Ommatidia – In this Life, or the Next

The Old Dead Tree est un groupe qui a inévitablement marqué le paysage du metal français ces dernières années, et la séparation fin 2009 de ce combo nous laissant derrière lui trois très bons albums aura fait naître un peu de tristesse. Alors la joie est née lorsque deux des membres (dont un ex-membre) de la défunte formation parisienne ont annoncés la naissance de Pretence, comprenant dans les rangs Nicolas Chevrollier, ancien guitariste du quatuor et Vincent Danhier, le bassiste. Un projet qui se monte, un line-up qui se constitue et un changement de nom plus tard, Ommatidia est né et prêt à prendre une place dans ce même espace français, laissée vide depuis le split-up des ex-tenants du trône. Alors fort est à partir qu'avec In this Life, or the Next, signé sur Season of Mist et disponible depuis fin Mars 2011, va faire grand bruit et soulever de multiples questions.

 

Complété de Guillaume Richard derrière le micro, Gilles Vardon pour la seconde guitare et Olivier Rouget en tant que batteur, la première chose qui est à se demander est de savoir si ce quintette nouvellement formé (puisque n'ayant qu'1 an à son actif) pourrait être un potentiel porteur du flambeau laissé dans le dark/gothic metal. Mais là encore, le groupe saurait-il se libérer suffisamment du giron du groupe passé ? Vague question qui hante l'auditeur avant une écoute de ce premier album. Alors première chose à se dire afin de ne pas être affublé de quelconques craintes : c'est à un tout nouveau groupe que nous avons à faire, et il faut considérer Ommatidia de la sorte.

 

Et l'ensemble n'est pas fait pour danser une petite gigue du bonheur ou respirer la joie de vivre à pleines narines. Dès les premières notes, et même dès l'introduction que constitue « Only Found By Those Who Seek », l'album respire la tristesse et la lente dépression, les sentiments les plus noirs du coeur humain explorés ici et là dans des compositions à inspiration Paradise Lost, une influence assez présente du début à la fin, et le refrain d'un morceau comme « Shy Away », très réussi au demeurant, ne trompe pas sur le groupe de table de chevet des cinq musiciens, qui doivent en connaître la discographie sur le bout des doigts, piochant autant dans la période doom des britanniques que les derniers opus, rangés dans le metal gothique plus traditionnel. Pas de frontières entre les genres pour les français, l'influence gothique se retrouvant au même titre que les racines doom, la lenteur des morceaux combinée au chant clair parvient à recréer la synthèse des deux, comme avec « Leaning on Complete Affinity ».

 

Les morceaux en eux même ne respirent pas l'originalité à plein nez, et le monde d'Ommatidia nous plonge irrémédiablement en terrain connu. En gros, rien de neuf sous le soleil, entre My Dying Bride, Paradise Lost ou les vieux Anathema, tout y passe, mais les influences marquées et présentes ne dérangent pas plus que ça, et si vous êtes un fan du style, alors voici de quoi rassurer l'auditoire s'étant lancé à l'écoute d'In this Life, or the Next. Il est également à constater que chaque piste possède quelque chose d'attractif et qu'aucune ne reste en dessous du lot, les multiples morceaux apportant chacun une pierre à l'édifice. Seulement, cette homogénéité peut être quelque peu préjudiciable, par le fait qu'aucun titre ne sort véritablement du lot et n'éclate au grand jour, donnant plus envie qu'un autre d'être réécouté, étudié. Pire, sur la fin, il est à observer quelques regrettables longueurs, et « Unaffected by Loss », s'il reste convenable et plaisant, aurait pu être un brin raccourci car l'impression de tourner en rond s'entend à plusieurs passages.

 

La linéarité, en revanche, est parfois un peu l'oeuvre de Guillaume Richard. Le chanteur manque parfois de quelques modulations qui pourraient apporter un peu plus de diversité à l'ensemble et peut-être retirer le sentiment d'étirement qui se fait présent une fois l'opus, certes très dense, achevé. Mais malgré cela, il faut bien reconnaître que le timbre clair du vocaliste est plaisant et correspond à merveille à ce que les ambiances suggèrent, avec ce côté triste, mélancolique dans la voix, et ses litanies et ses complaintes sont riches d'intenses émotions qui peuvent atteindre droit le coeur. En plus de cela, le chanteur vient garnir sa prestation de quelques growls bien placés mais manquant parfois un tantinet de puissance et ne parvenant pas à créer un effet noir et assombrissant comme on l'espérait. Ils ne sont en rien mauvais, mais restent malgré tout fondus dans la masse, sans véritable apport à la musique et ne venant ni la pénaliser, ni la renforcer. Un peu passe-partout dira-t-on pour les désigner.

 

Au niveau des pistes, elles gardent leur charme et possèdent toutes de l'attractivité : « Shy Away », par son instrumentation de qualité, ses lignes de chant adroitement exécutées et son intro très surprenante, quasiment punk, remporte la palme d'or du titre qui marque dès les premiers instants et qui, en plus, se hisse sur le haut du panier. Mais ce serait de la négligence que de pas citer « Starspeed God » qui décoiffe, rend (presque) de bonne humeur (oui oui !) et insuffle même une accroche positive, idéal lorsqu'un « Unaffected by Loss », sympathique, ne parvient pas à marquer et s'octroie des temps morts, alors que du haut de ses 6 minutes, « Leaning on Complete Affinity » n'ennuie pourtant pas une seconde, intimiste et envoûtante. « Serendipity » n'est pas la piste la plus exceptionnelle, mais elle touche malgré tout et se révèle un bon moment. Même constat avec « Disclosure », titre le plus court de l'offrande et qui ferait le single idéal, alors que « Naked Truth », bien qu'un poil répétitive, est parfaite pour faire donner naissance aux émotions. « Senses Commotion » est un peu à part, un peu rock parfois, avec un chant plus agressif mais qui cette fois pénalise par un manque de justesse, dommage. Cependant, et fort heureusement, la piste est touchante et marque d'excellents points sur ce côté.

 

Du côté de la production, très peu de reproches à adresser à Ommatidia qui se dote d'un son équilibré et très clair, limpide et harmonieux. Les instruments possèdent un espace assez important pour s'exprimer lorsque c'est nécessaire, mais parfois, la voix est un peu trop en avant par rapport au reste des musiciens. Mais les défauts sont minimes, et voilà de quoi rivaliser avec les grandes références du genre gothique/dark, même si le son peut sembler étouffé sur « Senses of Commotion ».

 

Voilà une première livraison de qualité que nous offre ici Ommatidia. Si il est dommage de constater un certain manque d'originalité et de prise de risque, le quintette restant en terrain connu, les français présentent malgré tout avec In this Life, or the Next des qualités qui peuvent leur permettre de prendre le devant dans l'avenir et de s'octroyer à nouveau le flambeau laissé par The Old Dead Tree, les styles des deux formations n'étant pas si éloignés. Voilà donc une sorte de Paradise Lost français, avec une première base très solide, et qui, dans l'avenir, a sérieusement l'occasion de se renforcer et de gagner en valeur. Attention tout de même, petite mise en garde qu'il sera bon d'écouter : pour une prochaine oeuvre, il faudra trouver de quoi faire la différence avec le reste de la scène, une personnalité plus affirmée, sans quoi, la place de suiveur de qualité ne pourra pas être dépassée. Mettre le pied à l'étrier n'est pas chose aisée, mais se reposer sur ses lauriers est préjudiciable. Alors il est bon d'apprécier cette première galette à sa juste valeur, et d'en attendre davantage pour la suite, qui, elle, sera très attendue au vu du fort potentiel des parisiens.

 

 

Note finale : 7,5/10

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