Urne – A Feast On Sorrow

Les sorties d'album sont tellement nombreuses chaque année qu'il nous arrive de passer à côté de très beaux albums. Alors, pour commencer 2024, nous avons voulu, deux semaines durant, faire un focus sur des albums de 2023 que nous n'avions pas eu le temps de traiter.

Aujourd'hui, retour sur A Feast on Sorrow, second album du trio anglais Urne

La démence, le déclin, le sentiment d’impuissance, le chagrin puis le deuil. Autant de thématiques personnelles pour le bassiste / vocaliste Joe Nally, développées dans ce nouvel opus du trio londonien Urne, deux ans après son premier effort Serpent and Spirit. En filigrane, l’insistant questionnement existentiel "Where do the memories go ?" que l’on retrouve dans le morceau d’ouverture "The Flood Came Rushing In", aux passages déchirants en chant clair, mais aussi dans l’interlude intimiste "Peace", au chant lointain, ou encore dans la piste de conclusion.

Au cœur de l’album, une douleur qui se chante, se crie et se hurle sur des registres variés. La puissance chaotique et la frustration du morceau d’ouverture se mue en moment suspendu, cathartique, puis on passe par la lourdeur et la violence plus doom ("To Die Twice"). Du cri du cœur à la suffocation ("I can’t breathe") il n’y a qu’un pas, franchi avec "Becoming the Ocean", morceau au tempo galopant, haletant. L’expression à vif de la peine et du deuil trouve son pendant dans les paroles de "A Stumble of Words", où le trio londonien adopte cette fois-ci la perspective d’une personne atteinte de maladie dégénérative, prise au piège d'une mémoire défaillante et d'une parole perdue. Les imperfections du chant, quant à elles, donnent un côté humain, vulnérable et honnête à cette cassure. Les screams écorchés de Joe Nally – évoquant Conjurer parfois – fonctionnent bien, même si certains passages en chant clair peuvent, par contraste, manquer de muscle ("Stumble of Words").

Les Anglais ont eu la chance d’être contactés directement par un autre Joe, Duplantier, pour la production de l’album, et la touche du maître se ressent indéniablement. L’instrumental, impeccable sur tout l’album, est doté d’un regain d’énergie perceptible sur tous les titres. Cet élan irrésistible se retrouve sur des compositions variées, du titre gojiresque "Burden", où la section rythmique basse - batterie fait des merveilles, à la puissance redoutable du sludge et la brutalité à vif du post hardcore que l’on imagine fonctionner parfaitement (et fiévreusement) sur scène.

A Feast on Sorrow se révèle chaotique, puissant, rapide, limite thrash par moments, mais aussi très prog, mélodique et lourd à la fois (comme sur "The Flood Came Rushing In", où la basse se distingue encore). La prestation de James Cook derrière les fûts est également impeccable. Ce dernier explore des territoires entre prog et metalcore, stoner et post hardcore sans broncher, laissant libre cours à des doubles blast impressionnants et accélérations redoutables. On peut seulement regretter que la batterie soit parfois un peu trop forte dans le mix, au détriment des guitares ("Becoming the Ocean").

L’émotion surgit de compositions particulièrement bien construites, où le propos et l’univers sonore ne font qu’un. Ainsi, le morceau-titre est introduit par des lignes de piano avant l’attaque des riffs assassins. Le trio déploie ici toute sa lourdeur, tandis que le chant chemine sur le fil entre growls profonds et chant clair dans le refrain. L’ultime piste de l’album, au titre évocateur "The Long Goodbye / Where Do the Memories Go ?", débute par les lamentations de guitare d’Angus Neyra qui annoncent la couleur : on ne voit pas les onze minutes passer, pris dans ce poids émotionnel et cette impression d’amertume, dans un morceau puissant mais tout en nuances, servi par des percussions énormes. Un finish magistral pour un album coup de poing, viscéral et puissant.

Les chanceux munis d’un billet pour l’imminente tournée d’Avatar pourront découvrir le sludge chaotique de Urne qui ouvrira pour le cirque des Suédois en mars. Si la moitié des dates françaises affiche déjà complet, il reste encore quelques places pour les dates de Roubaix, Reims, Toulouse, Biarritz et La Rochelle : avis aux curieux !

Tracklist : 

01 - The Flood Came Rushing In
02 - To Die Twice
03 - A Stumble of Words
04 - The Burden
05 - Becoming the Ocean
06 - A Feast on Sorrow
07 - Peace
08 - The Long Goodbye / Where Do the Memories Go?

A Feast on Sorrow est sorti le 8 août 2023 via Candlelight Records 

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NOTE DE L'AUTEUR : 7 / 10



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