Sinistro – Sangue Cássia

Troisième album pour la formation portugaise qui pérénnise sa collaboration avec la  chanteuse Patrícia Andrade. Sangue Cássia, tout en restant dans la continuité de son  prédécesseur, ne choisit pas la facilité  en développant son « Saudade doom metal »  sur des titres parfois plus longs que la moyenne. Le résultat tout à fait concluant peut cependant demander des efforts d'investissement pour en saisir toutes les subtilités.

Avec Semente sorti il y a deux ans, Sinistro avait fait connaître son doom metal imprégné de Saudade, cette mélancolie si méditerranéenne, au reste du monde métallique. Ceci apportait alors la preuve que la scène metal lisutanienne ne se résume pas à Moonspell par exemple. La réussite de cet album résultait du parfait alliage entre la voix de la chanteuse-actrice Patrícia Andrade et la musique lourde et éthérée du groupe. Un mélange assez unique, marqué aussi par l'usage de la langue natale du combo pour exprimer les sentiments.

En ce début 2018 paraît donc Sangue Cássia, nouvel opus de Sinistro. Autant le dire : l'effet de surprise n'est plus le même que celui que l'auditeur pouvait  éprouver avec Semente, cela n’enlève cependant aucune des qualités relevées précédemment chez les Portugais.

Sangue Cássia propose toujours ce mix de doom et d'atmosphères post-rock, ou heavenly voices, marqué par la tradition du fado, nous restons donc en terrain connu. Mais ce nouvel album est aussi plus difficile d'accès, et surtout noir tel l'habillage de ces femmes de pêcheurs attendant au port le retour des bateaux comme aime le représenter l'imaginaire local.
 

Il faut plusieurs écoutes pour pouvoir déceler les richesses de Sangue Cássia et nous pouvons déjà souligner que Sinistro n'a pas choisi la facilité en proposant comme opener « Cosmos Controle », soit le plus long titre de ce disque qui plafonne à plus de 11 minutes.  On passe donc sur cette première piste d'arpèges délicats à un doom funéraire sur lequel se pose la voix sensuelle et plaintive de  Patrícia. Le tout étant construit sur un léger crescendo menant vers un univers de noirceur abysmale aux guitares dissonantes et aux riffs très lourds. Le break atmosphérique aux ambiances un peu spatiales de ce morceau permet à peine de reprendre son souffle avant que l'odyssée désespérée ne s'achève sur des notes de clavier lointaines.

Si Sinistro débute son nouvel album avec un titre long, il prend aussi soin de l'achever avec un morceau construit de la même façon, « Cravo Carne » du haut de ses presques 10 minutes de doom atmosphérique est cependant moins étouffant de noirceur et le refrain, très prenant, reste même plutôt bien en tête.

Mais ce que l'on aime chez les Portugais, c'est ce mélange d'influences heavenly voices et de  passages plombés, en cela le très bon « Lotus »  au refrain efficace, avec ses arpèges délicats et vocalises lointaines laissant ensuite la place à un riff méga costaud, fait songer au The Gathering des débuts, mais en plus dépressif.

Dans ce registre retenons aussi « Petalas », autre bon morceau opposant douceur heavenly et  virage doom tandis que le lourd et menaçant « Abismo » évoque un Theatre Of  Tragedy  version lisutanienne. De même le groupe livre une fois de plus un titre presque totalement heavenly voices avec « Vento Sul » qui sonne donc plus pop que le reste du tracklisting avec ses accords rêveurs  et son refrain accrocheur, une piste tout à fait convaincante et pleine de feeling qui est peut- être le meilleur moment de Sangue Cássia.

Pour le reste « Nuvem » avec ses loops évoquant certains moments de The Cure est un bon  morceau goth' metal, au refrain encore efficace, alternant lourdeur et introspection  méditerranéenne, il en est de même pour « Gardenia » qui lui débute par un riff très funeral doom.

Enfin, signalons que Sangue Cássia dans son édition Deluxe possède deux titres  supplémentaires. En cela « Ferida » est un morceau sympathique mais pas non plus  indispensable tandis que la reprise de Paradise Lost (avec lesquels Sinistro a tourné en Europe fin 2017) « Nothing Sacred » est tout à fait convaincante et nous rappelle que Host est un album bien trop sous-estimé dans la discographie des légendes du metal gothique anglais.

En conclusion, ceux et celles qui ont déjà été séduits par les charmes de Semente trouveront  sûrement de nouveau leur bonheur à l'écoute de Sangue Cássia. Pour les néophytes ce troisième long format de Sinistro est une bonne introduction à l'univers si particulier des Lusitaniens, à condition déjà de ne pas être allergique au chant en portugais et aux ambiances lourdes. Une chose est sûre : jamais sinistrose n'a été aussi agréable à subir.

Liste des titres :
1. « Cosmos Controle »
2. « Lotus »
3. « Petalas »
4. « Vento Sul »
5. « Abismo »
6. « Nuvem »
7. « Gardenia »
8. « Cravo Carne »
9. « Ferida » (Bonus Track disponible sur l'édition Deluxe) 
10. « Nothing Sacred » (Bonus Track disponible sur l'édition Deluxe)


 

Disponible depuis le 5 janvier 2018 sur Season of Mist

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NOTE DE L'AUTEUR : 8 / 10



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