Sidilarsen (+ Les Tambours Du Bronx et Madam) à l’Olympia de Paris (11.10.25)

Le groupe Sidilarsen s’offre pour la première fois la mythique salle de l'Olympia, avec du beau monde, qui représente différentes générations de la scène française.

La salle se remplit lentement, mais n'affiche pas complet. Est-ce que Sidilarsen n’attirerait plus les foules ? Des promos étaient faites sur les billets les jours précédant le concert, ce qui fait supposer des difficultés pour faire le plein. Peu importe après tout, car le public présent ce soir est particulièrement chaud.

Madam

C’est le trio toulousain (comme Sidilarsen) de Madam qui ouvre le bal. D'emblée, l'énergie explosive des musiciennes est saisissante. Leur rock allie à merveille un son dansant et agressif. Les morceaux alternent souvent des passages très dynamiques, pas avares de cris, et d'autres tout en faux calme, avec un chant bas et grave presque murmuré. La basse de Marine, notamment, s'entend extrêmement bien et donne beaucoup de groove à l'ensemble. La bassiste elle-même saute partout en permanence - comme la guitariste et chanteuse principale, Gabbie, ou enchaîne les mouvements de danse, parfois assez sexy. La batteuse Anaïs est également très énergique derrière ses fûts.

Les trois comparses sont tout aussi endiablées et elles portent leurs morceaux avec une fougue enragée. "The Ride" et "La Meute" marquent particulièrement. Le public réagit plutôt bien, mais pas autant que le mériterait cette performance dantesque. La frontwoman a manifestement beaucoup envie de parler mais se contraint de par le temps de jeu limité. Elle trouve tout le même le temps de faire de l'humour. « Je n’ai pas le droit de parler, on ne joue pas longtemps », justifie-t-elle avec fougue. Le son est bon sauf sur l’un des derniers morceaux où tout semble en sourdine, la voix et la guitare notamment ne s'étendant quasiment plus. Mais c'est rétabli dès le morceau d'après.

Le set touche à sa fin. « Marine est fan des Beatles et on joue là alors qu'ils jouaient ici il y a 60 ans », s’enthousiasme Gabbie. Le trio conclut son set sur « Dance », tout aussi explosif que les autres, dont le refrain « Dance 'till the end of the world » reste en tête bien après le concert. Madam est largement acclamé, et le public continue de chanter le morceau une fois les musiciennes parties. Elles ont d'ailleurs droit à de nouvelles acclamations quand elles reviennent sur scène ranger leur matériel. Le jeune combo (formé en 2018, avec juste deux EP et un album au compteur) est impressionnant d'énergie et a clairement l'étoffe d'une tête d'affiche.

Les Tambours Du Bronx

Les Tambours du Bronx ont toujours été connus pour leurs performances scéniques explosives, et les performances metal qu'ils accomplissent depuis quelques années ont apporté quelque chose de spécial. Les neuf tambours s'installent en arc de cercle sur le devant de la scène, avec le reste du groupe en configuration metal : un bassiste sur le bord de la scène, deux guitaristes, un claviériste et un batteur sur l'estrade. Le fond de scène porte un backdrop de Weapons Of Mass Percussion, sorti en 2018, avec lequel les Tambours ont vraiment plongé dans le monde metal

Les Tambours sont répartis en trois sections, et s'ils frappent parfois à l'unisson, les trois sections jouent souvent une partie différente, créant une vraie richesse percussive. En outre, leur façon de frapper leurs bidons avec leurs sticks en bois est extrêmement visuelle, à grands renforts de mouvements très théâtraux. Les deux chanteurs se relaient sur scène d’un morceau à l’autre ou, le plus souvent, chantent ensemble sur le même titre. Ils ne tiennent pas en place, passant du devant de la scène à l’estrade derrière. Si Les Tambours Du Bronx sont en toute logique collés à leurs bidons, plusieurs d’entre eux viennent aussi parfois haranguer le public, se placer en avant-scène, ou déplacer leurs bidons. Sur un titre, les deux guitaristes se retrouvent au centre du demi-cercle pour un duel de tambours, d’abord en frappant à tour de rôle sur le même, puis de concert, chacun le sien. Tout cela renforce le côté explosif et très visuel de la prestation. Et manifestement, tout cela donne chaud, puisque si les neuf musiciens commencent en chemise, la moitié finira le set torse-nu.

La musique du groupe est puissante, et le groupe toujours aussi spectaculaire. En configuration metal, il officie dans un metal indus abrasif, mâtiné de groove metal et de neo-metal, avec parfois des pointes plus electro ou plus punk. Weapons Of Mass Percussions est en toute logique l’album le plus représenté, même si le dernier EP, The Wild Pack, est également là, ainsi que quelques anciens titres. Le groupe offre aussi un medley de reprises de Sepultura (« Refuse / Resist » et « Roots Bloody Roots » et « Territory »). Les Brésiliens cultes avaient d’ailleurs joué avec Les Tambours en concert.

La formule metal fonctionne extrêmement bien, agressive, métallique, tout en gardant un côté tribal. Mais à entendre quelques passages ou seuls Les Tambours restent sur scène, faisant entendre toute leur rage percussive, on se dit que finalement, leurs bidons n’ont besoin d’aucun ornement pour résonner, et que la formule metal nous prive peut-être d’une configuration plus simple mettant au final plus les percussions en valeur. Il n’empêche, la prestation emporte tout sur son passage, et le public, bien que toujours pas au complet, réserve un très bon accueil à ces Tambours Du Bronx qui en dépit de leur nom confirment la vitalité de la scène française.

Sidilarsen

Place enfin à la tête d’affiche de la soirée. La salle s’est presque remplie quand le set attaque avec un quart d’heure de retard (le fameux quart d’heure toulousain ?). Des lumières blanches balaient la salle avant que Sidilarsen monte sur scène. Le batteur Marvyn Palmeri est placé en arrière sur une estrade, et les quatre autres musiciens se juchent sur des praticables en bord de scène puis se mettent à sauter en rythme, ce qu’ils referont plusieurs fois durant la soirée. « Comme on vibre » lance les hostilités, avec un metal électro indus plein d’énergie.

La musique du groupe est sans conteste efficace. Son metal industriel est clairement taillé pour le live, à la fois agressif et dansant, avec des sonorités électro très présentes. L’ensemble finit par avoir tendance à se ressembler. Les morceaux cherchent plus à exprimer l’énergie et la rage qu’à développer des structures très élaborées ou une technique très virtuose. Cela pourrait lasser, mais le groupe y met suffisamment d'énergie pour que cela reste plaisant.

Quelques morceaux se démarquent, notamment ceux issus du dernier album Que La Lumière Soit, paru en 2024. « Adelphité », titre assez prenant, se distingue par des chœurs féminins et des claviers presque symphoniques. Le tempo plus lent et lourd de « On revient sur Terre » retient également l’attention, tout comme le très joli « Sunburn », qui commence comme une ballade avant de s’énerver.

Les musiciens sont dynamiques durant tout le set. Les deux chanteurs, David « Didou » Cancel et Benjamin « Viber » Bury, également guitariste, vont et viennent comme des lions en cage. Le second guitariste Benjamin « Benben » Lartigue et le bassiste Sylvain Sarrobert arpentent également la scène.

Malgré leur énergie, les musiciens prennent un sacré coup de vieux sur le furieux "Back to Basics". La chanteuse Gabbie, de Madam, y est invitée, et elle met tout le monde à l'amende. Véritable boule d'énergie, elle saute partout, chante ses parties avec une rage communicative. Les membres de Sidilarsen semblent fatigués en comparaison, mais cela apporte un regain d'énergie au show. Tous les musiciens finissent d’ailleurs autour du batteur, guitares et micros pointés vers lui, tandis qu'il effectue un solo.

Le public, de son côté, fait presque autant le show que les musiciens, surchauffé dès le début du set. La fosse remue en permanence, une partie des spectateurs dans les gradins sont debout le poing levé sur le deuxième morceau, « Intox », et tout le reste du concert. Le public s’enflamme sur tous les morceaux, réagit au quart de tour aux sollicitations et aux nombreuses questions posées par les chanteurs.

Car Didou et Viber communiquent abondamment avec l’auditoire, avec certes les habituelles réparties pour chauffer le public et le faire s’agiter encore plus, mais surtout bon nombre de discours à messages, qui font écho aux chansons jouées. « Le morceau qui vient est dédié aux femmes », commence ainsi banalement David Cancel, avant de poursuivre : « ce morceau est dédié aux victimes de violence psychologique ou physique, aux victimes de conflits armés, aux minorités opprimées. Il y a souvent un point commun, ce sont souvent des hommes qui choisissent ces violences ». Et de s’adresser directement au public : « On ne veut plus de ça dans les festivals, dans les concerts, juste du fun et de la bienveillance dans l'adelphité ». Le tout avant d’attaquer la bien nommée « Adelphité ».

Le morceau suivant, « On revient sur Terre », est l’occasion de parler des espoirs de Sidilarsen au début du millénaire (« Dans les années 2000, pour ceux qui étaient déjà là bien sûr, on aurait pu imaginer un monde sans frontière, où on aurait tous vécu dans une démocratie géante ») et de la désillusion à voir que les gens se replient de plus en plus sur eux-mêmes, y compris au sein d’une même nation. « Il serait temps de s'ancrer dans le sol. Voir qu'il y a des choses qui nous rapprochent. On part pas dans l'espace, on revient dans le sol ».

Le tout est parfois présenté avec humour, comme le morceau « Le meilleur est à venir ». « Est-ce que vous pensez qu’on peut encore faire pire ? » se voit ainsi demander la salle. Qui répond en majorité (mais pas en totalité) « Noooon ». « Bah quoi, il y a Lecornu 2, on peut creuser encore. Je ne parlais pas spécialement de nous, même si on n'a pas la lumière à tous les étages. Si on continue de creuser à la pelle, on peut même y aller à la pelleteuse. A un moment donné, comme on dit à Toulouse [accent toulousain inclus], ça va taper au fond et rebondir. Peut-être que le meilleur est encore à venir ». Idem sur « On va tous crever » : « J'ai une question on va voir si ça met tout le monde d'accord. Est-ce qu'on va tous crever ? » La salle est évidemment unanime. Et pour David Cancel, c’est une bonne nouvelle. « Ça fait du bien. Ça veut dire qu'on est à égalité et c'est une bonne chose dans cette période où on se divise, où on nous divise. Et ça veut dire qu'on est bien vivants ».

Sidilarsen n’en oublie pas un côté festif. Cette première date à l’Olympia a un côté presque anniversaire, avec des invités. Notamment un ancien du groupe, Sébastien « Sabash » Eychenne, guitariste, sur « La fibre », durant lequel une trentaine de personnes sont invitées à monter sur scène. Cela engendre d’ailleurs un cafouillage, puisque le discours de présentation est présenté avant le morceau précédant.

Après l’annonce du Sidifest les 10 et 11 octobre prochains au Bikini de Ramonville, il est l’heure du dernier morceau, le classique « Des Milliards ». Pour l’occasion, Les Tambours Du Bronx reviennent sur scène. Le public se déchaîne plus que jamais, tout le monde suit les ordres de s’asseoir puis de se relever en sautant, pour « symboliser le peuple endormi qui se réveille contre les 1% qui veulent toujours plus ». La chanson finit, mais la salle continue d’entonner a capella « Nous sommes des milliards contre une élite, impossible qu'ils nous évitent ». Un beau moment de communion entre un groupe phare du metal français et son public qui lui reste loyal.

Photos : Luca Liguori. Reproduction interdite sans autorisation du photographe



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