Eurockéennes 2017: Phoenix

Quelques heures avant leur concert et alors qu'une pluie torrentielle s'abattait sur la presqu'île du Malsaucy, ce qui bousculera quelque peu la mise en place complète de leur nouvelle scénographie, nous sommes partis à la rencontre de Phoenix. Nous nous sommes entretenus avec les deux guitaristes, Branco et Christian Mazzalai, qui ont accepté de répondre aux questions de La Grosse Radio. Nous avons pu tranquillement parler de leur dernier album Ti Amo, mais aussi billets, café, Monteverdi et...Gojira.

Interview par Charliedub

Vous êtes de retour aux Eurockéennes après un dernier passage en 2013 au cours duquel vous aviez projeté de faux billets au milieu du public. Qu'avez-prévu comme dispositif scénique cette fois-ci ?

Branco : C'est vrai qu'on avait jeté des billets, je ne m'en souvenais plus ! Ça me fait plaisir que tu en parles, puisque c'est le genre de choses qui nous demandent beaucoup de temps et d'énergie et on a l'impression que tout le monde oublie cela instantanément. Merci de t'en rappeler. Pour cette tournée, il n'y a pas de billets ; cet album est moins billets de Monopoly que celui d'avant. Sur Ti Amo, on trouve plus un esprit amour, amour à l'italienne. On a beaucoup travaillé sur le show, ça nous a pris beaucoup de temps.On était très excités par la perspective de mettre en œuvre une idée qu'on a depuis longtemps. Ce soir, si les vents le permettent, il y a en effet des histoires de vents et de poids [nous rappelons que la météo était particulièrement agitée en ce jour du 9 juillet à Malsaucy, NDLR], si ça marche, ça devrait être pas mal ! Mais pas de billets !

Votre nouvel album s'appelle Ti Amo. Pour qui est la déclaration d'amour ?

Branco : C'est l'amour en général, une déclaration d'amour à l'amour et au sentiment amoureux. C'est assez simple et évident, mais on voulait faire quelque chose dans ce sens pour cet album. On avait besoin de cette orientation presque naïve.

Ti Amo a donc une forte connotation italienne. A t-il été enregistré en Italie ?

Christian : Non, il a été enregistré à Paris. En fait, ce qui nous intéressait c'était de parler de la vision de l'Italie depuis la France. La vraie Italie est passionnante mais ce n'est pas cela que nous voulions mettre en avant, plutôt la distance, voire la distorsion du message. On n'avait pas du tout prévu de faire un album de ce genre ; on a expérimenté pendant quelques mois et une sorte de force supérieure nous a poussé à aller dans cette direction. On recherche perpétuellement de nouveaux territoires lorsque nous composons et écrivons des morceaux. Celui-ci en était un pour nous.

Avez-vous fait appel à des producteurs particuliers pour vous épauler ?

Christian : On a fait appel à un ami à nous, Pierrick Devin, un ingénieur du son qui a mixé l'album avec nous. Sinon, on a presque tout fait nous-mêmes, tous les quatre. Notre but était ainsi de faire un album authentique et charmant sans nécessairement atteindre la perfection, mais plutôt le premier geste, quelque chose de candide en somme.

La critique a qualifié votre disque d'italo-disco. Qu'en pensez-vous ?

Branco : Ouais, il faut forcément mettre une étiquette. L'Italie a avant tout une grosse influence musicale. Après, ce qu'on appelle l'italo-disco, c'est une musique qu'on n'écoute pas vraiment, même si on a un peu baigné dedans quand on était enfants. Cette idée d'Italiens qui font semblant d'être à New York nous plaît bien. Mais on n'écoute pas cette musique qui, il faut le dire, est un peu merdique mais quand même assez charmante. Par contre, ce sont plutôt des gens comme Ennio Morricone, Lucio Battisti ou Franco Battiato qui nous marquent ; sur trois décennies, ils représentent l'excellence de la musique en Italie. On les écoute comme on écoute Bowie ou Gainsbourg, ce sont des artistes importants dans nos vies de mélomanes. On se réfère également à l'esprit de l'art italien de la grande époque où il y avait un mélange de sophistication et de triomphe commercial avec des choses précises, pointues et des émotions fines ; une vraie culture noble qui a malheureusement disparu. C'est ainsi tout l'art de vivre à l'italienne qui nous inspire.

La dolce vita...

Branco : Oui, peut-être, mais c'est un cliché. Cependant, en Italie, si tu vas dans n'importe quel bar, tu sais que ton sandwich sera confectionné avec amour. Avec Phoenix, on a aussi cet esprit-là de petit commerçant qui fait bien son travail, comme les Italiens qui préparent eux-mêmes leurs sauces et qui ne les achètent pas en boîte. Ça c'est beau ! Merde ! (rires)

Malsaucy, 2017 Festival, Ti Amo
Photo © Brice Robert

Parlons de Gojira qui étaient eux-mêmes présents aux Eurockéennes cette année. Vous êtes tous les deux des groupes plébiscités aux Etats-Unis. Quels liens faites-vous entre vous deux ?

Branco : On avait joué le même soir ici il y a quelques années déjà. Je pense qu'à la base, on était des chevaux sur lesquels personne ne voulait miser. Lorsque tu veux faire du metal ou du rock en France, c'est assez compliqué. Quand on a commencé, les gens se foutaient de notre gueule, les maisons de disque ce n'était même pas la peine d'y penser. On avait pourtant envie de gravir cette montagne par une voie que personne n'avait empruntée. Je pense que c'est pareil pour eux. C'est un message d'espoir pour tous les mecs qu'on prend pour des tocards mais qui savent qu'au fond d'eux, il y a quelque chose à faire. Je crois que c'est un beau message d'espoir pour la jeunesse ! (rires)

Christian : On doit partager quelques accords avec Gojira. Certains enchaînements doivent être similaires. À étudier !

Branco : Le metal c'est un univers basé sur des codes que je ne connais pas très bien.

Peu importe, ce qui compte avant tout c'est que ça groove chez Gojira...

Branco : C'est vrai, ça groove Gojira ?

Oui, une section rythmique incroyable...

Branco : Alors ça, c'est une autre similarité, puisque notre batteur est un grand batteur de metal. Il joue par exemple en Suède avec Cult Of Luna. Il représente pour nous une porte d'entrée vers le metal. Il a une vision assez sophistiquée de la musique metal, on aime bien.

Vous parliez plus haut d'exploration de nouveaux territoires. Le prochain album de Phoenix sera metal alors ?

Christian : Ce serait beau !

Branco : On ne réfléchit pas du tout en termes de styles. Si on devait se limiter à un seul genre musical en particulier, on n'écouterait pas que de la bonne musique, alors qu'il y a des choses magnifiques partout. On est ouverts à fond. C'est comme si un amateur de café ne buvait que du café de Colombie en se bornant à une seule parcelle de quelques hectares, ce serait la galère. Très mauvais calcul pour l'amateur de café, nan ?

Christian : Dans les hauts plateaux ethiopiens, il y a des trucs fabuleux.

Branco : Oui et ce n'est pas la même torréfaction. Ce sont d'autres techniques.

Vous vous êtes référés à l'Italie pour cet album. Giuseppe Phoenix ou Claudio Phoenix, ça aurait bien sonné comme titre, nan ? (cf Wolfgang Amadeus Phoenix)

Branco : Claudio Montephoenix ! On vient de faire la B.O du film de Sofia Coppola et on a utilisé comme base de travail une pièce de Monteverdi justement. La musique classique, et celle de la Renaissance dans ce cas de figure, irrigue notre œuvre. Mais bon, on n'allait pas refaire le coup une deuxième fois, d'autant plus qu'on était persuadé qu'on allait se faire lapider lorsqu'on a appelé notre album Wolfgang Amadeus Phoenix. Mais c'est passé comme une lettre à la poste. On a été très déçus. (rires)  Mais c'est quand même un bon titre.

Merci Phoenix de nous avoir accordé cette interview.
Merci également au staff d'Ephélide pour avoir organisé cette rencontre.

 

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