Running Wild – Shadowmaker

Sombre pirate...

"Sur Shadowmaker, aucun morceau ne m'a demandé plus d'une demi-heure de travail !" (Rolf Kasparek dans le Rock Hard France n°120, au sujet du nouvel album Running Wild en vente depuis le 27 avril 2012 chez SPV/Steamhammer)

Une telle déclaration peut tout aussi bien relever du génie que de l'inconscience, voire d'un certain foutage de gueule - au choix. Et à l'écoute de ce Shadowmaker, comeback totalement inattendu de Running Wild alors que son leader en avait annoncé une fin définitive en 2009, on n'a plus aucun doute. Monsieur "Rock'n'Rolf" s'est profondément fourvoyé avec cette nouvelle galette, point de suspense ici mais peu importe tant les avis semblent unanimes un peu partout dans la presse ou sur le net.

Déjà qu'au moment de découvrir le résultat sonore de ce nouveau brûlot on ne peut qu'être submergé par la déception et l'incompréhension, ces terribles sentiments se voient renforcés voire décuplés à la lecture de l'entrevue que le maître d'armes allemand a bien voulu accorder au magazine metal français n°1. Entre cynisme et mauvaise foi, nous pouvons y lire pêle-mêle :

"Certaines chansons ramènent vraiment à l'essence de Running Wild."
"Je ne composerai plus jamais de titres comme "Whirlwind" où le tempo est soutenu du début à la fin, cela ne me plaît plus."

(Notez donc au passage la petite contradiction entre ces deux citations...)

"Je voulais que les chansons soient fraîches et spontanées"
"Tous mes proches et mes amis m'ont dit que Shadowmaker était probablement le meilleur opus jamais conçu par Running Wild"

(Rolf, franchement, si c'est le cas... change d'amis !)

Et on en passe. A partir de là, à défaut d'être inspiré par un album sans âme, on en vient à trouver un angle d'écriture pour une chronique car on comprend mieux, à la lecture de ces quelques mots, que l'ami Kasparek n'a pas vraiment d'excuses. Il s'est loupé... et ne l'avoue pas, pire même il s'enfonce, persiste et signe. Jusqu'où creusera-t-il ?

Running Wild Rolf Kasparek

Car pour le côté spontané et frais, on repassera. Ce n'est pas parce qu'un morceau est venu en 10 ou 30 minutes qu'il est spécialement spontané, il peut s'avérer tout simplement bâclé et c'est bel et bien ici le cas. Pour la fraîcheur, franchement... non. ce n'est pas parce que l'artiste s'amuse d'un "Me & the Boys" aux paroles adolescentes qu'on peut y voir de la fraîcheur, cela aurait plutôt tendance à ternir l'image d'un tel groupe et d'un musicien que l'on pensait bien au-dessus de ce genre de morceau festif gamin... totalement risible, mais pas même amusant.

Alors c'est bien parce que ce n'est pas notre genre de jeter le bébé avec l'eau du bain, on peut tout de même sauver quelques morceaux potables dans le lot. le single "Rising on the Tide" fonctionne plutôt bien dans le style et s'avère entraînant bien qu'au riff répétitif... mais voici une constante négative qui revient bien souvent sur l'album. Sauvons également le final "Dracula" qui semble un poil plus travaillé ainsi qu'un "Black Shadow" au rythme certes lent mais cohérent. Allez, rajoutons "Sailing Fire" qui, si on est de bonne humeur, peut nous rappeler ce côté pirate d'antan (enfin faut vraiment pas faire son difficile). Pour le reste... Ne soyons pas plus méchants, et concentrons-nous sur ces quelques points positifs.

On peut tout de même se demander pourquoi le pirate allemand s'est mis en tête de composer ainsi des titres bien pauvres et aux relents hard rock quelque peu mal assurés. La réponse semble évidente. Certains l'ignorent peut-être, mais en mettant plus ou moins un terme à Running Wild après le (tout aussi ?) poussif Rogues en Vogue (2005), Rolf s'est tourné vers une musique plus rock, plus calme, avec deux projets : Toxic Taste dont un album est sorti entre temps et une participation dans un combo hard rock bluesy du nom de Giant X. Ainsi a-t-il compris, selon ses propres termes, qu'il ne voulait plus jouer ce heavy speed envolé avec lequel Running Wild avait fait ses marques sur des albums tels que Pile of Skulls ou Black Hand Inn, tous deux des classiques du genre. Malgré un ultime sursaut d'orgueil en 2002 avec le très bon The Brotherhood, il ne voulait plus composer dans ce style, cela ne lui étant plus naturel, ni sincère... Sincère ? Il ne semble pourtant pas spécialement l'être au moment de répondre aux questions de divers journalistes, avançant quelques arguments assez étonnants. Mais alors, pourquoi ressusciter Running Wild ?

La faute est avant tout patronymique : ce Shadowmaker n'aurait jamais dû être affublé du nom légendaire d'un groupe clairement disparu aujourd'hui. Quel fan de ce pirate metal racé pourra se targuer d'apprécier un tel opus aujourd'hui ? Certes, une personne découvrant Running Wild avec cet album (ouch...) ne sera pas foncièrement choqué, même si cela ne sauvera en rien l'aspect musical globalement peu inspiré et assez pauvre, mais Rock'n'Rolf lance ici comme une insulte à ses suiveurs originels. Une tristesse devrait donc accabler la plupart d'entre eux, un peu comme quand un capitaine abandonne son navire et ses moussaillons à la dérive. Le pire dans cette histoire c'est que leur héros semble si fier et satisfait du résultat final qu'il compte remettre très vite le couvert...

"Je peux également vous promettre qu'il connaîtra rapidement un successeur.", déclare-t-il.

(sic)

Rapidement ? C'est sûr que s'il suit la même logique, on peut en avoir quatre par an... (re-sic)

Rolf Kasparek Running Wild

Pour le mot de la fin, je vous laisse avec un dialogue philosophique et martime de cette célèbre bande-dessinée française où des gaulois entrent souvent en "collision" avec une bande de pirates quelque peu perdus.

"Abyssus abyssum invocat!"
"Tais-toi et nage..."

Note : 3.5/10

PS : Retrouvez l'intégralité de l'entrevue dont les passages sont extraits ci-dessus aux pages 50 et 51 du Rock Hard France sorti au début du mois d'avril.
 

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NOTE DE L'AUTEUR : 4 / 10



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