Jus Osborn, guitariste-chanteur de Electric Wizard

"On avait beaucoup d’agressivité en nous avant d’aborder l’album, beaucoup de colère."

Sympa cette interview dans ce bar Metal près de la Bastille. De plus, le Dr Feelgood propose à la pression la fameuse Trooper… Up the Irons ! Au fond du bar, Jus Oborn et Liz Buckingham ont l’air décontractés et souriants…

Jus me précise qu’il est totalement sourd et commence l’interview par un énorme rot en s’excusant parce qu’il a déjà commencé une bière…

Lionel / Born 666 : Ma première question est…

Jus Oborn : …Tu sais tu dois parler beaucoup plus fort car j’ai écouté beaucoup de musique trop fort dans ma vie…

Ça tombe bien, au Hellfest cette année votre son était très fort, très lourd, c’était voulu ?

Oui bien sûr, tu sais quand j’étais jeune je voulais que tout soit lourd. J’ai vu Motörhead sur scène et j’ai été sourd pendant trois jours. J’avais mes copains qui me disaient… « Hé, tu as vu Motörhead hier soir ? », et je leur répondais « Quoi ? Quoi ? »…tu sais pour moi (me montrant sa main allant d’avant en arrière vers son ventre) je veux que cela se ressente là : « boum-boum-boum ». Après pendant plusieurs jours j’entendais des « whooowhooowhooo » dans mes oreilles… [Rires]

Après Black Masses…on a Time to Die…j’imagine qu’il était temps pour nous de mourir ?

Oui bien sûr, après Black Masses ! Mais c’est un concept. Avec Black Masses on devait découvrir les mystères. Black Masses c’est ce qu’on entendait, maintenant c’est la messe noire. On vit pour mourir et personne ne peut nous tuer. On n’est pas des psychopathes, on revient du monde des morts. On est des morts-vivants et quoique tu puisses faire, tu ne peux empêcher les morts-vivants de se mettre en travers de ton chemin.
 

Electric Wizard


Il vous a quand même fallu 4 ans pour le faire…

Il y a plusieurs raisons à cela. Tout d’abord des problèmes légaux qui nous ont pris la tête et qui a entrainé un arrêt de l’album pendant assez longtemps. Ok, on l’a terminé il y a un bout de temps mais, on est créatif, on doit se poser, créer une musique. Je ne veux pas que notre vie soit « Bam – Bam – Bam » album-tournée-album-tournée... Pour cet album il y a eu une solution naturelle. Ensuite on a dû trouver un studio, tout n’a pas été simple, mais on s’en est tout de même sorti. Le processus d’écriture à été long, on se demandait quand on allait enfin terminer l’album.

As-tu été influencé par le film Psychomania (film d'horreur britannique réalisé par Don Sharp et sorti en 1972. Le long-métrage est également connu sous le nom The Death Wheelers et met pour la première fois en scène au cinéma les Hell's Angels britanniques). Dans ce film de bikers on retrouve Tom, le chef de bande qui fait un pacte avec le Diable pour revenir du monde des morts ?

Oui bien sûr 100% de l’album a été influencé par ce film (rire), quand il tombe du pont "aahhhhhh" en se suicidant pour donner l’exemple aux membres de sa bande afin d’obtenir l’immortalité. On le fera peut être ce soir et on sera de retour demain [rires]. Mais c’est un film important pour moi.

Maintenant Clayton Burgess de Satan's Satyrs vous a rejoint, vous avez fait un deal… "Doom accros the ocean" ?

[Rires] Oui j’apprécie ce mec depuis quelques années, très impressionné par leur musicalité, leur attitude, les mélodies sont très belles. On a trouvé en la personne de Clayton un sacré bon et jeune musicien. Il est très anglophile et adore l’Angleterre. Il lui tarde de venir. Il n’était pas impressionné de rejoindre un groupe européen qui a déjà un certain passé.
 

Jus Osborn


Au début de "Incense for the Damned" on entend comme la bande son d’un film avec le son d’une rivière, c’est quoi exactement ?

C’est basé sur le meurtre de Rick Kasso qu’il avait fait à Northport, Long Island, le 16 Juin 1984 sous une forme de rituel satanique sous l’emprise de drogues. Il était le héros heavy metal meurtrier connu sous le nom d’Acid King [rires]. Dans les news, les journalistes disaient "oui c’est un assassin, et en plus c’est un fan de heavy metal" (au moment de son arrestation, il portait d’ailleurs un T-shirt AC/DC), il était fan de Black Sabbath, Judas Priest, Ozzy Osbourne… J’ai essayé de reproduire cette ambiance, cette époque de l’escapade meurtrière qui avait fait la une des journaux et qui avait fait peur à la face du monde…et l’eau qu’on entend c’est qu’un jour quand on meurt, on passe par un stade liquide. Le liquide, c’est la mort. Et du coup on fait de la musique qui revient du monde des morts.

Et à la fin de "We Love The Dead" on entend "…and 666". Encore un film ?

C’est tiré d’un documentaire, d’une nouvelle : j’aime bien faire cela. J’utilise de nombreuses métaphores tirées de l’horreur pour décrire la réalité. Ca fait vrai, de vraies histoires qui font peur. Il y a tellement d’horreur dans les vraies histoires. Tu peux sentir la vraie peur de cette réalité.
Quand le gamin dit à la fin de "Destroy Those Who Love God" il est totalement endoctriné dans un groupe satanique, dédié au meurtre. Et on voit que ce n’est pas un jeu. Ça pourrait devenir dangereux.

Pour trouver ces idées tu dois procéder d’une certaine manière pour trouver tes idées…

Pour écrire, ça devient évident après toutes ces années, on doit être influencé par ce qui se passe autour de nous, on n’a pas besoin de se dire "bon ok on va faire de la bonne musique", mais j’aime quand même être isolé pour être créatif.


Electric Wizard


...la nuit ?

Non pas obligatoirement, ça peut être n’importe quand pas : sur la plage, la nuit, sous les étoiles [rires], ça peut se passer n’importe quand.

La drogue influence encore ta façon d’écrire ?

Ça c’est une question difficile pour moi. J’étais concerné par la drogue avant de créer le groupe. Quand j’étais jeune, dans une ville très pauvre, sans emploi, la plupart de mes amis se shootaient [il mime le mec qui se fait une intraveineuse]. Parmi eux, nombreux étaient ceux qui allaient en Hollande acheter du crack. C’était très sombre et je me disais que ce n’était peut-être qu'une partie de ma vie mais pas le but de mon existence. Et peut-être que si je n’avais pas été dans un groupe de musique j’aurais passé mon temps à prendre des drogues. Et franchement tout ça c’est de la merde et je ne le recommande à personne.

Tu t’es à nouveau chargé de l’illustration de l’album ? Tu fais comment tu travailles avec de la peinture à l’huile ?

Non j’aime les vieux Comics  des années 70, comme Creepy, Eerie, Vault of Horror (comics américain d’horreur) des trucs comme ça, je préfère ces vieux magazines en noir et blanc. Je prends une feuille et je travaille en noir et blanc et j’utilise de la peinture à l’eau. Pour moi la chose la plus importante c’est que chaque personne dans le groupe est sa propre vision de ce que cela représente.

Je trouve Time to Die, plus lourd, plus doom…

C’est l’attitude de l’album, on avait beaucoup d’agressivité en nous avant d’aborder l’album, beaucoup de colère. On avait l’intention de tuer, d’attaquer, et on voulait que l’auditeur ressente cette envie, cette violence. C’est difficile de dire à quelqu’un comment il faut faire pour capturer cet esprit. [rires] On devait capter ce sentiment. Le producteur nous encourageait dans ce sens en nous répétant "vas-y, recommence, faits le encore…" Et puis tu sais quand tu l’as, quand la prise est bonne.

Lionel : Te souviens-tu de cette tournée avec Cathedral et Grand Magus qui vous avait vu vous produire à Paris sur la Seine (sur le Batofar en 2006) ?

[Silence] Cette tournée était horrible. Les shows étaient excellents. Mais l’esprit qui régnait entre nous était misérable. On se haïssait et on se retrouvait chaque soir pour jouer ensemble. Bon c’est de la merde et je n’ai plus envie d’en parler…

Bon...

J’ai une chose à rajouter. Comme on vendait plus de merchandising qu’eux ils sont devenus épouvantables avec nous et ont été vexés.

Vous avez déjà tourné avec Reverend Bizarre ?

Oui c’était une petite tournée qui s’appelait,…mince c’était il y a longtemps…il y avait 4 festivals, [impossible de mettre un nom sur cette tournée] pour nous ce sont nos meilleurs amis que l’on ait eu. Ils étaient là quand on a commencé.
 

Electric Wizard


Tu aimes les vieux films, comment expliques-tu ce mélange entre l’érotisme et l’horreur que l’on y retrouve ? années 60/70…

Je ne sais pas [rires]

J’ai lu que tu étais en train d’écrire un livre sur l’histoire des films pornos en Europe dans les années 60…

[Rire général] en vérité j’essaye de le faire depuis quelques années mais j’avoue que ce n’est pas facile de le faire. Tu sais c’est un monde dans lequel plus personne ne veut se souvenir de quoi que ce soit. [rires]

Et peux-tu nous conseiller le meilleur film porno des années 60 ?

Je dirai les films de Lasse Braun [réalisateur italo-français] il mettait beaucoup de sensations dans ses films. Des films assez courts mais assez géniaux, avec toujours de drôles d’histoires. C’est le meilleur sans aucun doute [rires].

J’imagine que de nos jours c’est beaucoup plus facile pour toi de trouver des vieux films d’épouvantes des années 60 ou 70 grâce à Internet qu’il y a 20 ans?

Ah, oui à l’époque j’allais dans les vidéo stores jusqu’à Helsinki pour fouiller dans les rayons. Tu devais les trouver physiquement. L’avantage que j’ai maintenant, c’est comme on tourne beaucoup j’ai plus d’occasion de trouver des vieux films un peu partout dans de vieilles boutiques. C’est toujours aussi passionnant de trouver des trucs de dingues. Car avec Internet c’est tout de même moins sympa de chercher même si on peut tout y trouver mais l’intérêt est moins drôle.

Tu es déjà tombé sur un Snuff Movie ? [film, généralement pornographique, qui met en scène la torture et le meurtre d'une ou plusieurs personnes.]

Non, j’en ai jamais trouvé, du moins jamais un "vrai". Et le pense d’ailleurs que cela n’existe pas.

C’est donc un mythe ?

Oui, absolument. Je pense qu’il y a des personnes qui vendent soit disant des snuff movies mais ce sont des faux. J’en ai un mais on se rend quand même compte que ce n’est pas un vrai ; et franchement tu serais stupide de croire que c’est un vrai… [rires]. Je me souviens qu’il y avait un film comme ça qui avait soit disant été fait à seulement 10 exemplaires et qu’on disait que c’était le pire film d’horreur jamais réalisé. Un jour je l’ai trouvé en DVD [rires] et on voyait que les trucages étaient trop flagrants.

Il y a trois semaines, il y avait un nouveau festival en France, le Fall of Summer dans lesquels Venom et Pentagram sont venus joués. Pourquoi as-tu toujours autant de respect pour ces deux groupes ?

Ils n’ont jamais rien changé. Ils ont donné les bases d’un côté sombre du heavy metal. Et ils n’ont rien perdu de leur attitude. A l’époque de Venom, j’étais un jeune teenager. J’étais en plein développement en tant que fan de metal. Et Pentagram m’a bien sûr influencé car par la suite j’ai créé mon groupe de doom. Et puis ils ne nous ont jamais abandonné.

Mais tu n’as jamais renié non plus ton admiration pour MC5, les Stooges, Alice Cooper…

Pour moi le vrai rock n’ roll, enfin le vrai heavyrock pour moi c’est les Stooges, c’est le début du heavy metal des années 60 avec cet esprit punk. Ils étaient très agressifs, très "dans la tronche", les premiers groupes de metal.

Lionel : Et pourtant Venom c’est le début du Black Metal. Tu as suivi la scène nordique ?

Jus : Je ne pouvais pas passer à côté de cette scène en grandissant avec les échanges de cassettes, j’avais ce feeling que je ressentais en moi et je les voyais comme des héros et je voulais faire quelque chose sans les copier mais avec ce même état d’esprit…mais bon j’aimais bien.

Photos : © 2014 Lionel /Born 666
Toute reproduction interdite sans autorisation écrite du photographe.

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