[LIVE-REPORT] OCEANSIZE au Nouveau Casino de Paris (09.11.2010)

OCEANSIZE retrouve le nouveau casino en ce mardi soir humide, et constat réjouissant, la salle est de nouveau pleine. Les anglais viennent défendre leur dernier rejeton, l'exigeant "self preserved while the bodies float up". L'album ne m'a pas entièrement convaincu, je suis donc très curieux d'entendre ce que ces titres aux ambiances plus tranchées vont donner en live.

Ce sont d'illustres inconnus qui ouvrent ce soir, VESSELS entame son set à 20h tapantes. Etant donné qu'ils ont été choisis par la tête d'affiche, on peut s'attendre à quelque chose qui sort des sentiers battus. Pari gagné puisque le quintet nous sert une musique quasi instrumentale et inclassable, entre post-rock et shoegazing énergique. Voir que ce genre de groupes existe a quelque chose de rassurant. Comme chacun sait, on parle beaucoup de crise de l'industrie du disque, de la difficulté qu'ont les groupes à diffuser leur musique. Pourtant, cela peut également s'avérer être une aubaine. Privés du soutien des labels, livrés à eux-mêmes, les groupes et artistes sont également affranchis des contraintes créatives liées à une distribution grand public. On ne va pas se lancer ici dans un grand débat, mais après avoir été gavés de productions formatées (y compris en métal, ne nous voilons pas la face), quel bpnheur de pouvoir découvrir de jeunes formations qui prennent quelques risques !

Abreuvés de sons en tous genres grâce au Web, les musiciens contemporains ont le plus souvent des influences très larges et éclectiques. Pour peu qu'ils laissent ces influences s'exprimer, on retrouve l'idée de création. "C'est quel style ? "Je sais pas, écoute, tu verras bien". C'est le cas ce soir, VESSELS ne faisant aucun complexe. Leur musique est principalement instrumentale, composée de longs riffs répétitifs, de montées en puissance progressives, sorte de kaléidoscope psychédélique directement issu des années 70. Certes, musicalement, il y a un fossé entre GENESIS et ces gars-là (faut dire qu'il s'en est passé des trucs depuis les débuts de Peter Gabriel et consorts). Mais l'esprit originel des années 70 est pleinement présent.

Les anglais font leur musique, sans se soucier du qu'en dira-t on. Excellente pioche, puisqu'on se régale à naviguer le long des ambiances de morceaux non linéaires. Sans compter que les membres du combo n'hésitent pas à passer des claviers aux guitares, puis des guitares aux percus (enfin aux cymbales du kit de batterie), pour un grand délire sensoriel aussi bien visuel qu'auditif. Le public réserve un excellent accueil (mérité) à cette formation prometteuse qui nous a donné envie d'en découvrir plus. Une demi-heure de set, c'était bien trop court, mais suffisant pour que le nom de la formation soit rentrée dans la caboche de l'assistance. Un groupe à suivre.

OCEANSIZE prend le temps de s'installer, quelques misères de matos et une certaine incompréhension donnent lieu à quelques accrochages semi-courtois amusants avec l'ingé-son de la salle. Bon nombre d'ingés-sons sont des faignasses invétérées, mais 5 musiciens anglais de prog' légèrement imbibés ne doivent pas être les clients les plus simples à gérer non plus. Qu'importe, parce que dès l'entame de "Part Cardiac", premier titre du nouvel album et un des titres les plus heavy jamais composés par les mancuniens (Mike Vennart crache ses tripes), le quintet saisit le public à la gorge et ne va plus le lâcher. A l'image de son dernier rejeton, le set sera globalement orienté vers des compos sombres et aggressives.

Là où le rendu était étrange sur album, on peut porter un nouveau regard sur ces nouveaux titres en concert. Ainsi, la quantité d'informations contenue sur un titre comme "Build us a rocket then..." est plus facilement assimilable en situation live, durant laquelle l'attention de toute personne normalement constituée est maximale (à moins d'avoir un texto urgent à envoyer ?). La prestation scénique est excellente, les zicos sont à bloc, mention spéciale aux trois gratteux, dont un Mike Vennart des grands soirs, qui passera tout le concert à danser la gigue entre ses pédales et son jeu de scène.

OCEANSIZE est fier de son nouveau bébé et a bien l'intention de le défendre, pusiqu'au total pas moins de 6 nouveaux titres seront interprétés. La maîtrise instrumentale est impressionnante ("It's my tail and I'll chase it if I want to", quelle claque), et force est de reconnaître que la plus grande attention est salutaire face à des morceaux parfois très exigeants. Impossible d'écouter ça en musique de fond ! Et puis de la musique sombre, n'exagérons rien, les anglais gardent cette capacité à scotcher tout le monde avec ses compos planantes aux ambiances éthérées ("Silent/Transpartent) et dispose d'une ribambelle de classiques (parmi lesquels l'incendiaire "Trail of Fire", mais aussi des moments de grâce comme "New Pin", "Music for a nurse" évidemment) qui s'enchaînent comme autant de perles sur un collier.

Ce n'est sûrement pas la meilleure prestation d'OCEANSIZE, pourtant il est difficile de faire la fine bouche devant ces zicos qui jouent avec leur coeur et délivrent une prestation de haute volée (pas une mince affaire vu la complexité de certains passages). Ovationné par le public, le groupe nous gratifie en rappel d'un titre du premier album qui nous fera juste regretter que le set n'ait duré qu'une heure et demie. On aurait bien pris un peu de rab, mais au vu de l'énergie dépensée, c'est la tête remplie de bonne musique que tout le monde va regagner ses pénates. De bonne musique et d'une certitude : la création musicale va renaître, l'esprit du temps est à faire sauter les barrières entre les genres institués.

Et si l'on se dirigeait vers un nouvel âge d'or de la création dans les musiques amplifiées ? Les genres déjà institutionnalisés resteront, mais de plus en plus de groupes et artistes s'amusent ainsi à emprunter une multitude d'éléments d'horizons divers pour des résultats parfois passionnants. C'était ça la démarche des grands anciens, qui sont aujourd'hui des références. Ils ne cherchaient qu'à faire leur truc. Leurs influences étaient source d'inspiration, pas un modèle à suivre parce-que-c'est-ce-qui-marche-en-ce-moment. On ne retrouvera jamais le son des 70s (ni d'aucune autre décennie d'ailleurs) parce que ces années-là sont derrière nous. L'esprit qui animait les acteurs qui les ont vécues et dont l'oeuvre inspire les musiciens d'aujourd'hui a lui survécu.

L'époque est différente, les sons employés, les conventions musicales également, mais des groupes comme ceux qu'on a vu ce soir ont la même envie, la même passion qui les anime. A mort le formatage de la musique sous toutes ses formes, celui des majors et des autres ! Statufier la musique des aînés, aussi glorieux soient-ils, ne rime à rien, musiciens de tous pays, éclatez-vous !

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