Jesse Leach, chanteur de Killswitch Engage

"Je ne voulais pas que l’album ressemble à celui que j’étais avant mais à celui que je suis maintenant"

Revenu dans Killswitch Engage en 2013 après l’avoir quitté en 2001, Jesse Leach a connu bien des difficultés, notamment la dépression. Alors qu’il était arrivé à temps pour enregistrer le chant sur Disarm The Descent, le bonhomme a vu la conception du nouvel album, Incarnate, avec un œil bien différent et surtout très exigeant. Bien dans sa tête et ses baskets, c’est un moment de discussion sincère que le chanteur a offert mi-janvier à La Grosse Radio

Salut Jesse et merci pour cette interview…

BROOOOOOOO, soudcheck (rires)! (Il me lâche un gros rôt en pleine tronche)

Merci, je sens qu’on va se marrer. Donc, Il s’agit du premier album sur lequel tu as pu travailler de A à Z avec KE. Quelles sont tes attentes et comment te sens-tu ?

Je me sens incroyablement bien et je suis tellement pressé que nos fans puissent écouter Incarnate. C’est triste de dire ça mais… Oui, je me sens très bien. Nous sommes vraiment fiers de ce disque et l’attente est de plus en plus longue, surtout pour moi.

Tu es triste d’être heureux ? Est-ce parce que tu repenses à ton absence et ses raisons ?

C’est exactement ça. La chose qui me paraissait la plus importante était de retrouver confiance en moi, que je redevienne « quelqu’un », tu vois ? Tomber en dépression, aller mieux puis retomber en dépression et enfin vivre ! Réapprendre qui je suis et comment marche mon cerveau (rires). Ce genre d’expérience t’affecte. Quand tu es musicien et que tu n’es pas bien dans ta peau tu ne veux qu’une chose : reprendre confiance en toi. Car tu ne peux faire de la musique si tu n’es pas confiant.

Ensuite, il fallait que je retravaille ma voix et je réapprenne à l’utiliser pour Killswitch. J’ai repris des cours de chant, j’ai beaucoup travaillé avec mon autre groupe (ndlr : Times of Grace), j’ai vraiment été « porté » par ma voix et ma volonté de l’améliorer. Aujourd’hui, j’ai arrêté de boire comme un trou avant de monter sur scène, je dors mieux, je fais attention à ma santé, je n’ai plus ces putains de palpitations dans le cœur qui m’empêchaient de chanter… Toutes ces décisions, toutes ces choses ont, j’en suis persuadé, fait de moi un meilleur chanteur, un meilleur musicien sur scène. Je pense que cela reflète notre nouvel  album et la façon dont nous allons le jouer sur scène : avec confiance, énergie, nous avons vraiment travaillé dur pour ça. J’en suis extrêmement fier.

Eh bien il est temps de nous parler un peu d’Incarnate. Peux-tu nous parler de sa genèse ?

Les gars ont vraiment apprécié mon retour il y a trois ans et rapidement nous avons commencé à penser à un nouvel album. Tout est parti Justin (Foley) qui a commencé à jouer quelques parties à la batterie. Puis, Joel et Adam ont commencé à poser leurs guitares, il y a eu quelque chose de très excitant, quelque chose de nouveau. Je sentais que l’on pouvait apporter des choses en plus. Alors,  j’ai commencé à travailler et écrire les paroles. J’ai changé ma façon de travailler, je me suis surtout laissé porter par la musique et la rage que je devais délivrer. Ensuite, j’ai écouté des tas de morceaux de tas de groupes que j’aime et j’ai cherché encore et encore ce qu’ils me faisaient ressentir. Et au final ce n’est pas de la rage mais de la mélancolie, de la tristesse, du mal être. Et ça m’a dérangé parce que je ne voulais pas que l’album ressemble à celui que j’étais avant mais à celui que je suis maintenant. Alors je me suis isolé dans un endroit calme pendant deux semaines parce qu’avant de savoir ce qu’était cet album je devais savoir qui j’étais et que je vais devenir. Voilà comment est né Incarnate.

Du coup, tu es resté dans cette solitude pour écrire tes textes ?

Pas forcément, j’ai plusieurs façons d’écrire. Avec le temps, je me rends compte que l’inspiration vient de nulle part et sans raison. Pourtant j’aime être préparé à écrire et voir venir cette inspiration. Pour cet album, j’ai réalisé que je voulais faire les choses bien et travailler sans aucune distraction. Il y a des moments où j’ai eu peur, où cet album m’a fait peur, car je voulais surtout écouter mon « âme » et je ne l’entendais pas. Et puis je me suis souvenu de qui j’étais, de cette confiance que j’avais retrouvé et ce « calme » qui me représentait. C’est ce « calme » qui m’a aidé à écrire les chansons. C’est pour ça que cet album est très, très important pour moi car il m’a fait me poser des questions existentielles.

Tu sais, je ne peux pas écrire des textes sur quelque chose qui ne me touche pas, nous sommes Killswitch ENGAGE (rires) et je dois donc me montrer engagé. Des choses simples comme ces gens qui courent en costard pour aller au bureau, l’administration et tous ses problèmes, ces gens qui ne pensent qu’à l’argent, tout ce bordel que sont les guerres « utiles »… Je trouve ces choses vraiment énervantes et c’est ça que tu retrouves dans les paroles : mon esprit, mes idées, ma compassion. Je me pose des questions dans les textes et je ne suis pas sûr à 100% d’apporter les bonnes réponses mais je veux être sincère. J’essaie d’être quelqu’un d’empathique, j’ai eu mes problèmes d’addiction et j’aimerais parler aux personnes qui ont ces problèmes. Nos fans ont besoin de savoir que j’ai changé et que je suis quelqu’un d’autre maintenant. Quand je fais une rétrospective de ce que j’ai fait par le passé et que je vois ce que j’écrivais avant et ce que j’écris aujourd’hui, j’adore vraiment ce que j’ai fait avec Incarnate. Ouais, j’adore… Putain ça fait beaucoup, beaucoup de choses à te dire (rires) ! Mais je ne suis pas quelqu’un de mesuré, j’aime aller au fond des choses (rires) ! Je veux que les choses soient bien faites, nous avons saigné sur cet album.

C’est un beau discours qui laisse espérer du bon pour l’avenir je pense, mais parlons un peu du passé avant : en 1999 KE sortait Killswitch Engage et en même temps le metalcore commençait vraiment à se popularisé, tout comme le nu metal. Quelle est ta réflexion sur ces mouvements musicaux 17 ans après ?

Je pense que cela a vraiment commencé quand les groupes de hardcore et ceux de metal se sont rapprochés. Là, ce n’est pas une musique mais un état d’esprit qui s’est créé. Et lorsqu’en 1998 nous avons commencé à couvrir ces deux mentalités avec Aftershock et Overcast (ndlr : des cendres de ces deux groupes est né Killswitch). Je me souviens au début de KE avoir travaillé point par point sur ce que je voulais que mon groupe apporte. Pour moi, la base de tout reste Agnostic Front auquel nous avons ajouté des groupes que j’adore : Edge of Sanity, In Flames ou Paradise Lost, car ce sont des groupes qui savent mélanger des mélodies. Faith No More a toujours fait des trucs de malades aussi.

Je pense donc que nous avons trouvé un juste milieu entre la rage et la mélodie et surtout que nous avons réussi conserver notre style. Tu sais, je suis très pointilleux quand il s’agit de ma musique (rires). Mais à la fin c’est cool mec. Quand je vois tous les gens qui nous suivent depuis des années, quand je vois des groupes qui disent que nous les avons influencés...

Tu sembles extrêmement pressé d’aller défendre Incarnat sur scène…

Complétement. Je veux surtout aller faire des festivals. Voyager, découvrir et rencontrer grâce à la musique est quelque chose d’incroyable. Je n’ai pas encore vu les dates mais il me semble que nous serons en Europe en juin pour les festivals d’été et j’espère que nous serons au Hellfest, tout le monde en parle (rires).

Et puis je veux cette interaction qui fait tout, cet échange avec le public qui chante en même temps que toi, cette rage qu’il nous donne. Et il nous donne plus que ce nous lui donnons. Notre carrière c’est le public. Quand je ne vais pas bien, quand je suis dans une mauvaise passe ou quand je ne suis pas d’humeur très sociable, j’oublie tout quand je monte sur scène, quand je vois la fosse qui « prête ».  C’est un amour unique entre le public et nous. Nous avons besoin de ça.

Peut-être pourrions-nous parler d’un autre futur : celui de Killswitch Engage ?

(Rires) Bien sûr, si nous avons la chance de le faire, il y aura un autre album. Quand je vois le plaisir que j’ai pris sur Incarnat, je veux continuer à faire des albums. Et puis les gars n’ont pas envie de lâcher non plus.  Ce matin j’ai dit dans ma première interview, je n’étais pas réveillé que je n’avais aucune idée de textes et de titres pour un prochain album mais j’ai menti, j’ai des idées. Tiens, une exclusivité offerte par Jesse Leach (rires) !

Question qui doit être récurrente je pense, mais le 28 décembre dernier, nous perdions Lemmy Kilmister. Comment as-tu vécu cette nouvelle ?

J’étais très, très triste. Je me suis souvenu que nous avions tous les deux joué au Download en juin. Je regardais leur show depuis une autre scène. Et c’était beau et amusant parce qu’il ne bougeait pratiquement pas et pourtant il y avait cette aura, cet esprit autour de lui. Ce mec est une légende, un « parrain (godfather) » et je suis fier qu’il ait était le symbole du rock et du heavy metal. J’aimais son état d’esprit. Quand tu vois dans le milieu du rock et du metal tous ces gars qui veulent des grandes maisons, des voitures toujours plus grosses toujours plus rapides… Lemmy n’était pas comme ça. Il aimait vivre simplement, boire et jouer du rock’n’roll. Pour moi c’est une légende et il restera un très grand héro. Je n’ai jamais rencontré quelqu’un qui m’a dit du mal de ce gars.

Quelles sont tes attentes musicales pour 2016? Il y a de beaux albums en vus…(il ne me laisse pas finir)

Gojira ! C’est vraiment le numéro un des albums que j’attends. Tu sais, je suis un gros râleur avec mon metal, mais Gojira, je suis vraiment un fan-boy (rires). Il y a quelque chose dans leurs textes et dans leurs compositions qui donnent un vrai sens à leur musique. Je pourrais écouter ce groupe pendant des semaines et des semaines. Vous pouvez être fiers de ces mecs géniaux !

J’aimerais terminer en parlant un peu de toi : tu es un grand amateur de séries. Killswitch Engage vient du nom d’un épisode de X-Files et une nouvelle saison arrive. Qu’en penses-tu ?

C’est génial, mais c’est plus avec Mike (guitariste) qu’il faudrait en parler, pour lui X-Files est une religion et moi, j’ai regardé un peu mais je n’ai jamais suivi et, pour être honnête, je ne me suis jamais intéressé à l’épisode en question (rires). Mais oui, j’adore les séries et plus particulièrement la science-fiction : Doctor Who, Start Trek, Star Wars. Mais pour moi le « next level » c’est Game of Thrones. Nous avons d’ailleurs participé à une compilation en 2015. C’est tellement intense, c’est un film de plusieurs heures. J’aime aussi énormément Viking.

Les derniers mots sont pour toi…

Je voudrais juste remercier nos fans français d’être toujours là pour nous et de nous soutenir, de ne pas nous avoir oublié et qu’ils vont aimer notre nouvel album. Merci beaucoup (en français) !

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