Ju, chanteur-guitariste et fondateur de Psykup

De retour depuis près de deux ans, et avec un nouvel album en préparation, Psykup opère un retour en force sur la scène française avec une réédition de son premier album, Le Temps de la Réflexion, disponible depuis le 26 février, et une tournée anniversaire centrée autour de ce dernier. L'occasion pour nous de nous entretenir avec Ju - chanteur, guitariste et fondateur du groupe - quelques heures avant la première date de la tournée.

Salut Ju, pourquoi une réédition du Temps de la Réflexion ?

Ju : Salut ! C'était à l'occasion de l'anniversaire de l'album, qui a été créé il y a quinze ans. Là ,actuellement, l'album est épuisé, quasiment impossible à trouver, et comme on était en train d'écrire un nouvel album et qu'on avait une période de creux d'ici à sa sortie, on s'est dit que c'était une bonne occasion de sortir un bel objet, d'en faire un vinyle, vu qu'on en avait encore jamais sorti. De fil en aiguille on a remasterisé le son, on a refait l'artwork, rajouté des bonus sur la version CD... Ca nous permet de sortir un bel album pour les fans.

La version remasterisée sonne résolument plus moderne, c'était une approche du son que vous aviez déjà en tête quand vous vous êtes lancés sur le projet ?

Ju : La difficulté, c'était de conserver les mêmes pistes qu'à l'époque, sachant qu'on était très jeunes lors de l'enregistrement et qu'il est difficile par ailleurs de faire des étincelles avec un simple master. C'est David Castel (Vidda, guitariste du groupe, NDLR.) qui a refait le master à partir des anciennes pistes, en rajoutant de la brillance, du corps, ce qui donne un rendu final un peu plus chaleureux et un peu plus moderne.

La réédition de l'album comporte également un nouvel artwork. Une volonté de votre part de proposer le plus de nouveautés possibles sur le projet ?

Ju : C'est Jouch qui s'est occupé du visuel de l'album, étant donné qu'on avait déjà bossé avec lui sur celui du troisième opus (We Love You All, NDLR). En revanche, les visuels des deux premiers albums - y compris celui du Temps de la Réflexion - étaient de notre ancien graphiste, Pierre Guiol, avec qui on a totalement perdu contact. Du coup on est naturellement revenus vers Jouch, en lui confiant la tâche compliquée de faire du neuf avec du vieux ; et il est arrivé avec ce travail de fou qui rappelle à la fois l'ancien artwork, en reprenant la même teinte bleutée, le petit personnage en train de lire un journal qui était déjà présent à l'origine... Et à la fois qui part sur un nouveau délire avec ce mélange de labyrinthe et d'autruche qui parlera aux fans de la première heure. Au final c'est exactement ce qu'on voulait, puisque les gens reconnaissent quand même le délire, la signature du groupe, et pourtant le visuel change tout dans la manière dont on reçoit le disque en tant qu'objet. Jouch est très bon pour ce genre de choses, d'autant plus qu'il a dû travailler dans l'urgence et qu'il nous a sorti un vinyle qui est hyper beau...

Quand tu parles de travailler dans l'urgence, le projet est né vers quelle période ?

Ju : On a commencé à en parler avec Mika, notre nouveau manager (ancien manager d'Eths, NDLR), alors qu'on était en train de travailler sur le projet de tournée anniversaire du premier album, et il a boosté le groupe à mort sur cette idée de réédition. Le projet s'est décidé vers octobre dernier, tout s'est très vite enchaîné, ce qui fait qu'on a dû travailler très vite et d'arrache-pied pour tenir les délais ! On a lancé une campagne de financement participatif sur internet pour que ce soit jouable financièrement, et à partir de là, avec l'aide de Mika qui a fourni un gros boulot, on a mis toutes nos forces en commun pour que le projet aboutisse.

Après avoir pris une pause en 2009 et être revenu en 2014 à l'occasion des dix ans de Jerkov Musiques, vous semblez être encore plus attendus par le public qu'à votre départ. La rareté est un bon moteur pour un groupe ?

Ju : A la base, c'est vraiment la reformation du groupe pour l'anniversaire de Jerkov qui a mis le feu aux poudres, avec une première date au Nouveau Casino de Paris (le 21/11/2014, NDLR) qui a été très vite sold out, et où on s'est rendus compte qu'il y avait une véritable demande du public, qui comptait sur notre retour, avec une ambiance de fou sur scène et dans la fosse. Donc la motivation des fans de Psykup nous a poussés à faire quelques dates supplémentaires, et de fil en aiguille on a sélectionné les dates qui nous permettraient de relancer Psykup dans les meilleurs conditions possibles. Tout est né de l'envie des fans, la fanbase de Psykup est assez hardcore, c'est vraiment un plaisir de se sentir soutenu et poussé de la sorte.

Vous débutez donc ce soir la tournée anniversaire du premier album, qui sera joué dans son intégralité et dans l'ordre. En quoi est-ce un exercice différent à aborder par rapport à un concert "traditionnel", plus libre dans le choix de la setlist ?

Ju : La première chose, c'est que ça nous permet de redécouvrir l'album, qui était finalement assez cohérent à l'époque. De réadapter certains morceaux avec l'expérience, de mieux les jouer aussi ! Ca permet surtout de réévaluer des vieux morceaux qu'on avait pas forcément l'habitude de jouer. Certains morceaux n'ont pas été joués depuis plus de dix ans ! Je redécouvre notamment le morceau "Martin X" sur cet album, qui est un morceau assez à part, qui arrive sur le set après un assez gros enchaînement de tubes et qui fait office de pause pendant le concert. Ce qui fait qu'avec son univers particulier il a parfaitement sa place au final !

Pour revenir sur le nouveau visuel, on y trouve deux symboles assez lourds de sens au regard de la musique du groupe, l'Autruche et le Labyrinthe. Le Labyrinthe semble être une illustration de la complexité, de l'aspect cérébral et calculé de vos compositions, tandis que l'Autruche au contraire s'affirme un témoin de la folie, de l'atmosphère surréaliste que vous transmettez sur scène. Est-ce que ce n'est pas cette ambiguïté entre profondeur et second degré qui fait votre originalité dans la scène française ?

Ju : C'est exactement ça : Psykup c'est à la fois très débridé, complètement fou et rock 'n roll, ce qui est vraiment barge sur scène puisqu'on peut se permettre de faire n'importe quoi de manière assez libre ; et en même temps c'est une musique très carrée, très quantifiée avec beaucoup de riffs compliqués. C'est un véritable équilibre à trouver sur scène puisque la musique du groupe est très écrite à la base, mais qu'on a toujours voulu garder un espace pour l'improvisation, pour les conneries, avec un côté théâtral qui permet de mettre l'ambiance dans le public. Par exemple, le morceau "L'Autruche" est un morceau que j'adore sur scène parce que quand on a des pauses, on s'en sert pour faire des trucs débiles. C'est quelque chose qu'on faisait beaucoup aux débuts du groupe et qu'on avait un peu perdu de vue, et finalement on revient de plus en plus à cet esprit premier qui est de jouer avec les morceaux et de se faire plaisir. Souvent quand les gens viennent nous voir pour la première fois après avoir écouté l'album ils s'attendent à quelque chose de très carré, avec des musiciens qui ont les yeux rivés sur leurs instruments ; c'est à nous derrière de lâcher les chiens et de les surprendre.

Avec un album qui s'intitule Le Temps de la Réflexion, finalement, vous appelez davantage à la réflexion ou au lâcher-prise ?

Ju : A l'origine le titre de l'album était surtout une référence au temps que nous avait pris la composition des morceaux, étant donné qu'on a eu huit ans de maturation avant de sortir le disque. Après, l'appel à la réflexion c'était surtout une manière de dire aux gens de se poser, de réfléchir et de penser positif, d'apporter une énergie positive qui est au centre de la musique de Psykup. C'est toute la difficulté avec Psykup, de faire la part des choses entre le premier degré et le second degré, puisqu'on est aussi beaucoup dans la déconne. Je pense qu'il faut un certain recul pour apprécier notre musique puisqu'on joue sur les deux tableaux, sur le premier et sur le second degré. Après, à chacun de rentrer dans le délire et de faire la part des choses.

Ce second degré, vous l'assumez dès le départ avec ce symbole de l'autruche. Vous avez même souvent qualifié votre style "d'autruche-core" à de nombreuses reprises. C'est une image qui est née du morceau "L'Autruche" (présent sur Le Temps de la Réflexion et déjà présent sur le premier EP du groupe, Sors La Tête) ou est-ce que c'était une idée que vous aviez déjà avant de le composer ?

Ju : C'est quelque chose qui est né assez naturellement quand j'ai composé "L'Autruche". J'avais seize ans à l'époque, c'est l'un des premiers morceaux que j'avais composés pour le groupe et je cherchais à faire un morceau long, avec beaucoup de parties complexes... Très vite j'ai eu cette image de l'autruche qui enfouit sa tête dans le sable, comme une invitation à se sortir la tête du sable et à élargir son point de vue. Ensuite, de fil en aiguille, l'autruche est devenue notre emblême parce qu'on trouvait cool d'être représentés par un animal assez décalé dans l'univers du metal, de jouer avec les clichés du style et de s'en amuser. A l'époque tout le monde parlait de néo-metal, donc nous "autruche-core" ça nous faisait marrer ! D'autant plus que l'autruche c'est à la fois un animal assez rigolo, qui ne ressemble à rien, et à la fois un animal agressif, qui peut avoir la gnaque ; donc c'était assez représentatif de notre musique.

La scène metal actuelle se fragmente de plus en plus en différentes scènes bien déterminées, et aux styles souvent assez prévisibles. Dans une ère médiatique où tout va de plus en plus vite, est-ce que ce n'est pas justement ce temps de la réflexion qui manque aux jeunes formations pour proposer quelque chose de réellement novateur ?

Ju : On est dans une époque très positive pour la musique dans la mesure où avec internet, aujourd'hui, tout le monde a accès à tout, ce qui était loin d'être le cas quand on a commencé en 1995. Après le risque c'est de tomber dans la précipitation : parce qu'on a les moyens d'enregistrer et de sortir quelque chose très vite, on balance quelque chose qui n'est pas forcément finalisé, alors qu'on sait à peine jouer les morceaux sur scène... Finalement l'auditeur se retrouve très vite submergé d'infos, et peut passer à côté de groupes très prometteurs qui essaient également de se faire connaître à côté. Mais surtout le problème de cette submersion, c'est qu'il faut absolument se distinguer pour se faire connaître, et qu'on cherche de plus en plus à sortir la vidéo la plus choc ou le morceau qui va faire le buzz à tout prix. Ce n'est pas la conception que je me fais de la musique. Après il y a aussi de très bonnes perles qui sortent, où tu hallucines devant les idées et le niveau technique de certains groupes d'aujourd'hui ! Le tout c'est de trouver un juste milieu au niveau de la communication. Je m'occupe beaucoup de la communication du groupe sur internet, et mon but ce n'est pas de chercher la communication à outrance, d'aller sur le mur des gens ou de répondre absolument aux messages privés ; mais simplement de proposer une information pour que les gens qui sont intéressés puissent y avoir accès.
 

La dernière question est inévitable : vous avez évoqué sur internet le projet d'un nouvel album si le financement participatif était un succès suffisant, ce qui semble être le cas (152% de la somme prévue a été rassemblée par les fans, NDLR). Du coup, où en est ce projet de nouvel album ?

Ju : Je suis en train d'écrire et d'enregistrer des nouveaux morceaux en ce moment même ! Il y a déjà un premier morceau qui est quasiment fini et dont on va faire le clip d'ici la rentrée prochaine, aux alentours d'octobre. On a prévu d'enregistrer l'album cet été, pour pouvoir le sortir en début d'année prochaine, aux alentours de février 2017 si tout va bien. Donc il va falloir que je me mette un peu la pression et que je me dépêche sur la composition !

Interview par Will pour La Grosse Radio.
Merci aux membres du groupes, et à toute l'équipe de la Klonosphère pour l'avoir rendue possible.

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