Main Square Festival à  Arras (5-6-7.07.2013)

“Qui trébuche fait un plus grand pas” disait l’autre. Après une année 2012 en demi-teinte (75 000 spectateurs, si peu), le Main Square Festival a réussi son objectif. Cette année, le festival a dépassé la barre des 100 000 spectateurs. Un résultat pas si étonnant, vu les têtes d’affiche exclusives en France cet été (Indochine) ou quasi-exclusives (Sting et Green Day) et la prog super moderne (Alt-J, Of Monsters and Men, Asaf Avidan, La Femme…).

Retrouvez toutes les photos de Elise Schipman ICI.

La plus belle histoire du festival s’est déroulée dès le premier jour. Elle concerne le groupe Starvage. Je les avais déjà vu en 2010, au Spotlight à Lille à l’occasion du tremplin So Nord, qu’ils avaient remporté. Cette année, le groupe avait raté le podium du tremplin Main Square qui invitait des groupes à jouer en début d’après-midi. C’est alors qu’eue lieu une intervention divine. Modestep, qui devait jouer à 19h40, annule son passage le jour même à cause d’un problème de transport. La production du Main Square appelle Starvage en catastrophe pour les remplacer. Et puisqu’on ne rate pas une telle occasion dans sa vie, les membres du groupe se sont libérés de leurs empêchements professionnels et étudiants pour venir remplacer au pied levé le groupe londonais ! À peine le temps de faire les balances que Starvage entame son show. “Criminal !” crie le jeune chanteur, qui assure malgré les circonstances et le stress. Si le manque de présence scénique trahissait leur inexpérience de ce genre de scène, les jeunes de Bruay-la-Buissière peuvent être fiers d’avoir fait bouger la foule de la Greenroom, notamment en entonnant une reprise de "Berlin" des excellents Black Rebel Motorcycle Club.
 

Elise Schipman)


Mine de rien, ils ont quand même joué après de sacrés artistes, comme le trio girly de Haïm ou le full-of-testostérone-torse-nu-tatouage-sueur de Biffy Clyro. Puis soudain, une apparition de Jesus en chair et en os sur la Main Stage. Thirty Seconds to Mars et son leader Jared Leto entrent en scène. Passé l’ennuyante intro "Birth", le trio balance l’intégralité de ses tubes pop-rock super efficaces, en oubliant ses deux premiers albums. Jared Leto n’arrête jamais de demander au public de sauter “Jump and touch the sky !”, crier “No No No No !”, et invite même deux festivaliers sur scène. Bon, pas les plus malins : “Where are you From ? - ÉLODIE !!” Sur leur dernière tournée, le groupe américain prenait une pause en diffusant un de ses (longs) clip. Devant la protestation du public, ils ont sur cette tournée trouvé un autre subterfuge. Sur les morceaux “Depuis le Début”, et “Pyres of Varanasi”, des acrobates (de Roue de Cyr par exemple) viennent divertir le public tandis que le groupe s’eclipse pour revenir avec des vêtements tout propres. Après un petit bain de foule sur "The Kill" (deuxième album !!), le set s’achève sur le single (bouh) "Up In The Air". Pour ces dernières minutes, une quarantaine d’"Echelon" (les Jared-lovers) a pu monter sur scène pour faire trembler les murs de la scène.
 

 

(Thirty Seconds To Mars © Elise Schipman)
 

Pendant ce temps, Bloc Party donne sur la Greenroom un de ses derniers concerts, le groupe ayant annoncé sa future (re)séparation après la tournée des festivals. L’occasion d’entendre une dernière fois en live les tubes “Banquet” ou “Octopus” au son de la guitare extraterrestre de Russel Lissack et de la voix unique de Kele Okereke.
Puis c’est la libération pour les ados qui attendent depuis six heures devant les barrières. Green Day entame son show en diffusant “Bohemian Rhapsody” de Queen et “Blitzkrieg Bop” des Ramones, bien entendu repris en choeur par le public de la Main Stage. Soudain, une mascotte de lapin rose apparaît sur scène pour chauffer la salle, montrant son popotin au public, ravi. C’est parti pour deux heures où les géants américains s’éclatent sur leur show, certes bien rodé mais plein de surprises pour les non-initiés. Billy Joe Armstrong emmène toute la foule, à coup de “Heyyy Hooo!” en se baladant de part et d’autres de la scène. Il demande qui sait jouer de la guitare dans le public. Tout le monde se manifeste, puis il décide de faire monter un jeune homme qui s’empare de son instrument, chante quelques instants avant de se déchaîner sur scène avec une impressionnante crédibilité. Il imite avec brio les mimiques de Billy Joe, se déplace aisément et se coordonne parfaitement pour le saut final qui clôt le morceau. Après avoir fait la bise au batteur Tre Cool, Billy Joe lui offre sa guitare. La grande classe et un souvenir inoubliable, mis à part que cette scène se répète tous les soirs pour le groupe. Sur les 26 morceaux joués ce soir-là, la moitié viennent des deux albums à succès, American Idiot et Dookie.
 

(Green Day © Elise Schipman)
 

Entre 1h15 et 2h30, il est coutume de faire venir un DJ ou artiste électro pour finir tranquillement la soirée, et non un groupe super populaire comme The Prodigy (L'année dernière, le festival avait programmé à la même heure Justice). Le son, assez faible et mal réglé incite d’autant plus le public à quitter la citadelle d’Arras avant la fin de leur set. Le groupe déchaîne pourtant la folie qu’on leur connaît, à coup de tubes ("Smack My Bitch Up", "Firestarter", "Invaders Must Die"…) et de lumières épileptiques. Keith Flint a l’air plus fou que jamais avec sa remarquable coiffure, tandis que Maxim Reality arbore un maquillage de panda. Les deux chanteurs lâchent des cris animaux, incroyablement identiques à ceux de leur live World's On Fire. Un show explosif bien préparé par la prestation “post-hardcore” de Enter Shikari sur la Greenroom juste avant.
 

(The Prodigy © Elise Schipman)
 

Le deuxième jour de festival était ambitieux. Avant la prestation du mythique Sting le soir, les deux scènes du festival ont accueilli les grands noms de Saez, dEUS, C2C, les récentes révélations de Alt-J, Of Monsters and Men et Asaf Avidan ainsi que les prometteurs Kodaline et Madeon. À tel point que le lieu du festival a commencé à se faire trop petit. À partir de 17 heures, naviguer entre les deux scènes est devenu un véritable calvaire. Devant un public déjà acquis, Of Monsters and Men a présenté son premier album avec quelques raretés ("Beneath my Bed" par exemple), alors que tout le monde attendait le déjà légendaire "Little Talks". Les islandais ont a su apporter sans effort un vent de fraîcheur malgré le soleil de plomb de ce samedi. Le genre de groupe qui jouera un peu plus tard chaque année. La course au très lourd continue avec l’imprévisible Saez, le seul homme sur Terre à ouvrir un concert avec un a cappella : “Les Anarchitectures”. Il enchaîne quelques morceaux à rallonge, tantôt langoureux (“Tu y crois”), tantôt très nerveux (“Pillule”). L’ancien frêle aux cheveux courts et la barbe rasée ressemble désormais à un gros nounours. Ses revendications, elles, n’ont pas changé. Il lance des hymnes ouvriers anticapitalistes, et parfois des maximes excellentes : “Les immigrés chantent en français, les p’tits bourgeois chantent en anglais. Alors dis-moi, qui des deux a un problème d’identité ?”
 

(Enter Shikari © Elise Schipman)


De l’autre côté du festival, la voix extraterrestre d’Asaf Avidan résonne. L’affluence des festivaliers rend tout passage entre les deux scènes impossible. Ce qui n'a pas empêché de faire chanter le plus public de la Main Stage au son lointain du tube "One Day".
Sur la Main Stage se prépare l'étonnant décor du show de The Hives. Le charismatique Howlin' Pelle Almqvist (à vos souhaits) n'attend même pas la deuxième chanson chanson pour se jeter au bord du public. Sa gueule d'ange blondinet contraste avec son jeu de scène absolument survolté. À la guitare, le sosie de Zach Galifianakis se déchaîne au même rythme que les quatre autres membres. Comme toujours, le groupe arbore le même uniforme dans lequel ils doivent d'ailleurs avoir assez chaud. Mais alors que résonne les premières notes du single "Hate to Say I Told You So", les anglais de Alt-J font leur apparition sur la Greenroom devant un public déjà acquis. Des mélodies et une voix uniques, il devient assez rare aujourd'hui de trouver un groupe musicalement innovant. Et pourtant, on peine a trouver des ressemblances à la musique de ce quatuor où personne ne fait de l'ombre à l'autre. Bonne surprise, une reprise a capella de "A Real Hero", titre de College issu de la B.O du film Drive.

(The Hives © Elise Schipman)

(C'était l'autre guitariste le sosie de Zach Galifianakis)


Puis vient le géant Sting, qui représente bien le syndrome de l'ancienne rock star. Entouré de musiciens exceptionnels, il enchaîne une vingtaine de titres : la moitié de Police, l'autre de son projet solo. Et bien sûr, on vient le voir pour la première moitié. Ce qui génère une ambiance un peu spéciale quand tout le monde se déchaîne sur "Roxanne" ou "Message in a Bottle", puis reste de marbre sur les autres morceaux de l'ex-chanteur de The Police. Certains auront déserté la scène pour rejoindre un des plus grands groupes de rock belge, dEUS. Après quelques morceaux un peu mous du genou, le groupe fait swinguer la foule progressivement avec "Keep Girls Drinking" et la très bonne reprise de Fleetwood Mac, "Oh well". Le groupe finit par s'énerver sur à peu près toutes ses outro, le guitariste pète sa lanière de guitare, et l'ambiance devient de plus en plus festive dans la zone de la Greenroom. Les courageux finiront de s'épuiser avec le show de C2C sur la Main Stage, puis du jeune Madeon avant un repos bien mérité.
 

(dEUS © Elise Schipman)


Pour clôturer le festival, la prod avait préparé une programmation très éclectique. Entre le métal de Volbeat, la new wave de La Femme, le flow de Wax Tailor, les rappeurs Feini-X Crew, Left Boy, Kendrick Lamar ou encore la gentille Lou Doillon… on oublierait presque qu'on est a un festival de rock.
Dans un genre un peu hybride, Volbeat va dévoiler son "Elvis Metal" aux festivaliers du dimanche. "Je ne parle par français, lance le chanteur Michael Poulsen. Mais je parle le rock, le heavy metal, la country et le punk ! On va bien réussir à s'entendre !" Étonnament, il s'agit d'un des seuls groupe à avoir déployé un décor de scène, style dark-western en l'occurrence. Entre deux morceaux de rockabilly metal, Michael Poulsen entonne quelques airs de "Keine Lust" (Rammstein), reconnu par une poignée de fans.
 

(Volbeat © Elise Schipman)


Alors que résonnent encore les guitares saturées de Volbeat, un bassiste en boxer apparaît sur la scène de la Greenroom. Malgré la chaleur, La Femme nous prépare à "entrer dans la froideur de la Sibérie". Au rythme de gimmicks nerveux et d'un tempo mécanique, les claviéristes se multiplient sur scène et, s'ils ont l'air de jouer sous psychotropes (oh la mauvaise langue), on doit bien saluer l'absence de boucles et bande-son malgré les multiples lignes de synthés. "Prends le bus ! Prends le bus !" s'exclame robotiquement le chanteur sur le morceau "Antitaxi". Un genre à la fois rétro et nouveau. Retour à la Main Stage pour la prestation de Puggy, d'un style plus classique et grand public. En 2011, ils jouaient déjà à la même heure, mais sur la Greenroom. Le jeune groupe connaît une popularité croissante depuis la sortie de son dernier album To Win The World, qu'il joue largement pendant son set. Après quelques morceaux, le public acquis se propage dans la citadelle d'Arras et Matthew Irons n'a aucune difficulté à faire claper ou chanter le public. Il faut dire qu'en seulement 8 ans, le groupe a su composer un paquet de morceaux ultra-efficaces. Pas timide, le jeune homme s'élance même sur l'avancée, spécialement construite pour le show d'Indochine du soir-même. 

(La Femme © Elise Schipman)


En tout cas, les jeunes de Puggy s'en sont mieux sorti que Stereophonics, qui s'est toujours trouvé dans la même situation (inexplicable) à chaque fois que je les ai vus en festival. Du rock british efficace, très sympathique à écouter mais qui n'emmène jamais la foule bien loin. Le seul moment mémorable de leur set est la reprise en choeur de leur titre le plus connu "Maybe Tomorrow". Un passage tout de même moins raté que celui d'Archive, qui plus est hué par les fans d'Indochine aux premiers rangs. Après une entrée en scène foirée par un micro en panne, le groupe stoppe brutalement le morceau et sort de scène sans dire un mot. Bonne ambiance. Pas de chance pour les britanniques qui bénéficient en plus d'un son d'assez mauvaise qualité... Les musiciens ne sont franchement pas tout sourire... un moment assez peu agréable pour tous.

(Puggy © Elise Schipman)


Intermède de cette vague rock, Wax Tailor investit la Greenroom avec son hip-hop hybride. "Je vais vous raconter une histoire", lance-t-il après une voix-off-blockbuster-americain. Manque de pot, le soleil encore debout masque les animations des écrans sur scène. La "Dusty Rainbow Experience"  (nom de son spectacle) débute avec tous les instruments possibles : guitare, basse, trompette, violoncelle, saxophone, contrebasse… sur des beats electroniques et un florilège de chanteurs. On compte Charlotte Savary à la robe éblouissante, et les trois rappeurs que sont Mattic et le duo d'A state of mind (Green T et Funk.E Poet). Le public restera bien accroché à cette scène alors que débute l'ultime concert du festival sur la Main Stage.

(Archive © Elise Schipman)


Indochine entre en scène avec "Vénus", une intro inédite ou plutôt ressortie dès placards de la tournée Paradize en 2002 (il fallait trouver une intro sans tombée de rideau…). Après quelques problèmes d'écrans (ils se feront pardonner en mettant de jolis zeffets vidéo), le show débute avec des morceaux du dernier album "Traffic Girl", "Belfast"… l'ambiance est brulante aux premiers rangs, mais peine à se propager dans le reste de la fosse. Au sixième morceau, Indochine joue enfin un single "Mémoria", puis s'enchaînent rapidement les incontournables : "Little Dolls", "J'ai Demandé à la Lune", "Tes Yeux Noirs", "Alice et June"… Les classiques sont tellement nombreux que le groupe les rassemble dans un medley qui comprend "Canary Bay" ("Ouh ! Ouh !"), "Des Fleurs Pour Salinger" ou encore "3e Sexe ". Nicola Sirkis, 54 ans tout de même, sautille dans tous les sens, passant faire coucou d'un côté à l'autre de la scène sans oublier l'allée centrale, spécialement construite pour qu'il y pose ses Creepers. Les détracteurs du groupe (dont la majeure partie de notre rédaction) seront forcés de saluer sa présence scénique, et verront leur tête gigoter mécaniquement au son de "Trois Nuits Par Semaine". On passera sur l'air faussement ému du leader, qui lâche un amusant "Vous allez me faire chialer !". Après un set acoustique voté par le public sur Internet ("Deux morceaux sont arrivés à égalité" [45 317 votes chacun je suppose?]), une longue introduction fait monter la pression. Quelques notes par-ci par-là, le public pressent le mythique tube "L'Aventurier", qui finit le concert et le festival en véritable apothéose.
 

(Indochine © Elise Schipman)


Attendez … On nous avait annoncé un feu d'artifice pour clore le festival. Ni une ni deux, on se précipite avec le photographe au fond de la fosse pour prendre une magnifique photo d'ensemble (on avait en tête le final du festival hollandais Pinkpop) Soudain, deux ridicules pétards se mettent à faire des étincelles de part et d'autre de la scène. Une déception telle qu'on éclate de rire, le sourire au lèvres garanti jusqu'à la maison.
 

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