Himinbjorg – Wyrd


Le destin d'un groupe comme Himinbjorg est plongé dans l'obscurité que confère nécessairement une certaine recherche de l'authentique.

Il a créé deux albums qui restent encore gravés dans l'histoire du metal français avec Where Ravens Fly et In the Ravens Shadow, avant une longue décennie ayant permis d'exprimer les divers aspects qu'affectionne Zahaah, le leader du groupe.

Musicalement, si la base a toujours été fondée sur un black/pagan metal, Himinbjorg n'hésite pas à s'aventurer vers des atmosphères mystiques et à ralentir nettement le tempo sur certains morceaux comme "Chant de Lune" (de l'excellent Chants d'hier, chants de guerre, chants de la terre...) pour ne citer que le premier qui me vient à l'esprit.

Tous ces changements font partis de la nécessaire évolution de l'âme du groupe. Sans évolution, il ne reste que la mort.

Or, Himinbjorg est tout sauf mort. L'âme intemporelle qui guide cette œuvre musicale est bien présente et continue tranquillement son chemin. Certes, le line-up a connu des changements, mais l'âme des origines et toujours bien là.

Mais ce qui est sûr, c'est qu'il s'agit d'un des rares groupes a être restés authentiques et à avoir gardé un son venant des profondeurs de la terre, à travers toutes ces années, sans jamais se renier ou se prostituer à la gloire des médias.

Le prix à payer est évidemment de rester dans un certain underground. Mais peut-être est-ce là son destin, son Wyrd justement.

(Himinbjorg au Cernunnos Pagan Fest 2014)


Le titre de l'album est déjà une quête en soi.

Le Wyrd est un concept complexe, bien que fondamental, de l'ancienne foi germanique, qui regroupe la notion de destin au sens classique du terme, mais aussi du lien qui unit le passé au futur. C'est à dire qu'il ne renie pas l'histoire et permet un futur changeant. En ce sens, il n'est pas équivalent au destin dans sa conception judéo-chrétienne convenue, avec une sorte de loi implacable qui guiderait les hommes, sans qu'ils ne puissent rien faire d'autre que de subir et d'accepter leur sort.

Le Wyrd est donc une sorte de destin que chacun peut forger en fonction de ses actes passés, présents et futurs.

Si j'en juge, le passé et le présent d'Himinbjorg, je ne peux que penser que ce titre convient à merveille à cet album.

En effet, comme déjà évoqué précédemment, les racines du groupe sont le black metal. Il reste présent, ne serait-ce qu'à travers la forme du chant de Zahaah. Il a toujours eu une part spirituelle, que l'on perçoit à travers.

Cet album se caractérise par une puissance. Non pas la violence et la rapidité des premiers albums, non, la vraie puissance du son. Celle que l'on ne peut obtenir qu'avec ses propres tripes, mais que l'on ne peut rendre vivante de manière satisfaisante qu'avec l'expérience et la connaissance. Les riffs de "The Sword of Dignity" sont simples et efficaces. Je dirais même terriblement simples et efficaces.

Il s'agit du cœur de la musique metal. Vous savez le genre de riffs immortels et pourtant simples que l'on peut retrouver dans des morceaux comme "South of Heaven" ou "Master of Puppets". Non pas qu'il y a une comparaison possible au niveau du style, si ce n'est d'avoir frôlé l'essence même du metal. Le chant éthéré de Zahaah marque la signature du groupe qui existe depuis  Where Ravens Fly.

On retrouve ces influences du passé sur plusieurs titres, comme l'excellent "The Circle of Warriors".
L'album alterne des morceaux plus lents avec des brutales accélérations, comme par exemple "Initiation".

Notons également la présence d'instruments traditionnels et d'invités de marque ayant participé à l'enregistrement, comme Baptiste Labenne de Boisson Divine, qui devrait d'ailleurs être sur scène avec le groupe au Ragnard Rock en juillet prochain, et qui a assuré les soli de l'outro de "The World Of Men Without Vertue" ainsi que les instruments traditionnels sur les autres morceaux, avec Christophe Morvan (collaborateur de Tri Yann, Soldat Louis, Celtic Voyage).

A force d'écouter et de chroniquer des albums, j'ai plusieurs critères pour décider d'une note (même si l'entreprise semble bien futile au regard de l'importance de ses goûts personnels dans une telle appréciation forcément subjective).

Tout d'abord, je me demande si le groupe s'auto-plagie, tourne en rond, indépendamment de la qualité de sa musique.

Ensuite, je m'interroge sur ce que j'ai réellement ressenti. Est-ce que même en l'écoutant d'une oreille distraite, je me retrouve à m'arrêter un instant en secouant la tête ou en contemplant le vide ?
Puis, je soumets l'album a l'épreuve de l'écoute en boucle. Est-ce qu'au bout d'un moment, je me lasse et je sens une forme de souffrance à l'idée de le remettre une fois encore ?

Enfin, je me demande s'il y a au moins une chanson qui méritera d'être écoutée à nouveau dans dix ans ?

En général, un CD ne passe pas tous ces critères avec succès.

Ce n'est pas le cas avec Wyrd.

Dans ces situations, certes rares, je ne vois pas ce que je pourrais faire d'autre que de mettre un 10/10, même si la perfection, j'en conviens, n'existe pas. Bon d'accord, je ne mettrais que 9,5 en conséquence. Mais comme à La Grosse Radio, on ne s'embête pas avec les demi-points, ça tombe bien, non ?

Evidemment, je ne vais pas comparer cet album avec les très grandes œuvres qui traverseront l'histoire du metal, comme South of Heaven de Slayer par exemple, ou bon nombre d'albums d'Iron Maiden pour ne citer que ceux là, mais j'aurais aussi pu parler de Det Som Engang Var ou Filosofem de Burzum dans un tout autre genre musical.

Quoique... Dans un genre différent, peu propice à grimper sur le piédestal des monuments du metal auprès du "grand public", d'une certaine manière, nous n'en sommes pas loin...

« Wyrd» - sorti le 1er mars 2015 chez European Tribes (France) / Vegvisir (reste du monde).

Tracklist (48 min):
1. Intro - Call to the Being (1:39)
2. The Sword of Dignity (7:17)
3. The World of Men Without Virtue - The Circle of Disillusion(7:37)
4. The Circle of Warriors (5:26)
5. Initiation (05:28)
6. The Mirror of Suffering - The Circle of Ghosts (6:10)
7. The Shamanic Whisper (6:08)
8. Another Shore (3:15)
9. The Eternal Light (5:02)
 


Thomas Orlanth

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NOTE DE L'AUTEUR : 10 / 10



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