Peu de temps après un interlude acoustique (
Essentia, sorti en 2013) leur permettant de naviguer vers d'autres contrées, les franciliens de
The Last Embrace viennent se rappeler à notre bon souvenir avec
The Winding Path, issu d'une campagne de crowdfunding fructifiante. Officiant toujours dans un style progressif teinté de rock atmosphérique, et ce depuis 1998, le combo nous présente ici un total de six compositions pour un peu moins d’une heure de musique.
Dès « On my own », le premier titre, les paysages musicaux dévoilés par
Anathema viennent immédiatement à l'esprit. Et ce d'autant plus que la voix de
Sandy la vocaliste de
The Last Embrace évoque celle de
Lee Douglas son homologue chez les Liverpuldiens. La chanteuse est ici à l'aise, dans un registre tantôt jazzy, caractérisé par des vocaux feutrés (le début de « Nescience », « The Fear of Loss »), puis plus rock. Son timbre lui permet de se démarquer des nombreuses formations à chanteuses, le groupe français étant loin d'une vulgaire copie de
The Gathering.
Les autres musiciens ne sont pas en reste et savent mettre leur talent au profit des compositions. On ressent un groupe soudé puisque claviers et guitare sont totalement complémentaires, sans que les premiers ne prévalent sur le second.
Olivier (guitare) varie les plaisirs, entre délicatesse de l'acoustique (« The Fear of Loss ») et puissance de l’électrique (« Let the Light take Us »). Les claviers de
Pierre-Henri rajoutent une texture et de la profondeur aux compositions sans pour autant présenter des sons datés propres au courant Neo-progressif.
Certains passages plus musclés font échos aux derniers albums de
Porcupine Tree ou au
Building an Empire de
Demians (le final de « Field of Minds », la seconde moitié de « Nescience » ou « White Bird ») sans tomber dans le plagiat et mettant en avant la personnalité du groupe. Ces passages raccrochent le combo à ses influences métal et permettent de donner un peu plus de dynamique à l'ensemble.
Mais c'est l'instrumental « Let the Light take us » qui est la pièce la plus réussie et qui pourrait justifier à elle seule l'achat de ce disque. Des cordes discrètes s'immiscent dans la composition sur laquelle la guitare d'
Olivier fait des merveilles. On en profitera d’ailleurs pour saluer la qualité des arrangements qui enrichissent réellement les compositions. Les musiciens ont ici trouvé la formule du morceau intemporel qui n'aurait pas à rougir aux côtés d'
Universal d'
Anathema ou de certains titres récents de
Camel.
Malgré tout, certains titres manquent de thèmes forts et accrocheurs, notamment « White Bird » ou la pièce épique de l'album, « The Field of minds ». Fort bien exécutée, celle-ci souffre de quelques longueurs liées en particulier à une évolution trop linéaire. Cependant, elle devrait faire le bonheur des amoureux de clavier et de piano tant cet instrument mène la dance sur ce morceau (le thème à 12mn), ponctué par les interventions de
Sandy. Les rythmiques de batterie de
Chris sont également à l'honneur, sachant osciller entre subtilité et technique (les ghosts notes sur la ride sont légions).
Ce
Winding Path a le mérite de souffler une brise rafraîchissante sur la scène prog hexagonale.
The Last Embrace parvient à montrer qu'il a bien digéré ses diverses influences, sans pour autant les dissimuler. Une mélancolie touchante s’en dégage, par le jeu des harmonies et des voix. Il en résulte un disque tout en douceur et en subtilité, très jazzy, dont la richesse ne se dévoile qu’après de nombreuses écoutes. Les compostions sont solides malgré l'absence de thèmes fédérateurs, mais le pari est réussi pour les franciliens que l'on imaginerait bien ouvrir pour les ténors du genre dans un avenir proche.