Epica + Blackbriar à  l’Elysée-Montmartre – Paris (06.10.19)

En 17 ans, Epica est devenu une tête de proue du metal symphonique, alliant des éléments de death et de prog à des orchestrations symphoniques et du chant lyrique. Les Néerlandais semblent apprécier la France depuis de nombreuses années, puisqu’ils y passent régulièrement. Cette année, une seule halte dans l’Hexagone, à l’Elysée-Montmartre parisien, mais c’est pour une occasion très spéciale, puisque le sextette célèbre le dixième anniversaire de Design Your Universe, considéré par beaucoup comme son meilleur album.

Blackbriar

Le concert affiche complet depuis des mois, et la foule se presse pour rentrer depuis le terre-plein central en face de la salle. Il faut dire que cette dernière est située sur une avenue très passante et que la file d’attente a été réalisée de façon assez curieuse.

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Alors que le public continue de rentrer, les spectateurs déjà à l’intérieur de la salle à l’esthétique singulière découvrent Blackbriar, un sextette néerlandais mené par la chanteuse Zora Cock. Mais les points communs avec Epica s’arrêtent là.

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Le son est bon et on entend distinctement les différents instruments, ce qui permet d’apprécier le metal alternatif à tendance gothique de la formation. Ça tombe bien, le son est plus puissant que sur album, et ne tarde pas à conquérir le public.

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En revanche, la chanteuse n’est pas forcément à son avantage. Elle semble sous-mixée et n’a de surcroit pas une voix très puissante. Pour se faire entendre au milieu des guitares et de la section rythmique lancée à fond, elle est donc obligée de forcer sur sa voix, ce qui n’est pas très heureux auditivement et l’amène souvent à la limite de la justesse. Ajouté à cela des montés dans les aigues trop présentes et crispantes, la pauvre n’a pas le meilleur rôle.

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Les instrumentistes, en revanche, déroulent leur partition de façon plus maîtrisée. Les guitares, la basse, la batterie, tous les instruments ont un son bien lourd, et les guitaristes Bart Winters et Robin Koezen se lancent même dans quelques soli. La batterie de René Boxem est particulièrement bien insonorisée et donne beaucoup d’énergie à l’ensemble. L’ambiance gothique est assurée entre autres par un clavier très présent mais qui parvient à se faire entendre au milieu du tumulte sans dégouliner sur le reste du groupe. L’ensemble donne un son rond et profond, puissant, et si l’on excepte les problèmes de voix de la chanteuse, Blackbriar aura donné une prestation convaincante.

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Setlist
•  Deadly Nightshade
•  Let Me In
•  Hear You Scream
•  Stone Cold Body
•  Preserved Roses
•  Cry of a Banshee
•  I'd Rather Burn
•  Arms of the Ocean
•  Ready to Kill
•  Until Eternity

Epica

La salle s’est considérablement remplie durant la première partie, l’anniversaire de Design Your Universe est un événement que de nombreux fans tenaient à vivre avec le groupe. La file au merch s’allonge pendant que la majeure partie du public patiente tranquillement.

Sur la scène, un roadie prend la pose le plus sérieusement du monde sur le devant de la scène et sur la haute estrade accueillant le clavier et la batterie, pour les besoins des réglages des projecteurs. Doublure lumière de Simone Simons, Mark Jansen et consorts, c’est à noter sur son CV.

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Quand le noir se fait, l’excitation de la foule se fait plus audible, et alors que les musiciens arrivent sur scène un par un au son de « Samadhi », l’introduction de Design Your Universe, la fosse se déchaîne, tandis que des mécanismes d’horlogerie rappelant le clip de « Quietus » se mettent en branle sur les côtés de la scène.

Les Bataves lancent « Resign To Surrender », toujours issu de Design Your Universe. Le son est puissant, les guitares et la section rythmique prennent le pouvoir sans difficulté, mais le son semble étrangement moins précis que pendant Blackbriar.

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Simone Simon arrive sous une ovation, malheureusement, ses premières notes sont assez fausses. Elle rectifie au bout de quelques secondes, mais sa voix n’est pas optimale sur l’ensemble de la chanson. Le problème de Blackbriar semble se répéter : la voix de la chanteuse est sous-mixée par rapport au reste. Comme Simons a une voix beaucoup plus puissante  que Zora Cock, c’est beaucoup moins désagréable, mais pour un groupe dont la voix de la chanteuse est aussi emblématique, il est dommage de commencer de la sorte.

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La fin du morceau est suivi d’acclamations assourdissantes qui semblent ne plus vouloir finir, le groupe lui-même est visiblement touché. Il enchaîne avec « Unleashed », l'un des morceaux de bravoure de Design Your Universe, et là, tous les problèmes de son sur la voix de Simone Simons ont disparu, et elle retrouve de sa superbe, même si elle est parfois un tout petit peu en dessous de ce qu'elle peut donner. Tous les éléments du groupe sont en place, des riffs agressifs clairement empreints de death (Isaac Delahaye et Mark Jansen), une batterie black / death (Ariën van Weesenbeek) qui use à tour de bras (et de pied) la double pédale et les blasts, appuyé par la basse discrète mais efficace de Rob Van Der Loo, une palette d’influences trop  large pour être citée intégralement, du growl puissant (Jansen secondé par Delahaye) et des éléments symphoniques représentés en live aussi bien par la voix de Simone Simons et le clavier de Coen Janssen que des éléments enregistrés. Si ceux-ci sont très nombreux comme il est de coutume dans ce style (un orchestre symphonique ne rentrerait de toute façon pas sur la scène de l’Elysée-Montmartre), contrairement à d’autres groupes, ils arrivent à ne pas être trop envahissants et ne pas prendre le pas sur la musique live.

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Suite au morceau et à une nouvelle ovation interminable, les fans, qui jouent depuis le début du concert avec des ballons d’anniversaire, entonnent un retentissant « happy birthday » que Simone Simons commente d’un « Mon anniversaire est dans plusieurs mois, mais j’imagine que vous parlez de l’album ! Alors Design The Universe vous dit merci ! ». Elle annonce qu’anniversaire oblige, le concert va comporter de très nombreux morceaux de cet album, ce qui ne peut que ravir les fans. De fait, la setlist est composée de neuf morceaux de DYU, mais tous les autres albums à l’exception de Requiem For The Indifferent, un peu en-dessous des autres, sont représentés.

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Après les cafouillages du début, il n’y a plus rien à dire techniquement, c’est agressif, c’est lyrique, c’est puissant et planant, les morceaux s’enchainent et le public en prend plein les oreilles, c’est maîtrisé aussi bien dans l’instrumentale que dans le chant lyrique, clair, growlé, screamé… On pourra toujours regretter l’absence de tel ou tel morceau (pas de « Quietus », mais pourquoi ?) ou la présence d’un ou deux morceaux dispensables par rapport aux autres mais la setlist est cohérente et ne laisse pas vraiment le temps de décrocher.

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Au-delà de leurs talents de composition et d’interprètes, ce qui frappe chez les membres d’Epica, c’est leur plaisir sincère à être sur scène. Alors que la musique est on ne peut plus sérieuse et dramatique (les mauvaises langues diront pompeuse et grandiloquente), les six musiciens affichent un mélange de professionnalisme et de décontraction assez réjouissant. Le décalage est même parfois étrange, on pourrait reprocher à Simone Simons de prendre parfois des poses de chanteuse de variété sur les passages growlés par Mark Jansen, mais la bonne humeur du sextette est contagieuse et il est difficile de lui tenir rigueur de défauts si mineurs. Et surtout, les musiciens semblent heureux de jouer ensemble, ce qui s’entend dans la cohérence musicale et se voit sur scène : ils vont tous les uns vers les autres à tour de rôle, passent de l’estrade à l’avant-scène, prennent des poses ensemble, bref le groupe est à l’antithèse des formations qui continuent de tourner ensemble sans envie.

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Et que dire de Coen Janssen ? Le claviériste mériterait un article à lui tout seul, tant il ne manque pas une occasion d’exécuter des pitreries. Evidemment, il fait tournoyer sur lui-même et rouler son clavier à roulettes d’un bout à l’autre de l’estrade, vient se promener sur le devant de la scène avec son clavier portatif, mais il faut noter aussi son habileté naturelle au lancer de jambes qu’on ne voit guère que durant un French Cancan et sa maîtrise parfaite du air guitar. Un artiste total en somme. On en viendrait presque à se demander si les parties de clavier ne sont pas enregistrées, tant le musicien s’agite dans tous les sens en permanence. A voir Jansen (Mark) s’esclaffer sur les facéties de Janssen (Coen) juste avant de reprendre le micro, on se demande comment il fait pour growler ensuite avec tout le sérieux du monde.

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Et le rapport du groupe avec le public semble aussi très naturel. Les deux chanteurs se partagent la parole, remercient le public en de nombreuses occasions, et Simons renomme « The Last Crusade » en « The French Crusade » en hommage au nom du fan club hexagonal. Et Coen Janssen (oui, encore lui) finira aux barrières pour faire des selfies avec les premiers rangs.

En début de rappel, Coen Janssen (oui, toujours lui), vient raconter comment le groupe se réunit toutes les semaines pour prendre le thé avec des biscuits et du fromage (la vie de rock star dans son exaltation la plus totale) et comment Paris aurait été citée en premier comme une ville incontournable dans cette tournée anniversaire. Il tente ensuite de faire parler le guitariste belge (flammand, de toute évidence) Isaak Delahaye en français, ce qui donne un franglais à peu près compréhensible, et les choses sérieuses reprennent une dernière fois avec le fracassant triptyque « Sancta Terra », « Beyond the Matrix » et « Consign to Oblivion », le deuxième montrant que les Néerlandais sont encore capables de merveilles dans leurs derniers ouvrages.

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Le concert s’achève sur une pluie de confettis dorés et argentés et un wall of death qui se transforme en pogo et circle pits particulièrement remuants. En deux heures de concert, plus que prévu initialement, Epica a livré une prestation flamboyante avec très peu de points négatifs. Avec une attitude pareil, on comprend la ferveur du public qui suit le groupe depuis des années.

Setlist
•  Resign to Surrender
•  Unleashed
•  Martyr of the Free Word
•  Our Destiny
•  Kingdom of Heaven
•  The Last Crusade
•  In All Conscience
•  The Price of Freedom
•  Burn to a Cinder
•  Tides of Time
•  Deconstruct / Semblance of Liberty
•  Cry for the Moon
•  Design Your Universe
•  • 
Rappel:
•  Sancta Terra
•  Beyond the Matrix
•  Consign to Oblivion

Photos : Tiphaine Zanutto. Reproduction interdite sans autorisation de la photographe.



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