Ça faisait plus de 10 ans que les Australiens de Rose Tattoo n'étaient pas passés par la France et que le groupe était un peu à la dérive suite au décès du guitariste Mick Cocks, peu de temps après la sortie de Blood Brothers. Ainsi, mis à part quelques concerts ici et là et la mise en place du projet Blood, Sweat & Beers, force était de constater que les Tatts étaient un peu en sommeil depuis de trop longues années. Autant dire que l'annonce d'une reformation de Rose Tattoo autour du chanteur historique Angry Anderson l'année dernière avec des fines gâchettes comme Mark Evans (AC/DC), Dai Pritchard, Bob Spencer et John "Watto" Watson a fait l'effet d'une bombe chez tous les fans !
Ainsi, Rose Tattoo s'est embarqué dans une tournée Européenne depuis quelques semaines avec pas moins de deux dates dans l'Hexagone, la Laiterie de Strasbourg et le Hellfest !
Malgré le fait que le père Angry Anderson a maintenant 70 ans, il faut bien avouer que le groupe du petit chauve nerveux n'a rien perdu de son attrait au regard du nombre de fans qui s'est déplacé à La Laiterie ce soir. Traversant les modes, faisant face à de tragiques disparitions au sein de son entourage, il est toujours là. Indéboulonnable et bouillonnant d'énergie, furieusement rock n' roll, outrageusement lui-même… Arrivé sur les planches en grandes pompes, Rose Tattoo attaque d'entrée de jeu un gros "One Of The Boys" des familles. Comme on pouvait s'y attendre, le tempo est plus lent que dans les années 1970, les lignes de chants ont été retravaillées et sont moins brutes de décoffrage, mais l'ensemble reste plutôt endiablé.
C'est sûr, le groupe n'est pas de toute prime jeunesse; on sent bien que la vie rock n' roll et le fait de brûler la chandelle par des deux bouts ont eu un prix à payer. Les héros seraient-ils fatigués ? Non, mais ils ont vieilli quand même… Ceci étant, il faut dire qu'Angry Anderson a toujours sa merveilleuse gouaille et que son charisme reste intact. On sent vraiment que le chanteur crache sa vie et raconte son histoire dans ses morceaux ("Rock n' Roll Outlaw", "Juice On The Lose", "1854" …) comme le faisait feu Bon Scott à son époque.
A ses côtés, l'excellent Mark Evans délivre un jeu solide et focalise lui aussi les attentions. En effet, le bassiste possède un gros capital sympathie auprès des fans (d'AC/DC mais aussi de Rose Tattoo) et on ne peut pas dire que l'homme soit un manchot à la quatre-cordes. De plus, on sent que l'ami Evans est heureux d'être sur scène avec ses copains (les musiciens se sont tous plus ou moins croisés depuis une quarantaine d'années dans différents groupes) et son sourire fait plaisir à voir.
Du côté des guitares, si Dai Pritchard maîtrise toujours autant son sujet niveau slide (ce n'est pas pour rien qu'il avait été adoubé par Pete Wells), le "petit nouveau" Bob Spencer lui, délivre des riffs implacables teintés de blues avec beaucoup de classe. Au fil des années et de ses nombreux groupes (Finch, The Angels...), le gratteux n'a pas son pareil pour jouer avec feeling dans un groupe rugueux comme Rose Tattoo. Il n'y a qu'à écouter des morceaux comme "Man About Town", "Rock n' Roll Is King" ou "Standover Man" pour s'en rendre compte ! L'homme n'hésite pas à rajouter quelques petites variantes subtiles dans ses plans et ses rythmiques, et on ne s'en plaint pas.
De même, Mark Evans se permettra lui aussi quelques petites incartades au niveau des lignes de basse histoire d'apporter une touche plus personnelle sans pour autant dénaturer le jeu puissant et groovy du costaud Geordie Leach (qui profite de sa retraite bien méritée au sein d'un projet solo bluesy plutôt bien fichu).
Evidemment, au fil des brulôts que sont "Bad Boy For Love", "The Butcher And Fast Eddy" ou "Branded" on pense à tous ceux qui ne sont plus là dans l'entourage de Rose Tattoo : Dallas "Digger" Royal, Ian Rillen, Pete Wells, Lobby Lloyde, Mick Cocks ainsi que les copains comme Malcolm Young, Bon Scott ou Stevie Wright des Easybeats. C'est d'ailleurs pourquoi Angry leur dédicacera respectivement un costaud "Scarred For Live" et la reprise "Black Eyed Bruiser" du p'tit Stevie ! Ça fait chaud au cœur et ça fait hérisser le poil, tout ça…
Comme à son habitude, le frontman fait le show à lui tout seul. Ses lignes de chant sentent le vécu et ses mélodies teintées de blues prennent aux tripes ("The Butcher & Fast Eddy", "Bad Boy For Love"…). De plus, il n'hésitera pas à communiquer avec le public entre les morceaux avec beaucoup d'humour (les femmes, le respect, le rock n' roll etc.), gronder des fans un peu trop bagarreurs tout en buvant de la bière entre les morceaux. L'homme est heureux d'être sur scène et son alchimie avec Mark Evans crève les yeux : ces deux-là s'entendent à merveille !
Après de nombreux morceaux qui font du bien par où ça passe ("We Can't Be Beaten", "Astra Wally", "Tramp"…), le quintette terminera par un gros "We Can't Be Beaten" avant de revenir sur le costaud "Nice Boys (Don't Play Rock n' Roll)" repris en chœur par un public Strasbourgeois chauffé à blanc. Décidément voilà un titre qui ne peut être joué que par Rose Tattoo pour prendre toute sa saveur. On s'agite dans le public devant une telle énergie rock n' roll et on chante à gorges déployées ! Et quand on pense qu'Angry Anderson a maintenant 70 ans et qu'il est toujours habité par le démon du rock n' roll, on reste admiratif. Véritablement.
Bien que les Tatts n'ont plus rien à prouver depuis longtemps, les musiciens se sont donnés à fond comme des jeunes premiers. Ça fait du bien de (re)voir ces véritables icônes du rock et leur prestation scénique est toujours aussi redoutable ! Au final, l'audience de La Laiterie a reçu une grosse leçon de rock ce soir. Angry Anderson possède toujours son aura divine malgré le poids des années et une vie d'excès. Le groupe a réalisé un show intense et sans demi-mesure avec énormément de communication, d'humilité et de sourire. Angry c'est le rock n' roll incarné, on a vu Dieu dans ce petit bonhomme de 70 ans. Mark Evans, Dai Pritchard, Bob Spencer et John "Watto" Watson sont quant à eux, les quatre cavaliers de l'apocalypse, c'est certain !
Petite cerise sur le gâteau, le groupe viendra signer des autographes, faire des photos et discuter avec les fans après le concert jusqu'à tard dans la nuit… RESPECT.
Setlist :
One Of The Boys
Juice On The Lose
Man About Town
Assault & Battery
Tamp
Rock n' Roll Outlaw
The Butcher And Fast Eddy
Standover Man
Branded
Black Eyed Bruiser
Once In A Lifetime
1854
Rock n' Roll Is King
Scarred For Life
Bad Boy For Love
Astra Wally
We Can't Be Beaten
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Nice Boys (Don't Play Rock n' Roll)
