Entretien avec VOLA au Hellfest 2025 : “ABBA et Meshuggah ? Ça donnerait Meshubba, le groupe ultime !”

Petite pépite de cette édition du Hellfest, le groupe danois VOLA a sublimé l’Altar avec son metal progressif moderne, aussi puissant que mélodique. Le groupe en a profité pour défendre Friend of a Phantom, un quatrième album aux contours plus personnels, porté par des influences plus ambientes et électro-pop. Nous avons eu la chance de rencontrer Asger Mygind, chanteur-guitariste et tête pensante du groupe, ainsi qu’Adam Janzi, batteur, quelques heures avant leur concert. Une interview très détendue, enrichie de confidences, d’anecdotes… et même de quelques gros mots en français.

Bonjour à vous et merci de nous accorder cette interview ! On dirait d’ailleurs que vous connaissez déjà un peu la France… surtout toi, Adam ?

Adam : Oui ! Ma copine est française, alors elle m’apprend un peu la langue. Bien sûr, comme tout bon professeur, elle a commencé par m’apprendre… les gros mots ! Du coup, je connais déjà pas mal de choses inappropriées à dire en français (rires).

Asger (amusé) : Tu comptes en placer pendant l’interview ?

Adam : Ça dépend… on verra comment ça se passe (rires).

 

Ce soir vous jouez au Hellfest. Qu’est-ce que vous pensez du festival ?

Adam : C’est la fierté française ! (rires) Sérieusement, c’est l’un des meilleurs festivals que j’ai vus jusqu’à présent. Tout est tellement classe et bien organisé.  On joue à l’Altar ce soir, et beaucoup de nos amis jouent aussi sur une scène très metal prog aujourd’hui : Wheel, Leprous, Persefone… C’est un peu comme quitter la maison mais retrouver quelque chose de familier. C’est une super sensation.

Vola band 2024
Photo : Heli Andrea

Plus sérieusement. VOLA est un groupe très difficile à décrire. Certains disent que vous mélangez du metal moderne façon djent avec de la pop ambiante, voire même de l’euro-dance. Tu serais d’accord avec ça ?

Asger : C’est une bonne manière de le dire, oui. On incorpore tout ce qu’on trouve excitant, sans vraiment se mettre de limites. Si ça sonne bien, ça a sa place. Il y a peut-être même une place pour du Aqua dans notre son. On verra un jour si on va jusque là (rires).

 

C’est vrai qu’il y a un vrai grand écart dans votre univers sonore, entre metal moderne très prog et des sons très pop ambiants. Vous avez sûrement pas mal d’influences non-metal ?

Adam : Pour moi, Loreena McKennitt est une grande inspiration et elle fait vraiment voyager. C’est une chanteuse canadienne qui fait de la musique celtique. Et parlant de la France, j’adore la chanson "Voyage Voyage" de Desireless. C’est une super chanson. En dehors de la musique, Carl Sagan (astrophysicien américain, ndlr) m’inspire beaucoup. Pour sa manière de voir la vie, de découvrir, d’aborder l’art. Ça me parle.

Asger :  L’artiste qui me vient, c’est Helios. C’est de la musique ambiante. C’est une musique vraiment très belle, et qui m’emmène ailleurs. Je recommande vraiment, allez l’écouter.

 

Vous avez l’air connaisseur... S'il fallait vous réincarner en groupe français, qu’est ce que vous auriez fait comme musique ?

Adam :  Si on était français ? Dur à dire, mais on écrirait sur le "pain au chocolat" ou la "chocolatine". Ce serait notre grande quête existentielle. (rires) C’est un vrai débat, non ? Et il y a aussi le débat sur Nantes, certains disent que ce n’est pas en Bretagne…

Asger : Moi je reste neutre, je suis pas assez expert, c’est Adam qui connait. (rires).

Vous incorporez parfois des influences musicales un peu inattendues, par exemple sur  "These Black Claws", issue de l’album Witness, où il y a une partie rap. C’est un passage vraiment inédit. Comment vous est venue l’idée ?

Asger :  La base du morceau, c’était un beat un peu hip-hop. Mais je ne savais pas rapper, donc il nous fallait quelqu’un pour faire cette partie. On a pensé à Tyler, The Creator, mais c’était trop ambitieux. Il est inaccessible hélas ! J’ai donc fait une recherche sur YouTube en tapant "rap voix grave", et je suis tombé sur ce gars, SHAHMEN. On lui a écrit sur Instagram, et il a simplement accepté. Il apporte beaucoup à la dynamique du morceau.

 

Vous êtes venus ici aussi pour promouvoir votre dernier album Friend of a Phantom. Un album aux sons plus pop, et encore plus éthéré que les précédents. Vous disiez que vous composez généralement beaucoup au feeling et selon votre humeur du moment. Dans quel état d’esprit étiez-vous pour celui-ci ?

Asger : Après Witness, qui réalisait beaucoup mes rêves d’album parfait, j’étais un peu perdu. J’avais l’impression d’avoir sorti tout ce que j’avais dans mon cerveau. De ce fait, pour le nouvel album, j’ai dû tout reconstruire à zéro, sans but clair, sans une vision d’ensemble. J’ai juste écouté chaque idée et en voyant où elle pouvait mener. Il y avait un peu de peur aussi : "Et si ce n’est pas aussi bon que Witness ?” Donc il y avait cette recherche, cette aventure, mais aussi une sorte d’angoisse.

J’ai fini par me dire qu’il ne fallait pas forcément faire "mieux", mais juste faire "aussi bien", mais différent. Et ça m’a libéré d’une pression énorme. J’étais plus libre ensuite, et à la fin je me suis dit que je voulais faire du Asger.

 

Asger, tu es un peu le cerveau du groupe, mais vous collaborez beaucoup ensemble entre les musiciens. Comment se passe ce processus ?

Adam : On a un serveur en ligne où on envoie nos idées. Asger (chant/guitare) et Nikolaj (basse) vivent à Copenhague. Martin (clavier) est à trois heures de là. Moi, je suis en Suède. Donc on bosse à distance : chacun enregistre, envoie, et les autres construisent dessus.  Parfois, on se retrouve dans la maison de vacances des parents d’Asger, et on mange des chips

Asger : Beaucoup de chips même! (rires). A la fin, c’est moi qui me charge de la production, mais lors du processus, chacun peut déposer une idée, les autres peuvent rebondir à telle ou telle idée. C’est très artisanal !

 

Musicalement, vous alternez le doux et le brutal. Par quoi ça commence ?

Asger : Ça dépend de chaque chanson. Parfois c’est un rythme que j’ai en tête. Je le traduis à la guitare, ça devient un couplet, puis un refrain.  C’est juste suivre l’idée, une sorte de cheminement, de A à B, puis jusqu’à D. On ne se dit jamais "là, il faut une partie douce" ou "là, il faut du lourd". On suit ce qui arrive. Tout est vraiment très naturel, et pas aussi mathématique qu’on peut le penser.

 

Asger, tu disais que tu étais fan de Steven Wilson et de son approche vocale. Peux-tu développer ?

Asger : C’est un roi de l’harmonie vocale. Quand on veut un refrain qui sonne grandiose, je pense à lui dans ma tête, qui me dit : "Encore une harmonie, encore une."  Il double souvent la voix principale avec un falsetto une octave au-dessus. Ça ajoute de l’air. Parfois aussi, je fais aussi une voix plus grave avec un octave en-dessous. Ce mélange de deux voix à l’unisson, mais à des octaves différentes, c’est un de ses trucs. Je m’en inspire beaucoup.

Est-ce que, comme Steven Wilson, vous considérez ABBA comme le plus grand groupe du monde ? Au même niveau que Meshuggah ?

Asger : Les meilleurs ? Hmm… Dur à dire… ABBA et Meshuggah, ça fait Meshubba. C’est ça qui serait le plus grand groupe du monde.

Adam : Oui ! Vive la Suède (rappelons qu’Adam est suédois, ndlr) ! Ils sont très très bons en vrai.  Même si Meshuggah ça reste Meshuggah ! Plus sérieusement, j'aime bien parfois décrire VOLA comme un croisement entre Meshuggah, Depeche Mode, et Mew (pop progressive).

 

Vous parliez de Meshuggah comme influence. Beaucoup trouvent que vous retranscrivez du Meshuggah dans un autre genre. En quoi ont-ils influencé votre manière de composer et de jouer ?

Asger : Quand j’ai écouté leur album Nothing pour la première fois, j’étais soufflé. Ces guitares graves, ces grooves étranges mais accrocheurs… Leur manière d’écrire un riff m’a complètement transformé. Quand j’ai compris qu’on pouvait écrire comme ça, ça m’a fait vraiment repenser la manière d’écrire de la musique.

Adam : J’avais 13 ans, je jouais à World of Warcraft et j’écoutais Meshuggah, jusqu’à ce que je comprenne leur pattern rythmique. À l’école de batterie, lors de la fête de fin d’année j’ai proposé de jouer soit du Dave Matthews soit du Meshuggah… Mon prof a dit "pas Meshuggah”, en râlant. C’est un bon souvenir. Thomas Haake est une énorme influence pour moi comme batteur. D’ailleurs on les a croisé en backstage sur un festival, j’ai chuchoté aux gars du groupe : "Regardez ces légendes !" Mais j’étais vraiment trop timide pour aller leur parler.

 

Et si vous deviez réinventer une de vos chansons dans un autre style ?

Adam : Bonne question…(le groupe réfléchit pendant un long moment et se prend au jeu) On a déjà parlé d’un album de Noël un peu fun.

Asger : Une version d’une de nos chansons de Friend of a Phantom avec des paroles de Noël !

Adam (qui reprend le refrain de “Paper Wolf”) : You better watch out, Santa is coming...

Asger : On est sur quelque chose, je pense qu’il faut explorer encore un peu mais il y a quelque chose ! On va la renommer "Paper Gift" (rires)

Il est temps de finir sur des questions un peu fun : On a une question capillaire pour Asger. Comment entretiens-tu tes longs cheveux ? les fans semblent faire une fixation sur ça, et il faut donc qu’on ait l’information…

Adam : Le monde veut savoir !

Asger : C’est un processus de plusieurs heures, une fois par jour…  Je plaisante ! (rires) J’ai une technique : je mets une casquette. Comme ça, pas besoin de brosser (Asger sort alors sa casquette fétiche violet). Mais sérieusement, l’autre secret, c’est l’après-shampoing. Si tu n’en mets pas, c’est impossible à brosser. Donc voilà : utilisez un bon après-shampoing. (Asger nous le dit de façon slogan publicitaire, un moment mémorable de l’interview.)

 

Et toi Adam, on ne t’oublie pas non plus, parlons de ton tatouage visible et si massif quand tu joues, que représente-t-il ?

Adam : Je l’ai terminé il y a cinq ans. D’ailleurs Facebook me l’a rappelé avec un post aujourd’hui, c’est un anniversaire semble t-il. C’est un crâne de bélier, mon premier et unique tatouage. C’est un symbole très thérapeutique, qui connecte à la fois des souvenirs/émotions positifs et négatifs pour mois. Trois sessions de six heures sur trois mois, ce fut très intense.

Quand on m’a tatoué cette zone sur le haut à droite, ma jambe droite bougeait toute seule pendant la séance. Et on m’a même demandé si ça allait, c’était flippant sur le moment. Le pire, c’est après, sachez que ça gratte de fou. Tu veux tout arracher, ça fait “mal sa mère(Adam dit cette expression en français, ndlr). Il a fallu rester calme pendant une semaine. Mais j’ai survécu ! Donc pour les enfants qui veulent le faire, sachez que ça fait mal, et qu’une fois qu’il est fait, il est là pour de bon. Voilà !

Le dernier album de VOLA, Friend of a Phantom, est disponible chez Mascot Records.

Le live report du concert de VOLA est aussi disponible ici.



Partagez cet article sur vos réseaux sociaux :

Ces articles en relation peuvent aussi vous intéresser...

Ces artistes en relation peuvent aussi vous intéresser...