Fabrice Loez, guitariste de S.U.P.


Alors que S.U.P. s'apprête à sortir de sa longue période d'hibernation studio avec la sortie de Dissymetry, premier opus depuis Hegemony (2008), nous avons posé quelques questions à l'une des deux têtes pensantes du quatuor nordiste. Fabrice Loez, guitariste et membre fondateur de Supuration puis S.U.P nous a accordé de son temps pour y répondre et en dévoiler un peu plus sur ce nouvel album.

Bonjour Fabrice et merci de nous accorder cette interview pour La Grosse Radio. Nous sommes ici pour parler de Dissymmetry, premier album sorti sous le nom de S.U.P depuis 2008, après les deux Supuration (Cu3e et Reveries...). Pourquoi avoir attendu aussi longtemps ?

Fabrice : Bonjour, et merci de nous permettre de nous exprimer sur votre page. Depuis 2008, nous avons fait pas mal de choses, des bootlegs, des musiques pour des courts métrages et un long métrage chez metaluna productions, quelques festivals (le Hellfest en 2011, 2014 et 2015). Ludo (chant, guitare NDLR) avait déjà en tête quelques titres pour un nouvel album de S.U.P après Hegemony. Mais il nous fallait du temps pour digérer le fait que cet album, Hegemony, soit passé à la trappe. Nous trouvons que cet album a été sous estimé. Donc après cela, ça a été très difficile de se lancer dans un nouvel opus. Supuration nous y a aidé. Cela nous a permis de faire un gros point entre nous quatre. Le temps passe très vite, nous tenions à terminer l'épisode Supuration du mieux possible, il nous est impossible de créer en ayant en tête les deux entités. S.U.P est désormais musicalement très éloigné de son grand frère Supuration. Cette parenthèse nous a rapproché, ce qui nous a permis de nous remettre à fond dans cette nouvelle aventure S.U.P. Ce nouvel album est l'aboutissement d'un travail collectif puisque nous avons tout fait à quatre, comme à l'époque et à l'ancienne, dans notre salle de répétition, avec l'aide de Gregoire Saint Maxin, co-producteur.

Comme chacun de vos albums, celui-ci est un album concept. Pouvez-vous, sans trop nous en dire, dévoiler la trame narrative ?

Fabrice : En effet, c'est de nouveau une histoire. Celle-ci est particulièrement la plus gore que l'on ait pu pondre. Elle met en évidence ce qu'il y a de plus personnel et de plus morbide dans un être humain, deux côtés très sombre de l'être humain. C'est l'histoire d'un schizophrène qui entend trop de voix dans sa tête et qui ne supporte plus son corps. Il pense pouvoir mettre un terme à sa souffrance en se mutilant et se reconstruire partie par partie à côté de lui. C'est une poésie gorifique comme l'aime à le décrire Ludo. Les paroles sont de Syobhan Mac Carthy qui bosse pour S.U.P depuis 1997.

SUP, Dissymetry, metal, french, Loez,

Cet album, par certains aspects, me rappelle Cu3e sorti sous le nom Supuration, notamment avec "Cathedra" qui me rappelle "The Flight". Comment avez-vous appréhendé la composition de Dissymetry ?

Fabrice : Ce sont les mêmes musiciens et le même compositeur donc c'est un peu normal. Par contre, je pense que Dissymmetry est beaucoup plus abouti. Il est vrai que le titre "The Flight" s'en approche un peu en terme d'émotions. On va dire que Cu3e s'approche de S.U.P plus que S.U.P s'approche de Supuration.

On retrouve toujours ces ambiances glaçantes, parfait mélange du death/doom et de vos influences plus gothiques (Type O Negative, Paradise Lost) ou new wave (Depeche Mode que Ludo aime beaucoup il me semble)... Pensez vous que votre longévité soit liée à votre patte très personnelle au sein de la scène metal française ?

Fabrice : J'espère que oui ! C'est un peu le but de tout groupe qui se respecte d'avoir sa propre identité. La nôtre s'est forgée au fur et à mesure des albums. Désormais, nous avons vraiment conscience que notre style nous colle à la peau. Nous avons notre propre identité, sur ce point, nous avons réussi. A force de vouloir faire autrement, de vouloir surprendre... Eh bien oui c'était le but que l'on s'était fixé à la sortie d'Anomaly.

La mélodie est toujours hyper présente (ces sonorités de piano sur "The Empty Chair", les arpèges d'"Excision", ou "The Day of Final Hope"). Comment parvenez-vous à cette cohésion entre mélodies et la violence ? Est-ce en raison d'un line-up stable quasiment depuis vos débuts ?

Fabrice : On axe tout sur l'aspect cinématographique des textes, ce que l'on veut retranscrire... Il y a beaucoup d'émotion, c'est peut-être ça qui nous donne ce résultat. Lorsque l'on lit les textes, on doit pouvoir visualiser la musique.

Selon moi, il s'agit de l'un de vos albums les plus travaillés et où chaque détail a été peaufiné. Avez-vous laissé maturer ces titres depuis 2008 ou bien la composition est-elle récente ?

Fabrice : Merci beaucoup ! Non, il y a un titre qui a été plus ou moins composé en 2008, c'est la mélodie de "The Empty Chair". C'est un peu la ligne directrice de l'album. Mais tous les autres titres ont été composés en même temps. Donc, pour répondre à ta question, la composition des titres est assez récente.

SUP, Supuration, metal, loez

Chez vous, la musique est indissociable de l'esthétique visuelle, comme vous avez pu le montrer à travers votre nombreux clips tout au long de votre histoire, ou encore sur les deux DVD Traces. Cette fois, cela se remarque encore sur le clip de "Cathedra", à l'esthétique léchée. Comment avez-vous abordé le tournage ? Pouvez vous nous parler de la collaboration avec Julien Bouzille, le réalisateur ?

Fabrice : Déjà, nous travaillons également avec Matthieu Carton depuis une vingtaine d'année. Il nous fait des superbes pochettes et cette dernière ne déroge pas à la règle, nous le remercions encore. Maintenant, en ce qui concerne le clip de "Cathedra", il a été pensé, filmé et monté en trois jours. Julien et moi avons discuté la veille du tournage pour se mettre d'accord sur ce que nous allions faire. Au départ, le clip devait être tourné en extérieur et vu le temps, on s'est rabattu dans un endroit qui nous a été prêté. Le jour du tournage, nous étions à cinq (les membres de S.U.P  et Julien) et ensemble nous avons mis en place les scènes et nous avons tourné. Le lendemain, Julien s'est mis sur le montage suivant mes indications et je l'ai rejoint pour que l'on puisse s'entendre sur le montage. Puis il a terminé seul et nous a fourni le résultat que vous pouvez voir. On n'a pas vraiment perdu de temps sur ce coup-là. Il faut dire que nous sommes très motivés lorsque nous sommes à quatre.

Vous sortez régulièrement des Official Bootlegs en édition très limitée sur votre site internet. Les deux derniers en date portent sur la tournée Incubation et la tournée Chronophobia. Avez-vous encore des archives à sortir ? Sortirez vous un jour la version audio de votre live au Hellfest 2015 (la vidéo étant disponible en ligne), comme vous l'aviez fait pour l'édition 2014 ?

Fabrice : Oui, nous avons encore quelques raretés à partager. Mais nous avons fait un break volontairement pour nous consacrer à notre album. Pour le moment, rien en perspective, juste l'album.

Vous allez prendre la route le mois prochain avec Gorod et Psykup (tournée en cours lors de la sortie de l'interview), qui sont des groupes tout de même différents de SUP. Avez-vous eu à un moment donné une certaine appréhension à jouer devant leur public ?

Fabrice : Nous savons que ces deux formations bénéficient d'une grande notoriété. Nous espérons tout de même que leur public respectif sera assez ouvert d'esprit pour nous intégrer dans leur vision du metal. Nous savons que musicalement, c'est très différent. De toute façon, nous avons préparé une setlist pour les fans de S.U.P, les adaptes de notre musique ne pourront qu'apprécier nos choix.

L'an dernier, Jérémie Grima, que vous connaissez très bien car il a sorti votre biographie ("SUP Traces Ecrites") s'est attelé avec Sam Guillerand à la réalisation du livre Enjoy the Violence, qui revient sur l'origine de la scène death/thrash française. Vous êtes bien entendus dedans pour votre travail avec Supuration. Avec le recul, comment voyez-vous ces jeunes années ?

Fabrice : Oui, il est venu à la maison le mois dernier et nous a remis un exemplaire de ce magnifique bouquin. Quel formidable travail ils ont accompli ! Bravo à eux ! Nous en parlons dans un épisode spécial de « We love it loud » sur notre chaine Youtube. L'épisode 45 il me semble. Pour nous, c'était hier, le temps passe trop vite. Nous avons fait les bons choix, nous sommes restés intègres à notre façon de voir les choses et notre façon de penser.

Il y a à l'heure actuelle une certaine fascination pour les plus jeunes générations (trentenaire notamment) qui n'ont pas connu cette époque et qui cherchent à retrouver ces sonorités old school. Qu'en pensez vous ?

Fabrice : le death metal est mort ! Vive le death metal ! Je peux comprendre l'envie de ces jeunes à revenir à ces vraies valeurs. Mais ils n'arriveront jamais à ressentir ce que l'on a pu ressentir lorsqu'un qu'un groupe sortait un album à l'époque, comme un Gothic de Paradise lost, un Cause of death d’Obituary ou un Altar of madness de Morbid Angel ! Il fallait le vivre à l'époque pour ressentir les véritables implications de cette musique. Je ne regrette pas cette période mais pour moi c'est révolu, on ne reviendra jamais dans le passé, il faut voir l'avenir. Sinon, on meurt ou on devient fou.

Vous avez récemment réédité vos albums en vinyle. Y aura-t-il également une réédition CD pour certains albums difficiles à trouver ?

Fabrice : j'espère ! C'est le but, une réédition de nos albums seraient un grand bonheur pour nous. C'est certain !

Merci à toi pour cette interview. As-tu un dernier mot pour nos lecteurs ? Comment les convaincre d'écouter Dissymmetry par exemple ?

Fabrice : j'espère que je n'aurais à convaincre personne d'écouter un de nos albums, tout le monde est libre de penser par lui même. J'espère juste qu’un maximum de personne prendront un peu de leur temps pour jeter une oreille sur notre dernier bébé.

Interview réalisée par mail en février 2019
Merci à Sabrina d'Overpowered Records
Photos promo : DR SUP/ Overpowered Records



Partagez cet article sur vos réseaux sociaux :

Ces articles en relation peuvent aussi vous intéresser...

Ces artistes en relation peuvent aussi vous intéresser...