Arkona – Slovo

2011, année du retour de beaucoup de grands groupes et artistes, des sorties attendues, tous styles de metal confondus. Entre Alice Cooper, Pain, Within Temptation, Arch Enemy, Falkenbach, Ghost Brigade, Morbid Angel, Dream Theater, Rhapsody of Fire, Leaves' Eyes, Black Country Communion, Mr. Big, Theatres des Vampires, Communic, Opeth et plus encore, c'est une (très) longue liste qui pourrait se dresser. Et là dedans se dresse un fier représentant du folk/pagan metal, un porte-étendard qui lève son drapeau haut dans le ciel, il s'agit des russes d'Arkona.

Bien évidemment, voilà une sortie très attendue après un palmarès comme le leur et un opus du calibre de Goi, Rode, Goi !, de quoi espérer beaucoup. Après un EP paru également cette année, voici Slovo, le nouveau petit bébé des russes. Perpétuera-t-il la lignée des réussites ?

Malheureusement, il ne faut pas très longtemps avant de comprendre qu'à force de vouloir trop en faire, Arkona s’emmêle les pinceaux et ne parvient pas à captiver bien longtemps, en s'empêtrant sans relâche dans une mixture trop décousue et incohérente pour prétendre révolutionner une discographie devenant conséquence. Là où Goi, Rode, Goi ! était long, dense mais prenant, Slovo part dans tous les sens et le fil conducteur est brisé dès les premiers instants. Entre des structures trop alambiquées, faussement maîtrisées et affreusement bordéliques, des titres qui sont trop difficilement assimilables, la faute à moult longueurs, ou encore une production qui aurait pu se révéler bien meilleure (le mixage est loin d'être adroit, plaçant le chant de Masha et les instruments traditionnels bien trop en avant, au détriment de guitares noyées dans le fond et faisant perdre une puissance considérable). Du coup, c'est l'incompréhension qui prime. Comment nos amis de l'Est, nos russes favoris qui papillonnaient de belles oeuvres en pépites, peuvent-ils revenir sur le devant de la scène avec pareille régression ?

Et se cacher derrière une tournure symphonique en toc ne change rien à l'étendue des dégats. La chorale des étudiants du conservatoire de Moscou et l'orchestre de Kazan, auxquels il va falloir ajouter les talents de la ravissante violoniste d'Eluveitie et du multi-instrumentaliste Volk ne sont que les arbres qui tentent de cacher la forêt. Le groupe se perd, ne parvient pas encore à contrôler à la perfection (voir assez bien pour convaincre, c'est ça qui est tragique) ce nouveau vi(r/s)age, ce chemin emprunté qui aurait pu être si profitable, et qui, en réalité, ne fait qu'accentuer les défauts dominants dans Slovo. Il ne faut pas oublier la partie traditionnelle, car après tout nous sommes bien dans l'univers pagan metal, et celle-ci vient évidemment sauver la mise aux compositions. Elle est savamment utilisée, joliment employée, elle n'est pas là pour faire décoration typée sapin de Noël. Elle s’incruste à merveille, sans difficultés, et c'est finalement dans ce genre d'exercices que nos russes s'en tirent le mieux. Toutefois, prenez garde, car là encore, voilà un point noir au tableau : les clichés. Et si auparavant, la bande à Masha les évitaient soigneusement, ils se jettent parfois en plein dedans, flagrant sur un « Leshiy » ridiculement bal-musette, foire à la saucisse, qui, avec son accordéon, se couvre plus de ridicule que ne démontre quelconques vertus, hélas.

Ce que l'on ne peut pas reprocher à Arkona, c'est de ne pas prendre de risque. Certes, le résultat n'est pas encore tout à fait mature et des efforts vont devoir être fournis pour atteindre une plus grande cohérence, mais au moins, les slaves ont le mérite de tenter quelque chose de nouveau, d'évoluer, de changer et de montrer une nouvelle facette de leur personnalité. Et ça, c'est tout à leur honneur, car au lieu de stagner, de rester assis sur ses lauriers, le combo innove, décide d'emprunter des chemins différents. Et mine de rien, impossible également de reprocher trop d'homogénéité, tant la diversité est de mise. On passe régulièrement du calme à la tempête, de l'ouragan à la belle brise d'Automne caressant le visage, avec la belle voix de la jolie russe qui berce, chaude et enveloppante. Elle est géniale, d'ailleurs, cette chanteuse, et c'est toujours un atout pour la formation. Elle alterne toujours d'un registre à un autre avec brio, son russe n'est pas rouillé, son timbre vraiment plaisant et sa voix a même plus de maturité. Dommage qu'elle nous fasse le pire (« Leshiy », complètement hors-sujet la demoiselle) mais aussi, tant mieux qu'elle nous fasse le meilleur (« Arkaim » ou la séduisante « Tam Za Tumanami »). Sinon, côté ambiance, on peut trouver du sombre (« Arkaim », « Zakliatie ») comme du joyeux (« Stenka Na Stenku »), passer de l'agressivité de riffs tranchants et bien placés (l'agréable « Nikogda ») à la douceur d'une incantation ou d'une légère ballade dans la langue maternelle des membres du groupe, tout ce qu'il faut pour combler les fans. Dommage que les défauts trop récurrents ne parviennent pas à faire s'envoler la musique vers des cieux plus cléments.

Les titres eux-mêmes laissent perplexe tant ils se suivent mais ne se ressemblent pas, et gagneraient à, au contraire, faire preuve d'un peu plus de fluidité et de liaisons. Et il est difficile de retenir un refrain ou une mélodie en particulier, l'accroche n'étant absolument pas la qualité principale de notre quintet qui s'amuse à déstabiliser les auditeurs. Et ça passe ou sa casse, et dans le cas présent, ça casse. Si l'on ne ressent pas d'ennui, on est en revanche décontenancés par ces passages allant sans arrêt du coq à l'âne, ne laissant qu'un faible répit. A force de vouloir toucher à tout, Arkona se perd un peu dans le fouillis.

C'est sur une pointe de déception que s'achève un album non pas mauvais, mais qui n'est clairement pas à la hauteur des réalisations précédentes. Loin de la qualité d'un Vo Slavu Velikim ou d'un Goi, Rode, Goi !, ce nouveau brûlot peine à emporter l'adhésion. Et un tel constat est bien navrant car nos russes sont capables de faire bien mieux et l'ont prouvés à moult reprises. Il ne reste plus qu'à espérer qu'Arkona sera prêt à gravir à nouveau une pente ascendante avec l'opus qui suivra Slovo, car ce dernier n'est pas à la hauteur de ce que l'on pouvait attendre d'un combo expérimenté et leader de la scène.

 

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NOTE DE L'AUTEUR : 6 / 10



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