Abrahma – Reflections in the bowels of a bird

Le quartet parisien avait signé un premier album ultra-costaud et revient (le 12 mai chez SmallStone Records) pour confirmer que la scène stoner psychédélique devra désormais compter avec lui. Pas de round d'observation, le ton est donné dès le premier titre, "Fountains of Vengeance". Toujours à mi-chemin entre le rock pachydermique, voire le métal (les influences de Paradise Lost et Type O Negative ne sont jamais loin, comme sur le terrible "An Offspring to the Wolves"), et le grunge d'un Soundgarden (le chant de Seb, qui module de mieux en mieux entre grosse voix et chant clair mélodique), le son du groupe s'est pourtant considérablement étoffé et affirmé. Ce 2e album ne fait pas dans la demi-mesure : Abrahma s'est trouvé une fois pour toutes et avance tranquillement, pesamment, sûr de ses forces. On a désormais affaire à un groupe libéré, sûr de lui et parfaitement à l'aise dans ce qu'il entreprend.


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Ce faisant, le combo prend également un certain risque : la noirceur est terriblement étouffante et opaque. Si quelques traits de lumière subsistent ici et là, si les parties de guitare lead fumées sont toujours bien présentes, elles sont désormais distillées avec parcimonie. Mais comment ne pas leur reconnaître cette science de l'ambiance à couper au couteau ("A Shepherd's Grief") et du break qui tue ? "Omens Pt. 1", lente mélopée qui, après un break magnifique, se termine en boucherie à faire pâlir plus d'un bulldozer, ne sacrifie jamais ses ambitions sur l'autel de l'efficacité à tout prix. C'est un fait : de nombreux groupes de rock, après avoir fait forte impression avec un album, sortent un opus plus énergique et, ce faisant, laissent souvent leur spécificité aux oubliettes. Rien de ça ici puisqu'au contraire, Abrahma affirme sa personnalité en se moquant comme d'une guigne du qu'en dira-t-on.

Il faut au moins ça pour avoir une chance de s'imposer dans une scène aussi intransigeante, où les fans sont pour la plupart de fins connaisseurs. S'il est bien une chose que l'on ne peut retirer au quartet, c'est bien le courage d'aller au bout de ses envies, sans rien se refuser, comme l'apparition d'un saxophone sur la fin de l'instrumental "Omens Pt. 2", réminiscence de l'album Sonny Simmons and Moksha Samnyasin, qui voyait le leader d'Abrahma Sebastien s'acoquiner avec Thomas de Blaak Heat Shujaa et le vétéran du jazz Sonny simmons, pour un album inclassable, aux frontières du jazz expérimental et de l'ambiant psyché. Pas de doute, cet homme et ses comparses ont de la suite dans les idées et les moyens d'aller de l'avant.
 

Reflections in the bowels of a bird se présente comme un manifeste, une ode au rock lourd, au métal puissant, à la musique ultra heavy et psychédélique. Le quartet puise ses forces aussi bien dans Alice in Chains qu'Electric Wizard ou Monster Magnet, et offre son propre mélange en béton armé. Riffs massue en veux-tu en voilà, ambiances païennes mélancoliques, solos de guitare jamais démonstratifs qui renforcent le caractère impénétrable de cette jungle érigée à la gloire de dieux vaudous oubliés, Abrahma a lancé un sacré pavé dans la mare. L'album est touffu et ne s'apprivoisera pas facilement, malgré une durée plus raisonnable que sur son prédécesseur, Through the Dusty Path of our Lives. Il n'est pas impossible qu'une telle densité en fasse fuir certains. On ne saurait les en blâmer, mais pour les autres, ce second album est un bloc de granit, non pas noir mais rouge sang. Comme les entrailles d'un oiseau, dans lesquelles l'avenir s'annonce radieux.

8,5/10

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NOTE DE L'AUTEUR : 9 / 10



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