Simone Simons et Coen Janssen du groupe Epica

"A chaque disque, on fait en sorte de se perfectionner et de se réinventer"

 

A l'occasion de la sortie de The Quantum Enigma d'Epica, Simone Simons, chant, et Coen Janssen, clavier, ont accordé une interview à La Grosse Radio Metal pour évoquer le processus créatif, les changements qui ont engendré cet album ainsi qu'une vue d'ensemble sur leur carrière. Ils ont aussi évoqué leur vision de la musique et leurs projets à venir.

Bonjour Simone et Coen et merci de nous accorder cette interview. Parlez-nous de l’album The Quantum Enigma, que veut dire ce titre ?

Coen Janssen : Le sujet principal parle d’un phénomène scientifique qui prouve que l’esprit peut influencer l’univers au niveau quantique. C’est une expérience qu’ils ont menée en observant les particules. Le résultat était différent quand ils les observaient et quand ils ne les observaient pas. Le fait de les regarder changeait donc leur comportement. Cela veut dire que, si tu veux, tu peux changer quelque chose en la regardant. Ma perception de toi n’est pas la même que Simone par exemple.

Simone Simons : Dans mon monde, tu as les cheveux rouges !

Coen : Dans le mien, tu es une belle fille. Tu peux y réfléchir et établir des philosophies autour de ces théories. Est-ce que c’est réel ou est-ce que ton esprit te donne une image de ce que tu veux voir ?

Simone : La quête de la réalité est un sujet sur lequel on peut prendre des années à écrire. Cet album est très philosophique et spirituel, c’est pour ça qu’on a utilisé Bouddha comme symbole sur la pochette. Notre quête de réalité ne finira jamais. Ces questions sur la vie, la mort, le cycle de la vie définissent Epica. C’est un sujet qui revient dans chaque album, on en parle dans The Phantom Agony, avec la chanson "Sensorium", qui parle du subconscient…

Peut-on parler d’album concept avec The Quantum Enigma ?

Non, pas vraiment. Il y a un fil rouge qu’on suit, la chanson The Quantum Enigma parle de ce que Coen a dit, les autres tournent autour de l’esprit, les maladies qui y sont liées, des pensées qui ne te laissent pas en paix… C’est le cas "The Essence of Silence", qui évoque des pensées qui ne te correspondent pas, tu dois donc apprendre à lâcher prise et à juste vivre l’instant présent, sans nécessairement penser sans arrêt. C’est très romantique comme sujet, il nous faut des bougies et un piano par-dessus lequel je chanterais. [rires]

"The Quantum Enigma - Kingdom of Heaven part II" semble faire suite à Kingdom of Heaven sur Design your Universe. Pourquoi ?

Coen : C’est le même sujet qui est traité dans ces deux chansons, c’était nécessaire de lui donner ce titre. Ce n’est pas quelque chose qu’on avait prévu à l’avance, quand on a écrit ce long titre épique, mais c’est ce qui est arrivé et ça va bien à l’ensemble. Le fait que beaucoup de personnes nous demandent ça rend le sujet encore plus intéressant.

Simone : Les fans peuvent y trouver une connexion supplémentaire et mettre les chansons l’une à côté de l’autre. Toutes nos paroles sont liées, mais ces chansons sont encore plus liées que les autres.

Epica

L’album est le fruit d’un travail de groupe en termes de composition, pouvez-vous nous en parler ?

Coen : Avec ce disque, nous avons décidé d’aller dans la salle d’enregistrement et jouer les chansons sans arrêt pour travailler tous les détails. Pour beaucoup de groupe, c’est une manière normale de procéder, mais ce n’est pas comme ça qu’on avait l’habitude de travailler, parce qu’on vit de part et d’autre de l’Europe et ce n’est pas évident de se réunir. Quand tu as fini de tourner, tu n’as pas non plus forcément envie de voir la tête des autres membres pendant quelques mois [rires]. Du coup, on écrivait chacun de notre côté et on s’envoyait nos chansons par internet. C’est allé un peu trop loin dans cette direction sur le disque précédent, du coup, nous avons décidé de nous réunir à nouveau. Je pense que ça a très bien marché, le groupe sonne plus uni et les chansons sont plus réfléchies et mieux écrites.

Simone : L’album est plus un produit de groupe, c’est le résultat d’intéractions humaines et non de messages par internet, c’est mieux pour la musique. Par exemple, si Coen joue du piano et que je chante tout de suite dessus, le résultat diffère du fait de m’envoyer une mélodie quand je suis chez moi. Le résultat peut être bon comme mauvais, je peux aussi avoir plus de temps pour y réfléchir. Mais je pense que la première mélodie qui te vient à l’esprit est la meilleure. Si deux personnes créatives sont réunies, le résultat est meilleur que si elles sont séparées.

Est-ce que l’emploi de cette méthode a aidé le nouveau bassiste, Rob, à mieux s’intégrer ?

Coen : Il est dans le groupe depuis 2 ans, il est bien intégré. Mais le fait qu’il soit directement inclus dans le processus créatif et qu’il a pu mettre ses plans rythmiques et son groove a bien aidé. De plus, il a une différente manière de composer.

Qu’est-ce que son arrivée a apporté au groupe ?

Coen : C’est un bassiste plus professionnel et technique. Je n’ai rien contre Yves [Huts, ancien bassiste], c’est un mec bien, mais il n’est pas aussi talentueux que Rob. Ca s’entend, il s’adapte mieux et travaille plus rapidement.

Epica Rob

On remarque sur ce disque que vous allez plus loin dans les aspects agressifs et orchestraux. Etait-ce un but que vous vous étiez fixés ?

Simone : A chaque disque, on fait en sorte de se perfectionner et de se réinventer. On a enregistré cet album à Sandlane Recording Facilities et avons pu travailler avec un chœur plus important, ainsi qu’un plus gros orchestre, de manière à inclure plus de détails dans la musique. Vu que j’étais enceinte au moment où on travaillait dessus, j’ai eu plus de temps pour travailler sur le disque. On a aussi changé de personnel, on travaille avec Joost an den Broek à la production et Jacob Hansen au mixage. Cela a rafraichi notre méthode et a poussé Epica au niveau supérieur. On a sciemment choisi de changer certaines choses pour sortir de notre routine. Le changement peut apporter de bonnes choses, je pense que c’est le cas ici.

Qu’est-ce que ça a changé d’avoir Joost à la production par rapport à Sascha ?

Coen : On a voulu adopter une approche différente cette fois, Joost a apporté quelques idées au processus et nous a aidés sur quelques structures musicales. On a voulu sortir de notre cocon, essayer un studio différent et faire confiance à un nouveau producteur. C’était une très bonne expérience de choisir cette méthode. Je ne vois aucune raison de ne pas le reprendre pour le prochain album. A moins que les fans n’aiment pas l’album ! S’il est mauvais, c’est de sa faute, s’il est bon, c’est grâce à nous [rires] !

Simone : C’est un type bien, toujours de bonne humeur, il a su garder son calme face aux problèmes, pas qu’il y en ait eu beaucoup, mais quand on enregistre, il y a toujours un couac quelque part, notamment sur le planning et certains retards. C’est quelqu’un de très organisé, comme un instituteur qui arrivait à nous discipliner. Il a su tirer le meilleur de nous-mêmes

Est-ce que ça change quelque chose de travailler avec un claviériste à la production plutôt qu’avec un guitariste comme Sascha ?

Coen : Je n’y ai jamais pensé. Je vois plus Joost comme un producteur plutôt qu’un claviériste, même s’il est excellent dans ce domaine, je ne suis pas aussi rapide que lui. Il a quitté la vie d’artiste pour se concentrer sur la production. Mais travailler sur les chœurs et les arrangements était un peu différent, parce qu’il avait quand même un regard de claviériste dessus. Sascha joue aussi du clavier, il a de nombreux talents. Je pense que ce changement de producteur a influencé Isaac [Delahaye, guitare] parce que Joost n’est pas guitariste, en revanche.

Simone : Sascha est toujours dans l’équipe Epica, il a notamment aidé Isaac à enregistrer ses parties, il a travaillé sur les lignes de chant avec Mark et moi et nous a aussi aidés à sélectionner les chansons qui finirait dans l’album et nous a aussi aidé sur quelques structures. Mais nous sommes tombés amoureux du studio et de Joost, qui était déjà dedans. Ensuite, nous avons envoyé une chanson à plusieurs mixeurs pour voir comment ils s’en sortiraient, et Jacob est celui qui a donné le meilleur résultat. Il a apporté un plus à Epica,  les chansons ont vraiment gagné en qualité une fois mixées, cela montre à quel point ce poste est important.

Epica

Simone, tu étais coachée au chant jusqu’à Requiem for the Indifferent. Y as-tu eu recours pour The Quantum Enigma ?

Simone : Pour Retrospect, j’ai été dans un atelier vocal parce que je voulais renforcer mon corps et ma voix pour rester en forme pour un concert de trois heures et ne pas tirer la langue à la moitié du show. Pour ce disque le seul coaching que j’ai eu concernait les changements de couche et l’allaitement. [rires] Pour ce disque, j’ai préféré mettre toutes mes connaissances que j’ai acquises au cours des années, je pense que ma performance vocale s’est améliorée grâce à ça.

Qu’est-ce que ça fait pour Epica d’avoir atteint ce niveau en 12 ans ?

Simone : Il y a bien du temps qui s’est écoulé ! Je m’en suis rendue compte quand on faisait la setlist pour le concert de Retrospect. A force de tourner et d’écrire des albums, tu oublies que le temps passe.  Mais quand on  se pose pour observer l’ensemble, on se rend compte qu’on as tourné à travers le monde, que notre fanbase est énorme et qu’on peut payer nos factures grâce à notre musique, nous ne sommes pas obligés de prendre un travail à côté et nous pouvons nous concentrer sur notre musique et notre vie de rockstar ! [rires] Avoir sa passion pour travail est très motivant. Nous avons travaillé dur pour ça, en tournant sans arrêt. En plus nous sommes bien entourés, que ce soit l’équipe technique, le management, le label, Nuclear Blast, qui nous a bien soutenus. Et on se connaît mieux que personne avec Coen et Mark [Jansen, guitare], vu qu’on est dans l’aventure depuis le début. Mais Isaac, Rob et Ariën sont d’excellents musiciens et ont aidé Epica à sonner plus mûr et à construire notre identité.

Quelle est la chose la plus importante que vous avez apprise tout le long de votre carrière ?

Coen : Si tu veux accomplir quelque chose, tu dois le faire toi-même. C’est un conseil que je donne aux jeunes qui se lancent dans un groupe, rien ne fera quoi que ce soit pour toi, tu dois le faire toi-même et travailler dur pour ça. Si tu le fais, tu seras récompensé. Il faut que tu "Design your own Universe" [définisses ton propre univers]. [rires]

Simone : Il faut travailler dur, avoir de la chance, être au bon endroit au bon moment, et il faut y croire ! Ne pas écouter ceux qui pensent que faire du metal n’est pas un travail. Tu peux rater, mais il faut continuer d’essayer, parce que si tu finis par faire quelque chose que tu n’aimes pas, tu auras raté quelque chose quand même.

Simone, qu’est-ce que ça a fait de participer au prochain album de Timo Tolkki ?

Simone : Cela fait un moment que je connais Timo, il m’avait déjà contacté mais ça n’avait pas marché à cause de soucis d’emploi du temps, mais pour cette fois j’ai pu y participer. Il m’a envoyé deux chansons, j’ai enregistré mes parties à Sandlane Recording Facilities il y a un mois et j’apprends que l’album sort en mai, je n’étais pas au courant ! [rires] C’est toujours bien de faire quelques projets parallèles et de connaître les autres musiciens de la scène. Floor Jansen [Nightwish, ReVamp] chante aussi, ça fait un joli casting pour Timo Tolkki’s Avalon !

Coen, tu n’as pas de projet parallèle me semble-t-il.

Coen : Non, j’ai remplacé Oliver Palotai de Kamelot quand lui et Simone ont eu un bébé, c’était une belle expérience, j’ai pu leur renvoyer l’ascenseur.

Simone : Kamelot et Epica ont l’habitude d’échanger leur claviéristes, Oliver avait aussi tourné avec nous quand Coen s’est marié et a eu son premier enfant, c’était une bonne expérience aussi. Je t’aime bien Coen, mais j’aime Oliver un peu plus, excuse-moi ! [rires]

Coen : A part ça, c’est très compliqué et très chronophage de commencer un autre projet à part Epica.

Simone : Mark est assez fou pour avoir commencé MaYan. Il n’a pas encore d’enfants, donc il peut passer plus de temps à écrire de la musique. J’aimerais bien aussi faire un album solo, un projet jazz et aussi chanter du classique. Mais je ne suis pas un chat, je n’ai qu’une vie, j’ai bébé maintenant et il n’y a que 24 heures dans une journée et j’adore dormir ! Du coup, je vais faire mon projet jazz pendant mon sommeil ! [rires] Ça viendra, mais dans quelques années, je ne veux pas me mettre la pression. Mon mari est un "musicien mille-pattes", il m’offre pas mal de possibilités sur le plan musical. Nous avons déjà le titre du projet jazz et même un autre projet en tête, mais il est aussi professeur à plein-temps, il compose et produit. Tant projets pour si peu de temps ! Mais, au moins, on a des projets, on n’en aura jamais fini avec la musique !
 

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