Whispering Tales – Echoes of Perversion

Équation quasi-mathématique et bien connue aujourd'hui, chanteuse + clavier = metal symphonique. De même, chanteuse + un groupe = metal gothique. Oui oui, Arch Enemy, Straight Line Stitch ou Ram-Zet sont des groupes gothiques. Et pas la peine de contredire, vous savez déjà que j'ai raison. Et Whispering Tales aussi, c'est du symphonique ET du gothique (comme Ram-Zet ci-dessus). Tout faux, oubliez cela. Si ces clichés perdurent, certains groupes tentent aujourd'hui de renverser cette tendance en proposant une musique différente. Et avec son premier opus auto-produit Echoes of Perversion, on peut dire qu'en matière de concept inhabituel, nos marseillais savent comment s'y prendre !

De toute évidence, les français ont décidés de ne pas faire les choses simplement et, pour leur premier opus, marquer les esprits en procédant différemment de moult formations déjà présentes sur la scène. Si Nightwish, par exemple, souhaite accompagner son dernier opus Imaginaerum d'un film qui accompagnera la musique ou Within Temptation d'une bande dessinée, Whispering Tales nous offre un concept comparable, avec une nouvelle qui pourra se lire en parallèle avec la musique, ce qui expliquera ainsi le découpage particulier de leur premier effort, qui sera ponctué de moult interludes qui trancheront entre les morceaux, introduisant ces derniers. Ce point expliqué, nous allons pouvoir nous concentrer sur l'aspect musical offert par le sextet. Ainsi, c'est un metal assez diversifié et énergique qui nous est proposé tout au long des 57 minutes qui forment ce Echoes of Perversion. En revanche, un premier point sautera aux oreilles, mais pas de la façon la plus agréable qu'il soit. La production n'est vraiment pas au niveau à laquelle on espérerait l'entendre. Non pas qu'elle soit vraiment brouillonne ou rendant un aspect inaudible et sale, mais il en résulte cependant une frustration. Les morceaux proposés nécessitent vraiment un son plus clair et fluide. Mais tout cela est, pour notre plus grand bonheur, contrebalancé par la qualité de la partition et le professionnalisme qui résulte de l’œuvre des marseillais.

Le découpage en interlude est un concept assez osé, qui en rebutera probablement plus d'un, et en ce sens, Whispering Tales fait le pari de se mettre à dos une partie des fans du genre pour garder un degré d'intégrité et de personnalité au sein du brûlot. Et la traversée telle un roman est bien amorcée, que ce soit par les paroles, les transitions ou encore les interventions des différents personnages qui parleront de temps à autre (« In Mens Sana », « Victor's Run » et autres …). Et en parlant musique, celle délivrée par le combo ne tombe pas dans le cliché symphonique grandiloquent assez banal de nos jours. Au chant féminin, la formation décide d'ajouter des guitares puissantes et souvent au premier plan, tendant vers quelque chose de plus heavy, ou les rythmiques navigueront entre ce style, mais également le power, le symphonique ou le progressif. C'est tout cela qui joue en la faveur des français, car il est difficile de les classer dans un genre précis. Nous sommes au contraire en face d'une fusion particulièrement bien amenée et rondement menée. Tout comme le jeu mené entre le clavier et les dames à cordes aime brouiller les pistes, les modulations de tempo amènent également une distorsion et brisent les poncifs. Non seulement cela, mais il est agréable d'entendre un résultat solide et dynamique, qui nous épargne monotonie et lassitude. Les plans sont rarement répétitifs, les structures travaillées et soignées, et la minutie accordée à l'ensemble n'entrave nullement la spontanéité qui découle à chaque apparition d'une piste.

Whispering Tales

De plus, la diversité des ambiances nous permet clairement d'imaginer l'univers du roman qui accompagne en temps normal l'écoute. Décor oriental sur « The Samâ/The Fall », placement dans l'intrigue au moment de « Collapsed », les exemples sont légions et nous permettent d'effectuer une traversée aux paysages multiples. Il serait idiot de refuser une telle invitation au voyage, n'est-ce pas ? De là surgit un premier défaut, c'est la dépendance des pistes par rapport à l'interlude qui l'accompagne. Il est difficile d'extraire un morceau seul, celui-ci est un peu trop rattaché à son ambiance et à l'album. De cela amène une uniformité, dans le sens où il n'y a pas de titre faible, mais pas réellement de fort non plus, celui qui nous frapperait dès l'écoute. Quelques uns sont très bons, comme « The Fall » où le duo avec Chaos Heidi (Asylum Pyre) aux growls et au chant clair, qui fait son petit effet, ou encore la tubesque et bourrée de charme « Anesidora », mais dur de trouver LE titre qui ferait frémir. Cela dit, ce système a également des avantages, nous offrant une bonne dose d'aération et faisant souffler un peu. Enchaîner tant de morceaux aurait pu devenir indigeste si cela n'avait pas été calculé pour que le repas soit un peu plus light et que l'estomac, une fois repu, ne soit repoussé par le met. Cependant, on aimerait pouvoir être un peu plus en appétit malgré tout.

Pour emmener la barque, il faut un capitaine. On serait bien tenté de dire qu'il s'agit de la guitare, mais ce serait renier le pouvoir du chant. Et à ce jeu-là, Lucie est une frontwoman assez talentueuse et capable, comme les atmosphères, de changer et de se faire caméléon, selon les circonstances et la tournure des événements. Elle colle comme il faut à Echoes of Perversion et se fraye un chemin parmi la myriade d'instruments, n'ayant aucun mal à transparaître malgré la production ne mettant pas forcément chaque élément en valeur. Alternant les tons (de plaintif à mystérieux, d'incantatoire à enjoué) et les registres, avec une maîtrise évidente de chacun, elle s'octroie un rôle de fil d'Ariane qui nous aide à suivre le fil. Épaulée par des invités (Chaos Heidi d'Asylum Pyre sur « The Fall », « Until the Dusk » et « Scent of Darkness » et Seb de Galderia sur « The 6th Part »), les interactions sont incrustées à des compositions inspirées. De quoi réjouir !

Whispering Tales parvient également à brouiller les pistes sur ses influences. Perceptibles de temps à autre (une pincée de Nightwish mélangée à une mixture empruntée à certains grands noms du heavy metal, recette à laquelle on ajoute un peu d'Epica pour le bombastique), elles restent en retrait pour permettre au combo de nous dévoiler son complet talent, sans piocher ou emprunter de trop à d'autres qui sont passés avant. Hélas, parfois, le poussif s'installe pour nous infliger un peu de déception. Cette dernière n'a pas été conviée au bal, alors elle arrive par la petite porte et enfile un masque, c'est « Until the Dusk » dont on déplore les longueurs et le manque de pêche, accentué par un côté poussif. Sauvée par la qualité des voix et des passages agréables, il s'agit du morceau qui n'est pas encore abouti. Tout cela est sauvé par « Anesidora » ou « Alone With My Fear », pour que la danse perdure sans encombrement.

C'est avec un certain plaisir que s'achève l'histoire et l'écoute d'Echoes of Perversion, album complet et mature mais qui manque encore de solidité sur quelques points. Cependant, le professionnalisme des musiciens, leur apparente expérience et la sensible personnalité que renferme ce beau digipack sont des raisons suffisantes pour se pencher sur l'univers si intriguant de Whispering Tales. Les marseillais nous prouvent qu'ils ne sont pas là pour faire de la figuration, il serait bien dommage, ainsi, de ne les laisser se cantonner qu'à ce rôle. Si ce n'est pas déjà fait, voilà une formation à découvrir.

Note finale : 7,5/10

Site officiel où se trouve la nouvelle

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NOTE DE L'AUTEUR : 8 / 10



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