Wormfood – Posthume


En ver(t) et contre tous !

par Ju de Melon

Vous en aviez cauchemardé ? Wormfood l'a fait. Mettre ainsi vos pires souffrances, vos plus profondes mélancolies, votre haine la plus crasse, en musique... Il fallait oser. Wormfood l'a fait... Encore. Car ce groupe français n'en est pas à son coup d'essai, ayant sorti en janvier 2011 son 4ème album studio chez Mala Fortuna (le label personnel du chanteur/compositeur Emmanuel "El Worm" Levy). Et ce après 6 ans de (long) silence.

Posthume, tel est son nom, nous place et nous glace entre sombres lueurs morbides voire même au-delà, explorant des thèmes que nul n'oserait imaginer. Même dans la plus pure des folies. En fait, nous sommes ici en présence d'une pièce unique qui sublime la musique et porte nos réflexions les plus refoulées à travers chaque note et chaque ligne de texte. Les thèmes traités vont du suicide par amour ("Les noces sans retour") à l'anorexie ("Troubles alimentaires") en passant par la haine post-adultère ("Salope"), pour des paroles souvent explicites et dramatiquement directes mais loin, très loin, d'être dénuées d'une certaine poésie noire.

Wormfood 2011

Car la première chose qui frappe à l'écoute de ce nouvel opus est, une nouvelle fois, la qualité de ses paroles parfaitement ciselées à l'extrême et rédigées ici uniquement en français. Cela est certain, Serge Gainsbourg aurait adoré ce groupe, un certain héritage du côté de la légende Ange (qui a fait les beaux jours du rock progressif français dans les 70s) est également à noter et pas seulement sur les mots utilisés ("souvent je pense à la mort quand je baise la gravité des corps..."), un certain psychédélisme ambiant ainsi qu'une voix bien torturée dark jaillissant plus d'une fois ici et là sur les 8 titres composant la galette.

De là à qualifier la musique de Wormfood de "progressive", il n'y a qu'un pas assez complexe à franchir, même si certaines structures déjantées et affinées peuvent s'apparenter à ce style. Nous tournons avant tout ici autour d'un rock/metal dark gothique aux relants de doom obscur et parfois typé "chanson française" (mais la vraie, pas l'actuelle)... Ouais, dark quoi, le mot est lâché et pourrait même être ici décliné sous toutes ses coutures.

Tel un ver rampant dans une mélasse crade mais bizarrement si agréable, nous nous délectons facilement de ce qui devrait nous repousser voire nous faire vomir, Wormfood s'amusant ainsi à faire jouer les contrastes et nous faire apprécier l'improbable ("Tout le mal que je fais, je le fais bien"). Bien sûr, certains passages sont plus subtils que d'autres, mais en y regardant de plus près un morceau aussi direct comme peut l'être "Salope" relève certaines métaphores allant au-delà de "l'acte gratuit" suggéré par son titre... Une métaphore religieuse se pare ici d'un texte plus profond qu'il n'y parait et à la critique peut-être plus acerbe qu'on ne pourrait le croire ? On peut d'autant plus le souligner vu l'écho fait à cette thématique sur le morceau final que constitue "Un seul amour", 9 minutes de mélancolie progressive tombant dans les plus profondes abysses du désespoir...

Wormfood nous propose ainsi un disque aux couches d'interprétations assez diverses qui révèlent leur sens au fil d'écoutes diverses (encore faut-il s'armer de courage pour cela). Il ne reste donc plus qu'à fermer les yeux et se laisser pénétrer (sic) par l'atmosphère globale, cette galette se voulant aussi un hommage indirect mais peut-être bien réfléchi à l'univers d'un certain Peter Steele, grand génie de Type O Negative disparu trop tôt l'an passé. La folie ici présente ne serait pas foncièrement étrangère aux travaux du géant vert.

Le tout reste en attendant diaboliquement compact, n'attendez aucune respiration ni légereté le long de ce Posthume, même si la reprise de Stephan Eicher ("Des hauts des bas") peut nous permettre un instant de familiarité bienvenu... même si plombé à l'extrême, cela va de soi.

Wormfood 2011

La réussite est ainsi pratiquement totale, nous pourrions cependant regretter une certaine uniformité parfois un tantinet lassante et, peut-être, une prise de risque musicale moindre par rapport au précédent opus du groupe, France, largement salué par la critique et bien plus diversifié (totalement différent et plus rentre-dedans aussi, cela va sans dire). Ceci serait chipoter, Posthume restant quoiqu'il arrive une oeuvre à part entière, une production singulière (y compris dans la carrière du groupe) qu'il sera difficile de réproduire à l'avenir.

Note : 8/10

Site officiel de Wormfood
Page Myspace de Wormfood

Récent hommage de Wormfood à Peter Steele

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NOTE DE L'AUTEUR : 8 / 10



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