Linkin Park – Dimanche 22 juin – Mainstage 1 – 23h00
Incontestablement, Linkin Park est bien la tête d’affiche la plus attendue de ce Hellfest 2025. La reformation des Américains et l'arrivée de la nouvelle chanteuse Emily Armstrong en fin d’année dernière a secoué la sphère médiatique. Il a donc semblé impensable de ne pas voir la bande à Mike Shinoda refouler enfin la scène de Clisson cette année. Pourtant, après l’annulation de leur concert en Suisse quelques jours plus tôt, le doute a plané un temps sur leur venue à Clisson. Heureusement le groupe est bien là pour nous offrir un dernier concert. Retour sur ce set de clôture de l’édition 2025.
Une setlist nostalgique et best-of, mais mal calibrée pour le Hellfest
Le set s’ouvre sur l’inévitable « Somewhere I Belong ». D’emblée, on sent que Linkin Park va reprendre la structure bien rodée de sa tournée de reformation. Et ça ne rate pas : un best-of calibré mêlant classiques nostalgiques (« In the End », « Numb », « Faint », « What I’ve Done ») et extraits efficaces du dernier album (« The Emptiness Machine », « Overflow », « Heavy Is the Crown »). En bonus, on retrouve évidemment le nouveau single de la version deluxe de From Zero « Up from the Bottom ». Un titre fraîchement sorti, mais sûrement déjà prêt depuis longtemps...
Le public a également le droit à quelques belles surprises. "From the Inside" et "Two Faced" sont inédits sur cette tournée. Mais surtout, LE moment du set est assurément "A Place for My Head " durant le rappel. Présenté par Mike Shinoda comme “a song for the pit”, il est aussi un hommage malin au public du Hellfest. C'est aussi l’un des rares moments où le frontman prend le temps d'interagir avec la la fosse.
La setlist n'est toutefois pas sans reproche. Le concert de Paris/Nanterre, quelques mois plus tôt, proposait « Crawling », « Points of Authority », « Castle of Glass », « Lost in the Echo » ou encore le grand oublié « Breaking the Habit », tous absents ici. Manque aussi à l'appel le culte « Given Up » ou « Casualty » (la plus explosive de From Zero), qui auraient été bien venus.
D’autant que certains choix, comme « The Catalyst », « Overflow » ou le mielleux « Waiting for the End », cassent par moments l’élan du set. Leur vibe pop-rock et mid-tempo retombe, là où on aurait aimé plus de tension et de dynamisme.
Emily Armstrong apparait en retrait, et une routine semble s'être installée au sein du groupe
Emily Armstrong, la nouvelle voix de Linkin Park, semble avoir perdu un peu de la fraîcheur et de l’émotion qui marquaient ses débuts. Sa voix parait voilée par moments, trahissant une fatigue ou un début d’enrouement. Du côté de la voix, les chants criés, eux manquent vraiment d'énergie. Surtout que la chanteuse, un peu blanchâtre, semble surtout vouloir se préserver pour ne pas se fatiguer davantage.
Cette sensation de routine s’est hélas ressentie plus généralement dans tout le groupe. Le show est propre, bien produit. Hélas, on sent que les artistes sont plus là pour faire leur travail qu’autre chose. Cette performance mitigée est probablement aussi liée à l'état de santé d'un membre du groupe (qu'on suppose être Emily), ce qui a entrainé l'annulation du concert en Suisse quelques jours plus tôt.
La communication d’Emily avec le public est restée limitée, laissant Mike Shinoda gérer l’essentiel des quelques interactions. Comme lors des autres dates, elle conserve son moment “rituel” sur scène en prenant la guitare. C'est cette fois-ci sur “Up From The Bottom” (ndlr : elle avait joué de la guitare sur "Over Each Other" à Paris) , pour accompagner le groupe sur scène. Un passage apprécié sur un morceau pas encore entendu en live, mais qui participe à cette impression de show très scripté. Aussi, le réarrangement piano-voix de « Lost », si poignant lors du concert de Paris-Nanterre, n’a pas eu le même impact sur la Mainstage.
Une production impressionnante… et des écrans de smartphones
Côté production, Linkin Park continue de proposer un show de haut vol: animations sur écrans revues pour l’occasion, jeux de lights modernisés et lasers lumineux puissants qui rendent la scénographie immédiatement reconnaissable, contribuant à faire de ce concert un moment à part.
Mais un autre spectacle s’est joué dans le public : le nombre de téléphones brandis pour filmer le concert était tout simplement hors norme, transformant la fosse en forêt d’écrans lumineux. Comme si ce show, à l’image de l’évolution du Hellfest, était devenu un moment qu’il est plus important de montrer sur les réseaux que de réellement vivre.
Dès lors, on regrette vraiment l'expérience que nous a offerte Ghost quelques semaines plus tôt. C'est un poil réactionnaire, mais il faut vraiment éduquer les gens sur le fait qu'un concert ne se vit pas à travers des écrans.
Un son perfectible et un bouquet final en demi-teinte ?
Malgré cette production solide, le son n’a pas été à la hauteur des attentes. Trop faible par moments, brouillon à d’autres, il a atténué l’impact de refrains pourtant taillés pour le live. Le côté organique de certains riffs plus metal, comme sur « One Step Closer », « Faint » ou « Papercut », a véritablement manqué.
Point positif cependant : le mix laissait plus de place au DJ du groupe, Mr. Hahn, dont les scratches, samples et manipulations sur ses tablettes apportent une signature sonore unique au show. Un élément qui a ravivé chez beaucoup cette pointe de nostalgie propre à Linkin Park.
Alors que "Bleed Out" termine en beauté ce set, le feu d’artifice du Hellfest (grand oublié de l'édition 2024), démarre juste après la fin du concert et en musique. D'abord sur du AC/DC, puis du Slayer (un prétendant headliner à la prochaine édition?), et enfin sur le morceau "In the End" de Linkin Park. Dommage qu’il n’ait pas été déclenché sur les dernières notes du morceau final. Cela aurait offert une conclusion symbolique et spectaculaire à cette édition.
Ce concert de Linkin Park aura été imparfait, mais reste un beau souvenir du festival, oscillant entre une routine installée par la tournée de reformation et des moments de nostalgie toujours uniques. Toutefois, le public semble avoir complètement adhéré au concert, d'un artiste tout à fait taillé pour headliner le festival. On se souvient alors de leur passage en 2017 où le regretté chanteur Chester Bennington et sa bande avaient littéralement été hués sur scène. Les temps ont bien changé - et c'est tant mieux.
Setlist
Act I
Inception Intro A (with elements of "Castle of Glass")
Somewhere I Belong
Lying From You
From the Inside
The Emptiness Machine
Act II
Creation Intro A (with elements of "Castle of Glass")
The Catalyst
Burn It Down
Two Faced
Waiting for the End
Up From the Bottom
One Step Closer
Act III
Break/Collapse
Lost
Overflow
What I've Done
Numb
In the End
Faint
Encore:
Resolution Intro A (with elements of "Castle of Glass")
Papercut
A Place for My Head
Heavy Is the Crown
Bleed It Out (extended bridge with "Reading My Eyes" verse 1)
Crédit photos : Sara Jisr/@GroovyMochi
Reproduction interdite sans l'autorisation de la photographe.
Pour lire notre live report du show de reformation de Linkin Park en France, c'est ici.
Et ici, pour lire la chronique de leur dernier album From Zero.