Chthonic – Takasago Army

Aujourd'hui, c'est vers l'Asie que nous allons nous diriger, et plus particulièrement la petite ile de Taïwan, qui nous évoque plutôt les chaussures de mauvaise qualité, généralement. Sauf que là, on va parler de metal (en même temps …), d'un combo officiant dans un genre extrême, à savoir Chthonic, groupe signé désormais sur le label Spinefarm Records et qui livre cette année une nouvelle offrande, nommée Takasago Army.

Pour ce nouvel opus, la formule n'est pas totalement changée, et on retrouve toujours un excellent black metal symphonique sans concessions, qui balance des rythmiques d'une grande rapidité, notamment un batteur qui semble apprécier sa double pédale. La formation sait toujours faire dans le côté technique de grande classe, sans tomber dans une surenchère inutile ou une démonstration qui ne serait là que pour combler un vide musical, ici bien rempli, inquiétudes dissipées dès les premières notes. Et petit plus qui fait toute la différence, avantage considérable et de poids pour les asiatiques, les racines du groupe sont ici bien présentes et ponctuent l'opus d'une touche d'un magnifique exotisme, séduisant. Les quelques mélodies d'un er-hu, instrument traditionnel, renforcent cet aspect qui devient un atout majeur et qui, pour la suite de la carrière du quintette taiwanais, pourrait bien être utilisé à nouveau. A côté de cela, on retrouve également des parties de chant qui, elles, sont dans la langue d'origine des musiciens (notamment sur « Takao » ou « Kaoru »), le résultat étant très convaincant, on aurait pu espérer une utilisation un peu plus étendue afin de coller encore davantage au concept.

Si les morceaux ne laissent aucun répit, force est de constater que malgré une certaine similarité dans les emplois d'éléments et les structures, cette récurrente régularité ne fait en rien un défaut, bien au contraire. La violence du propos ne fait qu'augmenter le plaisir que l'écoute procure, même si l'on appréciera une interlude plutôt mystique (« Root Regeneration ») pour briser un tempo qui, sur la longueur, aurait pu se faire quelque peu monotone, d'autant qu'en réalité, aucun titre n'est particulièrement excellent par rapport à un autre et que le brûlot semble plutôt former un tout, un véritable ensemble, que l'on écoute du début à la fin avec plaisir, dont on retient les mélodies et les artifices, mais s'il fallait citer une piste véritablement mémorable, une qui serait nettement au-dessus du panier, là, rien ne sortirait. Parfois, une belle petite touche de douceur s'invite à la fête, que ce soit par ce er-hu aux notes enchanteresses et nous faisant voyager dans ces contrées lointaines, une flûte de grande beauté, où par la voix d'une grande beauté de la ravissante bassiste Doris Yeh, dont on aimerait qu'elle intervienne plus régulièrement, comme sur l'incontournable de Chthonic, à savoir Seediq Bale. La présence du clavier est accrue elle aussi, sans être omniprésent les petites touches qu'il distille dans l'air sont sympathiques et aèrent un peu la musique. Pour autant les références du combo se font ressentir, par les divers éléments empruntés à un genre ou à un autre, du death au thrash, en passant par le folk et le metal symphonique. Et un nom peut nous revenir à l'esprit de temps à autre, surtout par les cris du frontman, c'est Cradle of Filth.

Freddy Lim est un vocaliste de grande qualité, qui, pour commencer, à l'excellente idée et la grande gentillesse de varier constamment sa manière de chanter, ses growls passant d'un son caverneux et grave à des aigus frôlant le Dani Filth, dans une version améliorée bien sûr, loin des espèces de cris de gargouille immonde que l'on retrouve chez MaYan par exemple. Le genre à s'être bien entrainé avant de pousser de puissants hurlements, sans faiblir ni faire preuve d'un moment de fatigue, ne reculant devant rien pour déverser hargne et brutalité. En parfaite osmose avec la musique, notre charismatique frontman s'occupe lui-même des instruments traditionnels, ce qui ne lui fait non pas un, mais deux atouts majeurs. Le seul regret, c'est que la belle bassiste n'utilise pas son chant de manière plus constante comme sur les opus précédents, car sa voix permet un contraste intéressant et s'incorpore judicieusement à la musique. De plus, avec un timbre aussi pur et cristallin que le sien, elle pourrait faire moult jalouses.

Il serait ardu et osé d'essayer de dire qu'un titre à part est un joyau qui supplante tous les autres, vu la très bonne facture de chaque morceau. Mais s'il fallait définir un trio de tête, alors la dévastatrice « Legacy of the Seediq », l'intrigante « Kaoru » et la piste finale « Quell the Souls in Sing Ling Temple » formeraient ce podium, par une dimension unique, quelque chose qui font d'elles des réussites, bien qu'on ne considèrera que Chthonic ne réalise ici aucun faux pas ni échec sur le plan qualité des morceaux, cahier des charges oblige. « Takao » est le titre le plus catchy et, paradoxalement, celui qui laissera le moins de traces dans les mémoires, toujours bon mais pas aussi excellent que d'autres. Le mieux est encore d'écouter pour se faire une idée de la réussite d'un opus dont on attendait beaucoup, si le groupe n'était pas inconnu au bataillon pour vous.

C'est donc avec un parfum de réussite que s'achève Takasago Army, une œuvre solide, puissante, massive et efficace qui livre des secrets ancestraux venus d'autres contrées. Il faut donc ouvrir le coffre et, comme Pandore, laisser son contenu s'échapper, pour entrer dans l'univers à la fois violent et raffiné de Chthonic. Pour les non-adeptes du genre, un opus à essayer. Pour ceux qui ne connaissent pas le combo, une galette qui vous permettrait de les découvrir dans d'excellentes conditions. Pour les fans, encore une réussite à ajouter au palmarès des taiwanais, surtout après un Mirror of Retribution en demi-teinte. Alors régalez-vous une sur galette aux épices d'un autre continent et profitez bien du voyage !


 

Myspace de Chthonic

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NOTE DE L'AUTEUR : 8 / 10



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