Vingtième album du groupe, Hell Yeah est la preuve que KMFDM ne s'essouffle pas. Proposant des compos variées et de qualité dans lesquelles les tempi dansants se mêlent aux boucles electros et aux grosses guitares, tout en prônant un certain engagement, cette nouvelle sortie ravira les anciens fans autant qu'il risque d'en séduire de nouveaux.
KMFDM, c'est un pan de l'histoire de la musique à lui tout seul, cela ramène aux années quatre-vingt dix, époque dorée où le rock industriel se mariait merveilleusement bien aux guitares acérées du metal. Un temps où grace à des artistes comme Ministry, Godflesh et Nine Inch Nails, certains dancefloors baignés dans les ténèbres pouvaient accueillir des chevelus headbangers.
KMFDM (acronyme de "Pas de majorité pour la pitié") défini par son fondateur Sascha Konietzko comme un projet de performance artistique est contemporain de Einstürzende Neubauten et de Die Krupps (autre précurseur dans le crossover indus/metal). Le groupe, a depuis sa fondation en 1984 , subi quelques mues et changements de personnel avant de trouver son style.
Réunie autour de Konietzko et la chanteuse Lucia Cifarelli, la troupe américano-allemande (KMFDM s'est formé à Hambourg mais a fini par émigrer aux Etats-Unis) applique un peu toujours la même formule depuis plus de vingt ans : des boucles électroniques, des samples et des ryhtmes dansants traversés de gros riffs.
Mais « The Beat ultra-lourd », terme employé par Sascha pour définir la musique de KMFDM, fonctionne toujours sur ce nouvel album portant le titre, pas très original, Hell Yeah mais à la pochette très évocatrice du narcissisme digital qui caractérise notre époque.
Ce qu'il y a de bien avec la musique des Allemands c'est que malgré la même formule appliquée, elle reste suffisament variée pour rester accrocheuse. On sent le travail d'artisans qui connaissent l'art de la composition sur le bout de leurs ongles vernis de noir.
Il y a à manger et à boire pour tout le monde sur cet album, les auditeurs les plus bourrins qui aiment les mandales metal indus à la Ministry peuvent trouver leur plaisir en écoutant « Burning Brain » et son « Sex, drugs and blood ! » scandé comme un cri de ralliement ou « Glam Glitz Guts and Gore » (tout est dans le titre).
Ceux qui aiment les travaux les plus récents de Monsieur Jourgensen trouveront leur compte dans ces morceaux mélangeant reggae/dub electro et metal indus engagé comme le triptyque « Oppression 1/2 »/« Total State Machine »/« Oppression 2/2 » comprenant ambiances enfumées et refrain rageur.
Sascha a même réenregistré un vieux titre, « Rip the System », (présent à l'origine sur l'album UAIOE qui date de 1989), dans ce style, cette version « v.2.0 » est d'ailleurs meilleure que l'originale.
Ces morceaux nous rappellent aussi le Treponem Pal de Higher, disque sorti il y a vingt ans et justement produit par Sascha Konietzko.
KMFDM c'est aussi cette étrange mélange, mais qui fonctionne très bien, de dance music déglinguée et de guitares acérées comme sur « Hell Yeah » et son refrain taillé pour les pistes de danse. Citons aussi dans le même style « Freak Flag » sur lequel le chant de Lucia Cifarelli est à un moment coupé par une intervention rap de Konietzko, ce qui donne l'impression d'entendre un 2 Unlimited bourré de MDMA et sur le point de péter un câble.
On pense aussi parfois aux, plutôt oubliés, Lords Of Acid, comme sur « Murder My Heart », titre où la voix sensuelle de Lucia fait des merveilles mais qui fera fuir les plus cloûtés d'entre-nous. « Shock » suit cette même tendance mais en mettant en avant des racines EBM.
Des racines que l'on entend aussi sur le martial « Fake News », un morceau dénonçant l'overdose d'informations présentes sur les médias et les réseaux sociaux. Ce titre donne l'impression d'entendre un D.A.F dopé aux guitares thrash.
La chanteuse fait aussi sensation sur l'espèce d'hybride electro funk froid réusssi « P 4 the Damned », bon morceau à la basse qui claque comme des coups de fouet sur une combinaison en cuir (on se calme oui), sa diction rageuse sur cette piste la rapprochant de la Nina Hagen des débuts.
On trouve aussi sur Hell Yeah des ambiances cabaret industriel avec « Only Lovers » sur lequel le chant de Cifarelli rappelle les travaux solo de Gitane Demone.
Ces titres en tout cas sont la preuve que la chanteuse d'origine italienne peut prétendre être la deuxième moitiée de l'identité musicale de KMFDM.
Hell Yeah donc par sa qualité constante prouve qu'actuellement en matière de metal industriel il peut encore s'entendre de bonnes choses. Cet album est donc celui Kill Me Faut Dès Maintenant recommander. KMFDM rules !
Liste des titres :
1.« Hell Yeah »
2.« Freak Flag »
3.« Oppression 1/2 »
4.« Total State Machine »
5.« Oppression 2/2 »
6.« Murder My Heart »
7.« Rip the System v.2.0 »
8.« Shock »
9.« Fake News »
10.« P 4 the Damned »
11.« Burning Brain »
12.« Only Lovers »
13.« Glam Glitz Guts and Gore »
Disponible depuis le 18 août 2017 chez KMDFM Records/Metropolis Records