Panzerballett – Breaking Brain

No brain, no gain
 

C’est triste à dire, mais dans ce bas-monde, certains sont voués à rester dans l’oubli, peu importe l’étendue de leur génie. Que cela soit des scientifiques, des poètes, des cinéastes, des soldats, ou des musiciens, l’histoire a toujours tendance à en oublier. Parfois, on pourrait considérer que c’est mérité, et d’un autre côté, c’est dans certains cas aussi très injuste. Vu le nombre de personnes présentes en décembre dernier au concert parisien de Panzerballett, il y a fort à parier que ces allemands feront partie de la seconde catégorie, alors que leur cinquième album Breaking Brain vient de sortir.

Pourquoi ce manque de reconnaissance est-il injuste ? Déjà, parce que Panzerballett pourrait se revendiquer comme un des pionniers du jazz metal. Et cela, en l’ayant créé de la bonne façon : le guitariste Jan Zehrfeld et ses comparses ont compris les deux genres musicaux, et en ont fusionné les éléments clefs pour former quelque chose de nouveau, frais et puissant. Toi au fond, là-bas, je te vois et je t’arrête tout de suite ! Non, il ne suffit pas d’ajouter un saxophone dans un groupe de metal pour faire du jazz metal. Donc Shining, ce n’est pas du jazz, quand bien même Jorgen Munkeby a une fâcheuse tendance à brouiller les pistes en appelant sa musique du « blackjazz ». Sigh ne fait pas de jazz non plus, ni même 90 % des groupes qui font appel aux services d'un saxophoniste. Il faut garder en tête que le jazz, c’est avant tout, en théorie, penser sa musique avec le moins de limites possibles, que cela soit d’un point de vue rythmique, harmonique ou même de format, tout en laissant une part importante d’improvisation dans l’écriture. Et sur ce point-là, on peut dire que Panzerballett a plutôt bien réussi son coup.
 

Panzerballett, Jan Zehrfeld, Gentle art of music, 2015, jazz metal, Sebastian lanser,


Breaking Brain voit le groupe continuer sur le chemin tracé par l’album précédent Tank Goodness, à savoir des compositions influencées par Meshuggah et pétries d’un jazz très technique, bourré de solos et fantaisies harmoniques. Et ça s’entend d’entrée de jeu avec « Euroblast », une chanson on ne peut plus typique de Panzerballett, dont le titre rend hommage au festival de metal progressif du même nom basé à Cologne. On peut cependant vite noter une différence avec le reste de la discographie. En effet, si les bizarreries de tout genre sont toujours là, elles sont moins nombreuses ou en tout cas pas aussi clinquantes qu’auparavant, ce qui rend l’album nettement plus digeste. Car soyons clairs, les entorses faites aux standards du rock/metal sont tellement importantes sur les précédents albums que ça en devenait parfois gênant, même avec des écoutes répétées. Mais ici, même si les délires musicaux sont légions, ils sont bien plus accrocheurs, comme par exemple les riffs épiléptiques de « Typewriter II ».
 

Panzerballett, Jan Zehrfeld, Gentle art of music, 2015, jazz metal, Sebastian lanser,


En fait, c’est une des principales qualités de cet excellent Breaking Brain : du riff lourd par palettes, et c’est franchement jouissif, bien qu’on ait du mal à taper du pied longtemps sans être dérouté par les rythmiques mutantes du combo munichois. Très clairement, nous avons affaire à des musiciens de haute volée, qui brillent tous sans se faire de l’ombre entre eux. On notera tout de même que Sebastian Lanser (qui joue aussi dans Obscura) est tout simplement impérial, peut être plus démonstratif que d’habitude, mais sans que cela soit surdosé. A l’image de l’album, ses par sont parfaitement équilibrées par rapport au discours du groupe (qui reste instrumental).
 

Panzerballett, Jan Zehrfeld, Gentle art of music, 2015, jazz metal, Sebastian lanser,


Nous faisons donc face à un Panzerballett qui a su arrondir les angles de sa musique pour frapper au but, avec une production impeccable et une réussite encore plus déconcertante à fusionner deux univers a priori antagonistes. Aussi, il est difficile d’isoler un morceau en particulier, tant l’album est valide en tant qu’unité. Pour pousser l’esprit jazz à son paroxysme, le quintet a même le culot de réenregistrer un standard qu’ils avaient déjà repris sur leur deuxième album : le thème de la Panthère Rose. Cette nouvelle interprétation est aussi plus directe : dépouillée de bridge manouche et de son solo de basse loufoque, elle basée sur les riffs et la mélodie que nous connaissons tous. Avec Breaking Brain, Panzerballett livre donc ici ce qui est fort probablement son meilleur album. Le dosage idéal entre metal et jazz a ici enfin été trouvé, rendant l’écoute aussi plaisante que déroutante. Malheureusement, après cinq albums et comte tenu de l’écho médiatique quasi-inexistant du petit dernier, tout porte à croire que Panzerballett est un groupe voué à rester confidentiel… Quel dommage !

Chronique par Tfaaon
 

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NOTE DE L'AUTEUR : 9 / 10



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