Sandro, guitariste de PURE INC.

Ils sont suisses qu'on m'a dit... Facile à dire, ils parlent français, allemand, italien, anglais ? C'est en anglais que Sandro me dit bonjour, et il m'a donc fallu traduire toutes mes questions en même temps que je les posais. Un mal pour un bien, car le guitariste de PURE INC. ne manque ni d'humour ni de bonne volonté, et c'est bien volontiers qu'il nous parle de son groupe, du nouvel album "IV", de sa vision de la musique, ses influences, de Music Business, et de plein d'autres choses encore. Rencontre avec un type fort sympathique et sincère, autour d'une discussion chaleureuse et stimulante.

Alors avant de parler du nouvel album IV, est-ce que tu peux revenir sur l'accueil qui a été réservé à votre album précédent, avec lequel je vous ai découvert, "Parasites and Worms" (2008) ?

Bien sûr, honnêtement, on a eu d'excellents retours, même si c'était une période assez difficile, puisqu'on a quitté notre label AFM, on a cherché une nouvelle maison de disques, et pendant ce temps on a tout enregistré nous-mêmes, on avait un nouveau bassiste, donc pas mal de nouveaux paramètres à prendre en compte, et on a été très surpris par ces retours tonitruants. Je veux dire, les revues allaient en moyenne de "très bien" à "excellent", on a eu de très bons retours de France aussi, où j'ai eu quelques interviews élogieuses, on a aussi eu quelques "albums du mois", des trucs comme ça, donc c'est très excitant, et je suis très curieux de voir quel accueil va recevoir le nouveau (rires).

Est-ce que vous avez pu vous exporter et aller jouer dans d'autres pays que la Suisse ?

En fait on l'a toujours fait, et on a continué à le faire avec cet album, on n'a pas joué en France, mais on a joué en Irlande, au Royaume-Uni pour la première fois, on est retourné en Hollande et en Allemagne, en Suisse bien sûr, en Espagne, qu'on avait déjà visité également. Malheureusement on n'a pas pu venir en France, mais on a toujours eu de bons échos et des possibilités pour aller jouer en dehors de nos frontières, probablement parce que notre musique n'est pas typiquement suisse, et on a toujours eu la volonté de partir en tournée dans d'autres pays.

Effectivement vous ne jouez pas de la zique typique de votre pays, je disais à un ami "ces mecs sonnent plus américains qu'un paquet de groupes américains" (rires). Quel était votre état d'esprit au moment d'écrire ce nouvel album ?

Et bien je pense qu'il était temps pour un petit changement. Avec le précédent, il y avait beaucoup d'agressivité, cette fois l'ambiance était plus à la concentration et à relâcher cette agressivité dans des chansons plus variées. Je suis devenu père il y a un an, pile quand on a commencé à enregistrer l'album, et c'était épique d'être au studio et de devenir père en même temps, et ça a naturellement influencé la musique. Tu l'entendras peut-être pleurer derrière (rires), il est en train de jouer à côté. Donc ça a joué d'un point de vue lyrique, sur nos relations aussi, beaucoup de changements donc, on avait des problèmes avec notre label de l'époque, je n'ai pas complètement compris ce qu'il s'est passé, mais néanmoins on se retrouvait sans deal et tout ça nous a guidé sur cet album. Donc ppas vraiment de sentiments très joyeux, mais pas non plus d'aggressivité brute comme sur "Parasites and Worms". D'un point de vue musical je pense qu'avec IV on élargit notre son, on explore, on a vraiment trouvé notre style sur le précédent et maintenant on construit sur cette base.

Ca s'entend, IV est moins metal, plus rock'n roll, globalement plus calme aussi. Peut-être parce que vous êtes plus confiants, comme tu dis vous avez trouvé votre style et peut-être que vous osez faire des choses que vous n'auriez pas faites avant ?

Ca pourrait très bien être ça. Tu sais, on est un groupe foncièrement honnête, on ne prétend pas jouer un style de musique particulier, on se laisse guider par la musique. Honnêtement, on veut juste écrire des chansons honnêtes, quand on est en studio on ne cherche pas à trop intellectualiser, on essaye de capturer l'énergie du moment, de ne pas jouer les chansons trop de fois, ce qui ferait perdre en feeling, ou la vraie vibe de la chanson. Il y a beaucoup de gens qui avant d'entrer en studio se disent "cette fois, ça doit être calme", "cette fois ça doit être moins calme", "cette fois ça devrait être comme ça", avec nous, c'est plus une façon de se laisser guider par ce qu'on joue, on jamme, on a ce qu'il faut pour s'enregistrer, et on s'enregistre directement la plupart du temps, ce qui nous permet de laisser reposer ces enregistrements, de se repencher dessus deux semaines plus tard à tête reposée et de décider "ça c'est vraiment cool", ou ça c'est pas terrible, puisqu'on a aussi des petits tics (rires). Ce qui est super cool, parce que tu peux recapturer l'instant, qui vient du coeur, et tu en fais quelque chose. Et je pense que ça marche, on essaie d'être aussi ouverts que possible dans notre approche de notre son.

Avec même un saxophone sur un titre !

(rires) Tu as aimé le trip funky ?

C'est super, j'étais un peu surpris mais enchanté d'entendre ça de votre part. Comme tu dis c'est un album très ouvert d'esprit, on entend des influences très variées. Quelles sont les influences que les différents membres du groupe ont en commun ?

(Il tousse)... C'est une question très dure ça Pierre (rires). Elle est dure... Personnellement, je suis très ouvert dans la musique que j'écoute, et bien sûr tout ça m'influence quand j'écris de la musique avec le groupe, j'achète encore beaucoup de CD et de vinyles, les autres membres du groupe sont très ouverts aussi, on a parfois des avis différents, d'autres choses font l'unanimité, mais... Par exemple pour Gianni (chant), il peut écouter des valses italiennes, il est à moitié italien, et ce sont ses racines, il écoute du classique mais aussi beaucoup de rock alternatif. Notre batteur est plus tourné vers le côté le plus sombre de la musique, il écoute du Gospeed You Black Emperor ! (groupe de post-rock canadien), tu vois, des trucs très planants, parfois sans vraie voix... Notre bassiste est très branché par le Dave Matthews Band et ce genre de trucs, mais en même temps il joue aussi de la guitare, et il aime les sons country et folk, et bien sûr on écoute tous du gros son, du Tool, du Meshuggah, King's X (rires) quand on commence à citer des groupes, ça ne s'arrête plus. Je pense qu'en termes d'influence, tu peux facilement retrouver des éléments qui font penser à Tool, A Perfect Circle, tout comme du Led Zeppelin, du Audioslave - qui est devenu plus basique -, personnellement je peux écouter beaucoup de trucs et trouver une vibe, Porcupine Tree... C'est dur à dire, je pense qu'ouverts d'esprits est ce qui nous va le mieux, avec des influences qui vont de la musique rock moderne à du progressif, ce qui s'entend plus sur cet album qu'auparavant, en fait ça vient comme ça vient, je sais pas si tu vois un peu ce que je veux dire (rires)

Complètement, comme tu dis c'est très ouvert, une autre chose qui m'a frappé c'est que le chant de Gianni est très bien mis en valeur, les chansons correspondent très bien à sa façon de chanter...

On n'écrit pas des chansons pour mettre ensuite des textes par dessus, tout le monde a des idées, et la plupart du temps, c'est soit un riff, soit un refrain, un début de chanson, ou un solo, et ensuite on cherche la suite. Cette fois on a été très créatifs, on a eu des tonnes d'idées et on a vraiment pu se concentrer sur ce qui marchait le mieux, éliminer ce qui fonctionnait moins bien, en plus on avait le temps, je sais pas d'où nous est venue cette inspiration à ce moment, on a fini cet album et déjà commencé à enregistrer de nouvelles idées. On a quelque chose comme 25 ou 30 chansons, pas des chansons, mais des idées, des fragments de chansons, on ne s'assoit pas pour discuter, on tente différentes choses, et Gianni a une grosse influence sur la direction que va prendre la chanson, tout comme moi, il gère la partie vocale, moi plutôt la musique, mais vraiment tout le monde dans le groupe a un rôle important, et chacun se concentre non pas seulement sur sa partie mais sur le rendu d'ensemble, on a grandi, même si on n'est pas encore des vieux cons (rires), et on a appris le rôle de chacun, c'est pâs comme si je me disais "waow, je suis le guitariste, la guitare doit écraser tout le reste", ou le batteur qui en met partout, on cherche plus ce qui sonne le mieux pour le groupe, ce qui est dur. Mais si tu me dis que c'est ce que tu entends, c'est le plus chouette compliment qu'on puisse nous faire.

Je parlais de Gianni parce que sa performance est énorme, c'est vraiment un super chanteur, je veux dire vous jouez tous bien (rires), mais son chant s'est tellement amélioré...

Je suis assez d'accord (rires). Je ne peux rien ajouter. On est vraiment très, très, très chanceux de l'avoir avec nous. De mon point de vue, c'est la plus belle voix que j'ai entendue en Europe dans notre style, en particulier à cet âge, autour de la trentaine, je n'ai jamais entendu quelqu'un qui puisse rivaliser, donc je suis très, très, très heureux, en plus c'est un de mes meilleurs amis, donc que puis-je dire de plus ?

De ton côté, toujours peu de solos (rires), c'est pas ton truc ?

Je vois les choses un peu différemment. J'aime beaucoup jouer des solos, j'en jouais davantage auparavant, mais... Sur cet album, il y a différents types de solos, parfois très calmes, comme sur "Once Upon a Time", qui démarre à 100 à l'heure, il y en a quelques autres, des trucs très mélodiques... Tu sais si je sens qu'un solo convient à la chanson je le fais, mais je ne cherche pas à jouer des trucs rapides ou à épater la galerie juste pour prouver que je suis un bon guitariste, je cherche à servir au mieux les chansons. De toutes façons il y a sûrement de bien meilleurs guitaristes que moi, et d'autres que je ne connais même pas, j'essaie vraiment de me concentrer sur la chanson et ce que je peux lui apporter, prenons par exemple "Number 7". Qui est très calme, et où la partie de guitare est comme un long solo, et pour moi c'est génial à jouer, c'est très émotionnel, très doux, parfois presque désespéré... Ca me fascine, et de mon point de vue ça correspond parfaitement à la chanson.

Vous avez déjà des plans pour aller défendre cet album sur scène ?

Pas tellement malheureusement, on a juste quelques shows de prévus, trois en Suisse et un en Allemagne, donc on est ouvert à toute possibilité pour aller partout où on peut, on n'a plus joué en France depuis longtemps, le dernier à côté de la frontière l'été dernier, en club malheureusement, et à Paris... Ca doit remonter à 4 ou 5 ans en arrière, mais on a tous un très bon souvenir, ça avait bien accroché, donc si on a une occasion de booker quelque chose, une date, une tournée, on reviendra bien sûr.

Si tu pouvais choisir de faire la première partie d'un groupe connu, lequel choisirais-tu ?

Si j'étais complètement libre ?

Oui !

Led Zeppelin (rires), ce qui n'arrivera jamais, et il y en a tellement d'autres, Soundgarden, qui se sont reformés, tourner avec Soundgarden, ça rendrait surtout Gianni complètement fou (rires), et moi aussi. Sinon, je suis un vieux fan de Metallica, je n'aime pas trop leurs albums récents, depuis Load. Tout le monde semble apprécier leur dernier, "Death Magnetic", que je n'apprécie pas tant que ça pour être honnête, comme ce qu'ils ont fait depuis le black album, mais quand même ce serait fantastique de jouer avec eux, mon dieu... En fait tu sais ce que j'aimerai vraiment ? On a fait quelques tournées, mais jamais avec un groupe qui s'accordait complètement avec notre son, on a tourné avec Masterplan, avec Jorn, Freak Kitchen, MSG, des groupes supers et des musiciens super sympas, mais qui jouent des styles assez différents du nôtre, ce qui n'est pas l'idéal pour plaire au public présent, donc ce que j'aimerai vraiment serait une tournée avec un groupe comme Audioslave, ou Soundgarden, ou un groupe plus branché Led Zeppelin, on a fait des tournées géniales, mais en bref j'aimerai savoir ce que c'est une tournée avec un groupe plus dans notre style. Tool à propos, oh mon dieu (rires) un de mes groupes préférés de tous les temps, pour moi c'est le nouveau Led Zeppelin, je ne sais pas pourquoi, mais d'une certaine façon j'ai la même sensation.

 
Vu que cet album est une franche réussite, en tous cas de mon point de vue, est-ce que vous avez des espoirs particuliers ?

C'est une autre question difficile ça Pierre. Hum... Je dois rester honnête et rationnel, j'ai 31 ans, je fais de la musique à un niveau professionnel depuis 7 ans maintenant, néanmoins depuis tout ce temps les temps sont durs pour le Music Buisness, bien plus qu'auparavant. On n'a jamais connu la grande époque de ce buisness, on a juste vu les choses empirer, alors soyons honnêtes, être capable aujourd'hui de sortir cet album en Suisse, en France, en Allemagne, au Bénéluxe, voire dans le reste du monde avec la sortie numérique, faire des interviews avec des gens comme toi, c'est déjà très bien, toujours pour rester rationnel. Maintenant, si je commence à espérer, j'aimerai qu'on fasse un pas en avant, on peut toujours se demander, pourquoi PURE INC. n'est-il pas plus connu ? Non pas que je me soucie d'être connu, ce que j'aimerai vraiment c'est avoir quelque chose de solide pour construire dessus, une certaine constance, rester sur le même label, faire une vraie tournée en tête d'affiche, on l'a fait la dernière fois, deux tournées de 5 dates en Allemagne et en Hollande, et les réactions du public sont très différentes alors, ça génère un bouche à oreilles plus important, c'est bien sûr très différent de nous voir en première partie d'un groupe plus connu ou de nous voir en tête d'affiche, quand on peut jouer tout notre show. C'est ça que je voudrai vraiment, continuer d'avancer, toujours tourné vers l'avant, mais tout en restant rationnel, je suis déjà content avec ce qu'on a (rires).

Tu peux me confirmer la date de sortie de votre album, j'ai lu sur votre site que vos problèmes de label étaient résolus et donc que l'album sera dispo chez nous en même temps qu'en Suisse ?

Oui, tout est réglé, et l'album sortira bien le 29 octobre en Suisse, en France, en Allemagne et au Bénéluxe pour la version physique, et en numérique pour le reste du monde. En fait on a monté notre propre label, avec notre manager, moi-même, et un très bon ami à nous, on pensait que c'était le bon moment pour tenter notre chance. Quand on a cherché un nouveau label, on a reçu quelques offres, mais rien qui nous satisfaisait pour la sortie du CD, donc on a décidé de tout faire par nous-mêmes. Et comme je disais avant, il nous faut rester rationnels : on va se concentrer sur les pays où l'album est disponible, qui sont nos marchés principaux, en particulier la Suisse, l'Allemagne et la France, malheureusement on n'a pas encore pu trop aller au bénéluxe jusqu'à maintenant, mais on va se pencher là-dessus et pour les autres pays comme l'Italie, on va voir ce qui va se passer. On est bien sûr dépendant de la promotion, de la distribution, on a besoin de contrats, on est très curieux de voir comment ça va se passer, mais on est assez confiants, surtout pour la France, on a Flo qui s'occupe de nous ici, qui est venu nous voir et qui était très motivé, il nous a dit qu'il voulait faire partie de l'aventure et s'occuper de notre promotion ici en France, c'est un bon ami depuis quelques années maintenant, donc on est très contents, en plus on a toujours eu une bonne réputation chez vous, donc maintenant, je ne peux que me demander comment on peut faire plus de concerts dans votre beau pays.

Je ne peux que vous souhaiter que ce soit le premier pas vers plus de succès. Quelques mots pour finir, puisque c'est décidément une mauvaise année pour les fans de rock, après Ronnie James Dio, Peter Steele et d'autres, Steve Lee (chanteur de Gotthard) est décédé il y a quelques semaines (renversé par un camion sur l'autoroute). Tu le connaissais ?

On a joué avec Gotthard, donc on les a tous rencontrés, ils étaient tous très sympas, mais c'était il y a 7 ans, donc je ne le connaissais pas vraiment, tout comme les autres membres du groupe. De toutes façons, il n'y avait que peu de chances pour qu'un groupe qui avait autant de succès qu'eux joue avec un petit groupe comme le nôtre (rires), on a des styles différents, des vies différentes, des attitudes différentes, mais pour autant que je m'en souvienne, c'était quelqu'un qui avait les pieds sur terre et un mec très cool. Je partage donc complètement ton sentiment comme quoi c'est une tragédie. Pour les autres, je pense qu'on est à un âge où on voit tous ces grands musiciens, qui tournaient beaucoup et qui ont fait pas mal d'excès, payer pour tout ça d'une certaine façon. Certainement pas Steve Lee qui n'était pas quelqu'un d'excessif, mais tu vois Peter Steele, une personnalité brillante, je ne le connaissais pas, mais d'après ce que j'ai lu, peut-être qu'il ne supportait pas sa vie, sa vie personnelle je veux dire (nde : le géant vert est connu pour être passé par diverses addictions suite à de nombreux décès survenus la même année dans sa famille, ce qui le poussa à écrire cet hymne à la joie de vivre qu'est "everything dies").

Ok, et bien merci beaucoup d'avoir répondu à mes questions, j'espère que tout va bien se passer et qu'on aura l'occasion de vous voir rapidement...

Merci beaucoup Pierre, j'ai beaucoup apprécié cette discussion, et j'espère qu'on aura l'occasion de se rencontrer. J'en parlais avec des gens par mail, qui nous disaient "s'il vous plaît, venez à Paris" (rires). C'est génial, parce que la musique est vraiment un langage, ça change la vie, c'est peut-être ce qui change le plus la vie, à part devenir père (rires), tu verras si ça t'arrive, ça va bouleverser ton existence, mais c'est une expérience incroyable.

La discussion s'est poursuivie un petit moment avec ce guitariste adorable qu'est Sandro. PURE INC vient donc de sortir un putain d'album, qui surprendra peut-être ceux qui, comme moi, les ont découverts avec le précédent,"Parasites and Worms", qui était bien plus agressif, mais pour peu qu'on lui donne sa chance le temps de plusieurs écoutes, ce "IV" très riche a toutes les qualités pour faire parler de lui. C'est tout le mal que l'on souhaite à nos amis suisses qu'on espère voir très vite en concert de ce côté de la frontière.

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