Quand la Sacem redresse la télé

Cyril Hanouna a-t-il du souci à se faire ? C’est la question qu’on peut se poser en lisant le dernier rapport 2014/2015 de la Sacem (Société des Auteurs, Compositeurs et Éditeurs Musicaux) qui épingle les émissions (d’intensité intellectuelle variable) préférées des Français. Dans le collimateur : Touche Pas à Mon Poste (TPMP), Envoyé Spécial, Le Meilleur Pâtissier de France, Alcaline Mag…toutes pointées du doigt par la désormais célèbre, institution civile qui leur reproche une oisiveté suspecte.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : 83% des musiques utilisées dans TPMP n’ont pas été déclarées, 70% pour Alcaline Mag et 97% pour Envoyé Spécial ! D’une certaine manière c’est le cadre sup’ qui vole la petite monnaie d’un SDF pour se payer un café. Du moins c’est ce qu’on pourrait croire de prime abord. Néanmoins, les choses sont un peu plus nuancées que ça car derrière cette apparente fraude digne de Jérome Cahuzac, le rapport met en avant plusieurs faits.
 

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D’abord, les producteurs de ces émissions ne sont qu’une grosse bande de feignasses qui préfère se la couler douce dans des open-space climatisés plutôt que de déclarer les titres qu’ils s’apprêtent à utiliser. Du moins, c’est ce que dit en substance Laurent Petitgirard, directeur de l’administration de la Sacem. Pour lui, ces émissions ne sont pas en mesure de déclarer tous les titres qu’elles vont diffuser en ce sens où elles diffusent de nombreux extraits d’autres chaînes, sans pouvoir accéder aux titres exploités.

Pour TPMP à la limite, c’est envisageable : manque de moyens humains, logistiques et légaux…soit. Mais pour Alcaline Mag, émission musicale du service public, censée être au fait de la réalité artistique, il y a de quoi rire…ou pleurer. Un service public qui n’a pas tardé à publier un démenti pour réfuter l’accusation d’inconstance en rappelant les « échanges permanents » qui unissent les deux institutions et le fonctionnement d’émissions comme Envoyé Spécial régulièrement bouleversées par l’actualité. Des bouleversements qui engendre de facto, des retards…
 

France Televisions


Or, même si France Télévision tente de s’expliquer (il est tout de même difficile de croire que sur toute une année, personne à la rédaction d’Envoyé Spécial n’ait pensé à déclarer les titres diffusés), elle est bien la seule puisque de D8 (groupe Canal +, ndlr) à M6, aucun producteur, aucun présentateur, n’a jusqu’à présent fait de déclarations sur le sujet. Un silence un peu gênant qui, quelques mois après l’assignation en justice de la chaîne Numéro 23 (groupe RMC) par la Sacem lui reprochant un défaut de paiement à hauteur d’un million d’euros, tend à crisper les relations entre elle et les chaînes de télévision.

Il faut savoir que pour pouvoir diffuser légalement une œuvre musicale, une chaine a trois possibilités : obtenir une autorisation des auteurs (donc aller taper à la porte de la Sacem), demander une autorisation des titulaires des « droits voisins » (soit les producteurs et artistes interprètes) ou passer par l’éditeur. La plupart du temps, les majors sont aussi des éditeurs, donc lorsqu’une chaîne vient lui demander une autorisation de diffusion, la Sacem touche par effet de bande, son dû.
 

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Or, il arrive parfois que des petits malins de la télé créent eux-mêmes leurs sociétés de production pour éviter le péage. Là encore, la Sacem s’insurge, drapée de blanc, contre cette pratique frauduleuse et injuste envers les « justes bénéficiaires ». Une critique adressée à demi-mot contre M6 qui, en sur-déclarant des diffusions dans ses émissions Le Meilleur Pâtissier et Ma Maison Est La Plus Originale, s’attire les foudres suspicieuses de l’institution et de ses sociétaires.

Sociétaires qui, rappelons-le, ne sont pas touchés par ces «oublis » ou du moins directement comme le confirme Petitgirard, expliquant que quoi qu’il arrive, ses services redistribuent les droits, semestre après semestre. Néanmoins, en obligeant la Sacem à renforcer son contrôle (au bas mot ce sont 2 millions d'œuvres diffusées de 276.000 compositeurs, éditeurs ou auteurs français et étrangers qui ont été analysés pour l’année 2014/2015), ces chaînes monopolisent les ressources de l’institution en dépit de la mise en œuvre de ses autres missions.

Même si la majorité d’entre elles, à savoir 70%, font preuve d’une rigueur et d’une intégrité notables,  ces sociétés de productions ne sont au final pas « conscientes des dommages » pour citer le Petitgirard.

Sources :
 


Rafael Panza

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