Sydney Taieb, batteur d’Atlantis Chronicles

Dans le cadre familier et chaleureux du Hard Rock Cafe parisien, nous retrouvons les membres du combo français Atlantis Chronicles, dont le second opus Barton's Odyssey vient de sortir, et nous a fortement emballés. Nous nous attablons avec Sydney, batteur du groupe, pour parler pendant presque une heure de sujets aussi variés que le concept du nouvel album, l'Atlantide, l'état actuel de l'industrie musicale ou encore Star Wars et Retour Vers Le Futur.

Salut Sydney ! Je commence par te remercier de nous accorder un peu de temps pour parler de l’actualité d’Atlantis Chronicles, et en particulier de votre nouvel album Barton’s Odyssey. Peux-tu commencer par présenter rapidement le groupe, pour ceux de nos lecteurs qui ne vous connaîtraient pas encore ?

Sydney : Alors Atlantis Chronicles, c’est un projet qui est né dans les faits en 2010 - je vais t’expliquer pourquoi dans les faits - et issu des cendres du groupe Abyss, première formation montée par Alex et moi. Du coup, changement de nom et renouveau du groupe suite à l’arrivée d’Antoine, et puis pas mal de nouvelles influences. Et on avait aussi besoin de sortir quelque chose de nouveau, on avait besoin de fraîcheur. On a donc changé de nom au profit d’Atlantis Chronicles à l’arrivée d’Antoine en 2010. J’aime pas trop les étiquettes, mais on peut dire qu’on joue du modern death, ou du death prog - certains nous assimilent plus à du death prog, ouais. On a la particularité de n’aborder que des thèmes en rapport avec le milieu océanique. Ça, c’est pour la forme. Après dans le fond, on aborde aussi d’autres sujets qui sont plus liés à la nature humaine, à la civilisation moderne.

Et d’où est venue cette idée de se focaliser sur les thèmes océaniques ?

S : L’idée remonte à l’époque d’Abyss : dès le début, on a toujours aimé l’imagerie de l’océan, et ce qu’elle représente. L’eau, source de toute vie sur Terre, force créatrice mais aussi force destructrice, puisque c’est un élément qu’on ne maîtrise pas du tout, qui donne naissance mais peut aussi reprendre la vie très très vite, sans notion de mal ou de bien. Tout ça, c’est quelque chose qui nous parlait beaucoup, et c’est aussi quelque chose qui est commun à toutes les civilisations. La rêverie, l’immensité… c’est très nourrissant dans un contexte metal pour nous, parce qu’on aime bien rattacher la musique à des images. C’est plus facile pour nous de coller de la musique sur des images que de ne pas avoir de thématique, et d’écrire de la musique pur écrire de la musique.

Rien à voir avec vos origines donc : quand ça parle de mer, on se demande toujours s’il n’y a pas un Breton dans les parages !

S : [rires] C’est vrai ! Mais dans notre cas, il n’y en a pas !

Parlons maintenant de votre second album, Barton’s Odyssey. C’est clairement un concept album : peux-tu nous en dire plus sur la trame narrative et son lien avec le premier opus ?

S : Je ne peux effectivement pas aborder le second album sans parler du premier car les deux histoires son étroitement liées. Le premier est aussi un concept album, dont l’histoire se déroule sur la tracklist. On a William Beebe, explorateur réel du début du vingtième siècle, qui va inventer avec l’aide d’Otis Barton, la Bathysphère, un engin submersible qui lui a permis de descendre à une profondeur de 924 mètres je crois, précisément, ce qui est un record pour l’époque. Dans notre premier album, on a donc pris ce fait historique, on l’a un peu scénarisé pour en faire quelque chose de plus fantastique, de plus sexy. Du coup, dans le premier album, on suit la descente de ce personnage, sa chute vers les profondeurs, et on décrit tout ce qui se déroule sous ses yeux dans cette abysse. Tout ça concerne la forme, et dans le fond on explore tout ce qui est de l’ordre des sensations et des émotions humaines. Il va ressentir des sentiments de panique, la claustrophobie, des moments d’emerveillement aussi, devant tout ce qui peut s’offrir à lui : l’immensite, la flore… tout ça était parfaitement inconnu à cette époque là.

Dans le second album, on a choisi de lier les deux histoires, et Otis Barton va replonger - cette partie est complètement fictive - sur les traces de William Beebe, qui a disparu à la fin du premier album. Il va se retrouver nez à nez avec un événement planétaire, qui est la destruction du monde par les eaux. Il y a donc une notion d’apocalypse, mais pas au sens biblique d’une destruction manichéenne. C’est plutôt au sens de la fin d’un cycle, et du début d’un nouveau, qui mène à la résurgence d’une nouvelle Terre, qui serait potentiellement la fameuse Atlantide. Et cette Atlantide, on la décrit comme quelque chose qui va arriver, plutôt que comme quelque chose qui s’est déjà produit. Encore une fois, on a un fond sous-jacent, qui va nous permettre en fin de compte d’analyser cette destruction, et d’avoir un regard sur l’humanité, sur pourquoi ce ne serait pas forcément quelque chose de mauvais. Comme une suite logique des événements qui mènerait vers quelque chose de plus positif. Il s’agit de casser un peu ce code d’apocalypse biblique, au sens religieux, et de dépeindre la fin d’un cycle débouchant sur une nouvelle humanité “2.0” qui a appris de ses erreurs. C’est aussi très utopique, puisque c’est une réalité qui n’existe pas et qui n’existera peut-être jamais, mais ça fait partie de notre fiction et de l’analyse personnelle qu’on a du monde d’aujourd’hui.

Cette apocalypse est donc plutôt une forme d’espoir au final…

S : Exactement. Plutôt une vision d’espoir pour la planète que pour l’humanité, mais avec quelques survivants qui ont appris des erreurs du passé. Dans cet album, on va donc pouvoir suivre le voyage d’Otis Barton, qui va apparaître plusieurs fois ponctuellement, et devenir le fil rouge à travers cette voix off qu’on entend régulièrement dans l’album. C’est en fait la voix d’Otis Barton, qui écrit son journal de bord, que l’on peut retrouver dans le livret de l’album, comme une sorte de récit passé et oublié qui ressort pour être raconté à cette humanité “2.0” vivant des millénaires après l'apocalypse. Et on retrouve en Otis Barton le seul témoin de ce bouleversement, de ce changement sur la planète.

Est-ce que dans cette logique, on peut imaginer un troisième album qui viendrait clôturer une trilogie ?

S : [rires] Alors c’est un sujet qui a donné lieu à beaucoup de discussions dans la journée. Mais je ne pense pas qu’on ira sur un troisième opus, parce que personnellement, je trouve que Retour Vers Le Futur II c’était bien, mais après… Alien, il n’aurait dû y en avoir que deux à mon sens [rires]. Nous aussi on apprend des erreurs de l’humanité si tu veux, on se nourrit énormément de pop-culture, de littérature, de cinéma, de jeux vidéos… Et il y a des suites qui sont de trop, des fois.

Il y avait Star Wars Épisode VI pourtant !

S : C'est vrai ! [rires] Donc je ne pense pas qu’on aille sur un troisième volet, même si je ne peux pas te le dire avec certitude, puisqu’on sort tout juste le deuxième. Je pense qu’on ira vers quelque chose de nouveau, toujours dans l’univers marin, mais avec d’autres idées sous-jacente sur et d’autres themes qui nous tiennent à cœur.

Votre imagerie rappelle forcément Jules Verne ou encore l’univers steampunk. Vous avez d’autres influences littéraires ou autres en particulier ?

S : Tu mets le doigt dessus, c’est évident qu’il y a des influences issues de la pop-culture, et Jules Verne en fait partie. Et l’œuvre de Jules Verne a donné naissance à d’autres choses, au cinéma, en peinture, ou encore des attractions à Disneyland ! C’est ancré dans la pop-culture en fin de compte. Donc oui, évidemment ça nous a influencés. Je te parlais de jeux vidéos, je peux citer Bioshock par exemple, qui est aussi je pense très influencé par l’œuvre de Jules Verne. Après, on veut aussi se détacher de ces influences, on ne veut pas copier-coller. Oui steampunk, oui Jules Verne, mais pas que. Dans les influences littéraires, on va trouver un peu de Lovecraft, évidemment Cthulhu, qu’on ne pointe pas forcément du doigt dans l’album, mais qui fait partie du bestiaire du premier album notamment. Avec d’autres noms, puisqu’on utilise les noms scientifiques des créatures décrites comme imaginaires. En résumé, la forme est très influencée par la pop-culture. Pour le fond, je sais qu’Antoine s’est beaucoup inspiré du bouddhisme - même si ça fait un peu pompeux, vu que ca se rapproche d’une culture plus marginale. Lui n’est pas bouddhiste, mais il y trouve un peu son compte sur les questions qu’il se pose sur la condition humaine, et de manière plus générale qui on est, où on va. C’est des questions qui animent un peu tout le monde, et quand tu t’y intéresses il y a pas mal de gens qui écrivent là-dessus. Et Antoine a donc trouvé des réponses dans le bouddhisme, et notamment chez Krishnamurti, qui parle un peu de tout ça de façon bien plus profonde. C’est vrai que nous, on reste sur des sujets qui peuvent paraître de surface, mais on ne peut pas non plus traiter l’information de façon si profonde dans ce contexte artistique

Si on se tourne vers l’aspect musical de l’album, on remarque une sorte de grand écart des styles. On trouve des aspects très techniques qui rappellent Gorod ou Obscura, mais aussi un côté plus deathcore ou djent. Est-ce que ce sont les influences de chacun des membres qui se mélangent, et surtout comment vous arrivez à faire cohabiter tout ça ?

S : Il doit y avoir une histoire d’unfluences de chacun, c’est sûr. Après, il y a dans le groupe plus de fans de death que de djent, même s’il y a des choses intéressantes dans le djent, dont on se nourrit directement ou indirectement. Je dirais même consciemment ou inconsciemment, puisque ça fait partie de notre composition. Mais il n’y a pas de volonté de faire cohabiter différents styles. Même si tu me parles de grand écart, je pense que le tout est cohérent.

C’est cohérent oui, mais on sent un panel très large d’influences.

S : Du point de vue des influences, c’est sûr. On est influencés par la musique classique, par le rock, la folk… le jazz, le blues - probablement un petit peu moins. Mais tout ça s’ajoute à la soupe commune des influences de chacun. Après, concernant la façon dont ça coexiste au sein de l’album, j’ai envie de te dire que c’est propre à notre façon d’ecrire de la musique, sans doute. Si il y a une cohérence - rassure-moi, c’est cohérent ? [rires] - c’est parce qu’il y a une continuité dans l’écriture, et que ça sort des mêmes cerveaux.

Puisqu’on parle de variété justement, j’aimerais évoquer le chant d’Antoine, qui est très varié. Ça va du chant death, à des tendances plus core. Est-ce qu’il y a une volonté d’utiliser ces variations pour camper des personnages différents ?

S : On n’a pas vu ça comme plusieurs personnages [il s’arrête et réfléchit]. C’est à creuser, et c’est une très bonne idée ! Pas bête ! Mais pour le coup, vu que l’histoire ne se déroule qu’à travers un personnage, ça n’est pas le cas. Mais… C’est une bonne idée ! Il faut que j’y réfléchisse ! Mais pour ce deuxième album… Ah mais c’est vraiment une bonne idée ! Pour ce deuxième album, Antoine a aussi fait un gros travail d’enrichissement au niveau de sa voix. Il voulait apporter quelque chose de nouveau, parce que sur le premier il a fait ce qu'il savait faire. Sur le deuxième il voulait apporter de la variété, essayer d’aller plus bas, plus aigu, et commencer à chanter entre guillemets. Ça reste du chant saturé bien sûr, mais il veut vraiment insuffler des notes évidents, intégrer plus de nuances, et faire quelque chose de mélodique. Il voulait aller dans la mélodie et presque dans la peinture audio, si j’ose dire. C’est vraiment comme une palette de couleurs. Les lignes de chant participent beaucoup à cette peinture audio, et nourrissent le projet, la thématique.

Alors puisqu’on parle de ces couleurs, comment apparaissent-elles, quelle est votre méthode d’écriture ?

S : Alors déjà, pas de jam du tout chez nous. C’est une musique qui est très écrite. C’est globalement Alex qui écrit en partant d’un riff. Il a plusieurs idées, un riff qui vient, un deuxième, avec des couleurs un peu différentes, et ils construit un squelette à partir de ces riffs qui s’enchaînent, avec une certaine logique, et dont ensuite revus par l’ensemble du groupe. De mon côté, j’ai un second rôle là-dessus, je viens poser la batterie, ce qui va donner le ton du morceau, sa direction : si ça va être brutal, plutôt soft, plutôt lisse… Vient ensuite s’ajouter à ca des idées de Simon à la basse, de Jérôme à la guitare, des leads qui vont aussi apporter d’autres couleurs… Mais c’est vrai que le gros du travail est fait par Alex, ré-arrangé par moi et revu par les autres, avec des décision communes bien entendu. Et enfin, Antoine qui greffe sa voix et ses lignes mélodiques, comme élément supplémentaire.

Au sujet de la production, il y a un élément qui semble diviser, c’est la sonorité de la batterie, qui est assez artificielle et semble triggée à l’extrême. C’est un choix artistique ?

S : C’est étonnant comme remarque, parce que j’ai l’impression que par rapport au premier album, on se rapproche plus de quelque chose d’organique. Pour la grosse caisse, c’est 100% triggé, c’est évident. Mais qui dit trig, ne dit pas forcément batterie programmée, attention ! Dans le son, c’est sûr qu’il y a des choses qui sont gonflées par la production, mais il y a de l’acoustique qui reste des prises batterie. Pour la grosse caisse, évidemment, à travers ces énormes guitares, cette basse grondante, c’est une volonté personnelle d’avoir une grosse production pour faire ressortir le kick… Le trig est obligatoire dans ce cas, on n’a pas vraiment le choix. Après, on est partis faire ce mixage chez Joshua Wickman au Dreadcore Studio, dans le Michigan… enfin on est partis… on a envoyé nos pistes ! Tu sais, avec le monde moderne c’est beaucoup plus simple ! [rires] Il avait fait notre premier album aussi, dans les mêmes conditions, et on a voulu retourner chez lui pour conserver cette puissance que lui arrive à rendre, pour un tarif qui en plus me paraît tout à fait honnête au vu du rendu final. On ne se voyait pas faire cet album ailleurs ! Je t’avoue qu’on s’est bien battus sur le son de batterie, pour avoir quelque chose d’organique qui respecte le plus possible les parties jouées, le jeu, le feeling, les nuances… Par exemple sur la caisse claire, les ghost notes et ce genre de choses, qu’il a je trouve très bien rendues. Mais la batterie est jouée, elle n'est pas artificielle dans le sens où elle n’est pas programmée. C’est imparfait, comme l’être humain. Donc certes, c’est gonflé par la prod, mais on a cette volonté de ne pas être sur la grille, de ne pas être quantifié, ni recalé de partout pour avoir un son stérile et froid. Il y a des fautes sur l'album, qu’on entend pas forcément au début, mais moi je les entend ! [rires] et ouais c’est un peu la nouvelle école : si tu écoutes les deux derniers Gojira, le dernier Slipknot, c’est un peu la surenchère de la production, chose dont on devrait je pense se détacher dans le prochain album. Mais pour celui-ci, avec le message et le fond qui est très intense, on voulait quelque chose qui soit très puissant, tout en gardant un maximum de chaleur et d’humanité dans le jeu et le son.

J’aimerais maintenant parler de la pochette, qui est magnifique. Est-ce que vous avez laissé carte blanche à Par Olofsson  ?

S : Alors le problème avec nous, c’est qu’on sait trop ce qu’on veut pour laisser carte blanche aux gens. Et des fois c’est problématique, ca prend plus de temps que prévu. Là, ça a été un peu dur, tant pour le son que pour l’artwork. Ces mêmes personnes ont bossé sur notre premier album, et ça a été plus simple, parce qu’on était surpris. Avec ce deuxième album, on a l’impression d’avoir généré une attente du public. Et si ce n’est pas le cas il y a au moins une attente de nous-mêmes. Donc on veut faire mieux. Alors c’est vrai que c’est peut-être égocentrique ou exagéré par rapport à la taille du projet, mais l’industrie du disque va mal, les gens n’ont plus d’argent pour aller voir des concerts etc… donc on voulait un produit vraiment bien, de bout en bout. Quelque chose dont on soit vraiment satisfaits, et qui pourrait pourquoi pas raviver la flamme du CD, de l’objet, de le collection, de la passion. Apres, libre aux gens d’y trouver leur compte ou non. Mais concernant la pochette, on a un peu délimité le cadre en donnant une thématique, en expliquant à Olofsson notre univers et les éléments qu’on voudrait y voir figurer, par rapport au contenu de l’album et à l’ensemble du message et des protagonistes. La base était “on veut la statue du roi Atlas, on veut l’Odysseus, on veut rappeler l’élément central du premier album, la Bathysphère” pour rappeler la continuité aussi par le visuel. Tout ça pour qu’on se dise en un regard “Eh ! mais cet élément était déjà là ! Il y a un rapport en fait !”. Il y a aussi cette flore, très colorée et lumineuse, qui faisait partie du cahier des charges. À partir de là, lui a tout mis en place : la disposition, la lumière, et le reste. Ça c’est son travail et on ne saurait pas lui dire où placer quoi : c’est vraiment du travail de composition.

Parlons un peu de la scène à présent. Atlantis Chronicles vient tout juste de débuter une tournée de promotion de Barton’s Odyssey : comment ça se passe et est-ce qu’on peut s’attendre à vous voir jouer l'album en entier et si non, est-ce que ca a été envisagé ?

S : Alors effectivement, la tournée vient juste de commencer, on a joué une date. C’était super bien, avec beaucoup plus de monde que ce qu’on attendait. J’ai l’impression que la gestation du deuxième album et notre retrait temporaire de la scène a créé une petite attente, qu’on a vraiment pu ressentir. C’est une salle où on avait déjà joué avec le premier album, et là il y avait quasiment deux fois plus de monde. Donc on s’est dit “Ouah, c’est la première date de la tournée, l’album n’est pas encore sorti, c’est prometteur !” Pour nous c’est super cool, on s’est donnés à 200% comme d’habitude. De toute façon on est pas là pour faire les touristes, on joue pas encore assez et on ne tourne pas assez pour se relâcher : la dernière fois on avait fait 80 dates, mais peut-être qu’après une tournée de 300 il y a un peu de lassitude, je sais pas ! On est encore en vie et dans la fraîcheur, ça fait plaisir aux gens et ca nous fait plaisir de leur faire plaisir ! Là on va jouer à Grenoble, Marseille, Paris le 5 avril, et après Nantes, Rennes, Bordeaux, un festival en Suisse, un à Nevers, des pistes qui se dessinent en Belgique aussi… d’autre choses en Suisse vers la rentrée. Donc tu vois on a pas mal de dates programmées ou qui devraient se confirmer rapidement, avec la sortie de l’album et le retour des gens, de la presse, un clip qui va dessiner les prochains mois. Donc on a faim est on est impatients de continuer les concerts et d’avaler des kilomètres.

Pour le fait de jouer l’album en entier, ca n’est pas prévu. Déjà parce qu’on ne peut pas jouer deux heures, et ensuite parce qu'il faut qu’on joue des morceaux du premier album, parce que les gens l'attendent et s’y retrouvent. Il va y avoir un temps d’adaptation, le temps que le deuxième album se décante, que les gens puissent le digérer à force de l’écouter. Donc on ne le jouera pas en entier, malgré le fil rouge qu’il renferme.

Vous n’en avez même pas parlé ?

S : Même pas, parce qu’on a la sensation qu’il y a des morceaux studio, et d'autres qui sont faits pour la scène. Il y a des choses qui s’apprécient en live, et d'autres plutôt seul avec un casque. Mais on ne décide pas en studio, on ne le sait pas à l’avance, et même en temps que musiciens on a des attentes d’auditeurs par rapport à notre musique. On a envie d’entendre des morceaux de live et des morceaux de studio donc on fait les deux. Globalement, les grosses pièces de cet album, on va les jouer sur scène, parce c’est ce qu’on va vouloir défendre. Les cinq premiers par exemple, il y a de fortes chances qu’on les joue. Après, il y a une autre limite, c’est celle de la première partie, où on a pas toujours le temps qu’on veux, et il faut donc faire un tri. Je pense que ça va se dessiner au cours des prochains mois.

Tu parlais des nombreuses dates à venir du groupe : comment vous vous êtes débrouillés pour organiser ça ? On sait que c’est dur pour les groupes, français qui plus est, de tourner un peu partout.

S : Ça a pris du temps ! Sur le premier album, ca avait été étrangement plus simple. Parce que le contexte a changé, en fait. En trois ans, il y a eu beaucoup de suppressions d’aides  financières du gouvernement sur la culture, et on a vu des assos touchées en premier, et maintenant ça commence à attaquer les salles. Elles ont de moins en moins de budget, et c’est donc difficile d’y jouer : si tu veux par exemple jouer dans le Sud de la France, tu ne peux pas y aller à perte, donc tu demandes le minimum pour être défrayé, et c’est déjà trop ! Donc tu restes chez toi et tu restes dans ton garage ! On essaie quand même d’être présents sur tout le territoire, mais si on fait ça à perte, on sera obligés de s’arrêter. Pour l’instant, on book nos dates nous-mêmes, en tous cas en France. C’est moi qui m’en occupe. J’ai envoyé une première salve de mails à toutes les salles qui nous avaient déjà fait jouer, et je me suis rendu compte qu’il y en avait bien 40% qui n’existaient plus, avec des dissolutions d’associations ou bien tellement peu d’argent qu’ils ne peuvent plus que faire jouer des groupes locaux qui mangent un sandwich et dorment chez eux. Donc ça rend les choses plus compliquées. On a donc exploré de nouvelles pistes et eu beaucoup de mal à démarcher de nouvelles salles sans contenu : il a fallu attendre de dévoiler un premier morceau pour vraiment pouvoir commencer le booking. La réponse qui grossit, de même que la fan base, les premières chroniques qui sont super positives, tout ça a fait germer les graines qu’on avait plantées en novembre dernier. Donc le résultat, 14 dates programmées, des nouvelles à confirmer bientôt et peut-être une tournée européenne à la rentrée, sur laquelle je ne vais pas trop m’étendre car il n’y a rien de sûr.

Tu as évoqué l’état délicat de l’industrie musicale côté scène, qu’est-ce que tu penses des aspects distribution, labels, etc… ?

S : J’ai été bercé dans tout ça, dans le sens où le marché à évolué, mais pas vraiment à notre niveau. Du point de vue distribution, signature, ce que les labels donnent et redistribuent… On est dans une situation où faire signer juste un album est loin d’être évident, puisque ça implique d’avoir des labels qui engagent des frais, sans garantie de résultat, mais en même temps qui prennent le moins de risques possible en engageant le moins de frais possible. Donc c’est vrai que les productions de clips, les artworks, ce sont les groupes qui les payent, et nous on a pu se permettre d’aller plus loin parce qu’on a pioché dans nos réserves accumulées avec les tournées du premier album. Sans ça, ça aurait  été impossible ! On a tous trente ans, on a tous des trucs à payer, et on n’aurait pas pu assumer les dépenses de cet album. Le message sous-jacent à tout ça, c’est que ce sont les gens qui font vivre les groupes, et les organisateurs de concerts : quand on demande un cachet, c’est pas pour s'en mettre plein les poches. Tout est réinjecté dans le projet, et nous on ne gagne rien. On s’estime déjà heureux de ne rien perdre ! Et on est  heureux de travailler avec Apathia Records, qui est à taille humaine, et travaille notre projet, c’est vraiment plaisant. Et on a aussi des retours de groupes plus avancés que nous, qui sont chez de gros labels et nous on expliqué que ce n’était pas forcément une bonne idée… Et être sur un plus petit label n’empêche pas de percer : si tu prends Gojira, l’album qui les a faits jouer outre-Atlantique est sorti sur un label qui s’appelle Mon Slip ! Alors c’est sur, un gros label ça aide : ils te placent sur de grosses tournées… mais ça implique de lâcher tout le reste, et de notre côté il y a tellement peu de garanties aussi que c’est délicat d’arrêter tout le reste, de lâcher nos boulots…

Tu as sinon d’autres groupes français qui ont retenu ton attention dernièrement ?

S : Je te dirais Gorod : j’ai bien bien écouté leur dernier album, il est vraiment super. Et j'ai encore noté  des similitudes dans la construction musicale avec ce qu'on fait, ça explique peut-être pourquoi on nous rapproche souvent d’eux d’ailleurs ! On a d’ailleurs des projets avec eux, on verra ce qui se fera. J’ai aussi beaucoup aimé le dernier Benighted. Je crois qu’Alex a beaucoup adhéré au dernier Hypno5e.

Et niveau concerts?

S : Alors en concerts, j’y vais de moins en moins, parce que c’est mon travail, je suis ingénieur du son. Du coup je vois beaucoup de concerts mais derrière ma console. Et en plus je dis aux gens d'y aller et moi j’y vais pas ! [rires] Mais c’est bien de se reposer un peu, sinon quand je suis pas en concert, je suis en concert ! Alors le dernier super concert que j’ai vu, ça remonte un petit peu, c’etait le retour de Despised Icon, ils sont passés à Paris au Divan du Monde. J’adore ce groupe, les gens trouvent que leur dernier album n’est pas le meilleur mais moi, je le trouve fabuleux ! Et je les découverts assez tard donc j’ai pris beaucoup de plaisir à les voir sur scène. D’autant plus qu’ils avaient splitté juste après que je les ai découverts. Donc grosse baffe, super groupe, son incroyable ! C’etait pas très fort mais très propre, l’ingé son avait fait un super boulot et ça fait plaisir d’avoir des concerts dans ces conditions, en tant que spectateur. Sinon j’ai adoré le dernier Fleshgod Apocalypse. Certains lui reprochent d’être trop symphonique et pas assez metal, mais ça change, parce qu’en fin de compte j’ai bouffé tellement de metal ces quinze dernières années que j’ai l’impression d’en avoir fait le tour. J’écoute un groupe quinze secondes et je me dis que j’ai déjà entendu ça. Attends, j’espère que ça ne fait pas ça avec notre album ? [rires] Mais bref, Fleshgod font peut-être un peu moins du metal mais c’est ca qui m’a marqué !

Merci en tous cas pour toutes tes réponses, et je te laisse le mot de la fin pour nos lecteurs !

S : Je vais me répéter, mais faites vivre la scène, venez voir des concerts. S’il n’y a pas de public, il n’y a pas de scène, et s’il n’y a pas de scène, il n’y a pas de groupes ! Pas de palais, pas de palais ! [rires]

 

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