Death – Symbolic (1995)

Pour étudier un groupe, il peut être intéressant de s’attarder sur la popularité de ses différentes sorties, et de tenter de comprendre pourquoi tel ou tel album plaît plus qu’un autre.  Et, lorsque la musique du groupe a évolué tout au long de sa carrière, on remarque que les suffrages peuvent être très concentrés sur un ou plusieurs albums. Ainsi, ce sont clairement les deux premiers d’Emperor, voire la démo Wrath of The Tyrant, qui sont préférés par les fans. Les exemples sont innombrables. A l’inverse, les aficionados ont parfois tendance à être (à peu près) équitablement répartis sur les albums d’une formation. Et c’est là qu’on vire sur le groupe, que dis-je, l’institution qui nous intéresse aujourd’hui : Death, dont le légendaire album Symbolic a 20 printemps aujourd’hui.

« On a tous notre album préféré de Death. » Clairement, ce genre d’affirmation démagogique est totalement vérifiée avec ce groupe.  Certains ne jurent que par l’aspect brut et direct de Scream Bloody Gore, alors que d’autres ne se lassent pas de l’alchimie qui lia temporairement le regretté Chuck Schuldiner et les membres de Cynic sur Human. Pour une partie des fans, le virage technique que Death a amorcé, justement à partir de Human, fut une déception. Trop complexe, pas assez rentre-dedans, les arguments sont nombreux… Mais une part importante des fanatiques émet un autre son de cloche, et a embrassé ce changement de cap. D’ailleurs, à bien des égards, on peut considérer que Symbolic est l’aboutissement ultime, le pinacle artistique de cette nouvelle orientation musicale voulue par Chucky.
 

Death, époque Symbolic


Dès la chanson-titre qui ouvre l’album, le climat est donné : finie « l’imagination hyperactive » d’Individual Thought Patterns. Chuck a diminué la vitesse et l’agressivité, pour accentuer la lourdeur de compositions plus épurées, tout en étant paradoxalement plus fouillées. Ce qui frappe avec Symbolic, c’est le travail sur la dynamique, qui n’a jamais été aussi abouti depuis les débuts du groupe, et le sera un peu moins sur The Sound Of Perseverance, qui lui est plus véloce et surtout, encore plus technique et alambiqué. Ici, tout repose sur un juste équilibre entre lourdeur, vitesse, agressivité et élaboration instrumentale.
 

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selfie argentique de Chuck et Gene sur l'appareil photo d'un fan


De même, le travail sur le son est ici remarquable. Toujours enregistré aux légendaires studios Morrisound, Chuck et Jim Morris ont travaillé d’arrache pied pour donner à cet album un son cristallin et organique. Même si Pro Tools était déjà utilisé à l’époque, son usage n’était pas généralisé comme aujourd’hui. Ainsi, Symbolic a été enregistré à l’ancienne, sur de bonnes vieilles bandes magnétiques, ce qui a sans doute contribué à lui donner cette tessiture chaleureuse, qu’on entend tout au long de l’album…
 

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Si on devait résumer Chuck à ses deux plus grandes qualités, on pourrait d’abord retenir un don pour l’écriture, qui se manifeste à la fois en musique et au niveau des paroles, qui sont elles pleines de désillusions misanthropiques. On pourrait facilement citer tout l’album pour illustrer ces propos, mais des pièces comme "Crystal Mountain", "Empty Words" ou "1,000 Eyes" montrent bien que le produit fini est bien à la hauteur des ambitions que Chuck avait pour cet album.
La deuxième grande qualité de Chuck était sans l’ombre d’un doute de savoir bien s’entourer. Tout au long de sa carrière, il a fait preuve d’un flair infaillible pour dénicher des musiciens talentueux pour l’épauler et l’aider à ciseler sa musique au moment de la figer sur bandes ou de la porter sur scène. Encore une fois, le tableau de chasse de Symbolic fait mal : Gene Hoglan à la batterie, surnommé à juste titre « l’horloge atomique », et qui avait mis tout le monde d’accord sur Individual Thought Patterns, de part ses capacités techniques ahurissantes comme son aptitude à innover, notamment par l’emploi de deux rides. Il réitère ici une performance qui laisse béat, et qui continue de faire rager des batteurs de métal en devenir aujourd’hui.

 


A la basse et à la guitare solo, Chuck a trouvé deux musiciens à l’époque inconnus au bataillon, mais qui se sont révélés être les pièces parfaites pour compléter le puzzle, en plus de s’illustrer plus tard dans d’autres formations de death reconnues (Monstrosity et Nader Sadek notamment). Si Chuck a enregistré l’ensemble des guitares rythmiques de Symbolic, Bobby Koelble s’est affirmé à ses côtés comme un soliste inspiré, qui avait bien compris l’univers musical de Death sur cet album. [Pour la petite anecdote, Bobby a affirmé n'avoir passé qu'une journée en studio pour enregistrer ses solos.] Kelly Conlon n’aura pas participé à la tournée Symbolic, suite à des désaccords avec Chuck, mais son excellente performance fera date, d’autant plus que la basse est encore plus mise en avant sur cet album.
 


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On pourrait continuer à écrire des tartines sur l’impact de cet album, qui s’est révélé être au moins aussi important que ses prédécesseurs. L’organisation cette année d’une tournée de Death DTA, le groupe hommage à Chuck, spécialement axée sur  Symbolic, révèle bien l’importance qu’a toujours cet album auprès du public. On retrouvait d’ailleurs sur scène, aux côté de Max Phelps (guitare/chant) et Steve Di Giorgio (basse), Gene Hoglan et Bobby Koelble. Souvenirs souvenirs… Symbolic a dévoilé de nouveaux horizons pour le death metal : une orientation résolument plus progressive, qui a inspiré de nombreux musiciens et fait pousser de nombreuses nouvelles branches sur l’arbre du métal. Vingt ans plus tard, cet album n’a rien perdu de sa superbe, et fait partie des grands albums du death, même du metal en général.

Chronique par Tfaaon
 

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