Keldian – Journey of Souls (2008)


Un voyage pour l'âme

Parfois la vie nous réserve de ces surprises qu'on n'oserait à peine imaginer même dans les plus beaux rêves. Et lorsque celles-ci s'avèrent musicales, notre esprit s'éveille avant de partir au loin et se laisser ainsi transporter à l'infini. Cela tombe plutôt bien, car le groupe norvégien Keldian compose sa musique dans ce but précis, performant une sorte de heavy power finement symphonique aux touches cosmiques, atmosphériques et même AOR. Un savant mélange pour plein d'influences parfaitement digérées, dont l'aperçu que nous laissait le premier opus Heaven's Gate paru en 2007 laissait déjà présager du meilleur. Et le meilleur fut, en mai 2008, lorsque Journey of Souls parut sur l'obscur label Perris Records. Pour un des must de cette même année (en compagnie du dernier Ayreon à date), de cette première décennie du XXIème siècle.

Comment ça, "Keldian" ? Evidemment, peu de gens connaissent, ce groupe étant resté fort discret et quasi en autoprod permanante, mené par un simple duo à la base plutôt éloigné de la musique metal - baignant plus dans l'univers électro-ambiant pour son claviériste Arild Aardalen, les thématiques metal reposant plus sur le guitariste-bassiste-chanteur (rien que ça) Christer Andresen pourtant plus attiré par le hard rock old school façon Europe ou Van Halen, ou le heavy à la Iron Maiden. Cela tombe bien, on peut dire que ces trois groupes posent les bases du moule Keldian, mais associé au "reste" vous ne serez, croyez-moi, pas au bout de vos surprises.

Deux hommes donc, et toutes ces touches aériennes apportées par un seul claviériste qui nous fait pour l'occasion profiter de son passé de DJ électro et fan de musiques à la Vangelis. A partir de là, on commence à comprendre d'où vient la singularité de Keldian, apportant au style "cosmic metal" une tonalité plus tempérée qu'un Prophet of the Last Eclipse de Luca Turilli ou qu'un Dol Ammad, autant de visions à base de LSD ou speed des familles. Bien que la rapidité d'exécution ne soit pas absente chez notre combo norvégien, ce n'est pas sur ce point qu'il parvient à transcender son auditoire, mais bel et bien sur ses atmosphères et ses changements de rythmes souvent implacables.

Keldian band (Norway)

Les guitares ne sont pas spécialement mises en avant tout au long de ce Journey of Souls, mais quand elles claquent on peut dire qu'elles font mal. Des titres comme "Starchildren" (à la limite d'un certain indus) ou "God of War" (et son esprit guerrier viking aux saccades pas loin d'un Amon Amarth) remueront le metalleux le plus traditionnel, tout comme ce passage endiablé et inattendu après le refrain de "The Ghost of Icarus". La plupart des autres riffages s'apparatent plus à un Iron Maiden des familles mais avec une efficacité pour le moins spectactulaire. Ne s'arrêtant pas sur l'électrique, Christer nous fait aussi profiter d'un savoir acoustique très fin (notamment sur la très catchy conclusion "Dreamcatcher", ou le saisissant break de "God of War" qui s'emballe en flamenco tout en retenue et on en passe). En fait, malgré ces effets très positifs, on aurait presque tendance à plus retenir certaines parties de basses assez intenses, quelques coups majesteux par ci par là pour doper une rythmique sans cesse évoluante et saisissante. J'en veux pour preuves ces plans subtils sur "Lords of Polaris" ou "Vinland", ça n'a pas l'air grand chose comme cela mais ce genre d'apport vous change une chanson. A noter que le même bonhomme s'occupe donc également du chant lead en plus de ces instruments... avec un certain brio, pour quelqu'un qui n'est visiblement pas un vocaliste de formation, et qui apporte ainsi une approche différente à la fonction de frontman sonore ; un atout d'originalité supplémentaire pour Keldian.

Un tout saisissant, voici ce qu'est Journey of Souls, avec au final 11 titres ayant chacun une force intrinsèque qui leur est propre. Il y a bien évidemment les hymnes, prenons l'exemple de l'entrée en matière "The Last Frontier" qui ferait pâlir de jalousie un Stratovarius old school, ou bien ce "Reaper" très simple avec ces claviers kitsch mais ô combien retentissants n'étant pas sans rappeler le "Jump" de Van Halen. On a déjà nommé "Dreamcatcher" dans le style, rajoutant aussi la simili-ballade "The Devil in Me" très classique mais finement relevée par ses guests chanteurs à la fois féminins (Anne Marit Bergheim pour le lead que l'on retrouve aussi sur "The Last Frontier", ou Maja Svisdahl et Anette Fodnes pour les choeurs) et masculin (Gjermund Elgenes, surtout pour les choeurs), mais aussi son break classieux folkisant réhaussé d'un violon traditionnel (Gunhild Mathea Olaussen aux manettes) et d'un fiddle (joué par Asle Tronrud). Rien que ça... car oui, Keldian s'entoure de nombreux guests, avec notamment trois batteurs différents utilisés sur ce seul album.

Les chansons "easy listening" ne faisant pas tout, il y a aussi ces joutes épiques assez spectaculaires qui débrident encore plus l'atmosphère au fil des écoutes. En tête, le fameux "Memento Mori", qui à l'instar de la version réalisée par Kamelot (sur The Black Halo) dépasse allègrement les huit minutes, atteignant même les neuf. Rien à voir avec le groupe américain ici, outre le côté Maiden pur jus déjà mentionné on se retrouve lancé avec douceur par un clavier Moog qui n'est pas sans rappeler la fameuse introduction du "Orion" de Metallica et, bien évidemment, Deep Purple. Le reste se déguste tout en subtilité, les ambiances "dream" étant à leur paroxysme. Tout ceci nous mène fort logiquement à vous parler du "Lords of Polaris" (voir ci-dessous) et ses contours grégoriens-Vangelis-cosmiques, pour un décollage immédiat vers les étoiles et un véritable "highlight" de l'album, sans oublier ce "Vinland" qui rappelle aux plus septiques que cette formation est avant tout scandinave et qu'elle ne renie pas ses racines, proposant ainsi un enrobage viking épico-ambiant des plus étonnant. Le regretté Quorthon de Bathory lui-même aurait été saisi par cette tentative des voisins norvégiens.

On pourrait continuer à en parler pendant des heures mais une phrase peut suffire à vous mener vers une écoute qui vaudra bien plus que tous les mots : "Keldian. Delivering melodic sci-fi metal to fans all over the world", comme l'indique l'accroche sur leur site. Il est clair que nous sommes en plein dedans, une musique appelant aux rêves et aux espoirs les plus fous, à écouter peu importe l'humeur dans laquelle on se trouve tant la richesse de ses compositions peut nous conduire vers différents états. ce Journey of Souls constitue donc une perle rare, un écrin trop subtilement caché aux yeux de tous qui se doit d'être révélé et propagé aux oreilles des plus curieux, amateurs de mélodies épiques, de heavy traditionnel, d'ambiances éthérées, d'hymnes acérés. Pour une musique simple et complexe à la fois, inspirée et aux contours uniques. Et cela tombe bien qu'on en reparle, car le groupe refait parler de lui après presque quatre ans de silence en proposant ses deux premiers opus (dont celui-ci donc) en téléchargement gratuit et semblant promettre un troisième album pour bientôt. "Rest assured, our adventure has just begun"... alors croisons les doigts.

9.5/10


Site officiel de Keldian
Télécharger Journey of Souls gratuitement et légalement

 

close

Ne perdez pas un instant

Soyez le premier à être au courant des actus de La Grosse Radio

Nous ne spammons pas ! Consultez notre politique de confidentialité pour plus d’informations.

NOTE DE L'AUTEUR : 9 / 10



Partagez cet article sur vos réseaux sociaux :

Ces articles en relation peuvent aussi vous intéresser...

Ces artistes en relation peuvent aussi vous intéresser...