vois, au bout  d’un moment t’arrêtes de te battre contre ça. Les mecs posent toujours la même question mais c’est normal. Comme c’est atypique, les gens s’y intéressent…

L.G.R. : Là, c’est fini. Tu es à la retraire…

D.W. : Enfin. Et ce n’est pas plus mal.

L.G.R. : Bosser à la RATP, c’est un truc assumé… Ca complète l’image que tu véhicules en disant que les ventes tu t’en fous et que tu veux faire la musique que tu as envie de faire…

D. W. : Ben oui, Si tu veux faire du rock en France et qu’après tu veux en vivre, c’est un peu bizarre. Tu vois, à moins d’avoir une chance énorme, il va falloir que tu mettes un peu d’eau dans ton vin. Et même en mettant de l’eau dans ton vin, ça ne marche pas. Les groupes qui ont essayé de faire du rock un peu plus mou ont galéré. T’a plus les fans qui te suivent… Tu fais du rock parce que c’est le truc auquel tu crois. C’est ton rêve, tu le vis à fond ou pas.

L.G.R. : Pour moi, les Wampas c’est plutôt du punk et toi comme Tony Truant, le gratteux du groupe, vous définissez votre musique plutôt rock que punk…

D.W. : C’est vrai. Pourtant moi je viens de là, du punk. J’avais 15 ans en 77 et c’est ça qui m’a donné envie de faire de la musique au départ. A 15 ans, tu vois les Clash à  la télé, ca te scotche. Avant ça, j’y connaissais pas grand-chose au rock. Tu vas chez des potes qui écoutent Pink Floyd ou Led Zeppelin et tu te dis : « si c’est ça le rock, ca me plait pas ». Je viens quand même du punk. Je dis « rock » parce que j’écoute du rock ‘n’ roll. Tu remontes très vite. T’écoutes les Jam on te dit que ca ressemble au Who

L.G.R. : Tu es un gros fan de musique ?

D.W. : Ouais, j’en écoute tout le temps. Vraiment de tout. Au début, j’étais vraiment sectaire mais très vite, je me suis mis à écouter du rock. C’est ce qui me plait. Mais tu fais le tour assez vite. Au bout de deux ou trois ans, tu as écouté tout ce qui se fait dans le rock. Un jour au milieu des années 90, je me suis dit : « merde il y a aussi la musique classique et j’y connais rien ». La musique, c’est toute ma vie et il reste une partie de la musique à laquelle je ne comprends rien. Je me suis forcé à écouter plein de musique classique, à écouter France Musique toute la journée, à lire des bouquins, à aller à la discothèque. C’est juste un langage. Petit à petit, tu arrives à le comprendre. Aujourd’hui j’écoute du classique, du rock et même du jazz. Au début, je n’y comprenais rien mais à force, tu arrives à écouter… C’est bizarre, moi je suis arrivé à Hendrix par Coltrane et pas le contraire. D’habitude c’est plutôt l’inverse. Hendrix ne me parlait pas du tout puis ; après avoir écouté Coltrane, j’ai compris sa musique.
 

Didier Wampas Live


L.G.R. : 15 ans en 77. Ca fait quoi quand on prend le punk en pleine tronche comme ça ?

D. W. : Moi je dis toujours que c’est une chance énorme. A 15 ans j’avais besoin de quelque chose. J’attendais quelque chose de la vie. Et quand un truc comme ça te tombe dessus, c’est énorme. Toutes les semaines t’as des 45 tours qui sortent et qui changent tout. Aujourd’hui, ils sont devenus cultes. Pendant deux ou trois ans jusqu’en 79, c’était comme ça. C’est vraiment une chance énorme. Ca m’a marqué. C’est des trucs qui sortaient à 100 ou mille exemplaires et qui sont aujourd’hui devenu « collector ». C’est pour ca qu’aujourd’hui le fait de vendre des disques, je m’en fous. Tu vois, moi j’y croyais en77 au rock ‘n’ roll. Je pensais que tous ces gens s’en foutait aussi, que tout le monde était pur.  Après tu te rends compte que ce n’est pas vrai mais moi j’ai continué à faire comme ça. Je rêve du rock ‘n’ roll comme d’un truc, grand beau, pur ou tout le monde se donne à fond tout les soirs, tout le monde y croit et moi je veux continuer à y croire, je veux faire vivre ce rêve.

L.G.R. : Les autres Wampas partagent-ils ton opinion ?

D. W. : Ben, un petit peu sinon ils ne seraient pas là. Ils ne sont pas aussi extrêmes que moi quand même. Les autres sont intermittents. Moi je ne l’ai jamais été et je ne le serai jamais. Je suis content de ne jamais l’avoir été. Quelque part, intermittent, c’est un peu incompatible avec le punk. J’en ai vu des groupes punks anarchistes comme ça mais je leur ai dit : « arrêtes-toi, ça rime à rien ». Quand tu es anarchiste, tu ne peux pas aller pleurer pour ton intermittence. Il faut un peu de logique. En tout cas, c’est ma façon de voir les choses. Pour moi le punk de 77 auquel je crois, c’est faire de la musique comme on veut, s’habiller comme on veut, on s’en fout… C’est ça pour moi la philosophie du punk. C’est la liberté totale. Le punk ce n’était pas pour moi «  no future », c’était plutôt le contraire : « dans le futur tout est possible ». Tu fais ce que tu veux. Ca, c’est comme jouer de la guitare. J’ai toujours joué de la guitare avec deux doigts et j’ai pas envie d’apprendre, je m’en branle. Ca ne veut rien dire après. Quand je suis sur scène, je fais mon malin et je peux parce que je continue à jouer de la guitare comme si j avais 14ans avec deux doigts. Putain, c’est ça qui est bien !!!

L.G.R. : Revenons sur le punk 77. Au rayon punk, Johnny Rotten a sorti il y a quelques mois une biographie. Tu en penses quoi ?

D.W. : J’ai le bouquin. Dans la première page, il dit qu’il est à Los Angeles… Ca m’a donné envie d’arrêter. Putain, il est à Los Angeles et bien d’accord. Ils ont vendu je sais pas combien de millions d’albums et il est à Los Angeles. Quelque part, ça me dérange. Par rapport à nous, les Sex Pistols ont eu la chance de pouvoir se trouver sur le marché américain. Quand nous on vend mille disques, eux en vendent 50 000.

L.G.R. : Tu as toujours la même envie après 30 ans de carrière ?

D.W. : Ben ouais. J’ai envie, j’ai besoin. Je crois que c’est important le rock ‘n’ roll. Qu’on peut faire quelque chose.  Quand tu vois le monde ou la France, tu vois qu’il y a des choses à faire. Alors, oui, il faut y aller.

L.G.R. : Peux-tu nous expliquer comment vous composez un morceau des Wampas ?

D.W. : Moi j’arrive avec une idée de chanson puis les autres y apportent leurs touches. Avant, quand il y a avait Marc dans le groupe on faisait ça a deux.  Quand Marc Police, le premier gratteux,est mort on a pris Philippe Almosnino (ex Dogs) qui joue super bien de la guitare et donc j’arrive avec mes morceaux puis on voit. Ca fonctionne comme ça.

L.G.R. : Y a-t-il eu pour les Wampas un avant et un après « Manu Chao », single qui vous valu après 20 ans de carrière une nomination pour le groupe révélation de l’année aux victoires de la musique en 2004 ?

D.W. : Pour notre travail, non. Après, on a été un peu plus connus. Mais les gens me prennent toujours pour un rigolo, ce n’est pas grave. Ca ne me dérange pas. Il faut avoir de l’humilité. Y a plein de groupes de rock dont le but est de faire la couv’ des Inrocks, moi j’en ai rien a foutre. Je m’en fous d’être dans les Inrocks ou Télérama. Avec les Wampas, on est « pas assez » nulle part. Pour les fanzines garage comme Dig It, on n’est pas assez punk, pour d’autres pas assez tranquille, on n’est pas assez nulle part… Finalement, je suis content de ne pouvoir rentrer dans aucune case. On a fait du psycho tout au début. J’en ai eu marre au bout d’un an de faire du psycho. Rien à foutre d’être enfermé dans une petite boite « psycho ». Moi je veux faire du rock, j’écoute plein de trucs que j’aime. Je veux tout mettre dans ma musique. Sur le deuxième album, on a fait des slows parce que j’en ai eu envie. Je m en fous. Le rock ‘n’ roll, c’est tellement large.
Quand on joue dans des festivals de punk, le public, ça bouge. Quand on joue après Exploited, on voit bien que le public devant nous n’est plus le même. Les gens adorent mettre les groupes dans des petites  boites avec des étiquettes. Le rock veut trop rentrer dans des petites chapelles. Ca va finir comme la musique classique et le baroque. T’auras toujours des gens qui feront du rock dans 300 ans, j’en suis persuadé, mais ils seront catalogués fichés, enfermés dans un style. C’est un truc que je refuse. Parfois je m’engueule avec des gens. Quand je vois dans Rock ‘n’ Folk, la rubrique sur les objets cultes du rock, je ne sui pas d’accord. Le rock ce n’est pas un truc qu’on met dans un musée.
Récemment, il y a quelqu’un qui m’a appelé pour écrire une biographie. Je lui ai dit : « non ». Je ne veux pas. Ca ne m’intéresse pas. Quand je serai mort, on fera ce qu’on veut. J’en ai rien à branler d’une biographie de moi. Pour moi, j’ai toujours 15 ans, rien n a changé. Le rock, c’est ma manière de m’exprimer. J’ai pas envie de faire autre chose. On m’a proposé mais j’en ai rien à branler de faire du cinéma. Le rock, c’est ce qui me permet de  m’exprimer le mieux. C’est comme ça que je peux vraiment dire des choses profondes. C’est comme ma langue natale. Si je parlais en anglais, ca ne me conviendrait pas. Pour le rock ‘n’ roll, c’est pareil, c’est naturel. Mais en vrai, je  m’en fous du rock ‘n’ roll. C’est bizarre à dire. Le rock est devenu tellement bizarre. Quand je vois Iggy Pop qui fait des pubs pour les galeries Lafayette avec son bonnet de père Noël.,.. Je dis : « non » ! Ca, je ne peux pas…

L.G.R. : En parlant de choses bizarres, tu es fan de Patrick Juvet...

D.W. : Quand j’étais petit, je n’avais pas de grand frère qui écoutait du rock… Je suis venu au rock ‘n’ roll par Johnny qui faisait des reprises d’Eddie Cochran ou d’Elvis ou des Rubettes. J’ai écouté un peu Bowie parc que « Jean Genie » passait à la radio. J’ai découvert le rock comme ça. Mais quand j’étais tout petit, vers 10 ans, j’étais fan de Patrick Juvet et de Mike Brant. Un des premiers trucs donc je me rappelle, c’est « Qui Saura ». J’avais 10 ans en 72 et cette musique, ça m’a fait quelque chose. La musique, ça te prend, ça te touche, tu ne peux pas renier ça. Sur le dernier disque, y a une chanson « Mars 78 » ou je parle de la mort de Claude François. C’est pareil.

L.G.R. : D’ailleurs, tu as repris « Le Téléphone Pleure » de Claude François avec Opium Du Peuple

D.W. : Oui. Au départ, je ne voulais pas parce que j’avais peur qu’ils se foutent de sa gueule mais ça va. La chanson est bien. Tu ne peux pas renier ce que tu as aimé ou alors tu peux mais ca sonne faux. J’y peux rien si j’ai grandi avec Il Etait Une Fois et tous ces trucs là.
 

Didier Wampas Patrick Juvet


L.G.R. : On vous sait très fan de cyclisme. Les morceaux comme « Jalabert » ou « Rimini » en sont la preuve dans des styles très différents. Y en aura –t- il un autre pour finir la trilogie ?

D.W. : Je suis fan de vélo et j’en fais le plus possible. Pour le troisième morceau, on verra. Je ne vais pas me forcer. C‘est comme pour « Chirac En Prison », on me demande quand je ferai « Sarkozy En Prison »... Mais non… Sinon, pour le vélo, ça fait longtemps que j’ai une chanson sur Virenque mais je n’arrive pas à la finir. Tu disais aussi que les morceaux étaient différents. Jalabert était vivant au moment de la chanson. (Il l’est toujours d’ailleurs). C’est marrant. J’ai hésité à la sortir. On était en studio et ce jour là il a gagné le championnat du monde de contre la montre. Ca a  été un signe. On a gardé la chanson. Les autres ne savaient pas qui c’était. Ils disaient c’est quoi ça ? On a eu depuis l’occasion d’en discuter avec Jalabert. Il était content. C’est un mec cool. J’ai eu l’opportunité de suivre le tour quelques fois. J’ai rencontré le manager de Virenque. Je m’éclate sur le Tour de France. Je l’ai fait avec la caravane publicitaire. C’était génial. Tu vois des trucs de fous. Je l’ai fait avec le pompier d’Aquarelle (une marque d’eau minérale qui a une énorme citerne publicitaire avec un faux pompier qui arrose les spectateurs au bord des routes durant les grosses chaleurs). Un truc de dingue. Je l’ai fait dans la montée de l’Alpe d’Huez et on a arrosé tout le monde. Il y a avait un flic à chaque carrefour et on les a tous arrosés au karcher. J’ai passé 300 flics au karcher dans la journée. Personne ne peut se vanter d’avoir fait ça de manière légale en plus. C’est le bonheur absolu. C’est le seul moment où tu peux faire ça. Ce jour là, Sarkozy était encore président et il est venu sur le Tour. J’ai espéré toute la journée qu’il passe a coté de la caravane mais, pas de bol, je ne l’ai pas vu. Ca aurait été trop beau. Sarkozy au karcher, ça aurait été l’aboutissement de ma carrière. J’adore l’ambiance du Tour. En plus comme je ne suis pas dans ce milieu, ça me fait plus rêver que jouer dans les festivals de rock où je sais comment ca se passe, où je connais les trucs. Je suis comme un môme à chaque fois. La première fois que j’y suis allé j’ai mangé avec Jalabert et Virenque. J’étais dans la peau d’un fan.

L.G.R. : Revenons à la musique. Quelles seront les prochaines activités musicales de Didier Wampas ? Ca sera avec les Wampas où un projet nouveau avec un autre groupe comme votre tournée avec Bikini Machine ?

D.W. : Je les adore, les Bikini Machine. C’est des mecs super. Leur disque est génial. On s’est rencontré par hasard. Avec les Wampas, on ne répétait plus trop et la maison de disque ma proposé de faire des maquettes à Los Angeles. On m’a proposé de faire un disque solo mais j’ai dit que ça ne m’intéressait pas. Mais bon, la maison de disque a payé, alors je n’ai pas discuté et j’y suis allé. On s’est retrouvés par hasard dans un garage. On a fait des morceaux. Et puis comme on a le même éclairagiste avec les Bikini, on a décidé de tourner ensemble. Ca a bien marché on s’est bien entendu.
Je fais aussi un autre groupe avec mes enfants et ma fiancée. C’est super de jouer avec ses mômes. On est parti au Cambodge deux semaines. On a joué là-bas. Le groupe s’appelle Sugar And Tiger. C’est moi qui fais les chansons. Ce n’est pas fondamentalement différents des autres groupes. Ce n’est pas moi qui chante c’est ma fiancée mais on est dans le même registre. Ce n’est pas du reggae, ni du trip hop.
 

Didier Wampas est le roi


Sur ces bonnes paroles, Didier nous quitte pour aller manger un morceau avant le concert du soir qu’il assurera avec la même envie que d’habitude. Bravo Didier, tu es le roi du rock ‘n roll comme l’ont scandé tes nombreux fans pendant toute la durée du concert.

 

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