Amberian Dawn – Circus Black

« De toute façon le metal à chanteuse lyrique, c'est de la merde, je préfère les voix heavy ».
Si tu te sens concerné par cette phrase, tu peux t'épargner de perdre quelques minutes par la lecture de cette chronique qui traitera de power metal à chant féminin lyrique.

Amberian Dawn.
Idées en l'air lorsque l'on parle de ces chers finlandais :

« Nouvel espoir du power symphonique »
« Clone de Nightwish sans ambition »
« Chanteuse rousse ça fait Epica »
« Le claviériste s'appelle aussi Tuomas. Coïncidence ? Je ne crois pas. »

Commençons par les affirmations n°2 et n°3 : la première est fausse, Circus Black en est la preuve. La seconde aussi, Heidi est brune maintenant. Pour la n°4, il faut blâmer les parents de Tuomas Seppala alors. Et la première est exacte, elle se vérifie en écoutant le 4ème album Circus Black qui sort sur Spinefarm Records, dont la chronique est ci-dessous :

Question compositions, il va falloir distinguer deux choses sur ce nouvel opus : le fond et la forme, qui sont très travaillés, autant l'un que l'autre et nous montrent que nos finlandais, souvent cantonnés au rang de suiveurs, ont évolués. S'ils ont décidés de dévier un peu de leur voie habituelle et de s'essayer à d'autres registres que ceux auxquels ils se cantonnent usuellement, la formation ne change pas non plus totalement, bonne ou mauvaise nouvelle, c'est selon votre position par rapport à notre sextet. Ainsi, vous comprendrez aisément que le groupe reste encore dans son power metal, aux touches néo-classiques assez marquées (l'introduction de la très belle « Charnel's Ball » ou le son des claviers), mais qu'il ralentit malgré tout le tempo dans sa globalité, pour laisser une plus grande part à quelque chose trop souvent délaissé par Amberian Dawn, c'est à dire l'ambiance. Le ralentissement contribue à mettre en place quelque chose de plutôt sombre, comme le suggère l'artwork. Quelques touches plus lumineuses surgissent par la voix ou les claviers, mais que ce soit l'orchestre (sur lequel nous reviendrons), les guitares ou les sonorités, le combo ne nous avait jamais laissé entrevoir une telle évolution (peut-être, à la limite, sur « War in Heaven », mais nous en sommes loin).

C'est dans ces moments que l'on se rend compte que le travail de fond effectué par notre petite formation est plus que conséquent, que les détails ont été tous peaufinés dans les moindres recoins et que rien n'est laissé au hasard. Alors oui, tout cela peut poser une question : où est l'âme là-dedans, le côté émotion, la spontanéité ? Notre combo n'est pas une bande d'amateurs et prouvent, tout au long de Circus Black, qu'ils ont franchis le pas, d'une seconde division séduisante mais imparfaite à un futur grand du genre (s'ils continuent dans cette voie, mais ce brûlot donne déjà envie de les nommer parmi les maîtres). Et ils sont futés car ils parviennent à créer de véritables petits hymnes à partir de structures qui semblent, en apparence, basiques, mais qui ont pourtant été ciselées au maximum pour nous offrir une alchimie parfaite. « Charnel's Ball » en est un exemple flagrant : si elle semble plutôt simpliste aux premiers abords, il faut tendre l'oreille pour se rendre compte de tout le soin qui est apporté, que cela provienne d'un clavier extrêmement polyvalent retraduisant à merveille l'atmosphère du cirque sur le pré-refrain, les chœurs qui accompagnent une Heidi toujours aussi délicate, et surtout, cette introduction qui commence aux airs d'un ballet. Pas de doute, le soucis du détail est bel et bien là. Et là où certains reprochent désormais à Nightwish l’omniprésence des claviers, et le poids important des orchestrations, Amberian Dawn y va avec modération : discrètes, mais présentes, avec toujours une vraie attention à leur égard. Là où le premier préfère la grandiloquence et en mettre plein la vue, les seconds invitent à faire attention au moindre instant, pour déceler un nouveau secret, une nouvelle sonorité. Astucieux et inventif, voilà deux mots qui décrivent Circus Black, futur pilier du metal symphonique/power metal.

Si Amberian Dawn se distingue par la qualité de ses orchestrations minutieuses, le sextet possède bien d'autres avantages, et les compositions ne sont pas en reste. Comme dit précédemment, différentes voies sont empruntées, des chemins qui ne se ressemblent pas forcément, et la diversité, qui pouvait être un reproche adressé au combo qui ne variait pas toujours assez, est pourtant présente à grand renfort de détails. Si elle ne vous saute pas aux oreilles directement, n'abandonnez pas car notre groupe aime bien jouer avec vous, ce sont des petits malins qui savent où ils veulent aller, et connaissent leurs ambitions, qui grandissent d'opus en opus, pour donner à présent un nouveau grand représentant, dressant fièrement le flambeau qui semble avoir été laissé après l'éviction de Tarja dans Nightwish (même si la concurrence avec Xandria dont on reparlera très bientôt va être serrée (re-paranthèse : cela ne veut pas dire que Nightwish avec Anette c'est mauvais, mais pour ceux qui ne sont pas en mesure d'accepter la suédoise et attendent quelque chose qui s'en rapprocherait un peu, etc …)). Pour les amateurs du genre, pas de panique, du power bien rapide et efficace, vous en voulez, vous serez servis : « Circus Black », « Fight », « Letter » ou « Lily of the Moon » nous rappellent ce qu'est avant tout Amberian Dawn, et qu'il souhaite quand même conserver son identité, sans passer pour un clone des autres finlandais cités plus haut (et ils ne le sont pas une seule seconde sur ce brûlot, cessez de penser aux ressemblances de pochettes , canailles). Cependant, nous avons aussi le droit à un très beau croisement classique/metal symphonique (la superbe « Charnel's Ball »), une instrumentale de qualité mais un peu trop démonstrative (« Rivalry Between Good and Evil »), des titres plutôt typés single, un peu FM sur les bords mais catchy comme pas possible avec présence de guests (« Cold Kiss », « I Share With You this Dream »), la ballade qui vous ferait presque pleurer tant la voix est cristalline et chante de tout son cœur (« Guardian »), vous voyez qu'en comptabilisant, le combo se permet d'user de plusieurs registres et que nous sommes servis. Il y en a un peu pour tous les goûts, il suffit de se servir et l'uniformité, elle est dans la qualité et non ailleurs.

D'ailleurs, comme on parle d'un groupe finlandais, c'est une réunion entre musiciens du même pays, sur ce Circus Black. Quelques guests font acte de présence, et, surtout, ils le font bien. Le plus remarqué sera Timo Kotipelto, dont la voix forme une union parfaite avec celle de la charismatique Heidi Parviainen, qui, elle aussi, est excellente, variant plus que jamais et procurant vraiment une quantité phénoménale d'émotions. Par contre, pas de Peter James Goodman cette fois-ci, sa belle voix peut manquer mais le vide sera comblé par nos invités. Kotipelto de Stratovarius est efficace sur « Cold Kiss », qui n'est pas le single pour rien. La mélodie est entêtante, entraînante, et les deux compères se renvoient la balle pour un dialogue qui nous fait dire que finalement, ça a ses avantages de ne pas être sourd. Jens Johansson, du même groupe que Timo, apposera sa patte identifiable entre milles sur « Crimson Flower », une perle cette piste. Nils Nordling posera sa voix sur « I Share With You this Dream » et même si le frontman est moins remarquable que Kotipelto ou que la demoiselle, il fait son boulot tout à fait correctement, même si Heidi, à la voix toujours aussi belle, lui vole un peu la vedette. Ah cette Heidi, soutenue par une production impeccable qui place chaque élément là où il faut (tous les détails sont parfaitement mesurés, c'est assez rare pour être souligné), elle nous émerveille et son chant est devenu une grande part de l'identité d'Amberian Dawn. Elle sait nous emmener dans un monde dont elle est la gardienne. Entre ses mains, par une ligne de chant, elle nous ouvre la porte, et bienvenue dans Circus Black. Imparable argument des finlandais.

Amberian Dawn

Et voilà une horde de mécontents qui s'annoncent avec leurs gros sabots : où est l'originalité, disent-ils ? Il n'y en a pas vraiment car il ne faut pas oublier que nous sommes dans du classique, un terrain déjà conquis et que le combo a décidé de jouer une autre carte que celle de l'originalité. Ils ont opté pour le talent, plutôt culotté mais au final admirablement réussi. Déjà, c'est terminé de lorgner un tant soit peu sur Nightwish, voilà qu'Amberian Dawn dégage un son très … Amberian Dawn. Le groupe, par la frontwoman, mais également grâce à ses compositions, son sens du détail mais aussi son raffinement, sa finesse, est parvenu à dégager sa propre identité et à se forger une identité. Plus aucun spectre ne volera au-dessus du combo (bon, peut-être un peucelui de Stratovarius). Ils ont déployés leurs ailes et s'envolent vers les sommets, nous démontrant d'une qu'ils ont atteint un stade de maturité que beaucoup devraient prendre en exemple et admirer, et de deux que la popularité s'étant formée autour d'eux n'est pas volée, bien au contraire. Ils ont, cette fois, de quoi faire taire quolibets et ragots à leur encontre, si bien sûr les détracteurs font attention à la finesse du détail, qui est un élément clé désormais chez nos finlandais.

Au niveau des morceaux, là encore, aucun n'est mauvais, mais peut-être un est en dessous des autres : « Rivalry Between Good and Evil ». Elle est très technique, comporte d'excellents moments et ne lasse pas, mais il lui manque le petit quelque chose que les autres pistes possèdent. Quatre, en revanche, sont particulièrement intéressants. Le premier, c'est « Cold Kiss », dont le duo est intelligemment bien pensé, et le refrain reste en tête très, très longtemps. Mentionnons également « Guardian », aux paroles touchantes, ballade à fleur de peau, où un paysage se dessine. Heidi nous raconte une histoire et on l'imagine très bien à nos côtés pendant que l'histoire se déroule devant nos yeux. Jamais le combo n'a aussi bien maîtrisé son art, et cela passe par des lignes de chant merveilleuses, mais également par les petites choses qui accompagnent : chœur féminin à en tomber, section rythmique, solo, tout est là. « Crimson Flower » est superbe. Déjà, le clavier est très remarqué, surtout celui de Jens. Mais l'air du titre, son refrain, rien n'est laissé au hasard et on se prend au jeu. Même chose pour « Charnel's Ball » et sa section instrumentale de qualité, son thème sur lequel on pourrait disserter des heures … Et puis, il y a tellement à mentionner, après tout. L'énergie combative de « Fight », l'excellent solo de « Letter », la puissance de « Lily of the Moon » qui est une super conclusion …

Pas la peine d'aller plus loin car vous l'aurez compris, Circus Black est excellent en tous points. Compositions maîtrisées et nettement supérieures à la moyenne du genre, chant à la hauteur de toutes espérances, et ambiance générale qui invite à réécouter pour découvrir chaque subtilité (et il y en a !). Alors non, ce groupe n'est pas une vulgaire copie de Nightwish, et s'il l'a été, il ne l'est plus. Amberian Dawn est devenu un potentiel leader, et certaines formations vont devoir compter un nouveau venu dans leurs rangs. A écouter !
 

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NOTE DE L'AUTEUR : 9 / 10



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