The Yokel – Here comes the wild

On les verrait parfaitement bien au catalogue d'American Recordings. On les imagine bien sûr du Kentucky ou qu'importe du moment où l'on peut croire que chaque grand-mère à un banjo près de la cheminée.
Ils s'appellent The Yokel, les péquenauds, et viennent de Metz, France, proche des trois frontières et en explose autant par titre.

Il faudra un jour se résoudre à enquêter sur cet étrange phénomène de groupes français sonnant presque plus américains que les américains eux-mêmes. Après tout la Lorraine s'appelait le Texas français donc ça se tient. Quoiqu'il en soit The Yokel, dont le noyau dur est constitué du trio Thibault, Lucile et Damien, ont acquis tous les codes de la folk et du bluegrass pour mieux n'en faire qu'à leur sauce.

La voix de Lucile rappelle parfois l'adorable Jennie Benford (Jim & Jennie & The Pinetops, elle accompagnait aussi Jason Molina) capable sans y paraître de passer d'un registre à l'autre sans se dénaturer, se faisant même rêveuse pour "The Whole" dont la réverbération servirait de refuge à la discrète Mariee Sioux. Une voix qui s'adapte à toutes circonstances que The Yokel provoque dans ce premier album attendu depuis quelques années déjà. Un temps qui aura fait du duo originel un trio de compositeurs/auteurs accompagné par d'autres sur scène pour coller à la richesse des arrangements.

L'ambition musicale la plus noble reste celle qui est mue par l'envie de partage. Aussi il m'était difficile de me coller à l'ordinateur pour écrire puisqu'en écoutant l'album nous n'avions qu'envie de bouger, d'aller voir des potes, de rouler, d'aller dans les champs célébrer un bonheur qui ne relève en rien de la naïveté. N'allez pas croire que bonheur rime avec superficiel. The Yokel ne se cantonne et ne se contente de rien, bien conscient que les émotions sont plus fortes quand on les confronte entre elles. C'est bien connu, le poivre relève la vanille.
C'est là que les textes troublent et ouvrent à de multiples interprétations comme le superbe "Birds of doom", faisant du groupe une bande de fêtards crépusculaires.

The Yokel, 2017, Here comes the wild, folk
Crédit photo (et pochette): Sébastien Grisey

Évidemment le clip qui accompagne cette sortie en fanfare n'est pas sans rappeler Mumford & Sons. Pour d'autres les bons souvenirs d'O'Brother vous reviendront, chacun son vecteur, tandis que les cuivres jovials raviveront les moments lumineux de Beirut ainsi que les enthousiasmes levés par Of Monsters And Men. Il sera impossible de ne pas évoquer Johnny Cash ou encore Bonnie 'Prince' Billy lors des accalmies notamment le profond "Ain't no misery" qui s'inscrit direct comme un intemporel tout comme le limpide "Here comes the wild". Vous savez bien que les références masquent plus qu'elles ne montrent et il conviendra alors pour mieux marquer les grands écarts de dire que Pete Seeger aurait sûrement aimé voir de tels disques sortir en 2017.

Si tous les ingrédients de la culture folk sont réunis (la grande famille des instruments typiques jusqu'au chant nasal), The Yokel garde une écriture parfois pop avec ce sens du refrain qui aideront les anglais à raviser l'injuste sentence de John Lennon. Au delà de tout, le sens que recouvre la folk ici et que vous ressentirez à coup sûr est l'envie de rassembler, de communier (eux-mêmes ont commencé à deux et font aujourd'hui leurs concerts en septet). Les horizons larges de leur musique n'aideront que mieux à nous rapprocher ne serait-ce que le temps d'un disque.

Et si la pochette est libre d'interprétation, elle semble montrer cet incroyable combat que l'on mène contre notre obsolescence programmée avec des moyens dérisoires (une fronde), et la folie qui nous guette à la longue.
Quoiqu'on en dise il n'y a rien de plus inutile que de faire un disque aujourd'hui et c'est exactement pour ça que c'est essentiel. Parce que c'est un intervalle, un temps de plaisir qu'un disque physique rend incompressible. On ne saurait que trop vous conseiller de vous accorder ce temps, cette extraction de la grande marche accélérée qui nous met tapis (pochette arrière) par pelletées entières.

Here comes the wild, on va tous finir cinglés alors autant commencer à danser.

Sorti le 19 septembre 2017 en cd en autoprod, et en vinyle chez Les Disques de la Face Cachée (LDFC).

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NOTE DE L'AUTEUR : 8 / 10



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