Jeudi 14 août, Carhaix
Et c'est reparti pour une nouvelle édition du Motocultor ! Une nouvelle fois, le festival breton se distingue par des couacs d'organisation sur le premier jour, des valeurs sûres de plus en plus impressionnantes et des découvertes toujours aussi renversantes. Le premier jour nous a fait retomber en enfance et confirmé que le talent sur scène ne vieillit pas.
A l’heure du coup d’envoi du Motocultor 2025, les premiers couacs arrivent déjà : il y a une queue phénoménale du côté de la pose des bracelets presse ou VIP (beaucoup plus que du côté festivaliers sans VIP). L’attente en plein soleil n’est pas ce qu’il y a de plus agréable. Le nouvel agencement du site semble plus fluide. Certes la distance entre les scènes est plus grande mais la tribune VIP, elle, est plutôt agréable, ombragée l’après-midi et très bien orientée pour profiter des concerts de la Dave Mustage mais aussi de la Supositor Stage. Le soleil de l’après-midi tape sérieusement, ce n’est que vers 20h que les températures baissent... ou plutôt chutent brutalement, au point de nous faire nous demander si l'automne n'est pas arrivé prématurément.
Nos concerts du jeudi 14 août
Versatile
Supositor Stage, 16h
Suite aux problèmes d'organisation du festival que nous avons déjà abordé, tout particulièrement la longueur de la file d'attente à la pose des bracelets presse, la majorité du concert de Versatile s'est déroulé avant que nous puissions entrer sur le site. Quand nous avons enfin le précieux sésame en poche (plus précisément au poignet) et que nous pouvons enfin nous diriger vers la Supositor, il ne reste déjà qu’une petite quinzaine de minutes avant la fin du set de black indus du groupe suisse.
Et c’est dommage, car l’utilisation de la scène est intéressante ! On y découvre des accoutrements remarquables, du corpse paint ou encore des masques évocateurs, mais aussi de la pyrotechnie. Beaucoup de pyrotechnie. En plus des lance-flammes, ce sont de véritables torches enflammées que le batteur utilise lorsqu’il vient, sur un fût placé au devant de la scène, jouer la rythmique indus de “Alter Ego”, clôture impressionnante d’un set qui semble avoir bien convaincu dans le public. Entre le soleil et toutes ces flammes, il fait chaud cet après-midi à Carhaix.
Helldebert
Dave Mustage, 16h45
Devant la Dave Mustage on distingue une armée d’enfants sur les épaules de courageux parents qui s’apprêtent à donner de leur personne pour 1h15 sous un soleil de plomb, et de nombreux festivaliers curieux venus (re)découvrir la version metal des concerts d’Aldebert. Sur les deux grands écrans du backdrop, après une intro sur “Thunderstruck” d’AC/DC, s’entame un dialogue entre le « gentil » Guillaume Aldebert et son jumeau maléfique, Helldebert. Cette tournée célèbre en effet le dernier album, Enfantillages 666 (sorti en 2024), sur lequel l’artiste penche du côté électrique et saturé de la force, et où figurent diverses collaborations avec des artistes français et internationaux du monde du metal – ou pas (-M-, Amélie Nothomb). Question du jour : y aura-t-il des invités spéciaux aujourd’hui ? La présence des écrans nous fait douter.
Avec ses baskets à roulettes, Aldebert glisse de gauche à droite de la scène et affiche un sourire non feint tout au long du set. Mais il ne faut pas se fier à cette apparente innocence : la bête de scène, rompue à l’exercice du live, sait mener son public, et pas que les enfants. Ça commence avec « Rock’n Roll » et ses paroles qui donnent le mot d’ordre du week-end : « Si c’est trop fort, c’est que t’es trop vieux ! » . Il va en falloir de l’énergie à tous les parents présents, sollicités dès « Seum 51 » avec ses « Jump ! » anti-seum. Aldebert, très en forme, fait la morale aux parents (« Le Temps de Vivre »), clashe gentiment le public sur « Du gros son », monte sur la barrière, chante en tenant la main d’un enfant sur « Pour Louper l’Ecole » avant de demander une ambiance « dance floor de milieu d’après-midi », parfaitement réussie par le public très enthousiaste. Les slams de moins de 12 ans se multiplient sur « Les Derniers Pirates », agrémenté par les growls du viking Johan Hegg de Amon Amarth, présent sur écran.
Côté metal, ça assure du côté d’Helldebert qui exhibe une collection impressionnante de guitares Flying V, et du côté de la brochette de musiciens énergiques qui l’accompagnent sur scène : Hubert Harel à la basse, Christophe Darlot aux claviers, à la batterie l’ex-Dagoba Nicolas Bastos et à la guitare Nicolas Alberny de Gorod. Les riffs pleuvent, et cette version électrique et énervée des gentils tubes d’Aldebert résonne bien fort sur le Motocultor. Le frontman s’essaie sans succès au solo de batterie avant de laisser sa place à Nicolas Bastos. Puis arrive LE moment culte de l’après-midi avec l’arrivée, en chair et en os cette fois, du légendaire Max Cavalera (Sepultura, Soulfly,...) en maillot de foot du Brésil. Visiblement ravi d’être là, l’artiste vient poser son cri puissant sur morceau « Le cartel des cartables », quelques heures avant son set avec Nailbomb sur la scène voisine.
Fin de set, quelques messages d’ouverture d’esprit et d’acceptation de la différence (« La Sorcière », « Hyperactif »), avant de présenter – chose assez rare – tous les techniciens, applaudis par le public. La conclusion aussi festive que l’ensemble du set, paroxysme du concert familial et bienveillant : Aldebert demande si une mamie est présente dans l’assemblée, l’heureuse grand-mère est emmenée en backstage un moment avant de revenir vêtue d’une cape et d’une guitare pour mimer le solo final de « Super Momie », célébration des anciens (avec la participation sur écran de Fetus d’Ultra Vomit, Stéphane Buriez, Mouss de Mass Hysteria,...), théâtre de circle pits et même d’un mini-wall of death réservé aux enfants du Motocultor. Le maître de cérémonie emmène même la super mamie du jour à la barrière pour lui offrir un slam d’anthologie ainsi qu’une guitare pour ses petits enfants ! Palme du capital sympathie et de la bonne humeur pour Helldebert et son orchestre, qui ont su faire slammer, crier et headbanguer petits et grands sous le franc soleil finistérien.
Setlist Helldebert :
Rock’n Roll
Seum 51
Pour louper l’école
Les derniers pirates
Le temps de vivre
Du gros son
La marche du monde
Le cartel des cartables
La Sorcière
Hyperactif
Croque-Mitaine
Super Momie
Year Of No Light
Massey Ferguscène, 18h05
Le sextette bordelais de post metal instrumental / sludge aurait certainement mérité un horaire plus tardif pour allier une ambiance nocturne à son univers sombre et entêtant, mais qu’importe. Un lightshow coloré suffit, et si la scénographie est extrêmement dépouillée, la configuration du groupe et la polyvalence des musiciens ne peut que séduire : avec trois guitares, une basse, deux batteries et deux claviers sur scène, on s’attend à un set massif et intense de la part du groupe qui compte déjà une vingtaine d’années d’existence. Deux morceaux longs et denses, “Perséphone (Enna)” et “Perséphone (Coré)” sont enchaînés sans pause, et d’emblée, grâce à un son excellent, la tente se retrouve embarquée dans des montées en puissance intenses avant des ralentissements travaillés.
On est tenté de fermer les yeux pour apprécier la force tranquille et la virtuosité qui émane des compositions du groupe, mais l’oeil est irrémédiablement attiré par le ballet hypnotique et fascinant du duo de batteurs qui martyrisent leurs fûts lentement tout en agitant la tête, calés sur les riffs lourds et traînants assénés par leurs camarades à l’avant. En plein morceau, l’un des batteurs se lève et passe à l’avant pour officier au clavier. Après un long passage atmo / space rock, c’est l’autre batteur qui revient pour un interlude étrange au clavier. Puis les deux musiciens repartent derrière leur kit. Au gré des ralentissements et reprises de tempos, la musique claque fort, les riffs des trois guitaristes vrombissent. On voit même une petite fille slammer assez lentement, au gré de la musique, sur un moment suspendu, avant un passage très lourd.
Sous la tente, les têtes s’agitent, les yeux se ferment, on vit la musique tout en se remettant des difficiles heures d’attente en plein soleil. A la fin de l’enchaînement des deux premiers morceaux (soit après une vingtaine de minutes), les musiciens se présentent et décrivent leur joie d’être là.
La mélodie entêtante de “Alètheia”, issue du dernier album de YONL, Consolamentum (2021) virevolte entre des arrêts abrupts et des reprises, sur une construction lente en crescendo, avant des explosions de puissance. Le guitariste Jérôme Alban prend la parole pour remercier le public, le troisième guitariste remplaçant, ainsi que leur cher ingé son, célébré avec une touche d’humour bordelais. Il annonce déjà le dernier morceau, “Stella Retrix” à la longue intro psyché avec le bassiste Johan Sebenne et le batteur aux claviers. Le crescendo et les boucles hypnotiques créent une intensité prenante et semblent emporter le public qui tape des mains lors des passages plus rythmés. Les riffs s’amplifient encore pour le final ultra saturé, avant que les musiciens ne fassent vibrer encore plus la tente en faisant cracher leurs amplis pour un point d’orgue bourdonnant.
Setlist Year of No Light :
Perséphone (Ena)
Perséphone (Coré)
Alètheia
Stella Rectrix
Me And That Man
Bruce Dickinscène, 18h55
Nergal est un habitué du Motocultor, lui qui est déjà venu se produire avec Behemoth à quatre reprises - 2022 pour la dernière fois -. Si le groupe de blackened death a sorti un nouvel opus cette année, qui plus est plutôt convaincant malgré son titre ridicule et peu inspiré (The Shit Ov God), c’est pourtant avec son projet alternatif de blues / dark folk qu’Adam Darski (de son vrai nom) foule la Bruce Dickinscène ce jeudi. Et c’est la première fois que le combo Me And That Man se produit au festival ! L’occasion de découvrir (ou redécouvrir) ce groupe et ses compositions qui suintent le blues gras et évoquent le voyage. “Nightride”, “On The Road” ou “Get Outta This Place” en sont de bons exemples, tous tirés du premier opus, Songs of Love and Death, seul album enregistré avec John Porter avant son départ (puis son retour pour notre plus grand plaisir). Sa prestance et son interprétation participent beaucoup au succès de la formule en live : on pense bien sûr à la profondeur de sa voix, mais aussi au livre de prières sataniques qu’il porte lors de “Burning Churches”, un titre qui invite le public à entonner avec joie sur des thématiques sataniques. Ce décalage entre les thématiques et ce style musical très éloigné en apparence de l’image généralement associée à cet univers crée des moments très intéressants. Quelle reprise jouissive du “Black Metal” de Venom, avec ce blues lent lourd et sale qui sied si bien au titre iconique ! Troquer de la vitesse pour de la lourdeur (et gagner au passage un excellent chanteur) : que demander de plus ?
Le groupe termine sa tournée européenne au Motocultor. Peut-être est-ce la cause d’une dynamique de concert un peu en dents de scie. Tous les titres ne semblent pas joués avec autant d’entrain et le public ne propose qu’occasionnellement du répondant. Me And That Man s’attèle tout de même à interpréter un nouveau titre composé, qui n’a pour le moment pas de nom. Actualité oblige (le festival se déroule un peu plus de trois semaines après le décès d’Ozzy Osbourne) le groupe termine “Losing My Blues” en medley avec “Paranoid”. Il ne s’agit pas tout à fait du premier hommage effectué lors du festival, en tout cas ce n’en est certainement pas le dernier. La fin du set s’organise en crescendo jusqu’au final sur “Blues And Cocaine”, où le public est largement invité à chantonner le thème. Une dernière sortie dans les marécages du Bayou et c’est fini. Pour la dernière date de sa tournée, le groupe a délivré un concert intéressant bien qu’inégal, avec ses temps forts marquants.
Setlist Me And That Man :
Run With The Devil
My Church Is Black
Nightride
On the road
Get Outta this place
Black Metal (Venom)
Burning Churches
Got Your Tongue
A Song Without A Name
White Faces (Roky Erickson And The Aliens)
Losing My Blues / en medley avec Paranoid (Black Sabbath)
Coming Home
Love & Death
Blues And Cocaine
Ne Obliviscaris
Massey Ferguscène, 20h
La bande à Nergal ayant fini en avance, le public a le temps de venir remplir la tente de la Massey Ferguscène pour Ne Obliviscaris. Le sextuor australien avait donné en fin d'année dernière plusieurs concerts magistraux en France, passant par Paris, Nantes, Lille et Lyon.
Les balances de la batterie sont assourdissantes et donnent un avant-goût prometteur du set. Les musiciens entrent finalement un par un et entament « Devour Me, Colossus (Part I): Blackholes », du deuxième album de 2014 Citadel. Le son est relativement brouillon au début, et la belle voix claire de Tim Charles s'entend très mal. Son chant se fait cependant plus audible au fil des morceaux : est-ce que le son s'améliore ou bien le groupe nous embarquant complètement, les problèmes de son ne se font bientôt plus sentir ?
Seulement cinquante minutes de concert pour un groupe pareil, c’est peu. Avec des compositions qui dépassent régulièrement le quart d’heure, la setlist est forcément réduite. Ne Obliviscaris va déployer durant le temps de jeu imparti quatre morceaux, dont le sublime "Equus ", du dernier album en date Exul, sorti en 2023. Sur les quatre disques sortis depuis 2012, le premier, Portal Of I, est ignoré, pour permettre de mettre davantage en avant le dernier né.
Le groupe est généralement décrit comme du « metal progressif extrême », ce qui lui correspond bien. Les parties death impressionnent, entre les blasts du batteur Daniel Presland et le growl du nouveau chanteur James Dorton, tandis que les parties planantes, aériennes prennent aux tripes. En un quart d’heure, il y a évidemment le temps de passer par toutes les émotions, et les morceaux du groupe nous entraînent sans réserve, aussi prenants en live qu’en studio. Ils donnent aussi à entendre des détails variés qui apportent de la richesse à l'ensemble, avec par exemple quelques passages plus groovy, des soli de basse (Martino Garattoni), de guitare (Benjamin Baret et Matt Klavins)... Le violon de Tim Charles, unique cofondateur encore présent, est évidemment très mis en avant, offrant ce son si particulier, enivrant et mélancolique, au quintette.
Au départ, les musiciens sont assez statiques, seul Charles, qui assure également le chant clair, se déplace, interagit avec le public et ses comparses. Cependant, une vraie alchimie, qui s’intensifie au fil des morceaux, s'observe entre les deux chanteurs, qu'ils se répondent ou doublent leurs lignes de chant. Tim Charles explique que le groupe a passé une mauvaise journée, des problèmes de transport - et de van trop petit - ayant compliqué leur accès au festival. Mais l’ensemble des musiciens finit par sortir de sa réserve. Guitaristes et bassiste viendront même tous les trois jouer sur le bord de scène.
Le public semble assez captivé, malgré un slam un peu incongru et de la poussière qui commence à s'élever - ce ne sera que la première fois du festival. Si les conditions n’étaient pas forcément optimales pour apprécier toute la richesse musicale de Ne Obliviscaris, les wallabies ont offert une entame parfaite sous la tente de la Massey Ferguscène.

















































































































































































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