Solsikk – Solsikk

La scène britannique de metal à voix féminine est en plein développement, avec des formations discrètes mais multiples qui n'hésitent pas à partager la scène ensemble, et ce malgré les différences stylistiques, la seule caractéristique commune de certaines d'entre elles étant souvent le sexe de la frontwoman. Et si on est curieux et qu'on aime faire des découvertes, que l'on désire se pencher sur tant de combo émergents lentement mais sûrement, alors on tombe sur de belles surprises, et l'amateur de nouveautés sera prié immédiatement d'aller se reporter sur Hanging Doll, Pythia, Nemhain ou encore Triaxis. Alors pourquoi une telle introduction ? Pour amener à parler d'une jeune formation qui s'est faite remarquée outre-Manche par son premier EP en 2009 du nom de Volatile Territory. Ce quatuor se nomme Solsikk.


Possédant déjà une certaine renommée locale, les quatre anglais veulent franchir le pas et prouver leur valeur au monde entier. Bien sûr, le fait que leur premier essai leur ai permis de sortir partiellement de l'ombre devrait être un indicateur d'un talent potentiel, mais peut-être la déception est possible avec un album. L'essai se doit, ainsi, d'être réussi. Le 2 Mai 2011 va donc sortir sur le label Femme Metal Records (comme son nom l'indique, spécialisé en death brutal) le premier brûlot des londoniens. Voici donc Solsikk, album éponyme donc, avec une pochette très psychédélique et plutôt éloignée de ce dont on est habitués. Impression assez déstabilisante...


...Qui se confirme lors de l'écoute. Avec Solsikk, on est plutôt loin des poncifs desquels nous sommes habitués dans le metal à voix féminine, et même dans le metal en général. Sans parler d'originalité ou de réinvention d'un style musical, les quatre musiciens possèdent pourtant un son assez particulier, une musique qui parfois semble totalement démente, sortir d'un autre monde, et autant dans les compositions peuplant le brûlot que dans la prestation vocale de Vykki Turner, un esprit complètement déjanté à la Pin-Up Went Down s'identifie, le combo partant dans des délires assez spéciaux mais qui restent malgré tout cohérents et créant un véritable squelette aux multiples pistes.


Et il sera assez difficile de reprocher aux anglais de faire dans la linéarité, les structures étant variées, sans tomber dans le metal progressif. Sur le genre, les britanniques se définiront plutôt entre le metal alternatif et le heavy. Les guitares ont parfois un air de System of a Down, le chant peut prendre des tournures à la Faith No More, mais les riffs denses et tranchants vous évoqueront parfois presque Mötorhead ou Judas Priest. Mélange certes plutôt improbable mais subtil et cohérent, l'impression de déconstruction assez présente sur le plan général n'allant en aucun cas perdre l'auditeur, mais la surprise, elle, est plutôt de mise.


Pour cette sensation étrange, ajoutez une vocaliste comme Vykki et là, vous voici dans un univers dément, presque l'asile. Les variations sont constantes, dans un même morceau souvent, la chanteuse est capable d'alterner les techniques et les tessitures à une rapidité assez folle, suivant ainsi la musique. « Volatile Territory » est probablement un exemple parfait de la démonstration vocale de la frontwoman, car outre les effets ajoutés, la demoiselle sait passer de la puissance à la fragilité, de l'énervement au calme, d'une voix bluesy à un chant rock pur, d'un chant plus haut perché à des growls bestiaux, tout y passe et avec un certain brio. Là encore, on pourra rapprocher une telle palette de certaines chanteuses françaises, Asphodel (Pin-Up Went Down) et Nehl Aëlin (Akphaezya) en premier lieu, même si le timbre de l'anglaise est plus cristallin.


Diversité, voilà le maitre mot qui se reflète lors de l'écoute des 10 pistes qui peuplent le monde schizophrène de Solsikk. Les instruments sont souvent tels des électrons libres, virevoltant dans tous les sens, ne se cantonnant qu'à une faible ligne conductrice et s'auto-gérant, avec des accélérations parfois brusques et soudaines, des instrumentations aussi surprenantes et inhabituelles que la charismatique vocaliste. Pouvant passer en un éclair de la lourdeur à un roulement de batterie rapide et furtif, suivi par une guitare qui passe par des solos sortis de nul part, la recette aurait pu être mal préparée si le professionnalisme des musiciens n'était pas présent.


Manque de chance pour ceux qui aiment les écueils, le quatuor n'ira dans aucune conformité tout au long de la traversée. Le seul inconvénient, c'est que cette qualité de privilégier une certaine forme de folie et de balader l'auditoire, c'est qu'il peut se transformer en défaut, là où le tout devient prévisible. « Your Blistering Tongue » par exemple ne procurera aucun effet de surprise et passera même clairement au-dessus de la tête alors que le début du brûlot aura réussi à faire naître un véritable enthousiasme. Bon, fort heureusement, il n'y a pas de mauvaise piste et chacune saura contenter, mais il aurait peut-être été mieux d'avoir un léger espace d'aération sur un morceau plus posé.


Malgré tout, il faut bien reconnaître que les londoniens ont le sens du rythme et du refrain, le propos ne faiblit pas et la folle cavalcade entraîne et faut mouche, ce qui doit déjà donner un effet assez fou sur scène. Les titres sont parfois imparables, « Volatile Territory » est un véritable hymne à la démence tant les influences et les ambiances s'entrelacent, entre douceur, puissance, lyrisme et agressivité. Et le voici finalement, ce fil d'Ariane, car ce qui réunit les pistes, c'est de savoir condenser sur un espace plutôt court n'importe quelles atmosphères. Si vous cherchez un peu de douceur, il faudra vous rendre sur « Cut a Little Deeper », ballade agréable mais qui ne manque pas de punch dans les dernières minutes, là où la voix de la jeune femme est riche d'émotions.


Des morceaux qui conviennent et parviennent à satisfaire les plus exigeants dans un style ou un autre, il y en a. Les relents hard rock de « Relish in Nervous Delight » vont plaire aux fans du genre, à condition d'aimer les voix féminines. Dans la veine alternative, « Viridiscere » et « Freefall » sont des tubes en puissance, qui devraient pouvoir, par leur refrain, combler les espérances. « Keep Pushing Me » et « Razored Cell » constituent des bombes potentielles, avec des petites incursions heavy agréable et capable d'offrir un beau moment d'headbang collectif, sport préféré des chevelus (et si vous n'en avez pas, courrez acheter une perruque avant d'écouter les titres). Seule la pauvre « Your Blistering Tongue » reste un peu sur le carreau, mais il faut dire que face à la tubesque et prenante « Volatile Territory », la mystérieuse piste de conclusion « Bloodlust » et ses chants profonds accompagnés de growls féroces, « Needles and Pins » décalée, loin des standards et originale, ou même face à la belle ballade « Cut a Little Deeper », il est ardu de résister.


Même la production est plutôt étrange, et dérange à la première écoute, demandant un certain temps d'adaptation. Ciselée au maximum au plus proche des morceaux, sans donner un relief, tout est concis, presque squelettique et articulé autour des instruments qui sonnent brut, incisifs, mais qui permet paradoxalement une mise en scène des moult types d'atmosphères bien plus efficace et accentuée. On regrettera parfois que parfois, la batterie soit plus éloignée par rapport à la voix et à la guitare, car les parties musicales de cette dernière sont intéressantes, très judicieusement utilisées.


Voilà donc une offrande très particulière à laquelle nous voici confrontée. Si, lors des premières écoutes, on ne sait absolument pas quoi penser de ce que les anglais viennent de nous préparer, il ne faudra malgré tout que peu de temps avant que ce Solsikk libère son charme qui se met à opérer. Et puis, rien que la superbe voix de Vykki Turner arrive dès la première impression à convaincre que l'on ne se trouve pas face à une galette de mauvaise qualité, les titres réussissant à faire le reste par la suite. En conclusion, voici un nouveau talent qui nous est offert par le Royaume-Uni, et dont le premier jet régalera les cages à miel. Solsikk est un groupe qu'il faut donc surveiller d'urgence, avec sa musique au son si personnel. Il ne reste plus qu'à persévérer et à continuer les efforts pour s'imposer comme une référence, croisons les doigts pour que le prochain soit encore meilleur. Mais la barre vient d'être placée si haute que cela donne envie d'attendre la suite avec impatience.



Note finale : 8,5/10

Myspace de Solsikk

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