While She Sleeps n’est pas seulement l’un des groupes phares de la scène metalcore britannique : c’est aussi un modèle d’indépendance. Entre leur label maison, leur Patreon ultra-actif et même une marque de vêtements, le groupe de Sheffield multiplie les projets sans jamais perdre de vue son public.
À l’occasion du Plane’R Fest près de Lyon, nous avons rencontré Loz Taylor, chanteur charismatique du groupe, pour une interview à la fois introspective et décontractée. L’occasion de revenir sur leur approche DIY, leur relation avec la scène française — et même sur ce featuring avec LANDMVRKS et leur concert au Zénith de Paris avec Mass Hysteria.
Hello Loz et bienvenue de nouveau à Lyon. On vous a vus plusieurs fois ici. On dirait que vous avez un super lien avec les fans en France. Qu'est-ce que ça fait d’être en tête d’affiche de ce festival ?
Oui, ça fait vraiment plaisir. Comme tu l’as dit, on a joué hier à Rock Werchter en Belgique. Donc c’est sympa de venir à Lyon. Pour un endroit qui est si proche de chez nous, au Royaume-Uni, ça a du sens qu’on vienne assez souvent. Et ces dernières années, il semble que les choses prennent vraiment de l’ampleur pour notre groupe ici. Et on s’amuse beaucoup quand on est là. Donc oui, on adore venir.
Parlons de votre Patreon, lancé il y a déjà quelques années. En quoi ce projet a-t-il changé votre manière de fonctionner en tant que groupe ?
Si nous revenons à l’époque où nous étions plus jeunes, c'est similaire à un fan club. C’est typiquement comme le Fiend Club des Misfits ou quelque chose du genre. Mais pour notre groupe, on est un peu entre deux générations : on n’est pas un groupe old school, mais on n’est pas non plus un nouveau groupe. Donc, on a toujours dû évoluer et s’adapter, notamment quand le streaming est devenu énorme et que les copies physiques ont perdu en popularité.
Je pense que, surtout pendant le COVID, lancer le Patreon a été une bénédiction pour nous. Ça nous a permis de faire travailler les gens qui bossent habituellement avec nous sur la route, de leur garantir un revenu, même sans tourner. C’était vraiment bien. Et ça nous a rapprochés de nos fans, de ceux qui aiment le groupe autant que nous, grâce à tous les contenus exclusifs et aux coulisses qu’on partageait.
C’était beaucoup de travail en plus de composer, enregistrer de la musique, tourner des clips et gérer tout ce qui concerne le fonctionnement du groupe. C’était intense, mais comme je l’ai dit, ça nous a beaucoup appris sur notre public. Ça a permis aux membres de Sleep Society de se sentir vraiment proches de nous. Ça a été une super expérience, et c’est toujours en place aujourd’hui, ce qui est génial.

Et est-ce que ce n’est pas trop de travail de gérer tout ça, sachant que vous êtes indépendants et que vous faites tout vous-mêmes ?
Ça fait beaucoup, c’est sûr. Mais nous pensons que c’est la meilleure façon de travailler… Nous avons déjà collaboré avec de gros labels auparavant, et on a toujours eu l’impression que, si on veut que le travail soit bien fait, autant le faire nous-mêmes. Donc oui, c’est beaucoup de choses à gérer en plus pour nous, mais en même temps, c’est très gratifiant quand on voit ce que ça apporte à notre fanbase.
En plus de votre musique et de tout le reste, vous avez lancé votre propre marque de vêtements, Knight & Dellaway. Qu’est-ce qui vous a inspiré à vous lancer là-dedans et à créer vos propres designs ? C’est un peu du matériel pensé pour les tournées, non ?
À la base, c’était juste une idée parce que Knight et Dellaway, ce sont les noms de mes grands-parents, et j’ai toujours trouvé que ça sonnait bien. Donc, je voulais leur rendre hommage. Et puis, c’est un peu devenu un passage obligé pour les gens qui sont dans des groupes, de vouloir lancer une ligne de vêtements ou autre. Alors, je me suis associé à notre batteur Adam, et on a commencé à produire des articles qui, comme tu le dis, pouvaient être utiles en tournée ou même pour des activités en extérieur, comme aller camper ou ce genre de lifestyle. On a commencé à faire ça, et ça a bien marché pendant un petit moment, mais ensuite, on a décidé de revendre la marque. Parce qu’avec tout le reste à gérer pour le groupe, c’était vraiment beaucoup à prendre en charge. On ne s’en rend pas compte avant d’essayer, mais voilà. L’univers des vêtements, en lien avec le fait d’être sur scène, m’a toujours intéressé. J’aime bien aussi aller dans des boutiques vintage, ce genre de choses. Donc peut-être qu’il y aura quelque chose de nouveau à ce niveau-là dans le futur. J’aimerais bien, en tout cas.
Comment faites-vous pour équilibrer, justement, tout l’aspect business lié au fait d’être indépendants et de gérer toutes ces choses, avec le côté créatif de la musique ? Vous trouvez encore le temps de tout faire ?
On a toujours été un groupe qui fonctionne un peu à la manière punk rock, même si on fait du metalcore. Cette philosophie DIY, c’est vraiment ce qui nous a toujours poussés à continuer et à avancer. Donc oui, c’est beaucoup à gérer. Mais comme je disais, si tu veux que le boulot soit bien fait, fais-le toi-même. On pense que, de cette façon, les fans reçoivent directement quelque chose qui vient de nous. Que ce soit l’artwork ou la musique, tout vient de nous. Et on trouve que c’est important de pouvoir le partager de cette manière.
En janvier dernier, vous étiez en première partie de Mass Hysteria au Zénith de Paris. C’est un groupe culte sur la scène metal française. Comment est née cette connexion ? Est-ce que c’est le label qui vous a mis en relation ?
Non, honnêtement, avant ce concert, je ne connaissais pas du tout le groupe. Et ils nous ont expliqué qu’ils fêtaient, je crois, les 20 ans du groupe. Donc, à partir de ce moment-là, on a commencé à s’intéresser à leur musique. Et c’était vraiment cool. En fait, ils nous ont tout simplement contactés parce qu’ils aiment notre groupe, et ils nous ont dit : « On adorerait que vous fassiez partie de notre concert anniversaire. » On a répondu que c’était super. Et pendant le show, ils ont même diffusé sur un écran géant toute leur histoire. C’était très émouvant, mais vraiment génial aussi. Donc ça a été un super concert, et on était vraiment reconnaissants d’avoir été invités à y participer. C’était top.
On voulait parler de la collaboration que Mat Welsh a faite avec LANDMVRKS, qui est un autre groupe français. Comment s’est passée cette collaboration ?
On connaît les gars de LANDMVRKS depuis pas mal de temps. Je crois qu’on les avait emmenés avec nous sur une de leurs toutes premières tournées au Royaume-Uni et en Europe. Et ils ont toujours été très reconnaissants pour ça, parce qu’ils disent que ça les a vraiment aidés à se faire connaître auprès de notre public, donc ça leur a apporté un vrai coup de pouce. C’est un super groupe. Et pour ce morceau, ils voulaient quelqu’un avec un chant un peu brut, dans un style punk. Donc ils ont contacté Mat, et il a tout de suite répondu : « Bien sûr, j'adorerais participer, je vous adore ! » Ce n’était pas vraiment compliqué. Après, on les a recroisés sur quelques festivals, et on a un peu bossé sur le morceau dans le tour bus et tout ça. C’était vraiment sympa.
Vos fans ont toujours fait partie de la famille While She Sleeps. Beaucoup sont très investis dans le groupe. Est-ce qu’il y a eu des moments où votre communauté vous a donné la force de continuer ?
Je pense que pendant les premières années au sein de While She Sleeps, c’était un peu… On ne prenait pas ça pour acquis, mais on était tout le temps sur la route, on faisait la fête, on buvait… Et plus tard, on a réalisé qu’on avait une responsabilité : celle d’offrir le meilleur show possible, tu vois ? Mais même très jeunes, on avait déjà conscience de tout ça. « This Is The Six », par exemple, c’est un titre qui fait référence aux fans : le « Six », c’est eux. On est cinq dans le groupe, mais le sixième membre, c’est tous ceux qui nous soutiennent. Donc, dès le début, on était très touchés et reconnaissants que des gens aiment suffisamment notre groupe pour nous soutenir et nous aider à aller là où on voulait aller. On est vraiment toujours très reconnaissants pour ça.
Ce qui est génial avec la fanbase de While She Sleeps, c’est qu’elle réagit toujours de manière hyper ouverte et positive aux messages qu’on essaie de faire passer. Quand on a sorti l’album Sleeps Society, la première chose qu’on a publiée, c’était une vidéo, un peu comme une conférence de presse filmée, où on expliquait les changements dans l’industrie musicale, notre manière de vouloir avancer et la meilleure façon pour les fans de nous soutenir, et pourquoi. Et la réaction des fans a été ultra positive. C’est toujours un peu stressant, pour un artiste, d’être totalement transparent, parce que ça pourrait se retourner contre nous si les gens n’adhéraient pas à nos idées. Mais, encore une fois, chaque fois qu’on fait quelque chose qui nous fait un peu flipper, notre fanbase répond toujours super bien. Donc, on est très chanceux d’avoir les fans qu’on a. Et Mat Welsh, notre guitariste, dit toujours qu’il pense qu’il pourrait aller boire une bière avec 90 % de nos fans, tellement ils sont tous cool. Donc franchement, on ne pourrait pas demander mieux. On est vraiment ravis.
Pour terminer cette interview, est-ce que tu pourrais nous faire une recommandation, peu importe le domaine ? Ça peut être un groupe, un film, un livre, tout ce que tu as envie de partager !
Alors, laisse-moi regarder ce que j’écoute en ce moment… Il y a un nouveau groupe très cool au Royaume-Uni qui s’appelle Angel Number. Ils ont un petit côté Nine Inch Nails dans leur son, pas aussi industriel, mais c’est un mélange entre la synthwave et metalcore. C’est vraiment original, j’ai rarement entendu quelque chose qui ressemble à ça. Sinon, j’écoute aussi un groupe qui s’appelle Royel Otis. C’est plutôt de la pop, mais qui mélange plusieurs genres. Et puis, un groupe un peu plus ancien que j’adore : Dead And Divine. Donc ouais, allez jeter une oreille à tout ça !
Interview réalisée le 4 juillet 2025 au Plane R Fest de Lyon.
Crédits photos : Florentine Pautet, toute reproduction interdite sans l'accord de la photographe.





